JOURNAL D APRES ET DE L ARRONDISSEMENT.
>0 3091.
30me année.
TPB.3S, 15 MAI.
Jeudi matin des pasquinadesont été trou-
véesàla porte d'un marchand de grains; la
police fait des recherches très-actives pour
trouver les coupables.
Notre ville jouit d'une tranquillité par
faite.
Vendredi dernier un individu sortant de
la prison d'Ypres, et passant Langemarck,
s'est présenté chez le sieur Vanderhaeghe,
savonnier dans cette commune, pour de
mande une aumône. N'ayant obtenu, il a
brisé deux carreaux de vitres. Il a été arrêté
immédiatement par les soins de la police
LU© ©ira ©UNIT ®KI„
locale, qui l'a reconduit Ypres. Le cou
pable est un garçon de 19 ans, qui marche
avec des béquilles; il se nomme Pierre
Gheldhof, et est domicilié Staden. Il est
supposer que la sombre perspective d'une
misère certaine l'aura poussé cet acte
de désespoir, et lui fait préférer le séjour
de la prison, où au moins on est bien
nourri et bien logé! Déplorable indifférence!
où la misère et la faim peuvent conduire
les hommes!
M. De Neckere, bourgmestre, et M. Gou-
bau, secrétaire communal, Messines, se
portent concurremment candidats au Con
seil provincial, en remplacement de M.
Victoor, décédé. M. Goubau est celui des
deux qui parait avoir le plus de chances
de succès.
Depuis deux jours il y a des troubles
Lille, plusieurs boulangers ont été pillés; il
paraît que ce matin les perturbateurs se
portaient vers la station du chemin de fer,
pour détruire les rails, il nous manquent
des notions cet égard.
Sont convoqués pour le 8 juin prochain,
les collèges électoraux des districts dési
gnés, l'effet d'élire chacun le nombre des
membres du Sénat et de la Chambre des
Représentants, en conformité de lois. Le
district d'Ypres aura élire un Sénateur
et trois Représentants.
On mande de Bruges, le 11 mai
Dans la nuit de dimanche lundi der-
nier, la police a conduit la permanence
74 pauvres qui, se trouvant sans asile, dor
maient sur la voie publique.
Une jeune femme, sur le point de de
venir mère, se mourait de faim dimanche
au coin du quai Vert; la police l'a fait
transporter chez le sieur De Brauwere, voi-
turier, où les secours de personnes cha
ritables et les soins de M. le pharmacien
Geeraerts, la rappelèrent la vie. Cette
malheureuse avait fait deux lieues et demie
pied et n'avait rien mangé depuis vingt-
quatre heures.
Un homme d'une cinquantaine d'an
nées, qu'on croit être de Wardamme, est
mort de faim dimanche Uylkerke. Le
meunier de la commune l'ayant trouvé
couché sur le chemin s'est empressé de re
tourner chez lui pour chercher des ali
ments, son retour, le malheureux avait
déjà cessé de vivre.
On lit dans le Courrier de l'Escaut
Les articles que le Libéral a publiés, pen
dant l'hiver, contre les corporations reli
gieuses, corporations qu'il représentait,
méchamment, comme enrichies de biens
auparavant destinés aux pauvres, viennent
de porter leurs fruits; notre ville, si calme
avant que la presse libérale travaillât y
exciter les passions, a été mardi soir,
le théâtre dedésordresqui, nous l'espérons,
ne se renouvelleront pas.
Oc s'abonne Yprés9 rue de
Lille, u° 10, près la Graud'place, et
chez les Percepteurs des Postes du
Royaume.
PRIX m: LMBtlIVEMElIT,
par trimeatre,
Pour Ypresfr. 4
Pour les autres localités 45©
Prix d'un numéro.
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé l'Éditeur
Ypres. Le Propagateur paraît
le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine.
PRIX DES l\*FRTIO\*.
1 7 centimes par ligue. Les ré
clames, 5 centimes la ligne.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Au marché d'aujourd'hui le froment a baissé de
dix francs par sac. Toutes les denrées ont suivi ce
mouvement descendant. Le peuple respire, la
satisfaction et l'espoir sont peints sur tous les
visages.
Depuis les jours des rogations, une série conte
nue de brillants soleils a échauffé et fécondé la
terre tout a changé rapidement de face dans les
campagnes; partout l'œil repose sur une végétation
des plus vigoureuses.
Le pauvre d'Ypres a été admirable de patience
et de résignation pendant ses longues angoisses et
ses souffrances; s'il a tendu une main suppliante,
nulle part la menace n'a été sur ses lèvres, les
murmures de l'envie n'ont pas roulé dans sa bou
che contre l'indigent déguénillé des campagnes,
qui vient partager les aumônes.
Que le zèle de la charité ne se refroidisse pas
la baisse peut encore n'être que passagère; elle ne
saurait d'ailleurs que remédier faiblement aux maux
que le paupérisme enfante.
ji
Avant de commencer cet épouvantable drame que tout le
monde sait, Lyon, et que les vieillards qui l'ont vu se rap
pellent avec effroi, j'aurais voulu, en causant, donner la sil
houette de cette grande cité lyonnaise; observer cette activité
dévorante, ce bruit de trente mille métiers, ce peuple de
travailleurs, qui va, qui vient, qui se heurte; ces arrivages de
vapeurs dont les roues sèment autour d'elles des gerbes d'eau
diamantées. Mais ne nousaccupons pas des mille communautés
religieuses qui font de Lyon comme une ville espagnole. Ne
visitons pas les dix-sept forts détachés, lourde ceinture de
pierre, d'eau, de bronze et de soldats; ne me demandez rien
de tout cela cette heure. Suivez-moi dans le quartier des
JBrotteaux marchons droite quelque deux cents pas, et ar
rêtons-nous devant ce monument morne, isolé comme un tom
beau c'est ici le dénouement du drame; écoutez
C'était en 1793, cette époque terrible où, au nom de la
régénération sociale et de l'humanité tout entière, la France
s'était couverte d'échafauds sur lesquels on traînait par milliers
les premiers citoyens de la nation, ceux-là même souvent qui
s'étaient associés aux orgies populaires, et qui, la veille, avaient
admiré leur bourreau du lendemain.
Nous n'avons pas juger ici ces temps douloureux où tous
les liens furent brisés, tous les rangs confondus, toutes les pas
sions heurtées, cataclysme effrayant, qui fera pâlir nos enfauts.
Après un horrible blocus de trois mois, le général comte de
Précy, qui avait héroïquement défendu Lyon contre le génie
opiniâtre et méthodique de Dubois-Crancé, venait enfin d'abau-
ÉLECTIOKN.
donner la ville avec deux mille aristocrateset les troupes de
la République, commandés par le général Dopet, ainsi que les
vingt-cinq mille réquisitionnâmes de Couthon, y étaient entrés
aux chants de la Carmagnole et de l'ignoble Ça ira. La moitié
de la ville était en cendre; le sol était horriblement labouré
par les vingt mille boulets qui y avait jetés Dubois-Crancé. On
ne marchait que sur des décombres, et les républicains furent
eux-mêmes obligés d'arrêter l'incendie qui dévorait l'élégante
place Bellecour. C'était un triste spectacle partout un silence
profond les rues étaient désertes, les boutiques fermées, tout
commerce interrompu, toute communication détruite; la ter
reur planait sur les familles. C'était comme une cité morte.
Couthon avait écrit v« victis! et ou savait quelles allaient
être les représailles de la victoire.
Eu effet, dès sou entrée dans la ville, Couthon avait écrit la
Convention
Je viens de créer une commission de Montagnards qui aura
juger militairement tous les contre-révolutionnaires. Il existe
Lyon trois classes bien distinotes
i° Les riches coupables; i° les riches égoïstes 3° les ouvriers
ignorants.
Il faut guillotiner les premiers et détruire leurs maisons,
faire contribuer impitoyablement Les seconds, et dépayser les
derniers.
Eu réponse cette lettre, la Convention rendait le décret
suivant
La ville de Lyon sera détruite.
La nouvelle cité prendra le nom de Commune-Affranchie,
Sur les débris de Lyon sera élevé un monument où on lira
TROUBLES A TOURNAI.
QUI SÈME LE VEXT, RECUEILLE LES TEMPÊTES!
Lyon Jit la guerre la liberté Lyon n'existe plus.
A la suite de ce foudroyant arrêt, la Convention nommait
pour exécuteurs de ses vengeances, et pour répréseutants auprès
de la cité maudite, le féroce Collet-d'Herbois, anoien acteur
sifflé Lyon, Maiibon-Montant et Fouché (de Nantes), trinité
infernale, qui devait outrepasser sa mission exterminatrice.
A son arrivée, Collot-d'Herbois déclara la guillotine en
permanence. Dès lelendemain, huit cents ouvriers le suivirent
dans les rues, et chaque coup de marteau qu'il frappait sur
un éditice, sur une maison qu'avait habité un royaliste, les
murs s'écroulaient l'instant même sous les pioches des démo
lisseurs de la république. Les plus belles rues furent sacrifiées.
Le nouvel Omar, le cul-de-jatte Collot, croyait sentir partout
l'odeur du royaliste, et partout il frappait avec son marteau
de vandale. D'un autre côté on pressurait les fortunes, afin,
disait-on, de nourrir les sans-culottes, et il était prudent de
donner joyeusement tout ce qu'on demandait, car la place des
Terreaux n'était pas loin, et tous les jours des flots de sang se
coagulaient sur ses dalles.
Le tribunal extraordinaire ne désemparait pas; il envoyait
régulièrement Chrétien, le bourreau héréditaire de Lyon, 5o
60 têtes par jour.
La stupeur était partout. On n'osait plus descendre dans la
rue, car au moindre signe, la moindre parole, on vous arrêtait
comme suspect, et, le lendemain, le couperet de Chrétien ré
pondait vos justifications.
L'affreux proconsul de la Convention, nouveau Carrier,
moins la noyade, craignant de n'avoir pas assez fait, et trouvant
d'ailleurs que la guillotine était trop lente, voulut couronuof