de deux millions dans ces dernières années. L'ancienne institutrice, chez laquelle on a saisi divers papiers, a été mise en état d'arrestation. M. le duc de Praslin a de profondes entailles trois doigts de la main gauche. On dit également qu'on a retrouvé dans sa chambre un foulard et une robe tachés de sang et qu'il aurait essayés de brûler. Les cheveux qu'on a trouvés dans la main cris pée de la victime seraient également l'élé ment d'une grave présomption. Suivant le National, M. le duc de Pras lin aurait répondu aux questions qui lui ont été faites par la justice qu'ayant enten du du bruit dans la chambre de sa femme, il est accouru, qu'il l'a trouvée blessée et se débattant contre un assassin; qu'il s'est précipité alors entre la victime et le bour reau; que, perdant la tête, il n'a su ni ap peler au secours, ni retenir le malfaiteur, qui a fui on ne sait par où; qu'il serait alors rentré dans sa chambre pour laver ses mains ensanglantées, etc. Le National ajoute D'autres bruits ont couru aussi, qui donneraient un caractère bien différent au meurtre et la cause du meurtre. Il n'y a peut-être dans tout cela que de vagues suppositions et peut-être des calomnies. Dès que la justice est saisie, il faut attendre qu'elle éclaircisse cet affreux mystère. Une correspondance du 20 août four nit les renseignements suivants sur ce dra me affreux La mèche de cheveux serrée convulsi vement dans la main gauche de la victime, est de la même couleur et de la même lon gueur que ceux du mari. M. de Praslin porte des traces d'égralignures sur la figure et il a deux blessures la main. Des traces de sang ont été constatés sur le plancher depuis la chambre de sa femme jusqu'à la sienne. 11 paraît que de munilieuses précau tions ont été prises jusqu'à présent autour du duc pour ôler la possibilité d'un suicide. Il paraît avoir entièrement perdu l'air hau tain et impérieux qu'on avait toujours re marqué en lui et il est maintenant sombre et abattu. Le dernier acte de l'instruction de l'affaire, par la justice ordinaire, a eu lieu cette nuit, en vidant les fosses d'aisance. L'a r m e a été ret rou vée. C'est u n cou leau de chasse, dit-on, appartenant au duc. Il est probable que la Cour se réunira demain samedi. .M. Cuizot revient Paris où il est at tendu tout moment. On disait aujourd'hui la bourse de Paris que le duc de Praslin s'était brûlé la cervelle. La Chambre des Pairs a du se réunir aujourd'hui (samedi), une heure pour re cevoir de M. le garde-des-sceauX commu nication de l'ordonnance royale qui la con stitue en cour de justice, afin de procéder immédiatement l'instruction et au juge ment de l'affaire de M. le duc de Choiseul- Praslin, accusé d'assassinat commis avec préméditation sur la personnedesa femme. On assurait hier Paris qu'il avait fait des aveux complets. INous lisons dans la Patrie La justice a continué hier ses opérations l'hôtel du duc de Choiseul-Praslin. .M. le procureur-général Delangle, M. le procu reur du roi, deux juges d'instruction et deux greffiers, qui ne se sont retirés avant- hier qu'après six heures, s'y sont rendus 7 heures du matin. M. le préfet de police y est venu plusieurs fois dans la journée. .M. Allard, chef de la police de sûreté, n'a pas quitté un instant la chambre coucher du duc de Praslin, qui est confiée sa garde. M. Allard est assisté d'un commissaire de police et de deux agents qui ont sa con fiance. A l'agitation fabriledonl nous par lions hier a succédé, chez le duc de Praslin, un étal de prostration et d'abattement tel qu'on a dû appeler un médecin, qui lui a prescrit avant-hier et hier des bains. Le duc ne prend rien et refuse tout aliment. Il reste presque toujours couché. Il se re lève peine lorsque les magistrats vien nent pour avoir de lui quelques renseigne ments nécessaires afin de compléter l'in struction sur certains faits. Il répond avec peine aux questions qui lui sont faites. Si on lui apporte, de rares intervalles, quel ques boissonelle est préparée par un mé decin commis par le préfet de police, d'ac cord avec le procureur général. L'ex-instilutrice des enfants de Mme de Praslin, arrêtée aujourd'hui, aurait été mise au secret. On assure que celte jeune personne a plusieurs enfants de ses rap ports avec le mari de la victime. Dans la matinée du 18, la sagacité de la police, une fois ses soupçons fixés, a, en quelque sorte, évoqué la scène tragique qui s'était accomplie entre quatre et cinq heures du matin; et voici, après l'examen des lieux, des traces de sang, des meubles, des tentures, de la direction et de la forme des plaies, comment on suppose que le drame a dû se passer: La chambre coucher de la duchesse était éclairée par une veilleuse mourante. L'assassin entra silencieux, et se dirigea, armé du couteau, vers le lit où la duchesse dormait d'un demi-sommeil. Le premier coup fut ainsi frappé la gorge de la vic time, qui porta subitement la main son cou. L'assassin frappe alors de nouveau, et l'arme coupe le petit doigt de la main droite de Mme de Praslin. 11 continue; Mme de Praslin, étourdie, saute en bas de son lit, et cherche saisir la sonnette; mais sa main ne l'atteint pas du premier coup, et deux empreintes de main sanglante sont marquées sur la tenture, non loin du cor don. Enfin, elle parvient sonner. Le monstre, irrité de voir ses coups impuis sants causer une mort immédiate, frappe alors avec une férocité sauvage; c'est alors qu'une lutte corps corps s'engage entre lui et la malheureuse femme, qui était ro buste, et dont les forces devaient être quin tuplées par le désespoir et par la suprême pensée de son père, de ses enfants, de la vie qu'elle ne voulait pas quitter. Elle a jeté par terre des meubles pour faire du bruit; elle a opposé aux coups du scélérat qui frappait en forcené, tort et travers, différents objets qui portent des traces de l'arme: et enfinépuisée par tant d'efforts, elle a glissé; elle est tombée dans son sang sous les derniers coups de l'assassin, dont l'arme s'était brisée dans cette lutte, et qui avait achevé sa victime coups de crosse de pistolet. C'est dans ce moment-là qu'on a dû frapper la porte, et que Mrae de Praslin a dû pousser ce gémissement qui précédait le râle de la mort. Quand les domestiques sont entrés, la duchesse ne pouvait plus ni crier, ni parler, ni faire des signes; mais elle avait encore les yeux ouverts, fixés, hagards. On l'a portée sur son lit; mais la vie s'en allait rapidement et le sentiment de ce qui se passait autour d'elle paraissait l'avoir enfin abandonnée. M"' de Luzzi, dont nous avons annoncé hier l'arrestation, a élé de nouveau inter rogée aujourd'hui. Elle nie avoir jamais eu aucune relation intime avec le duc de Praslin, et proteste avec énergie de son profond attachement la noble famille qui l'a comblée de bienfaits. Elle convient avoir élé péniblement impressionnée en se voyant forcée de quitter l'hôtel et de se séparer des jeunes demoiselles de Praslin, dont elle avait surveillé l'éducation, et ex plique, par le douloureux sentiment qu'elle avait éprouvé en cette circonstance, les termes d'une lettre par elle écrite a M. le duc de Praslin, et que la justice a saisie dans les papiers de celui-ci. On dit qu'un mandat d'amener a été dé cerné contre une autre concubine du duc, demeurant rue de Varennes, mais qu'on ne l'a pas trouvée son domicile. Les charges deviennent de plus en plus accablantes contre le duc. On assure que le domestique qui pénétra le premier dans la chambre de la duchesse, et qui vit cette malheureuse femme râlant par terre, ayant couru vers la chambre du duc, il le trouva occupé se laver les mains, encore rou ges du sang qu'il venait de verser. Le duc s'efforçait aussi de faire disparaître les ta ches de sang qui couvraient sa robe de chambre. C'est ce domestique qui a dé noncé le meurtrier. A côté de M. de Praslin, il y avait un pistolet chargé balle;on ignore dans quel but M. de Praslin l'avait chargé, et s'il vou lait s'en servir contre sa femme. Dans cette dernière hypothèse, il n'avait pas osé le décharger, sans doute de peur du bruit. Il en avait frappé sa femme avec la crosse pour l'achever, ce qui a été constaté. In terrogé, il a répondu qu'il avait voulu dé fendre sa femme contre un assassin; mais on lui a objecté qu'il ne restait aucune trace de la fuite de cet assassin mystérieux, et il a gardé le silence en se cachant la tète dans ses mains. L'infortunée duchesse avait pris ombrage des rapports de son mari avec AI"9 de Luzzy, etsans une haute intervention, Alm9de Pras lin aurait poursuivi sa séparation de corps. On dit que des membres de la famille royale seraient intervenus pour réconcilier les deux époux. Le Roi, la Reine, et sur tout Mm9 Adélaïde, avaient une affection particulière pour Mme de Praslin. Le duc, qui avait été l'ami intime du ducd'Orléans, avait des ropports d'intimité avec le duc de Nemours, qui l'invitait toutes ses par ties de chasse. On lit dans la Gazette des Tribunaux: Nous avons dit hier que l'état de santés du duc de Choiseul-Praslin avait inspiré quelques inquiétudes. L'ébranlement ap porté la santé du tluc a été, ce qh'ou assure, causé par une tentative d'empoi sonnement. Le duc de Praslin avait, eu effet, avalé une certaine quantité de lau- danum. On ne dit pas quel moment et b L'ordonnance de la convocation de la Chambre des Pairs en cour de justice a été apporté d'Eu cette après-midi, par M. le garde-des-sceaux Hébert qui est arrivé. 3 b M. de Praslin, interrogé d'abord sur ses relations de coupable intimité avec M"9 de Luzy, ne les a pas désavouées, ainsi que sa visite en arrivant de Praslin, dans la journée du 17. Oh assure que M"9 de Luzy a eu une violente attaque de nerfs qui a nécessité une saignée et les soins des hommes de l'art.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1847 | | pagina 3