JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
]\T0 3278.
Mercredi, 28 Février 1849.
32me année.
IÎP.23, 28 Février.
LES CHANTEURS MONTAGNARDS
H.
Le concert offert Dimanche 25 février,
par les 40 chanteurs montagnards français
a dépassé toutes les prévisions faites. Vrai
ment, il faut avoir assisté cette mémorable
soirée artistique pour se former une idée
exacte de l'expression, du sentiment, et de
la parfaite exécution nyisicale qui distin
guent l'habile troupe des pélérins de Ba-
gnères, dont après tout il est impossible
de faire un éloge convenable, égal au mé
rite.
Vêtus du costume d'anciens ménestrels
et précédés de ce drapeau majestueux que
les Pyramides d'Egypte et les murs de Jé
rusalem et de Nazareth ont vu flotter, les
intéressants enfants des Hautes-Pyrenées
en entonnant la marche triomphale de leur
sainte bannière ont défll£l plusieurs fois
devant un auditoire choî<n*qui ne se lassait
point d'admirer les latents les plus remar
quables voilés sous un habit imposant par
sa rigoureuse simplicité. Inutile d'ajouter
qu'à la fin de chaque chœur, de nombreux
vivat sont venus couvrir M. Roland et sa
jeune troupe.
Un incident qui dénote une grandeur
dame et un patriotisme au dessus de toute
louange est venu rehausser l'éclat de cette
belle fête. Au moment où les montagnards
venaient d'accomplir la première partie du
progi iurne, AI. l'Avocat SmaeJ^n, avec cet
imperturbable calme de caractère dont on
lui connaît éminemment le secret, a pris
place sur le théâtre et y a lu une pièce
de poésie qu'il a dédiée aux pieux chan
tres modernes, groupés autour de sa per
sonne. Ce morceau, dans lequel le juris
consulte yprois, convie chaleureusement
tous les peuples de la terre concourir
la délivrance du chef Suprême de l'Église,
a été acceuilli par de sympathiques applau
dissements. Nul doute que M. Roland ne
s'empresse mettre en musique d'aussi
nobles et magnanimes paroles; et que les
montagnards chéris de Bagnères-de-Bigor-
re ne communiquent bientôt aux vents et
aux échos des vallées les plus lointaines,
les beaux et généreux cris que la vue des
malheurs de l'Église, a fait pousser un
fils dévoué de la Belgique libre et catholi
que!
(Communiqué.)
Un journal de cette ville annonce, que
M. Pouparl docteur, se propose d'aller
s'établir dans une autre ville.
Par ce départ la place de médecin des
pompiers qu'il occupe viendra vacante, et
quoique jusqu'à ce jour leur service n'ait
jamais exigé de médecin, il est croire
que comme cela a déjà eu lieu, il y aura
beaucoup de postulants pour la susdite
place; surtout qu'il est généralement re
connu que c'est la filière par laquelle on
doit passer, pour être certain de pouvoir
plaireaux faiseurs ou omnipotents du jour,
qui dès lors se montrent très complaisants
vous octroyer toutes les faveursdésirables
et possibles, méritées ou non, au détriment
de droits acquis Avis aux intéressés.
L'on nous apprend comme une chose
certaine, que dans le dernier convoi d'in
surgés parti pour Belle-Ile il y a quelques
jours, se trouvait un de nos concitoyens
du nom de Deslave, fils du menuisier de
ce nom
Il paraît que leur sortie des forts s'est
opérée 3 heures de la nuit, et qu'un triple
rang de soldats accompagnait les déportés.
Deux de ces rangs étaient formés de fan
tassins portant des chandelles allumées au
bout du canon de leurs fusils, pour éclairer
les rues qu'ils devaient parcourir le 3m*
rang était composé de cavalerie ayant le
sabre au clair; ce qui rendait ainsi toute
fuite, ou tentative d'attaque impossible.
D'après le récit fait par un des témoins
oculaires de cette marche triste et lugubre,
une foule immense s'était portée sur les
lieux, parents et amis de ces malheureux
déportés, touss'étaientdonnés rendez vous:
nous devons renoncer décrire les scènes
déchirantesqui ont eu lieu dansces derniers
moments, momenlsqui se trou vaientcom p-
tés et sans appel, cause de la discipline
militaire qui ne peut transiger avec des
larmes; il nous suffira de dire qu'ici se
trouvait un père, ou une mère, un frère,
ou une sœur, désolés et éperdus enlaçant
dans leursbras.etcouvrant deléurs larmes
des membres de leur famille, auxquels il
leur restait faire un dernier adieuadieu
éternel peut-être! là se trouvait un fils
cherchant son père, un ami son ami, qu'ils
ne parvenaient découvrir qu'après un
temps plus ou moins long. Combien de
telles scènes de deuil et de misère, ne sont
ils pas capables de pouvoir ébranler les
sentiments, et les cœurs les plus durs
Les Yprois amis, et compagnons de ce
malheureux compatriote n'ont pas fait dé
faut dans ces derniers moments. Placés
sur l'itinéraire que la colonne avait par
courir par des cris plusieurs fois répétés,
ils sont parvenus se faire reconnaître de
celui qu'ils cherchaient, et qui devait dé
sormais cessèr d'être leur ami de travail et
leur compagnon de plaisir; les derniers
adieux donnés, le produit d'une collecte
faite en sa faveur lui fut remise, et ils s'en
trouvaient séparés.
Triste destinée! l'on doit en convenir.
Car ce sont bien là les conséquences d'un
moment d'imprudence et de folie, excitées
peut-être par des intrigants avides de pou
voir, qui au moment du danger se sont
éclipsés de la scène, en y abandonnant le
malheureux peuple victime de sa bonne
foi, et de sa crédulité; peuple qui s'expose
être meurtri par la mitraille ou banni
pour toujours du sol qui l'a vu naître.
Dans son dernier numéro, le Progrès
avance que c'est un fait admis que les
inspecteurs ecclésiastiques, outre qu'ils
n'inspectent rien, quand ils se mêlent d'une
école ne le font que dans l'intention de la
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Placeet chez les Percepteurs des Postes du Royaume,
PRIX DE L'AMIXEMEXT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités f« 3 5o. Un n° i5.
||ftCe Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine (Insertions 19 centimes la ligne.)
DES PYRÉNÉES.
Le concert des 4o Montagnards de Bagnères
avait attiré Dimanche une société aussi nombreuse
que choisie. D'unanimes applaudissements ont
accueilli les divers morceau*. La pureté, la vigueur
moelleuse des voix de ces artistes, l'harmonie et la
précision de l'ensemble, excitaient une égale ad
miration. La Pyrénéenne Halte là, les Mon
tagnards sont là la Toulousaine ou le chant
du soir, VHymne Pie IX ou VAlliance des
Peuples, le Chant Cqfalan avec accompagne
ment de castagnettes, ont tour a tour ravi les
assistants. Après l'Hymne Pie IX, quelques vers
de circonstance, fesant allusion aux événements
déplorables dont les États Pontificaux sont le
théâtre, ont été récités par M. Honoré Sinaelen,
avocat. Voici cette pièce:
D'affreux forfaits épouvantent la terre
Au Capitole ils détrônent la Croix
Pie IX a fui l'audace meurtrière
D'ingrats proscrits rappelés par sa voix.
Contre leur rage implorons pour un Père
La justice de Dieu, des Peuples et des Rois.
Seigneur du Ciel aux yeux de ton Église
D'uu seul souffle tu peux sécher les pleurs....
Des assassins que le stylet se brise
De l'Italien dissipe les fureurs.
11 croit la Liberté dans Rome assise,
Zl c'est l'impiété qui ravage les cœurs.
Pour replaoer sur son front la tiare,
Au doux Pie IX pour rendre srs élats,
Et de la Foi pour rétablir le phare,
S'il est besoin d'affronter les combats
Qu'à vos accents, Montagnards de Navarre!
Soudain le monde entier se couvre de soldats. 5
Devant la France étendez vos bannières:
La Belgique n'atteud que son signal;
Au mâle accord de vos chansons guerrières,
Tous les chrétiens dirout le mot fatal
Vaincre ou mourir sur le rocher de Pierre
four affermir du Christ le règne triomphal. B|S*
Lundi, la foule était encore beancotip plus com
pacte h la messe solennelle, qui par une attention
délicate, a été chantée h l'église paroisiale placée
sous le patronage de Sl-Pierre. Les Montagnards
se sont aussi fait entendre au magnifique pensionnat
des Dames de Rousbrugghe. Ensuite ils ont quitté
la ville pour revenir Vendredi. Ce jour là, les
jeunes Pyrénéens feront leurs adieux la ville
d'Ypres en rehaussant de l'éclat de leur talent une
autre messe, chantée au temple élégant de S'-Ni-
colas, patron des jeunes gens. La cérémonie est
ffrée jo heures. Ils partiront ainsi, laissant ici
comme partout, de nombreuses sympathies, on
souveuir aussi agréable qu'édifiant.