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JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 3316.
32me année.
Bien des fois nous avons exprimé nos
craintes sur les tendances funestes d'un
parti qui, après avoir guerroyé longtemps
avec insuccès, contre le bon sens et la
sagesse publique, a fini par s'installer au
sommet du pouvoir alors que mille pas
sions haineuses en avaient forcé les issues.
Les projets exclusifs que dévoilaient cer
tains coryphées du soi-disant libéralisme;
le langage pervers tenu par la presse
clubiste; le système révoltant préconisé
par un organe de la politique actuelle, de
changer la constitution légalement ou de
l'abattre rêvolutionnairementengendrè
rent dans notre esprit les appréhensions
les plus douloureuses. Hélas! les faits
récents ne justifient que trop nos défiances
et nos vives alarmes.
Après avoir médité l'anéantissement
de notre constitution, admirable trophée
de nos victoires de 1830, ennobli par le
généreux sang de tant de braves, les con
spirateurs du pseudo-libéralisme y ont
porté enfin une main sacrilège.
Evidemment, la loi sur l'enseignement
supérieur telle qu'elle vient d'être adoptée
par la chambre législative, est une atteinte
portée la constitution Belge, puisqu'elle
entrave la plus utile et la plus précieuse
des conquêtes que ce pacte consacre, la
liberté de l'instruction.
En obtenant de la législature le pouvoir
d'organiser le jury à-sa guise, le ministère
se trouve même d'exercer une action
puissante sur les jurés qu'il désignera.
Celte influence, ou le simple soupçon mê
me de la dépendance du jury l'égard
du gouvernement, est déjà un arrêt de
proscription prononcé contre la liberté,
puisqu'elle aura pour conséquence inévi
table de favoriser les universités de l'Etat,
au dépens des établissements libres. En
effet, quelle confiance les étudiants de ces
dernières universités auront-ils dans des
juges, trop souvent peut-être dociles instru
ments du pouvoir, inertes et impuissants
devant la partialité d'un président de jury
la dévotion du ministère? L'idée de leur
voir préférer les élèves des universités de
l'Etat, n'assiègera-t-elle pas continuelle
ment leur âme, et les parents pour sous
traire leurs enfants ces inconvénients si
nuisibles aux éludes ne finiront-ils pas par
les placer là où leurs succès académiques
seront d'autant plus assurés, que le réci
piendaire qui fréquente une université de
l'Etat, croira trouver dans les jurés non
des juges mais des protecteurs complai
sants? Après cela, n'est-il pas vrai de dire
que la composition du jury octroyée au
gouvernement, sans garantie légale pour
l'enseignement libre est un coup de mort
porté la liberté de l'instruction que la
constitution consacre.
Le monopole des bourses que le gouver
nement vient de s'adjuger par l'aveugle
ment ou la doçilité outrée de l'Assemblée
législative, est une mesure vexatoire qui
saute également aux yeux de tous. Comme
il l'a fait en matière de bienfaisance le
ministère est resté fidèle son système
d'accaparalion c'est en effet, avec les de
niers des contribuables qui entretiennent
les institutions libres, qu'il entend faire
décliner ces mêmes établissements en con
traignant les sujets distingués, mais privés
de fortune, suivre les ccurs qu'il veut
leur imposer.
A part les principes subversifs pour la
liberté professés par le ministère, il est
une autre considération qui nous afflige et
nous indigne, c'est la facilité avec laquelle
les Représentants Belges, et en particulier
les deux députés soi-disant libéraux de
l'arrondissement d'Ypres, MM. A. Vanden-
peereboom et Boedt, ont épousé les vues
mesquines du gouvernement. Eh! quoi,
les mandataires d'une population éminem
ment libre, devaient-ils par un vote irré-
flêrhret Sét-vile; resfrëindnffes succès d'une
université pour l'existence de laquelle
leurs commettants font tant de sacrifices?
Représentants, avez-vous compris la por
tée de vos suffrages? le public l'a saisie;
il saura vous en tenir compte aux comices
futures car sachez le bien, ce n'est pas
pour servir le ministère et toucher vos deux
cents florins par mois, qu'il vous envoya
siéger au parlement; mais pour défendre
ses droits, ses intérêts et surtout ses liber
tés les plus chères
Un jeune militaire s'est noyé avant-
hier dans le canal de Boesinghe, malgré
VERITE ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIT DE I/ABDTKEMEWT, par trimestre,
Ypres fr 3.. Les autres localités fr 3 5o. Un n° aî.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine (insertions 19 centimes la ligne.)
7? 3.2 S, 11 Juillet.
II suffira de jeter les regards sur cette
œuvre liberlicide pour se convaincre de
la rigoureuse justice de nos paroles.
Dans un numéro de la feuille cartonnée, feuille
que je ne lis jamais, et qui, par hasard, est tombée
entre mes mains, je vois les mots avorton de
la nature capricieuse et je me demande h qui
ces mots peuvent s'adresser. Serait-ce peut-être
cet enseigneur de Rhétorique, naguère jugé inepte
h conduire les élèves de sixième Huy, et recueilli
par nos faiseurs pour propager leurs principes
délétères au milieu de la génération nouvelle
qu'un déplorable aveuglement confie encore un
établissement destitué de tout enseignement reli
gieuxet pour exciter les enfants contre leurs
pères et les pères contre leurs enfants dans ie cas
où ils ue partageraient pas la même opinion au
sujet d'un candidat qu'un parti taré ose mettre sur
les rangs pour la représentation nationale? Ou
l'infàiue journal aurait-il voulu faire allusion a
ce gros monstre qui, trop jeune encore pour distil
ler son venin sur la société, fit bon marché des
égards, de l'affectiou et du respect que les enfants
ont ordinairement et d'instinct pour les auteurs de
leurs jours? Ou bien celte.feuille immonde aurait-
elle cherché h faire connaître le fonctionnaire
barbu et ses dignes acolytes, qui, l'avant-veille
du 19 Juin dernier, aaus un chef-lieu du caritoD,
se faisaient, en pleine orgie, conspuer par les élec
teurs devenus honteux d'avoir été jusque-là, les
dupes de ces charlatans dont ils n'avaient pas
encore pu apprécier les allures, les tendances et le
but? Quelque bas que soit tombé le Chiffon
Cartonné qui s'intitule Progrèset cela en dépit
des inspirations plus ou moins anodines du Mira
beau de VYperlée, il est permis de supposer que
ses stipendiâmes ne sont pas cependant assez
abrutis pour ne pas comprendre combien devait
retomber d'aplomb sur eux-mêmes celte qualifi
cation d'avorton de la nature, qualification in
ventée par la vanité et la sottise. Oui, trop
famé triumvirat, soyez tranquille, nous vous avons
compris dans votre délire vous avez voulu frapper
d'estoc et de taille, et vos perfides coups ne pou
vant atteindre une belle et généreuse intelligence,
qui sacrifie santé et intérêts pour éclairer ses con
citoyens sur vos infâmes menées, ont brisé le*peu
de crédit que vous teniez encore de l'ignorance et
de l'avilissement. Méditez, malheureux, et si de
votre âme corrompue il peut encore s'élever une
pensée raisonnable, vous comprendrez que si nous
voulions manier la plume avec cette impudeur
devant laquelle vous ne reculez jamais, c'est d^ns
vos rangs et chez les vôtres qu'on découvrirait eu
grand nombre les avortons de la nature capri
cieuse, tandis qu'autour de nous se groupent les
hommes courageux et conséquents, les hommes
heureusement doués qui, il est vrai, se distinguent
plus par l'honneur et par la dignité avec lesquels
ils défendent les droits de leurs concitoyens que
par ces ventres proéminents qui dénotent si bien
la matérialité, la voracité et l'égoïsine de ceux qui
les portent. Communiqué
Une exposition agricole est annoncée Ypres
pour le 22 septembre prochain.
Le tribunal d'Ypres vient de décider une ques
tion importante, relative la famille Kilsdonck.
Passé quelque temps dans un acte de partage passe
entre les époux Kilsdonck et desenfauts mineurs,
il fut reconnu que le mari avait fait des réparations
une maison commune, et en récompense, l'im
meuble lui fut assigné. Plus tard il fut soutenu
que cette dation en paiement constituait une alié
nation d'immeubles, impossible sans formalités
spéciales dans une affaire où des mineurs étaient
intéressés. En conséquence la cour de Gaud où
l'affaire fut portée, condamna la femme et les mi
neurs a payer en numéraire les impenses du mari
faites a l'immeuble indivis entre la femme et ces
mineurs. La cause étant revenue Ypres, la femme
a soutenu que la cour de Gand n'avait décidé
qu'en principe, sans que le chiffre des indemnités
dues au mari fut irrévocablement fixé. En fait elle
alléguait qu'il ne pouvait être du que'la plus va
lue, non la dépense réelle, et qu'en tout cas le
chiffre énoncé dépassait de plus du double la dé
pense réelle. Eu droit il est a remarquer que
ce que les époux se reconnaissent devoir ficti
vement,équivaut a une donation déguisée, toujours
sujette a révocation. Voir Jurisprudence du XIX*
siècle, année 18^7, partie belge, 2° volume,
p. 487. Néanmoins le tribunal a déclaré par ju
gement d'aujourd'hui, que l'arrêt de Gand fixe
irrévocablement le chiffre aussi bien que le prin
cipe; que par suite il y a chose jugée tous égards.