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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 3323.
33me année.
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VÉRITÉ ET* JUSTICE.
On s'abonne A Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande
Placé, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABOWEMEVT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. TJn n° aï.
le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine, (insertions 19 centimes la ligne.)
7PB.BS, 4 Août.
Hier, 3 Août, les électeurs de l'arrondis
sement de Thiell étaient convoqués l'effet
d'élire un membre du Sénat en remplace
ment de M. Isenbrandt démissionnaire. La
cause de l'ordre et de la modération a rera-
porté dans celle journée une victoire com
plète et significative, dans la personne de
M. le baron Jules D'Anelhan ancien minis
tre de justice, qui a été proclamé sénateur
par 452 suffrages contre 307 donnés M.
Pecsleen-Devrière.
L'imposante majorité dè 145 voix, que
le corps électoral de Thiel t vient d'accorder
M. D'Anelhan est d'une telle importance
que tout cœur libre et indépendant ne tar
dera pas y applaudir. A Thiell comme
Ypres, toutes les passions libérales ont été
déchainés; la presse voltairienne a traîné
le clergé dans la fange; le commissaire de
ce district pendant de celui du nôtre, le
gouverneur de la province, le ministère
même ont pris part l'action électorale.
En dépit ae toutes ces machinations le
candidat du soi-disant libéralisme est resté
dans l'urne.
La portée de cette lutte est façile sai
sir; les Belges se lassent de se voir violen
ter de la manière la plus indigne dans le
choix de leurs mandataires. Attachés avant
tout la chose publique ils veulent qu'à
eux revient la tâche de choisir des candi
dats, qui leur conviennent et n'entendent
guère que le pouvoir les leur impose; le
flamand surtout s'irrite et se courrouce de
voir traîner sur la claie le clergé qu'il
considère juste titre comme son meilleur
soutiqn et son appui.
De là cet imperturbable sang-froid de
vant les menaces ministérielles; de là cette
masse compacte de votes qui ont porté sur
une chaise curule, le chaleureux défen
seur des droits du pauvre, le fidèle ami du
malheureux. Que M. Kogier se pénètre
bien du sens de celte lutte qu'à l'avenir il
s'abstienne par la voix de l'Indépendance
d'intervenir dans nos élections et de nous
imposer ses misérables séides. Car, qu'il
le sache, s'il oublie la leçon, elle sera ré
pétée.
Jamais on n'a moins pesé les hommes
et les choses qu'à l'époque où le soi-disant
libéralisme, dévoré par la soif d'honneur
et de pouvoir amusa la crédulité publique
de son aptitude merveilleuse et de sa phi
lanthropie sans bornes. C'était la veille du
12 août 1847, les Flandres, jadis les deux
provinces les plus prospères de la Belgique
étaient en proieauxraouvementsconvulsifs
de la misère; le commerce et l'industrie,
ces branches vitales de la' richesse des
Etats, frappées d'une stérilité mortelle,
avaient besoin d'une main protectrice et
secourable. Une œuvre gigantesque et gé
néreuse, une tâche des plus héroïques et
des plus sublimes s'offrait donc aux hom
mes que l'avenir appellerait aux affaires
gouvernementales.
Le pseudo-libéralisme au son des grosses
caisses et des flageolets avait célébré cette
vaste entreprise. L'opinion sans consulter
sa conviction et sa conscience, se laissa
faire, et séduite par mille rêves éblouissants
et fantastiques, elle transforma la majorité
conservatrice des chambres en majorité
libéràlre et clubiste.
On sait dès lors ce qui résultat de ce
vote des fonctionnaires dont, toute la vie
révélait le plus sincère patriotisme, et le
dévouement le plus inaltérable la chose
publique furent immolés aux rancunes et
aux passions triomphantes. Le libéralisme
humanitaire était l'œuvpe! et les maisons
de correction et de force'régorgeaient de
malheureux que l'absencé de travail avait
conduit au crime; et la mort moissonnait
de milliers de victimes dont la faim et la
misère n'avait pu altérer la probité et la
justice.
Tel fut le lugubre spectacle qu'offrait la
Belgique, alors que le soi-disant libéralis
me, force d'intrigues ¥1 de fallacieuses
promesses, s'était assis au timon des af
faires. Trop raisonnables et surtout trop
justes pour vouloir l'impossible, nous ne
faisons.guère de reproche ce parti de
n'avoir point sauvé les Flandres. Comme
Allas sous le poids du ciel, le pouvoir
devait nécessairement plier sous cette
charge. Ce serait même tort que nous
le couvririons ce sujet de notre blâme,
si le ministère dans son fameux program
me n'avait pris sur lui la responsabilité de
sauver nos pauvres contrées flamandes.
En dehors de ces faits, il est d'ailleurs
d'autres motifs qui condamnent sévèrement
la confiance outrée que le pays accorda au
faux libéralisme le projet de loi sur les
successions en ligne directe, que la sagesse
du Sénat a fait avorter la satisfaction
générale; la réforme parlementaire qui
prive le pays du concours des capacités
et des lumières qu'il renferme; 'et la loi
sur la garde civique telle qu'elle a été
organisée, ne sont-ce pas là des mesures
qui aliénient le public d'un parti pour
lequel il n'avait d'abord que d'encens
offrir? En dernier lieu les interprétations
ministérielles qui foulent aux piçds, et
écrasent la charité privée, et la loi sur
l'enseignement supérieur qui porte une si
rude atteinte la liberté d'instruction con
sacrée dans notre charte, en favorisant
les établissements subsidiés par l'Etat,
au préjudice des institutions libres, voilà
certes autant de sujets capables de faire
comprendre au corps électoral l'immense
faute qu'il a commise en souscrivant bé
névolement aux vues passionnées des
hommes qui nous gouvernent, voilà autant
de raisons plausibles qui doivent éveiller
la méfiance de chacun, l'égard des prô-
neurs du libéralisme et dissiper l'indiffé
rence et l'aveuglement persistant qui a
caractérisé les opérations électorales.
Ces preuves de savoir faire de l'opinion
que nous n'avons cessé de combattre, le
Pays fort heureusement, commence les
saisir. Que de personnes déjà qui hier
encore s'inclinaient plat ventre devant
l'idole libérale maudissent aujourd'hui la
main qui nous conduit! Que de bras jadis
armés pour le triomphe de la cause libérà
lre, brandissent en ce moment le fer pour
sa défaite et sa ruine! la réaction mani
feste qui se déclare en faveur des principes
modérés et sages, il s'attache pour nous
une considération qu'il importe de ne
point passer sous silence; c'est que chez
les Belges les leçons de l'expérience ne
sont jamais perdues; trompé par des illu
sions brillantes, tôt ou lard ce peuple mire
les préjugés dans le miroir de la réalité.
C'est ainsi qu'à l'époque actuelle, où l'ex
emple est donné et que l'arbre libéral a
porté ses fruits, chacun les trouve fort
amers et de trop dure gestion pour euter
dans la suite de nouvelles greffes.
Jamais article n'a fait plus de sensation
en nôtre ville que celui publié par l'organe
du commerce, concernant le subside de
60,000 francsque le gouvernement, pen
dant la crise récente avait octroyés l'ad
ministration communale, pour venir au
secours des besoins de l'époque. Le mé
contentement, voire même l'indignation
était écrite sur toutes les lèvres en appre
nant qu'au lieu d'utiliser cette somme, en
grande partie, en la mettant entre les mains
de l'industrie dentellière souffrante, on
avait jugé plus propos de placer 50,000
francs l'intérêt de 5 pour cent. Ceci
connu, nous concevons présent le grand
motif qui faisait sécouer Mylord, comme
un caniche, toutes les fois que nous trai
tâmes de l'immense service rendu par notre
sénateur M. Malou-Vandenpeereboom,qui,
pendant ces jours jamais déplorables où
le commerce, faute de ressources pécu
niaires ne pouvait alimenter nos ouvrières
laborieuses, ouvrit largement ses trésors
nos honnêtes commerçants, et procura
ainsi de l'ouvrage de milliers de pauvres
de notre ville.
Après cela, Progrès cartonné! continuez
poursuivre de vos sarcasmes et de vos
sifflets, le respectable chef de la famille
Malou et tous ses membres; le langage
injurieux que vous tenez leur égard ne
fera que les relever de plus en plus dans
l'estime; soit, Mylord; faites passer les
industriels de cette ville, pour des man
nequins que quelque ressort secret fait
mouvoir, vos misérables lazzi ne feront
qu'augmenter le dégoût et le mépris avec