3 le commencement de la cérémonie funèbre qui se célébrait en l'honneur du maréchal Molitor dans ce refuge des vieux braves. Arrivé l'âge de 80 ans, après avoir traversé les époques glorieuses de la répu blique et de l'empire, après avoir vu s'ac cumuler sur sa poitrine et sur son nom les marques honorifiques de sa bravoure et de ses talents, le maréchal vivait encore au milieu de tous les souvenirs de la gloire impériale, que les fonctions élevées qu'il remplissait (grand chancelier de la Légion- d'Honneur), lui rappelaient chaque mo ment. La messe chantée en faux bourdon, a été dite par M. Estancelin, aumônier des Invalides, assisté d'un nombreux clergé et du curé de S'-Roch. Une foule nombreuse encombrait toutes les parties de la chapelle. Les notabilités de toute nature semblaient s'être donné rendez-vous auprès de la fosse qui allait se refermer sur cette grande illustration militaire. 1 O rs-- ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE DE FRANCE. Séance du 7 août. discussion sur l'expédition romaine. Les adversaires du ministère désiraient qu'un ordre du jour motivé diversât un blâme sur cette expédition. Le ministère roulait l'ordre du jour pur et simple. Voici ce que nous lisons ce sujet dans un jour nal hostile M. Defalloux, ministre de l'instruction publique, cause de la fran chise de ses convictions catholiques. M. de Falloux vient de prouver une se conde fois qu'il est le véritable orateur du parti catholique; on sent dans cet orateur frêle, nerveux, une de ces convictions pro fondes qui ne reculent devant aucune dif ficulté et qui donnent plus que le talent, qui donnent l'habilité. Cette tête pâle et aùstère qui porte sur les tempes les traces de brûlures résultant d'un traitement mé- dical, et qu'on dirait les cicatrices d'un martyre, celte taille qui paraît très-élevée, tant elle est élégante et libre, cette imper- turbabilité qui semble subir comme une épreuve expiatoire, les interruptions et même les insultes, et y voir le présage d'une victoire, cet organe faible et maladif qui fait éclater les acclamations d'une salle entière sur des phrases dites mi-voix, tout cela constitue une des individualités les plus puissantes qui aient jamais apparu dans une Assemblée législative. Il y a la fois dans M. de Falloux, l'élé- s'est levée contre nous. Les faits ont démontré que nous ne pouvons plus compter sans notre hôte, Qu'est-ce qu'une majorité de quelques voix seu lement. Or je vous le dis saDs aucun détour. Je n'ai plus dans le public cette confiance, qui me faisait dire, il y a du temps: c'est moi qui suis Guilliot, berger de ce troupeau. Mirabeau. Rassurez-vous cher pacha Le grand pacha. Notre campagne passée n'a point été satisfaisante. L'avenir me paraît égale ment sombre. Mirabeau. Le cas était exceptionnel; il s'agissait d'un candidat qui avait rendu d'immenses services aux Le grand pacha. Plus tard il sera question d'un autre dout les talents ont resplendi par tout le Royaume, et contre l'élimination duquel toute la nation a protesté. Mylord. Talents! Il n'y a de vrais talents que parmi l'opinion libérale. Le grand pacha. Le fait est incontestable. Ses talents sont prouvés. Mylord. Impossible s'il n'a servi le libéralisme vation de M. de Lamartine et la netteté de M. Dufaure. Je citerai au vol quelques-unes des phrases de son discours, et elles vous en révéleront mieux que*moi le mérite. M. de Falloux disait, en parlant des atta ques de M. J. Favre, que les outrages sui vaient les lois des corps physiques, et ne blessaient qu'en raison de la hauteur d'où elles tombaient; ceux qui lui criaient qu'il avait mis l'épée de la France aux mains de l'Autriche, il répondait que surtout nous ne l'avions pas mise aux mains où avait lui le poignard de Rossi; faisant éclater tous les bienfaits du catholicisme qui seul il attribue le pouvoir de conserver Rome sa véritable suprématie, il a voulu que celte cité restât la seconde patrie de tout le monde. En général, ce qui a fait la force de M. de Falloux, c'est qu'il s'est placé pour justifier l'expédition romaine, au point de vue de l'infaillibilité de l'église, et l'on com prend combien ces doctrines mystiques, qui font un peu évanouir l'atmosphère desséchante de la politique, se coloraient du brillant enthousiasme de l'orateur. La Montagne comprenait bien tout le terrain que gagnait sur elle l'habile minis tre, aussi n'a-t-elle cessé de le troubler par les insinuations les plus sauvages. C'est en vain que M. Dupin rappelait au respect de la tribune, de la dignité parlementaire, de l'art même, ces tribuns incultes dont aucun n'aurait pu balbutier une seule phrase de ce magnifique langage. Le dragon monta gnard se tordait et rugissait toujours sous le pied de ce terrible adversaire. En résu mé, les colères opiniâtres de l'extrême gauche ont pu faire perdre quelque chose de son effet, mais rien de son succès. Une réplique très-violente de M. J. Favre n'a fait que mieux ressortir l'adresse infi nie, la sûreté la fois polie et mortelle des traits qu'a lancés le ministre contre le nouveau chef de la Montagne; le champ de bataille est resté enfin, en tant que lutte oratoire, M. de Falloux. La séance a été d'autant plus finie, après le discours du ministre de l'instruction publique, que M. Quiuet y est monté. A ceux qui accusent le catholicisme d'abruter les populations, M. de Falloux a répondu Reportez-vous, Messieurs, l'origine du grand schisme qui a divisé le monde chré tien d'un côté, Constantinople et Moscou, et de l'autre, l'empire fidèle et Rome, et voyez de quel côté s'est établie, consolidée la servitude, de quel côté s'est développée la liberté. (Très-bien!) Le barbu biberon. Il a des capacités. Rogier les lui coooait; et les redoute. Je me rappelle fort bien, les aveux qu'il m'a fait, et l'ordre exprès qu'il a donne' de combattre sa rentrée. Mylord. Par le passé, le présent et l'avenir, je dis qu'il n'a pas de talents et s'il en a, je prouverai qu'il n'en a point, car je me mettrai eu quatre plus tôt que de le voir réintégrer en place. Mirabeau. C'est ce qu'il y a de mieux faire. Le barbu. Rien de si facile. Mylord. Il n'y a qu'il répéter sans cesse qu'il n'a été au pouvoir que pour remplir sa besace, qu'il a fait mourir les Flandres que Rogier a sau vées; que c'est son impéritie qui a engendré les emprunts forcés. Le grand pacha. Quant aux emprunts; laissons ce pot la cave nous n'y avons poiut perdu, vous savez; le public pourrait nous en faire un grief. Mylord. Le grand moyen c'est de vilipender le clergé et sa suite; la pluie, la grêle, la maladie des pommes de terre, tout doit lui être attribué; la fin du compte les campagnards décbaineront leurs chiens sur les robes noires. Ces deux grandes lignes parallèles sont bien faciles suivre, et le parallèle que chacun peut faire répond assez éloquem- ment aux accusations dont je viens de parler. Mais d'ailleurs, n'est-on pas injuste en vers ces populations italiennes que l'on peint comme dégradées par l'ignorance et l'abrutissement. L'Italie n'est-elle pas la patrie des sciences et des arts, et sa gloire n'est-elle pas née, ne s'est-elle pas dévelop pée avec le pouvoir temporel des Papes. (Interruption gauche.) Le ministre a continué! Nous avons eu dans l'expédition de Ro me plus d'un but, M. le ministre des affaires étrangères l'a déjà fait connaître. Nous avons eu un but catholique, nous avons voulu rendre au Saint-Siège l'indé pendance dont le monde catholique a be soin, et faire sentir dans cette grande œuvre la main de la France; ce but, nous l'avons atteint. Nous avons eu un autre but, nous avons voulu prêter appui la population romai ne, non contre son véritable père, contre Pie IX, contre celui qui fut salué de tant d'acclamations, et pour qui on a inventé la conspiration des ovations, car c'est de triomphe en triomphe qu'on l'a conduit l'abîme. (Très-bien! très-bien!) 11 n'avait pour se défendre que sa majes té, que ses bienfaits; on l'a conduit ainsi d'acclamations en acclamations, de recon- naissace en reconnaissance, jusqu'au jour où sur le seuil de son palais son ministre tombait un poignard dans la gorge. (Très- bien.) L'orateur voit dans le crime qu'il vient de rappeler la preuve que les fondateurs de la République romaine ne représentaient qu'une impuissante minorité. Quanta lui, il regrette que l'expédition n'ait pas en lieu plus tôt, elle eût prévenu bien des malheurs. voix nombreuses. L'ordre du jour pur et simple! a gauche. Non! non! l'ordre du jour mo tivé! L'ordre du jour pur et simple est mis aux voix. Il est procédé au scrutin public. Majorité absolue503. Pour l'ordre du jour pur et simple 4.28. Contre176. un enfant vendu pour trois francs. On se rappelle sans doute l'histoire assez cu rieuse d'une dame de haut parage dont le mari occupait le poste de Chambellan auprès du sou- Le grand pacha. De cette intrigue dépend la victoire. L'exploie-t-on avec malice nous sommes sauvés. Le fait-on avec rudesse nous sommes per dus et nous devrons quitter le capitole. Le barbu. Bah! Arrive ce qui pourra; et pui sons tant que la corde est au puils. Mirabeau. Le grand moyen, la méthode infail lible de réusir, ce serait de rendre le parti com merçant ridicule, au point de le faire passer pour des rétrogrades, des calotius et des affidés des jésuites. Mylord. Bravo! Bravo. Jetons les dans la jésui— tière ces industriels qui s'insurgeut contre nous. Le grand pacha. S'il y avait moyen de les faire rentrer dans nos bonnes grâces. C'est que les deux tiers de la ville appartiennent au commerce. Son organe b ce que j'ai appris, a plus de cent abonnés. Mylord. Qu'il en ait mille. Le libéralisme ne doit point s'abaisser jusqu'à faire patte de velours a ses adversaires. Il suffit que nous nous rallions les hommes qui ne sont point de l'école des jésuites et la victoire est h nous! Vive le libéralisme! A ce cris l'assemblée se sépare.

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Le Propagateur (1818-1871) | 1849 | | pagina 3