9 JOURNAL D'TFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. N» 3372. 33me année Quand il 's'agit de nous et de nos amis politiques, c'est peine si le vocabulaire du Progrès peut lui fournirassezd'épithètes, assez de paroles insultantes, acrimonieuses et récriminatoires notre adresse. Par courez les colonnes du moniteur de la régence d'Ypres, et vous y trouverez ré gulièrement l'opinion conservatrice, en termes du Progrès, les mannequins, les rétrogrades, les cléricaux, les Jésuites, les ultramontains et les Baziles, traités d'ambitieux, de gens que ne meut que la soif de dominer; qui usent de tout moyen pour renverser le pouvoir actuel, pour se parer ensuite de ses débris, et de ses in signes. La séance de la Chambre des Représen tants du 19 de ce mois est venue prouver de nouveau, combien les allégations du Progrès sont peu fondées, et combien les intentions que le soi-disant libéralisme prête l'opinion conservatrice sont erro nées et imaginaires. Le grand problème l'ordre du jour dans cette séance législative, était, comme on a pu le prévoir, la réorganisation de l'armée. Cette question soulevée par une fraction notable du parti libéral, renfer mait en soi un arrêt de vie ou de mort, pour le cabinet Rogier-Frère, selon que la majorité parlementaire appuyait ou re- jettaitla proposition de la section centrale. En face de cette perspective, le parti con servateur de la Chambre, se ressouvenant des vexations et des poursuites dirigées par la politique nouvelle contre l'opinion catholique; se rappellant les odieuses des titutions qui inaugurèrent le 12 Août 1847 d'éternelle mémoire va-t-il dans ce moment favorable, faire cause commune avec les adversaires du budget de la guerre dans le but de renverser le ministère? va-t-il, mû par le désir d'exerçer une vengeance, accorder ses YOtes aux libéraux dissidents, et donner le coup de pied au gouverne ment existant? Point du tout: fidèle ses antécédents, et persuadés que la question de l'armée est une question vitale pour le pays, il appuyé le ministère, et grâce son concours, les adversaires du budget écboueut devant une majorité de 30 mem bres. Sans doute; jamais occasion ne s'offrit plus belle pour renverser le pouvoir que dans la séance récente, où sur 91 votants, 61 membres seulement, repondirent qu'il n'y a point lieu de modiûer l'organisation de l'armée en vue d'obtenir des économies, s'il eut entré jamais dans le plan du parti conservateur de sacrifier le bien public au profit des intérêts personnels. Le Progrès lui-même doit nécessairement convenir de celte vérité, ayant trouvé dans les 61 suf- frages appuyant le ministère, le nom de plus de 20 membres du parti qu'il appelle rétrograde. En effet, il suffit de défalquer le chiffre des conservateurs qui ont donné leur ap pui au ministère, et de le joindre aux 31 voix libérâtres qui se promettaient de dé truire notre établissement militaire, pour s'assurer que le cabinet devait opérer sa retraite devant une opposition plus forte que lui de dix membres. Mais le renver sement du pouvoir n'entre guere dans l'intention du parti de l'ordre et de la con servation. Pour lui toute autorité est bonne si elle est juste et raisonnable; et comme l'a observé M. Rodenbach au sein du Par lement: Jamais l'esprit de parti ni les ran cunes ne dicteront la conduite de ses amis; mais le patriotisme le bien-être des masses, l'esprit Belge de 1830 voilà ce qui réglera toujours leur conduite. En présence de cette preuve d'abnéga tion politique, d'attachement la chose publique, donné par le parti que le Progrès appelle rétrograde et jésuitique, nous som mes curieux de voir en quels termes ce journal appréciera le vote favorable au budget de la guerre émis par la législa ture: quoiqu'il en soit, si les libérâtres de l'acabit du Progrès, refusent notre opi nion l'hommage qu'elle mérite, l'armée et le pays bien pensant ne lui accorderont pas moins leur estime et leur sympathie: l'a venir nous dira si nous nous trompons, en disant que la leçon donnée portera d'heu reux fruits en Belgique. VÉRITÉ ET JUSTICE. On s'abonne Ypres, rue de Lille, 10, près la Grande Placeet chez les Percepteurs des Postes du Royaume, PRIT DE I^ABDTA'EMEWT, par trimestre, Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 5o. Un n° a5. Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine, (insertions II centimes la ligne.) 7P3.SS, 23 Janvier. LE BUDGET DE LA. GUERRE. LA NIÈCE DU PAPE. LE BOULANGER. Hola!... maître Fonrnier, quoi pensez- vous donc? le troisième coup de matines est déjà sonné, et votre boulangerie est encore close. - Hola, oh! Et l'homme qui parlait ainsi frappait h coups redoublés a la porte d'une maison située dans une des principales rues de la petite ville de Saverdun, dans le comté de Foix. Cet homme portait snr ses épaules un large sac sous le poids duquel il parais sait accablé. Après quelques instants, l'homme dont l'impatience augmentait en raison du temps qu'on mettait h lui ouvrir, frappa de nouveau, mais cette fois avec tant de violence que la porte du rez-de- chaussée qui servait de boutique en fut ébranlée. Par le roi! cria-t-on de l'intérieur, soyez donc plus patient, et laissez-moi le temps de passer les manches de mon justaucorps. Sur cette invitation, l'homme s'apaisa: bientôt la porte s'ouvrit, et le boulanger parut sur le seuil. Que voulez-vous mon maître? demanda- t-il a celui qui attendait puis, le reconnaisant, il ajouta: Ah! c'est vous, compère Guérard, quel dé mon vous possède? Pourquoi venir faire pareil carillon a la porte de votre compère? Tenez dit l'homme, sans répondre cette question, voilà un setier de farine, c'est ma rede vance envers les frères de Saint-Benoît; demain pareille henreje viendrai chercher mes pains. Ouais n'y comptez pas, maître; aujourd'hui mon four restera froid et votre farine restera farine. Pourquoi donc, compère? avez-vous perdu le sens, ou bien oubliez-vous que nous sommes au jourd'hui samedi,jour de travail? Vous voila vêtu comme un damoiseau: qu'y a-t-il donc? Il y a, il y a, compère, qu'aujourd'hui nous sommes le septième jour d'avril de l'an i5a4; et que ce jour je marie ma gente et gracieuse Blanche, ma fille bien-airaée. Voilà ce qu'il y a, compère, voilà pourquoi mon four restera froid, pourquoi votre farine restera farine. Que Satan vous confonde, vous, votre fille et son épouseur murmura l'homme; il faut donc que je reprenne ma charge et que je m'adresse votre confrère, l'autre bout de la ville? Comme il vous plairareprit le boulanger en aidant maître Guérard placer commodément la charge sur ses épaules, adieu, compère Au diable reprit maître Guérard en sortant, et plaise Lucifer troubler aujourd'hui vos épou sailles! Le ciel nous en préserve s'écria maître Four- nier;et il renferma brusquement la porte. Quand il fut seul, il songea achever sa toilette: déjà il avait endossé un beau justaucorps en drap brun tout neuf, et serré sa taille dans une large ceinture de cuir il venait de tirer d'un bahut une mante de drap gris, soigneusement pliée, dont les manches étaient étroites et courtes,car il n'ap partenait qu'aux gentilshommes de porter de larges manches pendantes, et il allait la revêtir, lors que Guillemette, sa femme, descendit lourdement les marches de l'escalier de bois qui conduisait au premier étage, et entra dans la boutique. Elle aussi, elle était parée, et son accoutrement neuf ne le cédait en rien celui de son mari une longue robe de serge verte entourait sa taille épaisse, et sa bonne figure, grosse et rebondie, avait ce jour-là uu certain air de fraîcheur sous le double encadrement d'une chevelure encore noire, et d'une capuce oreillettes en drap violet. Certes, malgré son demi-siècle, Guillemette, ainsi vêtue, avait encore fort bon air; et puis il y avait tant de joie sur sa figure, qu'elle eût pu hardiment se faire plus jeune de quelques dix ans sbds craindre un démenti. C'est que le jour où elle marie sa fille,

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Le Propagateur (1818-1871) | 1850 | | pagina 1