su s'élever celte occasion au-dessus des
intérêts mesquins de parti. Elles ont mis
au jour la vérité toute entière et fait bonne
justice des pitoyables sorties et des récri
minations intempestives du ministre contre
M. l'abbé De Haerne.
Qu'un étranger, qu'un Français suive
la remorque les aberrations funestes du
libéralisme français; qu'un ex-pédagogue,
qu' un homme d'étude se laisse séduire im
prudemment au faux brillant de quelque
théorie; voilà ce qui se conçoit. Mais celte
voie ne saurait convenir la libre et ca
tholique Belgique. Malgré le libéralisme
antireligieux, les sources fécondes de la
religion et de la morale ne sont point la-
riesen son sein. Malgré le libéralisme anti-
national qui se dit humanitaire et éclairé,
elle ne démentira pas les glorieuses tradi
tions du passé et le rôle de satellite de la
France ne lui sourira jamais.
Depuis que la religion chrétienne est
venue régénérer le monde abruti sous le
paganisme, elle n'a cessé de se voir en
hutte aux violentes attaques d'ennemis
acharnés sa perle. Tantôt les fureurs
sanglantes des despotes payens; tantôt les
superbes revoltesdes hérétiques; enfin, les
railleries, les hypocrites clameurs des so
phistes. Néron, Luther, Voltaire.
La Belgique, comme toute l'Europe,
compte aussi de ces hommes, qui n'ont
pas reculé devant cet ignoble héritage.
Eh! qui sondera la profondeur de l'abîme
où de funestes enseignements savent pré-
cipiterceux qui les pratiquent logiquement
jusqu'au bout? On sait les horribles scènes
de 93 et les excès qui tout récemment en
core étonnèrent la France, l'Allemagne,
l'Italie. Comme nos libéràtres, les meur
triers de Louis XVI, les assassins de Mgr
Affre, de Lamberg, de Latour, de Lich-
nowsky, de Kossi étaient fils de Voltaire.
Mais le poison qu'ils sèment pleines
mains n'a pas poussé jusqu'ici d'assez
protondes racines dans notre catholique
Belgique. Un clergé vigilant et sage est là
sur la brèche où vient se briser la vaine
colère des apôtres de l'erreur. Aussi est-ce
contre luiqu'ilsconcenlrent naturellement
tous leurs efforts.
Au premier rang de la tourbe fanatique,
le l'rogrès se dislingue tout d'abord par ses
attaques aveugles et furibondes. Fidèle
sa déplorable mission, il ne manqua ja
mais d'aboyer tout propos contre la robe
noire; jamais il ne se fil faute d'incriminer
les actes les plus simples du clergé, s'ils
venaient l'encontre des préjugés ou des
passions d'autrui. .Ainsi l'autorité ecclé
siastique croit-elle devoir prémunir les
fidèles contre la scandaleuse représenta
tion d'un drame immoralle Progrès, se
posant en canoniste, ne manquera guère
de fronder ce devoir consciencieux des
pasteurs.
Insultes et calomnies, la feuille vollai-
rienne 11e croit jamais en déverser suffi
samment sur cet ordre fameux par ses
lumières et ses vertus: infatigables mis
sionnaires qui bravent les dangers et la
mort, se dévouant chez les peuplades les
plus lointaines la diffusion de la parole
de vérité et de vie; sublimes champions
delà morale sainte, tout réceinmentencore
on les vit dans les bagnes de Toulon et de
Brest faisant germer la religion et le re
pentir dans ces vastes repaires du crime
eudurci!
On sait assez au détriment de quelle
classe de citoyens nos soi-disant libéraux
apportent leurs singulières restrictions
la liberté en matière d'enseignement, en
matière d'élections, en matière de charité,
etc. Que les peuples avides de liberté et de
jouissances matérielles aient plus que ja
mais besoin de croyances positives et re
ligieuses; que l'influence des doctrines
perverses exige impérieusement le retour
vers les idées saines et conservatrices du
catholicisme, rien n'y fait. Le Progrès en
tend par gouverner, restreindre l'unique
influence qui puisse encore sauvegarder
l'avenir des nations. Pour lui le litre de
catholique est une épilhèle injurieuse qu'il
prodigue ses adversaires, n'importe de
quelle couleur.
Ces quelques citations,que nous restrei
gnons considérablement, suffisent croyons-
nous, pour faire comprendre la véritable
portée des déclamations du jonrnal voilai-
rien l'adresse du clergé. La persévérance
et la mauvaise foi qui les caractérisent,
dénotent indubitablement la résolution ar
rêtée d'avilir le culte en dénigrant tout
propos ses ministres, d'extirper d'entre le
peuple l'empire de la religion en s'achar-
nant sans cesse la ruine de tout ce qui
lui est intimement lié.
Il est pénible et repoussant d'avoir
remuer celte fange, mais les dupes nom
breuses que le faux libéralisme n'a cessé
de faire, au moyen de quelques dehors
d'une modération trompeuse, ne nous ont
pas permis le silence. 11 nous tardait d'ar
racher l'impiété moderne le masque
menteur, dont il couvre ses traits diffor
mes; il nous lardait d'exposer au grand
jour les haillons galonnés de ce baladin
de théâtre, et d'écarter enfin la robe trom
peuse qui le couvre, ainsi qu'un blanc
linceul enveloppe un cadavre décomposé.
Baziles! bedauds! répliquera sans doute
le Progrès. Qu'importe...
Mais au peuple, que vous avez indigne
ment trompé, Progrès; au peuple, que
vous n'avez su qu'abreuver de duperies;
insultant tout ce qu'il révérait; flétris
sant tout ce qui faisait son bonheur, tout
ce qui relevait ses instincts; au peuple que
repondrez-vous? Le temps n'est pas loin
peut-être, où dégoûté de phrases creuses,
il refoulera impitoyablement dans l'ombre
ces ambitieux pygniées qui jamais n'en au
raient dû sortir.
L'ENSEIGNEMENT PUBLIC,
Le cardinal les regarda d'un air consterné
Ne parles donc pas de moi comme si j'étais
l'auleur de vos victoires. Vous savez bien et je le
sais bien, je vous le répèle, que je n'en suis pour
rien. A h pourquoi l'empereur mon maître s'ob-
Stine—t-il vouloir faire de moi un ministre! Eh
bien gardez vos prisonniers; mais pas d'échafaud,
pas de coups de hache Je vais en écrire l'empe
reur, et le glorieux Charles-Quint décidera du sort
des vaincus. Maintenant, adieu, messeigneurs, car
voici d'illustres peintres qui attendent une audience
de moi, et vous savez que l'empereur mon maître
honore et veut qu'on honore comme lui les pein
tres et les hommes d'art.
Le cardinal congédia par un salut l'amiral et le
connétable. Il vint ensuite Dame Marguerite et h
ses deux compagnons, qui s'étaieut tenus respec
tueusement l'écart pendant que le cardinal ache
vait de s'entretenir avec don Fadrique Henriquez
et don Inigo Velasco.
Le prince de l'Eglise avait peine h dissimuler sa
joie il se croisa les bras sur la poitrine et regarda
fixement la vieille daiue.
L'Espagne et l'empereur mon maître s'ho
norent de recevoir des peintres aussi célèbres que
vous, commençait-il 'a dire.
Mais tout coup il laisse la sa feinte et le déco
rum, se mit h pleurer d'émotion et de joie, et se
jela dans les bras deMemlinck:
Vous ne reconnaissez pas le pauvre Adrien,
que dame Marguerite a empêché de mourir de faim
au pied d'un arbre Eh quoi si vos yeux ne m'ont
point reconnu, votre cœur du moins ne vous a-t-il
point appris qu'un ami se trouvait là devant vous
Eh oui! c'est moi, c'est bien .moi, moi Adrien
Boyers, moi le fils d'un menuisier. Hélas! oui, mes
enfants, je suis archevêque, cardinal, gouverneur des
Espagnes J'ai été aumônier de la reine Jeanne-la-
Folle, puis ambassadeur, puis régent du royaume.
Oui moi qui me suis perdu dans les rues de Gand,
fauted'uneassezgrande intelligence pourretrouver
la maison où je demeurais avec vous; moi qui ne
savais pas gagner mon pain, et qui serais mort de
faim sans votre charité, on a voulu que je gouverne
l'Espagne avec le cardinal Ximenès, le plus habile
diplomate de l'Univers. Il se riait sans cesse de ma
simplicité et me faisait signer toutes les pièces pé
rilleuses: cela m'a valu la réputation d'un gouver
neur hardi, d'un homme audacieux, a moi mes
enfants, moi que vous connaissez si bien! Or,
Charles-Quint, devenu un homme, un empereur,
n'a point voulu croire a mon ignorance et a ma fai
blesse, que je lui ai confessées cent fois. Tout ce
que font de bien et d'heureux les gens qui agissent
autour de moi, on me l'attribue; lorsqu'ils échouent,
on dit que c'est leur faute, tant ma réputation d'ha-
Le projet de l'oi sur l'enseignement présenté
aux chambres sacrifie quatre grandes choses la
religion, les finances, la science et la liberté. II
favoiise l'impiété, il menace d'épuiser le pays en
folles dépenses, il le condamne a l'ignorance dans
un siècle de lumière, il arrête et bâillonne le
progrès, il prévient la concurrence et prépare
l'oppression.
Fait-on cas des intérêts majeurs qui sont ici
engagés? Compte-l-on pour importants les maux
que nous signalons? Qu'on se tienne donc sur ses
gardes, le temps se précipite car il y a longtemps
que les machinations ont été méditées et préparées
le coup ne sera point porté sans qu'on ait visé le
plus juste possible au cœur de la patrie. Le mi
nistère cède h une influence mystérieuse et sinistre.
Les peuples barbares ont eux-mêmes dans tons
les siècles attaché la plus haute importance leurs
intérêts religieux. 11 n'y a que nous, rejetons
indignes d'ancêtres meilleurs, qui professons'a cet
endroit une lâche indifférence. Trois grands peu
ples dans l'antiquité profaue ont excellé par les
sciences en même temps que par leur puissance et
leur prospérité les Égyptiens, les Grecs et les
Romains, et l'on remarque que ces trois nations
bilité est glorieusement et irrévocablement établie.
Ces deux seigneurs qui sortent d'ici viennent de
remporter une grande victoire... j'ignorais même
que la bataille se fut donnée. Eh bien ils ont eu
le front de venir nie dire que l'avantage d'avoir
terminé la guerre civile m'appartenait Voila la
cour, mes enfants. Aussi n'ai-je point goûté un
jour, une heure de bonheur depuis que la volonté
de Dieu m'a séparé de vous Mais vous voilà re
venus, retrouvés... Embrassez-moi encore une fois,
car, vous le voyez, je pleure de joie. Oh! combien
de fois ai-je rêvé et appelé de mes vœux le mo
ment qui nous réunit Mais un jour une affaire, un
jour une autre m'empêchait de réaliser mon désir
le plus ardent Tant que vécut le duc Philippe, il
me fallut cacher mon nom et mon origine tous;
puis ensuite il me fallut gouverner l'Espagne, et
ce métier-là ne laisse guère de temps disponible
et de liberté d esprit... Dieu soit beni je ne mourrai
pas sans vous avoir encore une fojs revus et em
brassés.
Ils étaient là tous les quatre se livrant leurs
souvenirs, la voix émue, le cœur palpitant, l'âme
pleine de joie et de tendresse, quand tout coup un
honnne jeune encore, mais an maintien sérieux et
sévère, entra daus l'appartement. A sa vue le car
dinal jeta un cri de surprise et tomba les genoux
en terre. Pour être continué.)