9 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. N<> 3431 34me année. TPRSS, 17 Août. DU LIBÉRALISME EU SARDAIGNE. Jeudi 15 Août 81m# Anniversaire de la naissance de Napoléon Ajaccio, Ile de Corse, les anciens Frères d'Armes de l'Em- Eire Français, ont comme d'habitude célé- ré par un banquet, cette journée jamais mémorable. Leur salle tout en ayant quelque chose de grave et d'imposant, ne laissait point d'être coquettement decorée. Plusieurs toasts ont été portés, savoir: 1# Par le Vice-Président de la société, au grand homme, l'empereur Napoléon. 2* Par le Golonel-Commandant d'Ar mes, au Roi des Belges et la famille Royale. 3° Par le secrétaire de la société, Mr le général Moltzberger, président de la société; pour son concours utile, qui a tant contribué la prospérité de la société. 4° Par le capitaine Brabant, MM. les docteurs Taelman et Dalmote, au pre mier, pour le grand nombre de services VÉRITÉ ET JUSTICE. Les horreurs qui se commetlent en Sardaigue au nom du gouvernement prennent un caractère de plus en plus sérieux. Les hommes pervers qui sous prétexte de libéralisme ont lancé le pouvoir civil dans la voie des persécutions religieuses, doi vent s'applaudir de leurs crimes, dont le succès dépasse probablement leur attente. En abolissant par une loi les juridictions ecclé siastiques du royaume, tandis que les négociations sur cet objet étaient pendantes avec le S' Siège, et en les tranchant ainsi d'une manière outrageuse pour la religion, la majorité libérale du parlement a su faire naître dans ce pays catholique un conflit entre l'autorité spirituelle et l'autorité temporelle. Eu généralqu'on y fasse bien attentionc'est là ce que le libéralisme voltairien cherche dans tous les pays où son influence obtient de l'empire, et il faut convenir qu'il sait y mettre souvent autant d'habilité malicieuse que de patience machiavé lique. A force d'épier toutes les occasions où l'a mour propre du pouvoir peut être mis en jeu, où les passions populaires peuvent être flattées, où des principes politiques quelconques peuvent être poussés a quelque exagération, où des suscepti bilités n'importe de quel genre peuvent être éveil lées et exploitées, les libéraux parviennent tôt ou tard h mettre les deux pouvoirs en désaccord, h extorquer de la puissance civile quelque ordre que la conscience du catholique défende d'exécuter, et dès lors avec la fureur du fanatisme, ils crient 'a la nécessité du maintien de la légalité et de la pré pondérance civile, pour donner un libre cours h la haine impie qu'ils couvent sous ce manteau. En Belgique le génie qui fit éclorre le congrès libéral a-t-il uniquement voulu que l'organisation de l'instruction publique consacrât l'exclusion sys tématique du clergé comme autorité pour affaiblir l'ascendaot religieux dans le cœur de la jeunesse; ou nourrit-il le dessein ultérieur d'arriver par cette porte h d'autres résultats plus agressifs, c'est ce que nous apprendra un avenir peut être d'au tant plus rapproché, que l'aveuglement inerte des esprits rend l'époque propice h de semblables en treprises. La loi abolitive des immunités religieuses en Sardaigne,k laquelle le ministre Siccardi a attaché nn nom dorénavant flétri, causa autant de surprise que de douleur a la cour pontificale. Elle protesta en vain en invoquant la foi des traités et les prin cipes les plus élémentaires du droit public et de la diplomatie comme de la simple bonne foi. Il fut ordonné de passer outre h l'exécution. S. S. Pie IX défendit d'une manière formelle a l'épiscopat sarde de se conformer une loi sacrilège pro mulguée au mépris de l'église romaine et de ses droits. Les archevêques de Turin, de Sassari et deCag1iari,en fils obéissants du siège apostolique communiquèrent par une circulaire a leur clergé la défense de reconnaître comme légitime l'abo lition arbitraire des juridictions ecclésiastiques. Dès lors le zèle persécuteur eut beau jeu il jeta le masque et montra ses dents d'hyène. On commença par l'archevêque de Turin, Mgr. Fransoni, pour essai, et pour tâter le pouls du peuple. Les bas fonds des grandes villes offrent en effet plus de ressources pour ruerb point nom mé l'émeute écbevelée contre les prêtres et les couvents. En attendant le parti dominateur pré pare la population aux exploits qu'il provoquera en répandant a profusion des imprimés scandaleux, des gazettes hostiles au clergé, des chansons ob scènes. On fait circuler en même temps des rumeurs calomnieuses et absurdes sur le compte de l'arche vêque. Cependant le prélat est cité devant un juge d'instruction sous la prévention d'avoir provoqué h la désobéissance aux lois par sa circulaire. L'ar chevêque demande Rome s'il lui est permis de répondre la citation de cet officier civil, et dans l'intervalle sollicite de celui-ci un délai qui est aussitôt refusé. Du juge d'instruction la cause passe a la chambre des mises en accusations, puis elle est renvoyée k la cour de justice criminelle. Déjà plusieurs fois des groupes de vauriens avaient brisé les vitres de l'archevêché et y avaient fait entendre leurs huées en même temps que les cris de Vive Siccardi' Maintenant le prélat est extrait de son palais par la gendarmerie et enfermé k la citadelle. Cette première expédition se termina par la condamnation du vénérable confesseur k un mois d'emprisonnement. En différentes villes d'Italie, des adresses ont été votées et des souscriptions ouvertes pour offrir k Mgr. de Turin qui un calice, qui une mître, qui une crosse en témoignage d'admiration. Une sous cription a été également ouverte k Paris, et c'est M. Eug. Veuillot qui a eu l'insigne hounenr d'aller en députation pour présenter k la victime de la tyrannie libérâtre une superbe croix, hommage des catholiques français. La rage voltairienne n'a fait qu'accroître devant le courage chrétien du clergé piémontais. Après Mgr. Fransoni, c'est l'archevêque de Sassari qui a été mis aux arrêts dans son palais et condamné également k un mois de prison. Le même drame de procureurs maçonniques allait se renouveler k Cagliari; mais lk il parait que l'attitude du peuple indigné de ces infamies successives a fait au moins suspendre les mesures proconsulaires qu'on mé ditait. C'est donc k Turin qu'on est revenu k la charge, l'humeur persécutrice du cabinet n'étant nulle ment au point de se calmer. Un membre du mi nistère, le nommé Santa Rosa a été pris d'un vomissement de sang. En danger de mort, il a re tracté sa participation aux ordonnances Siccardi. Se trouvant en voie de guérison, il a révoqué sa rétractation. Réduit de nouveau k l'extrémité, il a encore une fois appelé les secours religieux. Mais le scandale de la rétractation révoquée a exigé plus de précaution deda part de l'autorité ecclésiastique. Ce qui s'est passé n'est pas encore exactement connu; mais il parait que l'archevêque a mis une rétractation explicite comme condition k l'admi nistration des sacrements, ce que d'abord le malade a refusé, peut-être sur des suggestions étrangères et qu'ensuite le temps de procurer les secours a marqué. Sans ces obstacles, c'est le supérieur des Frères servîtes, en sa qualité de curé de la pa roisse qu'habitait Santa Rosa, qui aurait du l'ad ministrer. Cette mort a été suivie d'un acte iuouï de ven geance. Le lendemain du jour où M. Veuilîot présentait k l'archevêque le don des catholiques de France, le prélat a été de nouveau arraché de sa résidence par une bande de gens armés et transféré k une citadelle malsaine k quelques lieues de lk. En même temps les religieux Servîtes ont été chassés de leur couvent, et le gouvernement s'est emparé dateurs propriétés,que les feuilles minis térielles évaluent triomphalement k 5o,ooo fr. de revenus. Comme précédemment, une émeute avec jet de pierres, bris de vitres et cris sauvages ac compagnait l'exécution de ces brigandages soi-di sant légaux. L'Indépendance belge constamment en extase devant les traits de courage et de sagesse du libéralisme alpestre disculpera ces brutalités, si son hypocrisie habituelle ne lui permet pas d'y applaudir ouvertement. Du reste ces événements, ainsi que nous le di sions au début n'offrent rien d'extraordinaire c'egt de la sorte que le libéralisme agit communément. Il travaille dans son élément en Sardaigne comme il fait en Suisse, et comme il fesait k Rome en pro nonçant légalement la déchéance du Pape. En Belgique il s'agite déj'a des pieds et des mains pour tirer parti de sa loi sur l'enseignement moyen. La France lui offre un champ moins libre k cause des socialistes qui n'épargneraient pas plus les voltairiens que M. de Montalembert. La Mon tagne a ainsi son utilité dans les calculs de la Pro vidence. Si quelque chose en Belgique peut guérir de l'engouement libéral, ce sera moins'la crainte de la démagogie ou l'exemple de l'étranger, que la si tuation financière que la politique des Frères em pire avec une remarquable rapidité, tout en affi chant l'économie. ■*-gQ9Qg-|»

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Le Propagateur (1818-1871) | 1850 | | pagina 1