JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N» 3502.
34me année.
SOUSCRIPTIOlN
7??aSS, 23 Avril.
S'il est une vérité incontestable, c'est
coup sûr le devoir, la nécessité de baser
l'éducation sur l'élément religieux. Malgré
ce qu'en aient pu dire des sophistes aux
rêves creux, il n'est pas de morale sans
religion, et sans morale il n'est pas de so
ciété ni de civilisation possibles. Fournir
la patrie de bons citoyens, tel est le but
vers lequel doit tendre l'éducation donnée
aux frais de l'État. Donc elle doit être re
ligieuse.
Et qu'on ne nous objecte pas qu'il ne
faut pas confondre l'éducation morale avec
l'instruction scientifique et littéraire; que
celle-ci est chose part où l'influence re
ligieuse n'a rien voir. Celte distinction
spécieuse pour bien des gens, n'est en réa
lité qu'un vain jeu de mots. L'instruction,
n'importe laquelle, tendant au perfection
nement de l'individu, ne peut jamais aller
l'eucontre de ce qui fait la base de ce
perfectionnement, c'est dire de la reli
gion; sous peine de falloir sa propre fin.
Aussi par une juste et inévitable consé
quence l'instruction scientifique et litté
raire basée sur la Religion elle-même
remplit mieux que toute autre la mission
civilisatrice et sociale qui lui incombe. Le
protestant Guizot a compris cette vérité
en ces termes: Il faut que l'atmosphère de
l'école soit religieuse.
Que dire par conséquent d'hommes d'é
tat, de journaux de parti, qui prétendent
nous donner la loi et ne voient dans l'en-
DAVID TENNIERS
seignement de la religion dans les collèges,
qu'une branche accessoire, qu'an annexe
au programme des études? Suivant eux,
l'autorité ecclésiastique invitée de par la
loi y faire enseigner la doctrine chré
tienne, n'aurait qu'à fournir sa coopération
sans s'informer si les leçons des profes
seurs en extirpant les sentiments religieux
du cœur de la jeunesse, ne rendront pas
inefficaces et illusoires ses efforts et ses
travaux.
Prêté en ces conditions le concours du
clergé ne servirait trop souvent qu'à cou
vrir du voile d'une scandaleuse indulgence
un enseignement anticatholique, et par un
odieux sacrilège la Religion elle-même de
viendrait dans les mains du prêtre un phare
menteur offert aux pères de famille pour
enlacer leurs enfants dans les filets des
doctrines perverses.
C'est en vue de ces éventualités que le
Sénat interpréta l'art. 8 de la loi nouvelle
sur l'enseignement moyen, dans le sens du
rapport lu devant cette assemblée, décla
rant qu'il restait aux ministres du culte,
par une conséquence toute logique, la faculté
de débattre les conditions morales de leur
coopération. C'est en ce sens que des feuil
les libérales, entr'autres le Journal des
Flandresentendent encore l'invitation que
consacre la loi. C'est en ce sens que YIn
dépendance, organe de M. Rogier, après
avoir déclaré (21 Juill. 1850) qu'il fallait
que la Religion fut le fondement des Études,
exprimait sa pensée, alors qu'elle disait:
Le gouvernement fidèle aux déclara
tions que nous avons rappelées (dans l'ex
posé des motifs, et plusieurs fois réitérées
durant la discussion) ne considérera point
le concours du clergé comme une vaine
formalité; il fera en sorte que cette coopéra
tion religieuse produise des fruits salutaires.
Tous les esprits éclairés et impartiaux dési
rent, d'ailleurs, qu'elle soit honorable et efficace.
Pour notre part, nous verrions avec
plaisir le gouvernement pousser les conces
sions jusqu'aux dernières limites.
Certes, si le ministère eut adopté ou
gardé ces dispositions conciliatrices, l'en
tente eut été facile; mais les clérophobes,
les voltairiens ont voqlu qu'il exigeât du
clergé un concours pur et simple, un con
cours sans conditions. Le cabinet est entré
dans cette voie, et dès ce moment il est
permis d'affirmer que l'avenir des athenées
et des collèges de l'Etat se trouve gravement
compromis. En même temps que la con
fiance de nos pasteurs, la confiance des
familles, qui les doit faire vivre, ne peut
manquer de leur faire défaut.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
pour le diocèse dévasté de séïde,
(Turquie Claie.)
Première recette une Damefr. i5 oo
Un Eccle'siastique5 oo
du concours du clergé a la loi sur
l'enseignement.
LE JOUEUR DE COR M G MI USE.
UNE RENCONTRE.
Le 2i juin de l'année 1625, vers midi, un jeune homme
de quinze ans environ, la figure douce et régulièretraver
sait la place du Marché Anvers, lorsque ses yeux se portant
vers la boutique d'un boulanger il aperçut une chose qui le
fit s'arrêter net, et le rendit attentif.
C'était un jeune homme un peu plus âgé que lui, mais sur
les traits duquel, la misère, ou plus que cela, une mauvaise
conduite semblait déjà avoir tracé son cachet fatal. A peine
vêtu, hâve, les yeux hagards de ce jeune homme se fixèrent
avec une avidité désesperée sur les petits pains dorés étalés
dans de charmantes corbeilles sur la devanture du magasin,
puis, farouches et craintifs, ils lançait parfois un regard ra
pide aux alentours; sa main, suivant la direction des regards,
tantôt s'avançait lentement vers les pains dorés, et au moin
dre bruitchaque entrée ou sortie du boulanger qui allait
et venait de l'arrière-boutique l'avant, se retirait brus
quement pour recommencer l'instant d'après le même ma
nège.
Le premier des jeunes gens suivait avec une sorte d'a
gitation fébrile, chaque mouvement du pauvre inconnu.
L'empêchera-t-il de commettre ce larcin, ou passera-t-il.
lui aussi, comme les autres, sans s'inquiéter du drame qui
s'accomplit trois pas de lui? Il paraît que le premier
sentiment fut celui qui le domina, car, après une légère
hésitation, il s'avança droit l'inconnu. Au moment où
il allait lui mettre la main sur l'épaule pour l'avertir du
danger qu'il courait, une exclamation de surprise lui
échappa.
Van Hermann, lui dit-il.
Celui qu'il appela de ce nom se tourna, fit aussi une
exclamation, mais se reprenant, et s'armant d'un air hautain,
il répondait sèchement:
Je ne vous counais pas, monsieur.
Quoi! tu ne te souviens plus de moi, David Teuniers,
appelé par vous tous, l'école, Junior, répliqua le premier
des jeuues gens, lu ne te rappelle pas mon père David
Tenuiers aussi, et que vous appeliez le Vieux, bien qu'il
fût enoore très-jeune as-tu doue oublié qu'il te faisait poser
chaque fois que tu venais me voir, ce qui t'ennuyait
tellementque o'est probablement cela que je dois ta
longue abseuce depuis deux ans que j'ai quitté l'école,
mais tu ne peux m'avoir oublié ce point, Van Hermann
j'ai un peu grandi, mais cela n'a pu me rendre mécon
naissable, toi, tu as plus que grandi, tu es extrême
ment changéje dirai même vieillites joues se sont
creusées, elles ont perdu toute la fraîcheur de la jeunesse.
et puis. le jeune Tenniers s'arrêta, il n'osait dire
l'action dont il avait craint d'être le témoin; il reprit
vivement mais qu'est-ce qui t'a dono changé ainsi?
que t'est-il arrivé... il me semble qu'à l'époque où nous nous
On nous rapporte que le gouvernement est
tombé d'accord.avec les compagnies demanderesses
en concession pour l'exéculion immédiate des voies
ferrées en fluviales dont nous avons depuis si long
temps signalé l'importance. Le renseignement est
puisé bonne source. Bien que l'urgence ne soit
pas égale pour chacune de ces entreprises, elles se
ront toutes simultanément soumises aux chambres,
afin que toutes les localités aient leur part.
Ainsi nous aurons t° La quadruple jonction
de Bruxelles, Louvain, Namur et Charleroi; 2° la
ligne de Namur É-Arlon en attendant la bifurcation
d'Arlon sur les deux frontières; 3° la ligne de
Bruxelles a Gand par Alost 4" la ligne d'Alh
Alost, eu attendant Termonde, Zele et Lokeren; 5°
le canal de Liège Laroche; 6° la dérivation de la
Meuse; 70 la canalisation de la Campine.
On espère un arrangement avec la compagnie
de la Flandre occidentale pour la direction de ses
embranchements complémentaires. Ypres serait
relié h Courlrai par Roulers au lieu de l'être par
Menin. Ce serait un détour, mais, en revanche,
Ypres serait rapproché de Bruges et satisfaction
serait donnée Thielt, qui, plus lard, serait relié
par Roulers la ligne de Bruges Courlrai et par
Deyuseh celle deGandaCourtrai. [Émancipation)
perdîmes de vue, tu étais parti pour Osteude, où tou père
t'avait trouvé uue bonne place, chez uu fabriquant de gants,
je crois.... tu vois que j'ai bonne mémoire.... Van Hermann.
Monsieur, le nom que vous continuez me donner... dit
le jeune homme pâle et mal mis... n'est pas...
Le tien... acheva brusquement Tenniers saisissant la
main de son voisin; et avant que ce dernier eût pu se douter
de sou action, il lui souleva la manche, et découvrant uue
cicatrice qu'il avait au bras, il répliqua Et cette marque
donc, ne tu rappelles-tu plus aussi que c'est en volant des
pommes chez le voisin Spacmann, que tu es tombé, et que tu
t'es fait celte entaille au bras Allons donc, "Van Hermann
fi! que c'est laid de renier ses amis.»
Le jeune homme pris ainsi au dépourvu baissa les yeux et
répondit
Eb bien, oui, je l'avoue, je ne voulais pas te reconnaître...
ah Junior, j'ai éprouvé bien des malheurs depuis que je ne
l'ai vu.
Tu me conteras cela en buvant une bouteille de biere, et
en cassant une croûte, dit Tenniers qui avait toujours devant
les yeux l'action qu'il avait tant oraiut de voir commettre et
passant le bras sous celui de Van Hermannil l'entraîna au
cabaret le plus voisin.
Du pain et de la biere, dit-il en faisant asseoir son ami
une table, et prenant place près de lui.
Demande aussi une tranche de mouton ou de boeuf, dit
Van Hermann reprenant mesure une audace qui semblait
habituelle ses traits, car j'ai un appétit de tous les dia
bles.