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JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M<> 3504.
Mercredi, 30 Avril 1851.
34me annëe.
7PPLES, 30 Avril. i
L'INSTRUCTION PUBLIQUE.
L'Indépendance affirmait l'autre jour que
le gouvernement avait fajt tout ce qu'il
lui était possible de Taire jusqu'ici pour
obtenir le concours du clergé dans l'en
seignement. De là découlent les consé
quences suivantes:
La loi nouvelle sur l'instruction secon
daire a porté ses fruits, les mesures pour
assurer l'influence de la religion comme
base de l'éducation sont prises, les pères
de famille ont obtenu les garanties qui de
vaient être dans leurs vœux légitimes.
Le gouvernement n'a plus rien faire,
puisque tout ce qu'il lui était possible de
faire, il l'a fait: son œuvre est accomplie.
11 ne s'agit plus que de laisser aller les
choses d'après l'impulsion qu'elles ont re
çue. Les améliorations qu'on voulait intro
duire dans l'éducation nationale existent.
Que si les résultats satisfaisants que nous
venons d'indiquer ne sont pas atteints, il
ne faut pas les attendre, il ne faut même
plus rien attendre de mieux, puisque le
gouvernement étant rapidement allé jus
qu'aux limites du possible il n'y a plus rien
au delà. Si donc l'alliance indispensable
de la religion et de la science pour asseoir
une éducation digne de ce nom, solide et
éclairée, fait défaut, c'est que le clergé au
lieu d'accorder son concours le refuse, et
ce refus résistant tous les efforts qu'il a
été possible d'employer pour le vaincre, il
est évident qu'il doit être envisagé comme
déûnitif et sans espoir de changement.
UNE MESSE D'HOPITAL.
Le ton de suffisance du journal minis
tériel n'est qu'un véritable persilflage, mais
une mystification d'autant plus odieuse
qu'elle est grosse dans l'avenir des maux
les plus déplorables pour la patrie.
Le gouvernement a fait tout ce qu'il lui
a été possible de faire.
Le clergé refuse tout concours dans l'é
ducation.
Prenons acte de ces deux propositions
qui sont le résumé de toutes les rodomon
tades ministérielles.
Si le gouvernement a fait tout ce qu'il a
pu, il doit avoir beaucoup fait, il doit avoir
obtenu de grands résultats, etcotame i.l n'y
a rien de plus populaire que l'éducation
de la jeunesse, que rien n'iqtéïesse un plus
grand nombre de familles, que rien ne
fixe plus l'attention de chacno, les avan
tages réalisés ont sans doute frappé tous
les esprits. Or qu'est-ce que le gouverne
ment a fait pour que l'enseignement laïque
fut imprégné d'un esprit religieux? en quoi
s'est-il montré convaincu que la religion
seule est la règle et la gardienne sure des
mœurs? Quels changements ce point de
vue a-t-il introduits dans les établissements
dont il revendique la dépendance et |e pa
tronage, dans les institutions qu'il inspecte,
qu'il subsidie, qu'il protège? Que ceux qui
confient leurs enfants l'éducation libé
rale, ou qui connaissent ces améliorations,
nous les signalent: car bien qu'avides d'y
applaudir, nous n'avons jusqu'ici pu en
trouver l'occasion.
Pour ne pas porter trop loin nos regards
sur l'horizon, occupons-nous de ce qui se
passe dans notre propre cité. Quel est le
bien engendré par la loi sur l'instruction
publique dans ses rapports avec le mal
heureux collège communal dont la desti
nation semble être de sucer la meilleure
substance du budget de la ville? Assuré
ment si da'ns l'organisation d'un collège
quelconque, il y a matière tailler,
émonder, extirper la vieille routine,
répandre un autre air, remanier le tout,
c'est bien dans-celui là.
Guillaume avait pour but de fondre les
deux nationalités belge et hollandaise en
une seule, non par la création d'une na
tionalité mixte, mais en absorbant l'élé
ment belge qu'il voulait effacer, dans l'é
lément hollandais qui devait seul dominer
et se perpétuer. Langue, pouvoirs, assiette
des contributions, service militaire, sys
tème monétaire et métrique, religion, tout
devait être courbé insensiblement sous ce
niveau. La même raison qui proscrivait le
français au barreau, devait introduire le
protestantisme partout sans aheurtement.
Une politique habile se bornait ériger de
petits oratoires calvinistes dans plusieurs
localités catholiques: défaut d'oser prê
cher la réforme ouvertement, on cherchait
par transition détacher les catholiques
de leur culte au moyen de l'indifférence.
On comprend quel puissant ressort prêtait
ces desseins l'éducation publique. Le rusé
despote ne l'ignorait pas, et de même qu'ail
leurs, son gouvernement s'empara du col
lège d'Ypres, en chassa les prêtres, et y
installa un enseignement soi-disant neutre,
c'est dire se bornant aux branches scien
tifiques, en laissant subsister les pratiques
religieuses, qui privées de la sève d'une
instruction graduée, devaient finir par n'ê
tre plus qu'une routine pâle et sans signi
fication. Le libéralisme hollandais fut trop
précipité dans son action, il était trop hâté
d'en finir avec ce Catholicisme qu'il pour
suivait, qu'il raillait et qu'il minait la ma
chine trop tendue dressée contre la religion
des Belges se brisa, et la révolution dissipa
de folles espérances sous l'égide de la li
berté constitutionnelle.
Cependant et là quelques ruines du ré
seau d'oppression restèrent debout. Le col
lège libéralisé d'Ypres continua entr'aulres
vivoter, et c'est avec la même organisation
surannée qu'il traîne encore son existence
aussi dommageable pour la partie de la
91)
/A
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Place, el chez les Perct-pteurs des Postes du Royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre,
Ypres fr 3. Les autres localités fr 3 Ôo. Un n« ^5.
Le Propagateur parait le SAMEDI et le MERCREDI
de ohaqiïe semaine (insertions 19 centimes la ligne).
AMÉLIORATIONS LIBÉRALES
DAKS
Une messe moins majestueuse sans doute que oelles qui sont
célébrées dans un camp et bord d'un vaisseau, au milieu de
toute l'éclatante magie des armes, c'est une messe d'hôpital.
Je me souviendrai toujours d'avoir assisté au Saiut Sacrifice
dans une salle peuplée de malades et dagonisans. A droite et
h gauche de cette spacieuse galerie étaient alignés cinquante
lits, avec leurs rideaux, draps et couvertures rivalisant de
blancheur avec la peine. Hélas auoun de ces lits n'était vide,
tant la maladie et la misère se hâtent de remplir les places qui
leur sont réservées!
Sur Chacune de ces couches était gisant un être souffrant
ou un moribond touchant au moment de ne plus souffrir; et
lorsque la petite clochette de l'enfant de chœur qui accom
pagnait le prêtre montant l'autel se fit entendre pour an
noncer que la messe commençait, je vis tous les blessés, les
malades et les convalesceus se soulever, autaut qu'ils le pou
vaient, sur leur séant, et porter leurs fronts leurs mains
piles et amaigries pour faire le signe de la oroix les moins
taibles se penchaient èn avant, et, les mains jointes, regar
daient l'autel. Entre les deux cierges allumés et au-dessus du
tabernacle, où les hosties du viatique et les saintes huiles sont
conservées pour les agonisans prêts partir pour le grand
voyage, pour le voyage sans retour, se voyait une belle statue
de la Vierge des Douleurs, assise au pied de la croix et ver
sant des larmes sur le corps ensanglanté de son divin Fils.
Quelques sainlsquelques justesque Dieu protège spécia
lement, ont plusieurs fois vu, en assistant la messe, toute
une escorte d'anges et de Séraphins prosternés autour de l'au
tel, adorant le Dieu de l'Eucharistie! Moi, indigne! je n'ai
eu aucune de ces visions; mais, cette messe, qui n'est pas
sortie de ma mémoirej'ai vu d'autres auges que* ceux du ciel
j'ai vu, pendant que le sacrifice se célébrait, marcher douce
ment et sans aucun bruit des sœurs de charité, allant d'un
lit l'autre pour savoir où il y avait porter secours. La piété
des filles de Saint-Vincent-de-Paul a beau être ardente, elle
leur laisse leur passion dominantela charité. Dans celte
demi-heure que durerait la messe, il y aurait peut-être des
souffiances plus aiguës, des poitrines plus oppressées, des fai
blesses devenues plus giaudes, des agonies plus avancées et
des derniers soupirs reudus au Dieu des vivans et des morts...
11 fallait que les sœurs de service n'iguorassent rien de cette
triste statistique, et qu'elle pussent dire au prêtre où il y avait
des par/ans. où se trouvaient les partis. Aussiaprès celte so
lennelle revue passée, elles allaient dire quelques mots l'au
mônier, qui, descendu de l'autel, se rendait tout de suite
auprès des lits indiqués par les surveillantes, et là, exerçant
son saiut ministère, il donnait celui-ci le paiu des forts;
celui-la l'onction du salut; et cet autre, la sœur voilait la
face; car, pendant que le célébrant avait demandé au Dieu
de compassiou et de miséricorde d'alléger les souffrances de
tous ceux qui étaient préseus au divin sacrifice, ce malade s'en
était allé, doucement et sans efforts, de ce monde de douleurs!
Une des ses soeurs me raconta que le jeune prêtre dont je
venais d'entendre la messe, dit avec uue grande dévotion,
avait eu, il n'y a pas lougterops, une rude épreuve, suivie
d'un grand bonheur.
Dès ses premières années, ce digne ministre du Dieu qui a
traversé le monde en faisant le bienavait reçu une éducation
sérieuse. Sa mère, délaissée de son mari, qui s'était fait marin
après avoir follement dissipé son héritage, vivait dans la soli-
tude, les regrets et la résigualion; et souvent son enfant, en
apprenant sur ses genoux maternels prier le bon Dieu et la
bonne Viergeavait senti des pleurs tomber sur son front et
sur ses petites mains jointes. Samuel n'est pas le seul enfant
qui le Seigneur ait parlé. Quand il n'y a pas trop de dissi
pation dans une famillequand ou n'y fait pas trop de bruit
il y a chance que la voix d'en haut soit entendue.
La pieuse chrétienne, qui vivait comme uue veuve, et qui
aimait mieux confier ses chagrins Dieu qu'à ses voisines,
passait chaque jour une heure l'église, et un des booheursdu
petit Stanislas était d'y aller avec elle. Saus pouvoir définir
quel attrait il y trouvait, il se sentait là mieux que partout
ailleurs; les lueurs du jour qui lui venaient, tamisées travers
les vieux vitraux lui plaisaient bien plus que la lumière crue