de députés appuyeront de leurs suffrages
la ruineuse conception du ministère. Et
cependant nous entendons d'ici les feuilles
libéralistes vanter le bout de voie ferrée
que le projet ministériel nous offre en
perspective; comme si en payant de nos
deniers les lourdes charges que les intérêts
deLiége et de Gand réclament, nous avions
la certitude de voir se réaliser l'espoir dont
on nous leurre. Qu'aurons nons donc pro
fité par l'avénemenl du libéralisme au pou
voir? disons le franchement; un nouveau
commissaire de district, fine fleur du libé
ralisme, pour l'entretien du quel le pays
compte annuellement la modeste pension
de 6,000 francs, et hors cela nous n'avons
recueilli du ministère que l'avantage de
voir grossir continuellement la quote-part
de nos charges et dépenses. C'est très avan
tageux c'est très économique, c'est très
amusant que de se voir administré par la
politique libérale!
Mercredi, 13 de ce mois, a eu lieu aux
halles la distribution des prix aux élèves
du collège communal. Peu de spectateurs
assistaient cette solennité.
Nous ne ferons pas beaucoup d'éloges
de la pièce dramatique qui l'a ouverte, et
dont le moindre défaut est d'être profon
dement ennuyeuse. Tous ceux qui ont as
sisté celte scène se demanderont avec
nous quel intérêt peuvent offrir un pu
blic Belge, en l'an de grâce 1831, les dia
tribes surannées des libéraux français de
la Restauration. On nous accordera sans
doute qu'il faut une dose peu commune
d'effronterie et de maladresse pour con
vertir un théâtre d'écoliers en tribune po
litique. Mais pour les pères, les mères de
famille, qui s'étaient fait une douce jouis
sance d'assister aux innocents succès de
leurs fils, quelle triste déception n'auront-
ils pas éprouvée, en entendant ces jeunes
gens, tout leur espoir, lancer le sarcasme,
couvrir de ridicule les principes monar
chiques et religieux? Quel douloureux
pressentiment se sera-t-il glissé en leur
cœur, et que leur reste t-il attendre et
espérer d'une maison d'éducation où,
ciel ouvert, dans une solennité publique,
en leur présence, qui plus est, dans un
siècle de dissolution sociale et de scepti-
cisme religieux, tous les principes conser
vateurs sont bafoués et voués au ridicule?
C'est un peu fort, il faut l'avouer; c'est par
trop d'audace!
M. Gorissen, professeur de rhétorique,
est ensuite monté en scène. En voyant
l'honnête prédagogue déployer ses pape
rasses, on s'attendait quelque chose qui
ressemblât un discours, et iout le monde
de bâiller l'avance. Mais, grâces lui en
soient rendus, M. Gorissen n'a pas abusé
delà patience de son auditoire; après avoir
marmoté entre les dents quelques mots
sur l'usage de la langue flamande, qui ne
parait pas jouir de ses sympathies et qu'il
n'gntend pas, croyons-nous, le digne pro
fesseur a rengainé tous ses petits papiers,
sans que personne ait pu se rendre compte
du motif qui avait fait parler l'orateur. Il
faut croire que les marques évidentes d'en
nui que trahissaient outre mesure les mâ
choires détendues de la foule qui bâillait,
auront effarouche notre homme et fait
supprimer les développements et les preu
ves l'appui de sa thèse.
Mais silence! Voici venir le gros rédac
teur en chef du Progrès. 11 ne faut pas le
voir; sa voix dénote suffisamment que c'est
là un homme de poids. Bon! le voilà en
train; et ceux de nos lecteurs qui ne l'ont
pas entendu, doivent avoir déviné que
c'est l'éloge du ministère et celui du conseil
communal, dont il fait partie, qu'il vient
nous étaler. Mais qu'importe ce qu'il dé
bite; n'avons-nous pas lu cinquante fois
toutes ces choses dans le ProgrèsC'est
une attrape que ce discours; M. Merghe-
lynck nous régale de la lecture d'un nu
méro de son journal. Oh! le voilà qui se
met frémir: il aura entrevu une tricorne!
Messieurs, dit-il peu près en ces termes,
il était temps, il était plus que temps qu'on
reslreingnit la liberté absolue de l'ensei
gnement; elle nous eût ramené aux ténè
bres du moyen âge! Ainsi, il est bien
convenu aujourd'hui que la loi nouvelle
sur l'enseignement moyen entrave la li
berté. Pourquoi a-t-il fallu cependant que
l'honorable conseiller communal entachât
de ridicule ce remarquable aveu en évo
quant le spectre fripé du moyen âge.
Disons, par forme d'acquit, que la pro
vienne faillir entre vos mains!... Ah si parmi
tous ces seigneurs il se trouvait un homme noble
et puissant pour vous prêter son appui mais,
j'ai beau porter mes yeux autour de votre trône,
je n'y vois que des ambitieux et des artisans de
clamation des jeunes lauréats a suivi cette
élucubration drolatique.
Voici les noms des élèves qui ont ob
tenus des prix au Collège communal
MM. L. Dujardin, L. Beele, L. Duha-
meeuw, F. Sursan, E. Joos, P. Vauden
Broucke, A. Iweins, H. Dewaeghenaere,
P. Liebaert, G. Liebaert, L. Vansingle, J.
Lameere,E. Iweins,C. Liebaert. H. Iweins,
E. Coffyn, F. Dethoor, G. Antonny, J. Car-
dinael, A. Lameere, G. Bits, L. Lapiere,
A. Verhille, J. Degryse, L. Comyn, A. Na-
vez, E. Vantholl, P. Dehem, A Rosoor, J.
Maurau, P. Debergh, E. Thiebault, P. Du-
pret, L. Garnier, A. Levasseur et C. Craye,
d'Ypres; MM. S. Kempen, de Hasselt; P.
Peckel, de Boesinghe; Ed. Yermeesch, de
Dickebusch; B. Vanleene, de Dickebusch;
I. Vermeirsch, d'Oslende; V. Hentel, de
Paris; Aimé Petit, de Moorslede; J. Denis,
de Roubaix; E. Nevejan, de Weslroosebeke;
A. Reynaert, de Nieuport; et C. Otto,
d'Anvers.
Une demoiselle d'une honorable famille
de cette ville vient d'être enlevée la fleur
de l'âge par une mort aussi soudaine qu'ef
frayante. Dimanche dernier, le second
dimanche de la fête communale, elle se
promenait encore et se récréait avec ses
amies: vers le soir elle s'amusait une
campagne que sa famille possède hors
des murs. Sans qu'on en ait l'entière
certitude, elle y fut piquée la lèvre par
une abeille, un frêlon, ou quelque autre
insecte. Le lendemain il s'était formé un
leger bouton qui ne fixa d'abord que très
peu l'attention,et n'empêcha point la jeune
personne de sortir, et d'aller l'église
comme d'habitude. A deux heures, la tu
meur avait pris le développement d'un
pustule carbonique, un gonflement con
sidérable se déclara rapidement. Le cou
et la poitrine prirent une teinte noirâtre.
Le frère de la jeune malade, un de nos
médecins les plus distingués, appelé la
hâte, s'empressa d'appliquer des sangsues
au contour de la bouché. La respiration
s'embarrassait, la demoiselle ne pouvait
presque plus parler, la gangrène eut ga
gné bientôt toute la tête, les derniers
sacrements lui furent administrés et
vait pas d'enfant, le reconnut dès sa naissance pour
son he'ritier.
Le mariage de la princesse Sibylle, qui devait
porter tant de fruits pour la prospérité du royaume
latin, se trouva donc de nul effet circonstance des
plus malheureuses: car le roi, atteint de la lèpre
dès son enfance, sentait sa maladie empirer, et se
trouvait de jour en jour plus incapable de gou
verner. Cependant, par un effort sublime, le roi
lépreux, comme on l'appelait, se voyant attaqué
par Saladin, qui menaçait Ascalon, retrouva assez
d'énergie pour combattre le sultan et pour rem
porter sur lui la plus éclatante victoire. Mais ce
triomphe ne fut qu'un éclair qui perça les nuages
sombres qui s'amassaient sur Jérusalem de tristes
pressentiments occupaient les esprits. Les murs de
la ville sainte tombaient de vétusté, et Baudouin,
de plus en plus malade, n'avait pas la force de se
faire obéir, et voyait, sans pouvoir y porter re
mède, des intrigants et des ambitieux profiter de
ses infirmités pour semer partout les haines, les
jalousie» et les défiances.
La princesse Sibylle voyait avec douleur ces
principes de ruine pour le royaume.
Mon pauvre frère s'écriait-elle pafois...
faut-il donc que le royaume de Jérusalem
ruinedes fils de Belial qui précipitent chaque
jour le royaume dans le gouffre sur lequel il penche.
Telles étaient les craintes et les lamentations de
la princesse Sibylle, quand parut tout coup en
Orient un homme dont on n'avait pas entendu
parler jusque alors, et dont le nom fut bientôt dans
toutes les bouches, Guy de Lusigoan. L'éclat de ses
hauts faits, sa grâce et sa beauté, jointes sa fer
meté et son courage, en faisaient un héros. Si
bylle ne tarda pas le remarquer.
«Voilà, mon frère, dit-elle comme in
spiréevoilà l'homme qui doit soutenir votre
trône chancelant... voilà celui sur lequel votre
faiblesse doit s'appuyer.
Baudouin, qui avait grande confiance dans les
avis de la sage princesse, se hâta d'attirer près de
lui Guy de Lusignan. Il jugea que Sibylle avait
dit vrai, et résolut de donner ce jeune seigneur
la régence du royaume. Mais ici se présenta un
obstacle imprévu Baudouin devait faire agréer
son choix par les principaux seigneurs; autrement
la nomination de Gui de Lusigoan la régence
n'était qu'un nouveau motif de troubles. A cet
effet, il assembla les principaux seigneurs en un
concile, et il leur communiqua son projet de por
ter ce nouveau venu la régence du royaume.
Mais aux premiers mots du roi, des murmures
s'élevèrent de toutes parts.
Voyez-vous cet aventurier qui arrive en.
Terre-Sainte et qui veut obtenir des honneurs
et des charges notre détriment, nous qui avons
combattu en Orient depuis nombre d'années
disait l'un.
D'où vient-il?... Quel est-il? demandaient
d'autres... Quels sont ses droits?»
Et tant d'autres questions toutes défavorables
Guy de Lusignan. Celui-ci, en entendant de tels
discours, se sentait indigné, et il allait provoquer
au combat singulier tel qui voudrait l'accepter,
parmi les insolents seigneurs, quand le comte de
Tripoli, Raymond, qui se trouvait là, prit la pa
role en faveur de Homfroi de Thoron, dont il était
le tuteur. Homfroi était le beau-frère du roi; car
il avait épousé Isabelle, seconde fille d'Amaury, et
par conséquent sœur de Baudouin et de Sibylle.
[Pour être continué.)