JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. 9 No 3562. 35mc année. LA SITUATION ET LE MINISTÈRE. S'il faut en croire les feuilles ministé rielles, la situation créée par le votedu Sénat repoussant le droit en ligne directe serait des plus graves, et deviendrait plus grave encore si, n'adoptant point le projet sou mis de nouveau ses délibérations, la chambre haute issue des élections du 27 septembre persistât repousser la malen contreuse loi des larmes. La situation serait compliquée et grave! mais qui la faute? Evidemment au minis tère; car c'est lui et lui seul que revient la responsabilité des périls et des embarras qui peuvent surgir. Exposons les faits. Il y a eu conflit entre les chambres; ou plutôt il y a eu conflit entre le ministère menant la majorité de la chambre en laisse et le Sénat voulant conserver son indé pendance, et sa liberté d'action dans l'exa men d'un projet d'impôt, destiné jeter la perturbation dans les familles. Malgré toutes les intrigues et la pression ministérielles, le Sénat tint bon et refusa d'adopter une fiscalité injuste, immorale, odieuse. Le ministère froissé de cette man que de complaisance laquelle les ja knik- kers de l'autre chambre l'ont si bien ha bitué, blâma hautement la conduite tenue son égard par l'assemblée sénatoriale, et prétendit, coûte que coûte, faire passer loi, le projet de M. Frère. La raison? M. Frère l'exposa lui qui, le 2 mai 1851 en pleine séance prononça les paroles sui vantes Je ne me fais pas, pour ma part, aucune illusion cet égard je ne mets pas mon amour propre nier que dans l'état IFDLI 1 aeluet des esprits le droit en ligne directe échouerait la chambre et dans tous les cas au Sénat; »peul-on le croire, ce même M. Frère, quelques mois plus tard, prétend que les choses sont changées, et que, ce qui était d'abord noir, devient blanc par le seul effet de sa volonté. A la déclaration de M. Frère se joignit celle de M. Rogier. En mai 1851 M. Rogier avait émis ces paroles Le gouvernement reconnait que l'impôt sur la ligne directe n'a pas de chances d'obtenir la sanction des chambres ni même la sanction de l'opinion publique, et voilà aussi que ce même M. Rogier devant le vote du Sénat, trouve que les chambres, le pays doivent adopter ce que de son propre aveu il reprouvai l la veille. C'est donc parce qu'ils changèrent d'avis, que MM. Rogier et Frère voulurent faire accroire que le Sépat et le pays en tier furent changés de même. Le Sénat fut dissous, et le pays consulté. On sait le résultat de l'opération du 27 septembre. 50,584 électeurs se présentè rent au vote. Sur ce nombre 28,842 accor dèrent leurs suffrages aux adversaires de l'impôt; 21,324 seulement donnèrent leur appui au ministère. Il résulte donc de cette statistique empruntée au Moniteur, qu'une majorité de 7,518 électeurs s'est déclarée antipathique au projet du cabinet. Quelle est la signification de ce vole ren voyant au Sénat 30 adversaires de Vimpôt des larmes. Evidemment c'est que le pays condamne cette loi spoliatrice comme le Sénat l'a condamnée, comme la chambre pendant trois années elle-même l'a con damnée; c'est que MM. Rogier et Frère ont dit vrai quand ils déclarèrent, que dans l'état actuel des esprits, le droit sur les successions en ligne directe n'avait point la sanction de l'opinion publique. En face de ce résultat, pourquoi le ca binet ne retire-t-il pas sa loi fatale; et pourquoi en présence d'un Sénat qui est l'expression fidèle du pays hostile cette mesure spoliatrice persiste-t-il faire ap prouver son projet condamné'par lescon- irihuables. Nous ne pouvons nous rendre compte de cette conduite persistante et obstinée. Toutefois, nous laissons au mi nistère la responsabilité de son entêtement et de ses prétentions aveugles, intimement convaincus que le Sénat ne se laissera point intimider par la résistance de l'a- mour-propre ministériel et qu'il repous sera la loi des larmes comme le pays l'a repoussé lui-même. Dimanche IG novembre midi a eu lieu la remise des insignes de chevalier de la Légion d'Honneur, décernés par le Pré sident de la République Française notre concitoyen M. François Mieroo, officier .au corps des Sapeurs Pompiers pour services militaires rendus sous l'Empire. Le mau vais temps n'a point permis que cette cérémonie se fît sur la Grand' Place. C'est sur les halles que le corps des Pompiers, et la Société des anciens Frères d'Armes, se sont réunis pour recevoir le nouveau légionnaire. Un grand nombre d'amis de M. Mieroo, par leur assistance sont venus prouver combien ils s'ascocient la glo rieuse marque d'estime que le Chef de la République lui accorde. C'est M. le général major Mollzherger, président de la Société des Frères d'Armes qui a bien voulu atta cher la croix sur la noble poitrine de son compagnon d'armes. Vieux débris de ces immortelles, de ces invincibles phalanges qui firent trembler toute l'Europe, M. Mieroo peut porter ses insignes avec une juste et légitime fierté. Par la prodigalité extrême avec laquelle on les décerne de nos jours, les croix d'honneur ont perdu une grande partie de leur prestige et de leur mérite. Les insignes dont vient d'être revêtu notre cher conci toyen, nous en faisons la demande, ne sont ils pas autrement brillants que ceux qu'on accorde soit pour l'exhibition de navets et de carottes, soit pour services politiques rendus au ministère, témoin la décoration de M. De Langhe? Récompense dislinclive d'actes de bravoure, et de courage mili- VÉRITÉ ET JUSTICE. On s'abonne Ypresrue de Lille, io, près la Grande Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume. PRIX DR LMROlWRnKIT, par trlmefrtre, Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Uu n° 25 c. Le Propagateur paraît le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine. insertions 19 centimes la ligne. 7??.SS. 19 Novembre. FEUILLETON. (Suite) iii. Il était deux heures du matin neuf officiers se présentèrent devant la tente du général, et furent introduits ils composaient le conseil de guerre qui allait juger Victor. Quelques soldats du régiment le l'accusé furent appelés en témoignage, et tous ■e chargèrent en rappelant ses larmes fréquentes, qu'ils attribuaient la peur. D'après ces rapports, le conscrit était déj'a a moitié condamné cependaut le général demanda s'il y avait des témoins en sa faveur. Un seul s'est présenté, répondit un officier. Qu'il entre, ordonna le général. Le sergent Raymond parut devant le conseil, Qu'avez-votis a dire en faveur de l'accusé? lui demanda t-on. Pardon, excuse, mon général, répondit Raymond, troublé par l'émotion, je u'ai rien b dire; seulement je suis sûr que Victor n'a pas abandonné son poste par lâcheté, comme on le dit. Si c'avait été un poltron, il ne serait pas allé se mettre devant les prunes autrichiennes... que sa capote en est criblée... il ne serait pas revenu de lui-tnétne. Faut qu'il y ait quelque autre chose, et je l'aurais su, si on ne m'avait pas empêché de lui parler... Voila tout ce que je peux dire... Mais ce garçon-lb n'est pas un lâche, j'en réponds, et le sergent Raymond s'y connaît. Mais on dit que vous lui avez remis uûe lettre au moment de sa faction. Oui, mon général, b preuve que j'ai couru comme un possédé pour trouver le vaguemestre. Victor était inquiet: il a laissé an pays sa mère malade... une pauvre femme qui n'a que lui, et, comme il m'avait compté la chose, j'ai voulu lui procurer des nouvelles... Voila. Tout cela ne prouve pas qu'il n'ait pas abandonné son poste... et la loi est précise. Je le sais, général, reprit Raymond, ému, je connais la loi militaire, je l'entends lire de puis assez longtemps: Abandon de son poste devant Cennemi, Mort! Le fait y est, il n'y a pas b y revenir; je veux seulement prouver que ce n'est pas par lâcheté. Je sais bien que ça ne le sauvera pas, mais au moins il ne mourra pas déshor- noré. C'est le seul service que le sergent Raymond puisse lui rendre. Général, dit un des officiers, voici la lettre qui a été prise entre les mains de l'accusé, au moment de son arrestation. C'est bien, Monsieur, reprit le général, qu'on fasse venir l'accusé proipptetneut uu

HISTORISCHE KRANTEN

Le Propagateur (1818-1871) | 1851 | | pagina 1