JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. 9 Mo 3566 35111e année. Il y a déjà quelque temps qu'un journal de province résumait en ces mots la situa tion diplomatique faite au pays par le ca binet du 12 août: «Toutes nos relations diplomatiques sont en ce moment dans le plus grand désarroi. On sait avec quel peu de ménagement le cabinet hollandais vient de nous traiter dans la question de la monnaie d'or; notre contrat avec le Zollverein est dénoncé, et c'est un coup mortel pour notre industrie métallurgique; la France est sur le point d'accorder la libre entrée des houilles l'Angleterre, et le ministère, si l'on en juge par le silence que gardent ses journaux sur celte question, 11e parait nullement s'occuper d'un événement qui causerait la ruine de nos bassins houillers. Notre politique est suspecte Rome, Vienne, voire même Berlin et Paris où les hommes qui dirigent aujourd'hui les affaires ne se gênent pas pour la juger avec sévérité. Bref, nous sommes menacés d'être complètement isolés d'ici quelque temps, et le ministère n'a pas l'air de s'en émouvoir. Depuis l'époque où le Journal de Char- leroy s'exprimait de la sorte, la situation s'est-elle améliorée? Non certes, et pour ne parler que des faits les plus récents, deux traités commerciaux conclus l'un avec la Hollande, l'autre avec l'Angleterre sont venus répandre l'alarme parmi nos popu- l'école d'quiitingtoi. lalions tant urbaines que rurales. Celui-ci menace nos salines d'un chômage forcé; celui-là sacrifie aux exigences de nos voi sins du nord notre marine marchande, en même temps que l'élève du bétail, celte féconde ressource pour l'agriculture. La situation est donc des plus graves. Si jamais notre ruine agricole se consomme c'en est fait de notre prospérité publique et privée. Une fois cette puissante artère de la fortune publique retranchée; c'en est fait de la propriété foncière et du bien- être de trois millions d'agriculteurs. 11 faut bien le reconnaître, cet honnête M. d'Hoffschmilh convient ravir au dé partement des affaires étrangères; en ce sens, au moins,qu'il entend beaucoup mieux les affaires d'autrui que nos propres af faires. Mais les chambres sanctionneront-elles ces actes diplomatiques? Se laisseront-elles fasciner par le fantôme usé du clérical, qui, jusqu'ici a fait merveille, lorsque nos in térêts moreaux seuls se trouvaient en jeu? Nous aimons en douter. Tout récemment encore la chambre des représentants vient de poser un acte qui lui fait honneur. Voici quelle occasion. Un représentant, M. Coomans, celui là même que son zèle défendre les intérêts de l'agriculture, son dévouement sans bor nes la cause de l'ordre social et les in jures des folliculaires du parti tartuffe, dit libéral, ont signalé depuis longtemps au respect de tous les honnêtes gens, M. Coo mans disons-nous,ademandél'extension du libre-écliange l'industrie urbaine. Ami du système protecteur, l'honorable représen tant de Turnhout est convaincu que l'ap plication exclusive du libre-échange serait bien moins nuisible l'industrie en général, que le système borgue actuellement en vi- gueur, et qui consiste abandonner l'agri culture la concurrence étrangère tout en couvrant d'autres articles de droits prohi bitifs. Voyant donc les partisans du système protectionniste réduits l'impuissance, il a fait appel tout la fois aux défenseurs des intérêts agricoles et ceux du libre- échange, en proposant l'extension de ce dernier système toutes les branches de l'industrieBelge. Les premiers ont repondu son appel et ont voté la prise en consi dération; parmi les seconds, au contraire, cinq seulement ont eu le courage de leur opinion; le reste a repoussé la proposition- Coomans ou n'a osé se montrer. En défi nitive, malgré l'opposition du cabinet, qui a renié ses principes et ses promesses, la prise en considération a réuni la majorité des suffrages et donnera lieu une des discussions les plus intéressantes que nos annales parlementaires puissent avoir enrégistrer. Nous en avons l'intime con viction, le jour est proche où tous ces fas tueux free-lraders, ignominieusement dé pouillés de leur masque de théâtre par la main du courageux député de Turnhout,se verront publiquement reconnus pour des phraseurs sans convictions et en définitive pour des prohibilionnistes de la pire espèce. Coutelle, cabarelier et charpentier, de vait de très bon matin partir pour son ou vrage. Sa fille crut se lever 4 h. du matin, quand il n'était que 2 h. de la nuit, elle ouvrit le cabaret. A ce moment un individu du voisinage était entrain de se battre avec sa mère. Celle-ci avait pris la fuite. Le fils dénaturé la poursuivit, crut l'apercevoir dans le vestibule de Coutelle frappa avec un couteau, et atteignit la fille Coutelle, qui eut la main percée. Le coupable a été de suite mis èn lieu sûr. VÉRITÉ ET JUSTICE. On s'abonne Yprès, rue de Lille, 10, près la Grande Place, et chei les Percepteurs des Postes du Royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre, Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c. Le Propagateur païaît le SAMEDI et le MERCREDI de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne.) TP^SS, 3 Décembre. (l 614.) (Huile.) Fais-les jouer Kat... voilà la seule parole sensée que vous ayez dite; et si, au lieu de vous emporter en discours superflus, vous aviez com mencé par me dire ce fameux Fais-les jouer je vous aurais répondu que celle-là était sur le point de l'être... Kat, croyez-moi... j'ai enfin trouvé un moyen de me faire jouer... ce que je cherchais de puis vingt ans et c'était une surprise que je vous ménageais... pour votre naissance. Que dis-tu là Oui, Kat... oui, je dis la vérité... et vous verrez quç... Vous avez trouvé des acteurs, mon ami demanda mistress Beard adoucie tout coup. J'en ai trouvé... ma chère Kat... et qui fe ront valoir ma tragédie, je l'espère... un chef- d'œuvre, tnon trésor et quel titre Le combat de la langue et des cinq sens... une allégorie... Que ce soit ce que ça voudra... mais que ça rapporte de l'argent, voilà tout ce que je de mande... Vous sortez de la question, Kat... nous par- Ions de la faire jouer dans ce moment. L'un n'est-il pas la couséqueoce de l'antre Nous verrons... nous verrons... Et mainte- tenant je vais ouvrir mes écoliers; retouruez aux soins du ménage, Ketty, et félicitez-vous du bon heur dont le Ciel vous a gratifiée en vous donnant un époux poète... lequel a enfin trouvé le moyen de se faire jouer. Ce disant, il se dirigea gravement vers la porte, tandis que Kat regagnait la cuisine en bâtissant déjà de grandes espérances sur le produit de la tragédie. Il ne veut pas s'expliquer, pensait- elle; mais il en a trop dit pour que je ne devine pas il est arrivé des comédiens dans le pays, et il s'est arrangé avec eux... Enfin Ces douces espérances ramenèrent la sérénité sur ses traits, et tout le jour mistress Beard fut d'une humeur charmante. Cepeudant les acteurs qu'avait trouvés maître Beard n'étaient autres que ses écoliers. Depuis vingt ans le pauvre maître d'école cherchait dans sa tête le moyen de voir enfiu ses œuvres représentées, et la nuit précédente, en consultant sa pensée sur ce chapitre, il avait trouvé ce sublime expédient de faire apprendre les rôles ses élèves, et de leur faire jouer son cbef- d'œuvre. Avant de se livrer aux clameurs de la scène, il y mettait la dernière main pendaut que les enfants frappaient la porte, et au moment où mistress Beard était venue si mal propos le dé ranger. A vos places cria-t-il dès que les écoliers furent entrés; puis, quand on eut obéi cet ordre, il monta les quelques marches de son estrade, et commença le discours suivant Chers écoliers... vous savez si je m'occupe de votre instruction... si je mets tous mes soins vous former l'esprit et le cœur... Les leçons, les avis, les coups de férule et même les coups de pied ne vous ont jamais manqué chez moi... et j'ai toujours agi envers vous de la façon la plus paternelle. Ici maître Beard s'interrompit pour envoyer un avertissement sur l'oreille d'un petit bambin qui ue prêtait pas une assez grande attention ses pa roles, puis l'orateur reprit le fil de son discours. Je le répète, écoliers qui m'êtes bien chers, j'ai tout fait pour mériter la confiance dont vos parents ont bien voulu m'honorer, et vous pouvez leur dire (je vous y engage même) qu'à vingt mil les la ronde on ne trouverait pas un professeur plus savant, plus soigneux, plus... enfin, toutes les qualités qui vous passeront par la tête... car je vais aujourd'hui même vous douuer une preuve de ma sollicitude...

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Le Propagateur (1818-1871) | 1851 | | pagina 1