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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
35? 1.
Samedi, 20 Décembre 1851.
35me
annee.
F Ri S S, 20 Décembre.
Le Receveur des contri
butions directes prie les con
tribuables qui sont en retard
de payer les termes échus, de vouloir bien
les acquitter dans la huitaine, faute de
quoi il se verrait regret dans la nécessité
de leur occasionner des frais de poursuites.
Le système financier du ministère, con
sistant remplacer les droits d'entrée per
çus sur les importations étrangères par des
impôts puisés dans la bourse des contri
buables, se maintient toujours tant bien
que mal, grâce la majorité docile qui le
soutient devant la Chambre.
Mais il est clair et reconnu qu'il dégoûte
et fatigue en secret ses plus fidèles adhé
rents. A l'avènement du cabinet' Rogier-
Frère l'esprit public surexité par les atta
ques incessantes dont la politique modérée
s'était vu si longtemps l'objet; ébloui et
fasciné j>ar les promesses hyperboliques
que formulaient le ministère et ses or
ganes; l'esprit public se laissa aller aux
plus chimériques espérances de bien-être
moral et matériel.
Jusques là on avait cru que nos fabri
ques ne pouvant lutter avec avantage con
tre l'industrieanglaise, que l'élève du bétail
n'étant pas chez nous aussi perfectionné
que chez nos voisins du nord, que nos
grains ne pouvant soutenir la concurrence
avec les grains russes, il fallait mettre ces
importantes branches de la fortune pu
blique l'abri de droits protecteurs. Nos
ministériels ne furent pas de cet avis;
leur sens, il fallait abandonner l'industrie
urbaine et rurale ses propres forces, afin
de la contraindre déployer toutes ses
ressources, sous l'aiguillon stimulant de
la concurrence. Toutefois en empiriques
sensés et prudents, nos hommes d'état
eqrent soin d'appliquer ce beau système
qui devait enrichir tout le monde ceux-là
seuls qui n'avaient que leurs plus médio
cres sympathies, c'est dire aux popula-
tionsagricoles,genlerélrogradeetcléricale,
commeon sait. L'industrie urbaine,au con
traire, et avec elle MM. les fabricants, dont
la plupart sont dévoués au cabinet, conti
nuèrent dormir tranquilles dans le bour
bier monacal du système des droits pro
tecteurs.
Qu'arriva-t-il? Il arriva ce que nous
voyons tous les jours. Nos campagnards
vendent leurs grains vil prix et ne peu
vent, faute d'acheteurs, vider leurs étables.
Au contraire nos fabricants, si l'on a égard
la perturbation commerciale qu'enlrai-
nenl toujours les perturbations politiques,
nos fabricants font leurs affaires le mieux
possible; en attendant toutefois que le pau
périsme des campagnes réagisse fatale
ment sur le bien-être de la cité.
Il faut bien en convenir, maintenant
que quatre années d'expérience ont parlé,
le libre-échange n'est pas une si heureuse
invention, puisqu'il n'enfante que la ruine.
Cependant la politique nouvelle ne songe
pas en démordre. Le nouveau traité avec
la Hollande, en consacrant la libre impor
tation du bétail agrave encore et consomme
le système ministériel si fatal l'agricul
ture. il sacrifie également aux exigences
de nos voisins du nord notre marine mar
chande et reserre toutes ses faveurs pour
les intérêts liégeois, autour desquels pivote
la Belgique entière depuis l'avènement du
cabinet de Meuse et Moselle.
Un autre traité commercial conclu avec
l'Angleterre, en accordant la libre impor
tation du sel minéral, sacrifie nos saune-
ries et ébranle la fortune de 450 industriels,
qui leur tour procurenldesmoyensd'exis-
tence autant de familles d'ouvriers.
Ajoutons ici qu'en rabaissant sans cesse
les droits d'importation perçusià la douane,
le ministère abandonne, dan&jun moment
de pénurie financière et au profit de l'é
tranger, une précieuse ressource laquelle
il se voit déjà contraint de suppléer en éta
blissant des impôts aussi onéreux qu'im
populaires.
Mais, nous l'avons déjà dit, ses adhérents
même se dégoûtent de ses innovations.
C'est ainsi que la chambre de commerce
d'Anvers vient de réprouver avec énergie
la politique commerciale du cabinet dans
une pétition où le rejet du traité hollando-
belge se trouve nettement formulé. C'est
ainsi, qu'un grand nombre d'amis du ca
binet, ont voté au Sénat contre l'impôt sur
les successions. C'est ainsi, qu'à la Cham
bre des représentants, la section centrale
a par deux fois rejetté celte charge anti
pathique la nation, et que le traité hol-
lando-belge ne s'est pas vu mieux accueilli.
Jusqu'ici cependant M. Frère a triomphé,
au moment du vole, des répugnauces les
plus manifestes, mais ces répugnances, tou
jours froissées, toujours méconnues, que
jusqu'ici la pression ministériellea réduites
au silence, pourraient bien un jour réagir
contre ceux qui les oui imprudemment
amoncelées.
Cependant l'impôt sur la ligne directe
se trouve définitivement converti en loi;
les successsions de moins de 1000 fr. seules
en sont exemptes; et un amendement de
M. Coomans tendant porter ce chiffre
3500 fr. n'a pas été adopté. A celle occa
sion M. Frère a déclaré (il est bon d'en
faire la remarque) que l'impôt serait im
productif s'il n'atteignait que les familles
aisées. Ainsi, il est bien convenu mainte
nant que les feuilles ministérielles en ont
indignement imposé en soutenant, au mo
ment des élections, que celte charge odieuse
retomberait entièrement sur les riches et
qu'ainsi le vote du Sénat ne pouvait être
dicté que par l'intérêt personnel. Le fait
est qu'un honnête artisan possédant pour
une valeur immobilière de 1000 fr. se
trouve passible de l'impôt, tandis que le
financier millionnaire, dont la fortune est
toute en portefeuille, n'a rien démêler
avec le fisc.
Nous terminerons ici ces quelques aper
çus sur la gestion de nos intérêts matériels.
Il nous serait facile, en les complétant,
d'établir jusqu'à quel point la science éco
nomique du cabinet se trouve marquée au
coin de l'inexpérience et de la présomp
tion. Dans un proehain n° nous nous pro
posons d'examiner brièvement si les inté
rêts de la morale sont mieux compris et
mieux sauvegardés par les hommes d'état
de la politique nouvelle.
CITATIONS EN JUSTICE DE PAIX.
MM. les Juges de paix ont l'habitude de
retenir et de classer parmi leurs archives
les originaux des citations civiles de con
ciliation et de compétence qui sont faites
devant eux. Nous croyons qu'ils n'en ont
pas le droit, et qu'il serait juste que cet
usage abusif cessât, c'est-à-dire, que le ju
gement prononcé, les pièces du procès,
notamment les citations fussent remises
aux parties qui les ont requises.
Sans doute la partie qui cite son adver
saire doitpresenlerau juge la citation pour
que celui-ci prenne connaissance de l'objet
en contestation. Durant tout le cours du
litige, pas le moindre doute que le juge
n'ait besoin de rester nanti des pièces,
surtout après avoir entendu les moyens
respectifs, pour former sa conviction, ré
diger et motiver sa décision. Mais une fois
le jugement prononcé, le tribunal est des
saisi, et moins d'ordre formel et excep
tionnel de la loi, les pièces reviennent
qui elles appartiennent. Or, les citations
appartiennent ceux qui les ont requises
et payées, et non la justice de paix ni
au greffier. Souvent un greffier demeure
distance: après le laps d'une année, les
archives sont déposées l'Hôlel-de-ville, et
delà résullequ'au bout d'uncertaintemps,
les parties qui ont besoin de leurs exploits
ne les obtiennent que difficilement, après
une longue attente, de nombreuses cour
ses, seulement en communication et com
me par grâce. Des juges de paix ne tien
nent pas ces prétendues archives, ils ne
sont pas en grand nombre, mais les meil
leures raisons sont certainement de leur
côté. Nul ne peut être privé de sa propriété
que pour une nécessité publique avec in
demnité préalable. Personne ne paie une
indemnité aux plaideurs privés de leurs
pièces, aucune utilité publique ne justifie
cette disparition de leurs mains. Les cita
tions dormant au dépôt de l'Hôlel-de-ville
y sont d'une complète inutilité. Cependant
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonne jà Ypres, rue de Lille, io, près la Grande
Place, et clier les Percepteurs des Postes du Royaume.
l'HIV DE E'AIIOVVEMENT, par trimestre,
res fr. 3. Lys autres localités fr. 3-5o. Un n° 25 c.
Le Propagateur païaît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaitië. (Insertions M 9 centimes la ligne.)
DES