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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 3636 ET 3637.
Samedi, 7 Août 1852.
36me
annee.
7PB.ES, 7 Août.
DE LA CRISE MINISTÉRIELLE
La crise ministérielle n'a pas encore
reçu une solution définitive.
Le cabinet de M. Frère se reïire devant
la solennelle condamnation infligée sa
politique par le corps électoral, niais sur
tout dévanl les inextricables difficultés que
durant cinq années de pouvoir il s'est plu
soulever par ses imprudentes innovations
et par ses agressions systématiques contre
le catholicisme. Nous nous proposons de
revenir prochainement sur ces derniers
points.
Cependant on se demande comment le
libéralisme qui se trouve encore en majo
rité la Chambre ne parvient pas re
constituer uu ministère, tout en faisant
quelques concessions réelles l'opinion
publique. A nos yeux l'impossibilité, où se
trouve le libéralisme de se reconstituer au
pouvoir, se rattache une double cause;
elle git d'abord en ce que le parti libéral,
malgré sa force numérique au parlement,
compte bien peu de personnages politiques
en son sein, et n'est riche qu'en médiocri
tés eh tout genre, avocats et demi-savants
surtout. Cela se conçoit du reste, si l'on
observe qu'aucun système politique n'est
plus propre que le libéralisme satisfaire
la vanité indocile et pédantesque des uns
et des autres, lui qui enseigne battre en
brèche les vérités les plus généralement
reçues et mettre en pratique, contre vent
et marée, des innovations aussi dangereu
ses que saugrenues. Voilà ce qui explique
comment il s'est étendu si avant parmi la
classe demi-savante, et comment tant d'in
dividus d'une nullité complète se croient
des hommes de conséquence s'ils se trou
vent affublés du titre fastueux et menteur
de libéral. Mais les véritables politiques,
hommes pratiques entre tous, savent
quoi s'en tenir sur l'élasticité et le néant
des doctrines libéralistes; ils savent qu'il
est ridicule de prétendre gouverner un
peuple en-dehors des principes conserva
teurs; ils n'ignorent pas qu'en dissolvant
tous les liens de l'ordre politique, attri
buant la volonté essentiellement incon
stante et peu sage du peuple la pleine
faculté de tout intervertir et de tout chanr
ger sa guise, le libéralisme a frayé la
route aux cataclysmes révolutionnaires
dont nous fûmes témoins et tous les dé
sordres sociaux qui nous menacent.
Nous avions dit quelle pierre d'achoppe
ment s'oppose en premier lieu la consti
tution d'un nouveau cabinet dans le sens
du libéralisme. 11 en est une seconde plus
importante encore. Elle consiste dans l'ac
tion prépondérante des loges maçonniques
sur le libéralisme tout entier. A ce sujet
de curieuses et importantes révélations
ont été fournies par le Journal de Bruxelles
durant ces derniers mois. A l'aide de piè
ces émanant des loges et d'une incontes
table authenticité, cette feuille démontre
et constate qu'une vaste et ténébreuse as
sociation enserre l'Occident tout entier et
nommément la Belgique dans son réseau
infernal. Quelques hommes la dominent;
leur plan tracé d'avance, c'est la ruine du
trône et de l'autel sous eux se classent les
grades inférieurs de franc-maçons; geute
moutonnière dont la grande masse ignore
le premier mot du rôle qu'on lui fait jouer,
mais que la contrainte morale du respect
humain enchaine et fascine, et qui en
conséquence travaille soit amener de
nouvelles recrues aux loges ou aux clubs,
soit influencer le corps électoral et leurs
amis en particulier au jour des élections,
tout en ne comprenant rien eux-mêmes
aux questions importantes qu'elles sont
appelés résoudre.
Mais parmi ces révélations importantes
de la feuille Bruxelloise, il en est une qui
se rattache en particulier la question qui
nous occupe; elle a trait certaine réha
bilitation. maçonnique ou libérale, laquelle
s'est vu assujetti M. Van de W'eyer, après
la chute imprévue du ministère où il était
entré en 1845 conjointement avec MM.
Malou, d'Anethan et Dechamps. On voit
en effet par cet exemple quelles traverses
et quelles inimitiés s'expose tout libéral
qui ne craint pas de s'affranchir de l'igno
minieuse tutelle des loges et des clubs
qu'elles dirigent. Aujourd'hui la franc-
maçonnerie consentirait-elle ce que des
notabilités du libéralisme (presque tous
adeptes avoués ou secrets des loges) se
prètassentà unecomhiuaison ministérielle,
qui n'eût pas pour mission de combattre
en tout et partout les principes conserva
teurs? Non sans doute;car si nos soi-disant
libéraux sont hommes se contenter d'un
porte-feuille de ministre; la maçonnerie
vise plus haut et plus loin; la guerre qu'elle
a déclarée au sceptre et la tiare, est une
guerre outrance; et celte guerre est son
aliment de chaque jour; celle guerre est sa
raison d'être. La maçonnerie ne saurait
donc rien concéder au principe conserva
teur, sans signer sa propre abdication, et
c'est là surtout ce qui explique la position
agressive où le libéralisme se maintient
dans sa défaite comme au jour de sa puis
sance; le libéralisme netaut, comme nous
l'avons constaté plus haut, que l'instrument
servi le des loges maçonniques. Or, ce ser
vage sans dignité, qui au-dessus des pou
voirs constitués place un pouvoir rival et
ennemi, et qui enlève au libéralisme jus
qu'à la faculté de satisfaire aux exigences
de l'opinion publique, est bien propre
rendre désormais problématique non seu
lement l'avenir, mais la possibilité même
d'un cabinet libéraliste.
Nos concitoyens n'ont pas oublié sans
doute les deux prêtres GénèVois, qui dans
le courant de l'année sont venus faire ap
pel leur bienfaisance en faveur d'une
église dont l'accroissement du catholicisme
Genève exigeait l'érection. De leur côté
ces respectables ecclésiastiques, MM. Cail
lai et Gignoux, conservent de leur séjour
dans nos murs des souvenirs aussi doux
qu'inaltérables. Une lettre, que ce dernier
nous adresse, en fait foi; elle témoigne vi
vement de leur profonde reconnaissance
et rappelle avec une cordiale effusion le
souvenir de l'excellent accueil que les bons
habitants d'Ypres firent aux représentants
et aux pasteurs de leur frère de Gehêve.
Cependant la pieuse entreprise, laquelle
ils ont coopéré si généreusement, est en
voie de se réaliser; déjà sont jetés les fon
dements de la nouvelle église, et bientôt
sur cette terre berceau du calvinisme s'é-
lévera un monument religieux digne du
monde catholique, qui l'aura édifié de ses
largesses charitables afin de subvenir aux
besoins nouveaux que développe de plus
en plus la régénération religieuse dont Ge
nève en particulier est le théâtre.
Dimanche, 1" du mois, la procession
annuelle de la Tuindaga parcouru son itiné
raire accoutumé. Un temps magnifique l'a
constamment favorisée. Sortie neuf heu
res du matin de l'ancienne cathédrale de
Saint-Martin,elle n'est rentrée que vers les
onze heures et demie.
Depuis nombre d'années celle belle so
lennité religieuse ne se fil avec tant de
pompe et de décor. On remarquait parti
culièrement dans le cortège l'image de
ISotre-Dame de Tuin, patronne de la cité,
que surmontait uu antique baldaquin,
nouvellement restauré par les soins et le
zèle du digne prévôt de Notre-Dame, vi
caire de Saint-Martin.
Les amis des beaux-arts et ceux de la
Religion sauront également gré M. l'abbé
Bossaert d'avoir par son intelligente ini
tiative rendu au culte et sa première
splendeurcetle pièce artistique en laquelle
l'élégance de la forme égale le fini du tra
vail, et qui depuis longtemps gisait oubliée
dans la poussière d'une sacristie.
Au-devant et autour de l'image de la
Vierge marchait uné troupe nombreuse
de jeunes enfants aux costumes gracieux
et variés, les uns portant des emblèmes
religieux; les autres représentant des per
sonnages de l'histoire sacrée ou quelques
figures allégoriques.
Durant la marche de la procession la
musique du corps des sapeurs-pompiers
et celle de l'école des orphelins se faisaient
entendre tour tour, alternant avec les
hymnes liturgiques des choristes. Deux
compagnies de la garde civique, les sa-
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