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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Ko 3658.
Mercredi, 20 Octobre 1852.
a=
30me année.
Au milieu de l'immense décomposition
sociale et politique laquelle a présidé
partout le libéralisme en Europe, chaque
nation se prend appeler de tous ses vœux,
un pouvoir fort et respecté qui sache pré
server la société de sa ruine et la sauver
des théories révolutionnaires auxquelles
elle est exposée. Doués d'un caractère es
sentiellement calme et tranquille, plus que
tout autre peuple, les Belges se lassaient
d'avoir combattre un ennemi intérieur
et manifestaient depuis longtemps le désir,
de voir changer un état des choses diamé
tralement opposé aux volontés publiques.
Sans sortirdecetteréserveetdececalme
qu'admire en elle l'histoire, notre patrie
vient d'accomplir la révolution vers la
quelle elle soupirait pour son bonheur et
sa gloire.
Telle est, on ne peut le méconnaître la
signification du vote du 27 septembre,
la Chambre des Représentants, que, do
rénavant la Belgique ne doive plus gémir
sous le joug infâme d'un parti, qui semble
avoir abdiqué toulsentimentdenationalité,
de raison et de justice; et que par la suite,
les contribuables Belges prétendent être ad
ministrés par des ministres portant comme
eux un nom et un cœur communs.
Qu'était-ce en vérité que celte faction té
nébreuse et turbulente dont Rogier Frère
et Tesch subissaient le valelage et dont ils
servaient les folles ambitions? Qu'était-ce,
sinon des écrivains gages, des patriotes
sans patrie,des républicains, des socialistes
ennemis de la Royauté, des franc-maçons,
des révolutionnaires de toute sorte? Voilà
les éléments, voilà les membres de cette
coalition monstrueuse dont l'aventurier
Rogier, le clérophobe Frère et le cynique
Verhaegen étaient les dignes chefs.
Cinq années sont venues s'écouler sous
l'administration de ces politiques d'espèce
nouvelle et voyez quel triste héritage ils
nous ont légué.
Sans porter atteinte la moindre de nos
libertés, sans cesser un seul instant de
donner les preuves les plus irrécusables
de patriotisme et de dévouement, l'opinion
conservatrice, géra pendant 17 années les
affaires. A l'époque de sa retraite, pouvoir,
libertés, droits constitutionnels tout était
respecté et debout, comme l'a observé M.
Jules Malou, en quittant le ministère.
Et maintenant, qu'on nous dise, où en
est ce même pouvoir, avili par les passions
et le souffle des intrigues politiques? où en
est l'administration publique languissant
dégradée par la dilapidation? où en sont
notamment nos libertés, et parmi celles-ci
la liberté de l'enseignement, et la liberté
de faire l'aumône? l'Une et l'autre ne se
raient-elles pas effacées de notre Code
Constitutionnel, si on était parvenu les
déraciner du cœur des masses? Mais ce
sont surtout les droits civiques et la justice
distributive que nos libéraux ontébréchés
et combattus?
Il est de fait, la constitution, le trésor,
les faveurs gouvernementales, selon les
actes du cabinet déchu, n'existaient que
pour en faire le monopole des sectaires
des loges et des clubs inaçoniques-libérâ-
tres. Depuis l'avènement de la politique
Frère, subsides, places, décorations tout
n'a t-il été dévolu systématiquement des
hommes de parti, plutôt qu'à des hommes
de mérite? Qu'on observe le cours des
choses et bientôt l'on verra que de nos
jours, les croix de chevaliers ne s'adap
taient plus qu'aux habits de taille libérale,
et que les millions que le commerçant et
l'industriel apportent au trésor allaient en
grande partie se perdre dans les mains de
la bonne presse qui insulte la religion et
la morale, ou dans les poches de (1) ceux
qui ont eu mission de libéraliser la jeunesse
des collèges en l'élevant en dehors de Fat-
mosphère religieuse.
Tant d'abus criants, tant d'excès ne pou
vaient se commettre plus long-temps sans
soulever l'indignation publique. Le pays a
exprimé hautement son dégoût, son mépris
pour la politique des loges. Espérons que
le ministère qui succédera la politique
déchu, tiendra compte de l'arrêt du 27
septembre, et que désormais l'on respec
tera la volonté nationale. A moins qu'il ne
se conforme aux avis que le pays a donnés
par la voix de ses mandataires et que le
pouvoir qui surgira ne porte le drapeau de
1830, son existence ne sera que de peu de
durée. Ce que veulent les Belges, c'est
comme l'a dit avec tant de raison M. Tie-
lemans, un gouvernement qui se tienne
en dehors de tous les partis, dont le mot
d'ordre soit la loi, et dont le droit consiste
dire tous: respectez le pacte constitu
tionnel de l'Etat. C'est un tel gouver
nement que nous voulons, c'est un tel
gouvernement que reclame la grande ma
jorité des Belges. Et quelques soient les
hommes qui le composeront un concours
puissant lui est assuré de la part de tout
citoyen qui n'ambitionne que le bien-être
de sa patrie.
Nous apprenons avec plaisirquc M. Ange
Pattou de Brielen, ancien élève du collège
S' Vincent, récemment diplômé comme as
pirant-instituteur vient d'être appelé com
me professeur au collège de Thielt. Cette
institution communale comme celle d'Os-
tende et de Menin est sous l'éminent pa
tronage de M,r l'Évêque de Bruges.
Hier 4 heures du matin, est décédé en
son château Langemarck, l'âge de 95
ans et o mois, Messire Joseph-Charles
Vicomte DE PATIN de Langemarck, Che
valier de l'ordre de Léopold, ancien officier
supérieur au service de Sa Majesté l'Im
pératrice Marie-Thérèse, ancien chambel
lan de Sa Majesté Guillaume 1" Roi des
Pays-Bas, ancien membre de l'ordre Éques
tre et des Etats Provinciaux de la Flandre
Occidentale,et Bourgmestre de la commune
de Langemarck.
VÉRITÉ ET JUSTICE.
On s'abonue Ypres, rue de Lille, io, près la Graude
Place, et chez les Percepteurs des Postes du Royaume.
PRI1L DE I.\ABO.\'!AE.ME!iTpar trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. TJn n° a5 c.
Le Propagateur païaît le SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne.)
7FF.3S, 20 Octobre.
(i) Par suite de la nouvelle organisation de renseignement
moyen, les contribuables sont tenus payer une dépense de
fr. 4,000,000, de plus que les sommes affectées antérieure
ment renseignement public
L'Émancipation signale comme très-grave un
fait que le ministère déchu a posé dans les derniers
jours de son existence, et en effet nous ne savons
comment qualifier la balourdise de publier toutes
les pièces résumant les travaux de la grande com
mission militaire, y compris les opinions émises
dans le comité de défense du pays. C'est là une
chose inouïe, contraire tous les errements gou
vernementaux. Il y a, dans la législation de tous
les peuples, des pénalités graves prononcées contre
ceux qui livrent l'étranger les secrets de la dé
fense du pays; notre code pénal (art. 77, 78 et 81)
n'est pas muet sous ce rapport mais le législateur
n'a pas prévu ni dû prévoir qu'un gouvernement
serait assez malavisé pour livrer l'étranger tous
les secrets, tous les points vulnérables de notre
territoire. C'est cependant la faute irréparable
que le ministère déchu a commise et que Éman
cipation flétrit avec raison dans les termes suivants:
Nous avons parcouru ces doenraents avec un
douloureux étonnement. Des mémoires très in
structifs, très-savants, mais que leurs auteurs, nos
officiers du ge'oie les plus distingués, ont dû consi
dérer comme confidentiels, signalent la valeur
stratégique de chaque point, le moyen de tourner
ou de vaincre chaque obstacle et fort en un mot,
pour toutes les hypothèses possibles, le plan d'une
invasion et de l'occupation du territoire belge. Il
n'y a pas une lacune, pas une omission on indique
avec un soin minutieux comment il faut s'y prendre
pour triompher des difficultés naturelles ou artifi
cielles, pour battre l'armée belge et s'emparer de
tout le pays. Artné de ces volumes, tout officier
conoaît aussi bien que nos généraux les plus expéri
mentés le fort et le faible de notre situation militaire.
Nous n'hésistoDs pas nn instant le déclarer,
aucun des membres de la grande commission n'a
pu croire que ces documents seraient publiés et
livrés b l'examen de toute l'Europe. Leur intelli
gence se serait révoltée, leur patriotisme se serait
indigné si on leur avait dit que ces travaux con
sciencieux et utiles, b la condition de demeurer
secrets, recevraient une publicité inutile et dange
reuse.
La pins vulgaire prudence, le plus simple in
stinct des intérêts nationaux le texte même de
nos lois pénales devaient les rassurer.
Mais la politique nouvelle, qui a tout changé en
ce monde, leur préparait un cruel mécompte. On a
trouvé boD, pour la première fois depuis qu'il
existe des gouvernements, d'éditer b un grand