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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3710.
36me année.
7FB.ES, 20 Avril.
Il est question dans l'histoire naturelle
de certain animal immonde, qui poursuivi
par les chasseurs et traqué de près par
leurs chiens, ne trouvant de chance de
salut ni dans la fuite, ni dans la résistance,
exhale une odeur si fétide que les chiens
eux-mêmes ne la pouvant endurer en sont
réduits rebrousser chemin. Tactique
bizarre dont le Progrès lient évidemment
tenter sur nous l'expérience.
Assez récemment encore nous avons en
tamé une polémique propos des actes
administratifs du Conseil Communal. Mous
le blâmâmes de n'avoir su, en temps op
portuns, réaliser des économies en vue de
dépenses que tout le monde pouvait pré
voir, et l'appui de ce reproche nous eû
mes soin d'apporter des faits palpables et
reconnus; nous énumerâmes un certain
nombre de dépenses aussi ruineuses qu'i
nutiles, et enfin le nouvel impôt de 10 p.
et les agravalions de droits l'octroi, con
séquence rigoureusementnécessairedusys-
tème en vigueu r. Des gros mots sans portée,
un tas de banales injures et l'expression
nette d'un dépit non déguisé constituèrent
en résumé la défense du Progrès: c'était
s'avouer vaincu.
Nous le pressâmes de plus près, et le
confrère, après avoir inutilement essayé
de déplacer la question et de nous attirer
ailleurs, s'est avisé, parait-il, d'entraver
notre poursuite en nous dégoûtant force
de grossierté et d'impudeur.
Renonçant par esprit de système ou plu
tôt par impuissance jamais rien prouver,
SOEUR GENEVIÈVE.
II ses articles de fonds ne forment, depuis
quelque temps surtout, qu'un amalgame
indigeste d'accusations odieuses et ridicules
envers les hommes les plus généralement
respectés, ecclésiastiques ou laïques, de
cette ville; tandis que d'un même trait de
plume il déclare mensonge, calomnie et
turpitude les faits patents et incontestables
qui le gênent et qu'il ne saurait réfuter.
Rien n'embarrasse ce fidèle sectateur de
l'aphorisme voltairien: Mentez, mentez!
il en restera toujours quelque chose. Ainsi
dit; ainsi fait; et plus le mensonge est gros
sier, invraisemblable; plus la feuille maçon
nique chante victoire enfin d'en imposer
la gente moutonnière de ses dupes habi-
tuels. Un exem pleprisentre mil lefera mieux
connaitreencore que nos paroles sa manière
lui de traiter une question quelconque:
il s'agit d'un article du Propagateur d'il y
a huit jours, où nous démontrâmes ce qu'il
y avait de choquant offrir une médaille
un personnage politique, du chef même
des fausses imputations qu'il s'était per
mises, en un moment d'effervesence po
litique, envers une fraction notable des
représentants du pays et de l'éclatant dé
saveu que la Chambre intliga son étrange
conduite.
Dans un article intitulé: la calomnie
réhabilitée, Bazile qui vil dece pain quo-
tidien, le répudie, il méprise ce qui lui
donne l'existence; bien plus, il accuse
les autres de calomnier dans un numéro,
où il est obligé d'enregistrer sa propre
turpitude, dans lequel il doit avouer qu'il
est un menteur, non de bonne foi, car
où diable la bonne foi irait-elle se ni-
cher? mais de propos délibéré, dans le
but de commettre un meurtre moral
l'endroit de personnes dont la moralité
et l'honorabilité ne peuvent être suspec-
tées que par des insulteurs aux gages du
clergé.
Débrouille qui voudra ce baragouin de
carrefour; dévine qui pourra quelles sont
ces personnes victimes d'un meurtre moral.
Mais poursuivons:
Tartufe qui accuse les autres de ca-
lomnier, c'est drôle, mais c'est ainsi; et
dans cet acte d'accusation, il commet son
péché mignon l'endroit de M. Verhaegen
qui n'a eu que le seul tort d'être un ad-
versaire persévérant et courageux de
l'oppression cléricale. M. Verhaegen a
osé dire ce que tout le monde pense, que
le haut clergé et les faiseurs du parti
clérical ont été sur le point de vendre la
Belgique la France et qu'ils sont en-
core les ennemis intimes de la Consli-
tution de 1851 et des institutions consli-
tutionnelles. Ensuite M. Verhaegen a osé
offrir une médaille M. Eugène Sue,
a l'auteur du Juif errant, qjor a si bien dé-
o crit les mœurs et intrigues des Jésuites.
C'est ainsi que l'honnête journal se perd
dans un dédale de phrases bouffies de fiel
et de rancune, et qu'à l'aide de quelques
brutales appellations il espère nous con
fondre en étourdissant les oreilles des gens
par un vain cliquetis de mots. La tactique
est ancienne chez lui, et nous en savons
quelque chose par expérience depuis nos
différents propos des prodigalités de ses
patrons et des nouvelles impositions coïn
cidant si mai avec la diminution des res
sources de l'habitant: matières épineuses
pour notre homme qui s'ingénia les cou
vrir tour tour sous des flots de récrimi
nations et sous le poids de l'oubli. Mais
nous ne sommes pas d'humeur lâcher
prise de sitôt; nous continuerons d'élever
la voix avec courage et saurons surmonter,
s'il le faut, le dégoût que nous cause sa
polémique. Nous sommes de ces gens qu'ir
rite l'insolence des fuyards et qu'exaspère
la mauvaise foi.
VÉRITÉ ET JC8TICE.
On s'abonue Vpiesrue de Lille, 10, près la Grand
Place, et cher les Percepteurs des Postes du .Royaume.
PRIX DE I/AUOAAEMEKT, par trimestre,
Ypres fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. TJu n° a5 c.
Le Propagateur paraît le (SAMEDI et le MERCREDI
de chaque semaine. (Insertions 19 centimes la ligne.)
[Suite.)
Et pourquoi supposerions-nous que la pauvreté
doit nécessairement amener commettre un crime
Pourquoi poser une espèce de réprobation et de
méfiance sur la plus touchante et la plus respectable
des misères humaines? Que restera-t-il donc au
pauvre, si nous le privons encore de son rang dans
l'humanité? Nous occupons-nous beaucoup de lui,
pour avoir le droit de prétendre si bien le con
naître? Pour le juger, il suffirait simplement de
bien savoir sa position, et de distinguer si l'indo
lence ou le malheur cause sa pauvreté; et si c'est
vraiment la maladie et la misère, nous découvri
rons en lui des sentiments et des vertus qui nous
le rendront vénérable et sacré.
Mais sœur Geneviève n'attendait pas cet examen.
Son cœur, mort h tous les autres sentiments, ne
vivant que de celui-là, l'avait rendu universel.
Vertueux et méchants, croyants et incrédules, tous
avaient droit sa charité, dès qu'ils étaient rnal-
heureux. Elle n'examinait pas si son travail était
h celui-ci distribué plus injustement qu'à celui-là.
Dès qu'elle avait une misère devaot les yeux, elle
arrivait pour la diminuer. Cela les convertira, di
sait-elle quelquefois ceux qui venaient lui dire
du mal de ceux qu'elle obligeait. Ils deviendront
meilleurs en étant plus heureux. La charité doit
être prudente, mais devant des maux réels elle ne
doit jamais examiner que le malheur 1
Un soir, une pauvre femme se présenta chez
elle, vêtue misérablement, pâle et les traits bou
leversés.
Ah! dit-elle, si vous pouviez venir tout de
suite! Ma pauvre petite fille se meurt! et je n'ai
rien lui donner pas un liard pour acheter
quelque chose!
Appelons promptement un médecin,dit sœur
Geneviève, je ne saurais me connaître sa maladie.
El de l'argent pour le payer?
Je m'en charge, dit la sœur. Courez chercher
M. Bessière; dites-lui que c'est moi qui le prie de
passer chez vous.
Et pendant ce temps-là vous pourriez peut-
être quelque chose pour mon pauvre enfaut, vous,
ma sœur
Eh bien j'y vais. Ne demeurez-vous pas ici,
près de l'église?
Oui.
Soyez tranquille; je vais aller le voir l'ins
tant. Vous me trouverez chez vous.
La pauvre mère jeta sur elle un de ces regards
de reconnaissance qui feraient faire le bien, seu
lement pour les recevoir, et disparut prompte
ment.
Sœur Geneviève se rendit auprès de la petite
malade. C'était une de ces soirées d'hiver où la
lune éclaire les glaçons et les fait briller comme
des diamants. Ici, toute la nature, souffrant une
atonie momentanée, se refuse, pour ainsi dire,
tous les besoins de la vie; c'est l'agonie du pau
vre; c'est le redoublement de ses misères et de ses
angoisses. Si Dieu rie lui avait promis un royaume
pour payer son indigence, on le croirait, dans ce
temps déplorable, atteint d'un analhême et maudit
par le Seigneur. Celte saison de nos plaisirs est
celle de son désespoir. Nous dansons, nous rions,
tout auprès de ces mansardes, où gisent tant de
souffrances oubliées! Le bruit de nos instruments
de fêtes, les robes, les fleurs, les parures dorées
s'aperçoivent du haut de ces chambres désolées