porte dans la sphère des principes. C'est bien la
pensée du catholicisme qu'elle nous fait entendre.
Remarquons, en premier lieu, avec quelle pru
dence les docteurs de Paris accueillent et envisa
gent l'ordonnance qui leur est soumise. Pour tonte
la partie des sociétés modernes qui vit indifférente
aux sentiments de l'Église ou en-dehors de ses
lois, les pauvres ne sont qu'un embarras. Pour s'en
délivrer, tons les a peu près de la bienfaisance pa
raissent excellents on les applaudit, on les met en
pratique. Ce n'est pas sous ce point de vue que nos
pères considéraient la question. Pour eux, il y
avait un libre échange auquel ils tenaient avant
tout autre, et qui leur semblait le plus ferme sup
port des lois du monde moral le libre échange de
l'aumône et de la reconnaissance. Aussi une des
premières conditions que nos théologiens mettent
leur approbation, c'est qu'aucune entrave ne sera
apportée l'exercice des œuvres de miséricorde.
Ils établissent d'abord qu'on ne peut empêcher de
mendier que celui qu'ou peut nourrir et entretenir
suffisamment. Voilà pour le droit du pauvre. Mais
le riche aussi a son droit de chrétien c'est celui
d'être pitoyable, compatissant, secourable envers
ses frères. Le souci de ce droit inviolable éveille
la sollicitude des membres de la Faculté. Ils pré
voient les inconvénients de cet amalgame d'admi
nistration et de charité. Ils ne veulent poiut que la
régularité bureaucratique étouffe les élans de la
générosité
Mais les adversaires de l'Église auront noté la
recommandation solennelle faite par les docteurs
aux magistrats d'Ypres, de prendre garde d'attenter
aux propriétés ecclésiastiques, sous prétexte de
grossir le trésor des pauvres, et ils ne manqueront
pas de railler le soin jaloux avec lequel ils protè
gent la richesse du clergé. Ils y verront matière
de belles phrases sur le dénuement évangélique,
pour lequel ils professent la plus singulière et la
plus platonique tendresse, l'ourlantles événe
ments ne nous ont pas ménagé leurs leçons. Dans
tous les^iays qui oui dépouillé l'Église, l'accrois
sement de la misère a pris des proportions déme
surées. En veillant l'intégrité des domaines du
clergé, la Sorbonne se bornait donc empêcher
qu'on ne dissipât le capital des indigents dans le
but trompeur d'augmenter leurs revenus. La li-
^i—
ne cessèrent point. Arlevelde eut pour successeur,
François Ackerman, qui marcha sur les traces de
son hardi prédécesseur. Il excita davantage le
peuple la révolte. Celui-ci continua de faire le
commerce avec la Grande-Bretagne, et de conser
ver son amitié avec le roi de cette contrée. Les
Gantois lui envoyèrent même douze plénipoten
tiaires, pour lui offrir la souverainté du pays, s'il
voulait leur prêter assistance. (1)
Toutefois, non-seulement ils ne négligèrent
rien, mais même ils ue laissèrent échapper aucune
occasion ponr attirer les Anglais en Flandre.
Sur ces entrefaites, il s'éleva un schisme dans
l'église Romaine, après la mort de Grégoire IX, et
qui dura de 1378 14:17 (2) En voici l'origine:
Clément VII venait d'être élu, par les cardinaux
Français comme successeur de Grégoire, les Ita
liens, au contraire, se choisirent pour pape Urbain
VI. Celui-ci tenait son séjour Rome, et l'autre
avait fixé sa résidence 'a Avignon. Toute la chré
tienté fut partagée d'opinion quant l'obéissance
au pape. Ainsi les Anglais et les Flamands se dé
clarèrent pour Urbain, et les Français se mirent du
côté de son antagoniste. Urbain, étant arrivé
Gênes, y excita les Anglais combattre les schis—
matiques. A cette fin il ordonna de prêcher en
Angleterre une croisade contre les Français et le
(1) Meyer, lib. l3.
(2) Fleury 380" livre.
berté des religieux mendiants rentre dans le même
ordre d'idées la sauve-garder, c est conserver, en
quelque sorte, ces titres de noblesse que Jésus-
Christ a conférés la souffrance humaine par la
simplicité de sa vie et les humiliations de sa mort.
Si le socialisme est une chimère, si l'homme n est
pas fait pour jouir, si son impuissance échapper
la douleur égale l'infini de ses aspirations vers
une existence plus parfaite, s'il y a un type de
sacrifice, d'abnégation, de courage héroïque qu il
est nécessaire de conserver sur la terre pour arrêter
les cœurs sur la pente honteuse du sinsualisme, oui,
la Faculté de Paris défendait la cause de I esprit
contre la matière, de la civilisation contre la bar
barie, par cela seul qu'elle voulait maintenir les
conditions extérieures de la puissance de l'Église et
ces institutions merveilleuses qui, si elles ne sont
pas, comme on le répète si souvent, l'essence même
'de la vérité catholique, loi sont au moins ce que
le rayounement est au foyer de la lumière.
Enfin une dernière différence sépare l'opinion
de nos pères de la nôtre sur ce point capital du
soulagement des misérables. C'est la différence
même du génie catholique et de ce philosophisme
vantard qui nous assourdit les oreilles. Celui-ci ne
procède que par des généralités pompeuses. 11
promulgue des lois auxquelles tout doit se soumet-
Ire. Il n'y a point ponr eux de passé, de temps, de
lieux, de circonstances; magisler dixit l'enfant,
l'écolier, c'est-à-dire, l'univers n'a plus qu'à
obéir. Ainsi quelques-uns s'imaginent avoir trouvé
que la charité chrétienne est une niaiseiie, une
affaire de prêtres et de bonnes femmes qu'il faut
tailler eu grand eu pareille matière que l'État seul
a besoin d'avoir des entrailles, et que c'est lui
d'instituer des préposés la bienfaisancecomme
il a des préposés aux boues de ses cités. Aussitôt,
cette trouvaille selon Aa formule est proclamée
grand principe.
Ce n'était pas là les allures de la sagesse de nos
anciens. Elle ue prenait pas feu aussi rapidement
pour les conceptions individuelles si excellentes
qu'elle les reconnût. Autant elle affirmait haute
ment et les lois divines et les lois de la nature hu
maine, autant elle était sagace saisir les rapports
contingents descauseset leur laisser leur caractère
variable et passager. Aussi la vieille Sorbonne,
pape Clément, et, pour appuyer cette entreprise,
dit de Fleury Urbain ordonna de lever un
impôt d'un dixième sur toutes les Églises d'An
gleterre. La Grande-Bretagne procura aussitôt des
moyens suffisants pour faire réussir cette entreprise.
Les Flamands profitèrent d'une occasion aussi
favorable pour engager les Anglais descendre en
Flandre, quoique Richard II, eut promis Louis
de Mâledenepoint favoriser lesFIamandsdansleur
révolte. (1) L'évêque de Norwich, Henri Spencer,
fut choisi comme chef de l'armée Anglaise, desti
née aller combattre les Français partisans de
Clément. Ce jeune homme, n'avait aucune ex
périence de l'art militaire. Le pape Urbain VI
l'avait déjà chargé de prêcher la croisade qu'il
préparait contre la France. (2) Les Anglais se
réunirent près de Sandwich et de Douvres. L'évê
que, dit Schriechius, représentait le pape légitime,
et était muni de pleins pouvoirs dont il abusa
fréquemment. Il avait sous ses ordres plusieurs
chevaliers et écuyers d'Angleterre et de Gascogne,
eutr autres Guillaume de Beaucamp, maréchal
d'Angleterre, le seigneur de Beaumont, Hugues de
Caurelée, ou Chaverelleancien guerrier qui avait
fait la guerre sous les règnes d'Edouard III et de
Richard II, Thomas Trivet, Hugues Spencer,
neveu de HenriGuillaume Helinao Guillaume
(1) Sauvage, cbap. 112.
(s) Daniel, tcnû. 7, pag. a, 3.
tout en avouant que les associations charit3i
peuvent être une digne habilement opposée Jt,
excès de la mendicité, se garde bien de faire dV
fait une loi. Dans le sujet qui nous occupe, il
d'éternel ses yeux, que le droit du pauvre èlr^
secouru, que l'obligation pour le riche de secour
le pauvre.
Les journaux de la Flandre ont signalé un.
circulaire de M. le gouverneur de Jaegher
blâme les instituteurs et les suus-insliiuttUr,
d'avoir pris part au pétitionne ment en Javtur
de la langue flamande, et réclame une enquéh
leur sujet. Avec la naïveté proverbiale qù
le caractérise, ce haut fonctionnaire dit
tr'autre, que Que M. le Ministre de l'intérieur
est bien loin de repousser tout fait l'usage de
langue flamande. C'est un coup de pavé dont
M. le Ministre saura probablement peu de gre
au zèle de M. de Jaegher.
Quoiqu'il en soit, la lettre de ce dernier n'eil
que la paraphase de la circulaire de M. le mi
nistre de l'intérieur.
S'il s'agissait de pétitions politiques, noui
concevrions la sévérité de la circulaire mi
nistérielle. Mais il est tellement absurde dt
voir dans les pétitions sur l'emploi de la langur
flamande une manijeslation quelconque ayanl
trait la politique et un abus susceptible dt
répression, que nous croyons que M. le Ministrt
a signé sans la lire la circulaire émise tutu
son nom.
La langue flamande est celle de la majorik
de nos populations. Il est tout naturel qu'ellei
désirent que leur idiome maternel soit mis en
usage dans leurs rapports avec l'administra
tion. Les lois, les arrêtés, les décrets sont Jaits
pour tous; n'est-il pas absurde qu'un grand
nombre de citoyens sont obligés d'avoir un in
terprète ou un traducteur-juré pour en prendre
connaissance
Ou il faut imposer de force aux Flamands
la langue f rançaise qui leur est étrangère, ou
il faut leur parler eux mêmes leur langue
Que diraient les habitants des provinces wal
lonnes si on employait la langue flamande daru
les actes de l'autorité qui les concernent lit
se réuniraient bon droit contre cette tyranmt
Tarenson, Jean de Terriere, Matthieu Radenieo,
capitaine de Berwich, le seigneur de Château Neuf
et d'autres, (i) La marche eut lieu comme une
croisade contre les infidèles, après que les Anglais
eurent fait serment devaut le conseil du roi et
en sa présence de combattre tons les Français qui
n'étaient pas soumis l'obéissance du pape Urbain.
Ils partirent de Douvres et abordèrent Ca lais le
23 Avril 1585 dans le dessein d'attaquer les
Français. Ils y délibérèrent sur ce qu'il leur restait
faire et résolurent de se jeter sur la Flandre et de
soumettre ce pays. (2)
Les rebelles, qui étaient auparavant partis de
Calais, se rendirent l'armée des Anglais. Fran-
cois Ackerman, R. Van de Voorde, Jacques Scbul-
telaere et quelques autres engagèrent leurs alliésà
se rendre en Flandre. L'évêque de Norwicb,
parut avoir quelque confiance dans ces capitaiues
fit comprendre ses troupes, qu'hormis Calais elles
n avaient partout que des ennemis combattre-
D'un côté les Boulonnais, de l'autre les Flamands
soumis I obéissance du pape Clément. Il les per
suada aussi que ce qui leur restait de mieux fai'e
c était d employer tous les moyens pour les vain
cre pour se venger de Louis de Mâle qui les avait
bauuis de Bruges.
(Pour être continué
(1) Meyer, lib. i3.
(2) Sauvage, chap. 112.