JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 3,879.
Samedi, 2 Décembre, 1854.
38me année.
PROPAGATEUR,
viniri: f.t jï«tice.
Ou s'almuue Yprès, rue de bille, io, jwes la Graud
Place, et chez. les Peici-pleurs des Hosles du Royaume.
IMtIX L'.tBO.VSEMDIVT, par trimestre,
Yprea fr. 3. Les autres localités fr. 3-5o. Un n° a5 c.
Le Propagateur paraît le *lF.Rrni:i»l et le HttlEDI
de chaque Semaine. (insertlmiN I? centime* In ligne.)
7??.SiS, 2 Décembre.
Dans les circonstances difficiles où se
trouve le pays, en face des graves éventua
lités de l'avenir, nous nous plaisons
signaler ici les tendances nouvelles qui ont
surgi dans le monde poliliqueel queconsta-
tent la fois les paroles et les actes des
membres de la législature.
Ainsi l'on a vu, diverses reprises déjà
depuis l'ouverturedelasession, une pensée
de conciliation et de concorde réunir au
nom du bien public les représentants de
la droite et ceux de la gauche. Ainsi, des
deux côtés de la Chambre, M. Devaux et
M. de Theux ont proclamé cette trêve si
nécessaire au pays, si honorable pour tous,
et l'éloquente parole du rédacteur de l'a
dresse au Hoi, de M. De Decker, ce noble
champion de l'ancienne union, a trouvé de
l'écho parmi ceux-là même pour qui la
lutte des partis fut un moyen de parvenir
et restait un axiome de politique.
En vain M. Verhaegen, le thuriféraire
d'Eugène Sue, en vain M. Frère, ce nour
risson chéri des loges, ont ils tenté, propos
delà convention d'An vers,deravi ver les pas
sions éteintes; en vain s'eflbrcèrent-ils d'a
mener leurs collègues de gauche un vole
hostile l'entrée du prêtre dans les écoles
moyennes de l'Etat, toutes ces vaines cla
meurs se sont perdues dans le vide, et
l'inanité de leurs efforts n'a abouti qu'à
constater leur impuissance. M. Lebeau, M.
Delfosse, M. Vandenpeereboom, d'autres
députés encore de la gauche ont répudié
la tribune le système intolérant et anti
religieux que jadis la politique du 12 août
imposa la libre et catholique Belgique,
mais qui aujourd'hui ne serait plus qu'un
non sens ridicule, un honteux anachro
nisme. Ainsi l'ont entendu et déclaré par
leur vote 81 représentants contre 12.
.Mais ce rapprochement entre les opi
nions n'est pas resté circonscrit dans le
domaine des intérêts moraux, et l'impor
tante question des denrées alimentaires l'a
fait apparailre encore dans le cercle des
intérêts matériels. Un moment il semblait
craindre qu'un attachement trop vif
des théories longtemps caressées, long
temps exaltées, qu'un faux point d'hon
neur, en un mol, ou l'empire d'anciens
préjugés n'empêchassent ies partisans du
libre-échange d'appliquer aux maux dont
souffrent nos classes ouvrières le seul re
mède ou plutôt le seul palliatif dont ils
fussent susceptibles, la prohibition des
grains la sortie. Toutefois il n'en a point
été ainsi, et maint libre-échangiste con
vaincu s'est joint aux protectionnistes de
la droite pour amener ce résultat si dési
rable. Sur ce terrain, où les vœux aussi j
bien que les besoins du pays, les conviaient,
bon nombre de députés libéraux se sont
rencontrés avec la plupart de ceux de la
droite, et c'est ainsi qu'entre les défenseurs
de la prohibition nous voyons figurer avec
plaisir nos trois représentants, MM. Ma-
lou, Vandenpeereboom et Van Renynghe.
Ce revirement des esprits vers des prin
cipes de modération et île paix, qui, avant
que de se traduire en actes au sein du
parlement, se manifesta par tout le pays
avec une énergie toujours croissante et en
signes non équivoques; ce revirement, di
sons nous, en même temps qu'il inspire
les plus légitimes espérâm es quiconque
se préoccupe de notre avenir national et
des principes fondamentaux de l'ordre po
litique et social, met le comble l'exaspé
ration des feuilles maçonniques dont le
parti libéral endure depuis trop longtemps
le honteux patronage.
Quoiqu'elles fassent néanmoins, l'atti
tude nouvelle d'une fraction importante
de libéraux a singulièrement amoindri le
rôle qu'elles s'étaient adjugé au sein de
leur parti. Il est bien avéré désormais,
ainsi qu'on en a fait la remarque avant
nous, que la presse soi disant libérale ne
représente pas l'opinion publique; elle ne
représente pas même le libéralisme; elle
est tout simplement un instrument des
loges.
Au reste, il nous est permis de le dire,
la conduite sage et persévérante du parti
conservaleurdans ses succès,comme dans
ses revers, n'a pas peu contribué ce re
tour de l'opinion vers les idées qu'il re
présente. Ce n'est pas lui qui se plût
opposer l'une l'autre, la religion et la
liberté, ces deux éléments vitaux de la na
tionalité Belge; ce n'est pas lui qui érigea
l'exclusivisme en axiome gouvernemental;
ce n'est pas lui qui imposa la conscience
des mandataires de son choix les odieuses
entraves du mandat impératif. Fidèle aux
traditions généreuses de 1830, il a su, aux
yeux de quiconque n'aveuglent point la
passion, l'intérêt ou d'aveugles préjugés,
se montrer, dans ses principes et surtout
dans ses actes, plus franchement libéral
que ceux-là même qui se larguaient de
donner le branle aux vrais amis de la li
berté, mais qui cachaient leurs propres
chaînes sous les oripeaux meilleurs du li
béralisme.
Dans sa séance du 29 novembre, le Sénat
a adopté la loi relative aux denrées ali
mentaires, la majorité de 50 voix contre
2 et 0 abstentions.
Le même jour le Vonileur a publié la
loi, qui est devenue obligatoire le lende
main de sa publication.
Voici maintenant le texte tel qu'il se
trouve dans le Journal officiel:
I.ÊOPOI.Detc. Les Chambres ont adopté et
cous sanctionnons ce qui suit
Art. Sont déclare's libres l'entrée le
(Voment, l'épeantre mondé, le méteil, les pois, les
lentilles et fèves (haricots), le seigle, le tuais, le
sarrasin, les févernles et vesces, l'orge, la dtêche
(orge gerntée), l'avoine, l'épeaulre non ntondé, le
gruau et l'orge perlé, les farines et moulures de
tonte espèce, le son, la fécule et les autres substan
ces amylacées, le rix, le pain, le biscuit, les pommes
de terre, les taureaux, les bœufs, les vaches, les
bonvillons, les iaurillons, les génisses, les veaux,
les moulons, les agneaux et les cochons.
Sont également libres l'entrée les viandes de
tonte espace.
Art. 2. Le froment et la farine de froment, le
seigle et la farine de seigle, les pommes de terre
et la fécule de pommes de terre sont prohibés h la
sortie.
Art. 3. Les dispositions qui précèdent sorti
ront leurs effets jusqu'au 3r décembre î855.
Toutefois, le gouvernement pourra, avant cette
époque, faire cesser les effets de l'art. 2.
Art. 4. Le bénéfice de la libre entrée, décrétée
par l'art, t", sera applicable a tout navire belge
ou étranger dont les papiers d'expédition consta
teront que le chargement a été complété et le
départ effectué d'un port étranger avant la date du
rétablissement des droits.
Art. 5. L'arrêté royal du 25 juillet 1854,
qui a maintenu provisoirement la prohibition des
pommes de terre a la sortie, est approuvé.
Art. 6. La présente loi sera obligatoire le
lendemain de sa promulgation.
Promulguons la présente loi ordonnons
qu'elle soit revêtue du sceau de l'État et publiée
par la voie du Moniteur.
Donné Laekett, le 2g novembre t854.
La baisse du prix des céréales continue
sur tous les marchés tenus cette semaine.
Au marché de Thourout, le froment a
éprouvé une défaveur de 5 fr. et le seigle,
de 5 fr. 5 50.
Au marché de Fumes, le blé a baissé de
3 5 fr., et le seigle, de 2 50 3 fr.
A Ninove, la baisse a été, pour le fro
ment, de 1 50 3 fr., et pour le seigle, de
1 -85 fr. 5 50.
A Bruxelles, il y a eu également baisse,
et beaucoup degrainssontreslés invendus.
Le projet de loi qui interdit l'exporta
tion des eaux-de-vie indigènes a été adopté
par la Chambre des Représentants, la
majorité de 73 contre deux et trois ab
stentions.
La loi nouvelle autorisera cependant
l'exportation des eaux-de-vie fabriqués
avec des céréales étrangères, et portera
la décharge de l'accise au montant même
du droit, sans autre prime.
La prohibition des eaux-de-vie, la
sortie, cessera de plein droit le 51 dé
cembre 1855, si elle n'est pas levée avant
celle époque.