JOURNAL D'YFRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3,897.
38me année
-Js'wp 'ji *«»îl TÉMTÉ ET JCftTICE.
7FR.I2S, 3 Février.
Le monde politique se préoccupe et s'in-
jquièle à'juste litre de l'attitude déplorable
ique vient de prendre toutà-eoup le parle
ment de la Grande-Bretagne. On sait que
M. Boebuck avait soumis la Chambre des
Communes une motion d'enquête sur la
situation de l'armée anglaise en Crimée.
Celte motion qui impliquait un vote de cen
sure contre legouvernement a été adoptée
par 505 voix contre 148, et a fortement
entraîné la chute du ministère. C'est ainsi
qu'après avoir poussé la nation dans une
lutte dont les Conseillers de la Couronne
faisaient pressentir les difficultés et les
périls, le parlement a eu ensuite le triste
courage d'ofîrir ces mêmes Conseillers en
holocauste la satisfaction des masses, et
de les rendre injustement responsables des
désastres d'une campagne qui n'ont d'au
tres causes que les vices d'une organisation
militaire surannée. Au lieu d'écouter les
intérêts de la patrie, la Chambre des Com
munes préféré se mettre la remorque
des passions populaires; et dans fes cir
constances solemiielles où se trouve l'An
gleterre et toute l'Europe, elle n'a pas
craint de sacrifier l'honneur, la dignité,
toute la force du gouvernement représen
tatif pour courir après une popularité
éphémère dont tôt ou tard elle risque de
devenir la victime. Car enfin, ce coup de
tête n'améliorera en rien la silualion des
affaires en Crimée.: et si les événements de
la guerre allaient prendre une tournure
plus fâcheuse' encore, que fera alors le
parlement? Il s'irritera, c'est-à-dire que
son altitude menace de devenir factieuse.
Mais ensuite? C'est ce qu'on ose peine se
demander.
Sir Gladstone, dans la discussion de
lundi, a fait toucher du doigt le danger
de tout ce qui se passe depuis quelques
jours. Il a surtout réprouvé en termes no
bles et énergiques la motion d'enquête.
Voici ses paroles:
M. Gladstone, chancelier de l'Échiquier.
Je voudrais savoir maintenant ce que
vous voulez obtenir par celte enquête... Je
demande l'honorable M. Walpole, si,
étant membre de la commission d'enquête
(honneur que je ne lui envie pas), il trou
vera le moyen de ne pas loucher la po
litique du gouvernement français? Il nous
faudra des témoins fiançais aussi bien
qu'anglais. On parle d'une enquête faite
dans le temps au sujet de l'expédition de
Walcheren. Mais l'expédition de Walche-
ren était terminée. Elle rentrait dans le
droit légitime et exécutable de la Cham
bre des Communes. Les Ministres avaient
adopté une marche dont les résultats
étaient néfastes, et l'on a jugé les Mi
nistres.
Vous n'avez pas gouverner le pays,
mais demander compte de leur gestion
ceux qui le gouvernent. Pour cela, il est
possible de juger une expédition faite.
Mais comment juger le passé de l'expédi
tion de Sébastopol sans juger aussi le pré
sent et l'avenir? Gomment le faire sans
réunir le présent et l'avenir?
La vérité est que cette motion (d'en?
quête) viole toutes les lois constitution
nelles, car elle tend enlever le corn-
mandement de l'expédition des mains du
gouvernement. L'enquête de Walcheren
été faite la barre de la Chambre. Ici,, il
s'agit de nommer une Commission d'en
quête. Il me paraît!qtie lorsque la!Cham
bre toute entière s'érige en tribunal, uiié
enquête est puissante et solemnelle; mais
est-il bien vrai qu'ici il s'agisse de confier
cette jurisdiction quelques individus?
Répondez oui ou non celle question.
Et vous êtes divisés sur ce point. M.
Roebuck veut uncomité de quelques mem
bres, et M. Lagard le combat et le repousse.
Alors pourquoi vote-t il pour la motion?
Parce qu'il veut renverser le Cabinet. C'est
son seul désir. Il ne défend pas la motion;
il l'abandonne, il la condamne, il la traite
de ridicule, et il a raison. Vous ne pouvez
confier celle enquête une Commission.
Vous dites que vos pouvoirs sont illimités:
Vous êtes Souverains, sans doute; vous
pouvez transférer vos pouvoirs une Com
mission qui décidera de tout pour vous-
mêmes. Vous pouvez abdiquer vos préro
gatives et les céder quelques membres,
mais sera-ce le moyen de sauver l'armée
et la dignité du pays?
L'honorable.membre croit il que l'An
gleterre lui permettra de se jouer ainsi
d'intérêts aussi graves? Croit-il que le ren-,
versement d'un gouvernement soit chose
si précieuse pour l'Angleterre, qu'elle ne
s'inquiète pas même de savoir comment
on le tue? Si l'honorable membre le croit,
il se trompe. Le pays, fût-il heureux de
voler cette enquête, sera fort désappointé
d'apprendre qu'elle'iv'aura jamais lieu.
Si la Chambre croit devoir renverser
le gouvernement, qu'elle songe du moins
la légalité des moyens dont elle se sert
pour le démolir... Nous sommes Ministres;
privez-nous de ce caractère. Mais nous
restons membres du Parlement, et comme
tels nous avons un intérêt commun dé
fendre la dignité de la Chambre. Votre
pouvoir est gigantesque, mais il l'est
condition d'être prudent, d'être juste et
d'être patriotique.
Soyez en sûrs, dans ce libre pays, la
Chambre des Communes pas plusque tout
autre corps secondaire, ne peut dédaigner
les règles de la justice, et amuser le pays
de promesses qui ne doivent pas être te
nues. Il importe la Chambre dès Com
munes, autant et plus qu'à personne, de
rester dans les limites de son droit, si elle
veut restergrande et respectée dans l'exer
cice de son mandat. Si celle motion est
volée, ce sera un grand soulagement pour
les Ministres, mais ce sera pour vous une
grande responsabilité.
Vous pouvez ne pas le comprendre.
J'en vois ici qui n'ont qu'une très-courte
expérience des affaires, et qui sont appelés
voler sur une question dont ils n'appré
cient pas toute l'importance. Pour moi, je
dis que quel que soit le Cabinet qui sur
gisse de nos centres, il faudra qu'on lui
rende tout l'appui dont nous sommes ca
pables.
J'ajouterai aussi qu'il est du devoir de
tous ceux qui voteront celte motion, quels
qu'ils soient, quél que soit leur parti, de
ne pas hésiter nous remplacer sur la
brèche. Je crois que ce que vous allez faire
nè servira rien l'armée de la Crimée.
Celte enquête n'aura jamais lieu, ou bien
elle ne mènera rien, qu'au désordre et
la confusion, au désastre, la boule, la
faiblesse.
Elle n'apportera aucune consolation
ceux qui souffrent; elle remplira de joie
les ennemis (le l'Angleterre; et pour ma
part, ce me sera une joie éternelle, si la
motion est volée, d'avoir, comme membre
du Cabinet de lord Aberdeen, protesté so
lennellement, jusqu'au bout, contre un pro
cédé qui n'a de raison d'être ni dans la
Constitution ni dans l'histoire, qui est inu
tile et dangereux, et qui, d'après moi, met
en péril la puissance, la dignité et la mis
sion des Communes de la Grande Breta
gne! (Applaudissements prolongés.)
Après les observations de quelques au
tres orateurs la Chambre passe au vote sur
la motion qui est adoptée par 305 voix
contre 148. Majorité contre le ministère,
157.
La Proclamation du vole est accueillie
contre l'usage, par un profond silence.
La séance est levée.
La section centrale chargée d'examiner
le crédit de 400,0J0 fr. pour les fonction
naires inférieurs, s'est réunie mercredi
sous la présidence de M. Veydl. Diverses
opinions ont été émises sur la manière de
répartir cette allocation.
M.Osy veut que tous les facteurs ruraux,
mariés ou non, participent au subside. M.
Van Iseghem désire que les facteurs des
villes, dont le traitement est au-dessous de
600 fr., ne soient pas exceptés. M. Vanden
Peereboom insiste sur une prompte dis
tribution du subside, afin que le secours
n'arrive pas trop tard, et il pense qu'il
faut laisser beaucoup de latitude au gou
vernement.
M. Van den Branden de Reeth croit que
le secours doit être accordé en une fois, et
le plus promplement possible, vu la modi
cité de la somme. La section entière se
rallie cet avis.
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LK MOTION D'ENQUÊTE DE M. ROEBUCK.