JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
No 3,908.
38me année.
7FR.3S, 44 Mars.
Certaines feuilles libérales se livrent
de singulières réflexions au sujet de notre
crise ministérielle actuelle. Elles avouent
d'assez mauvaise grâce que les partisans
du libéralisme intolérant et exclusif se
trouvent en minorité dans les Chambres;
elles vont même jusqu'à dire qu'à la ri
gueur il serait convenable qu'il y eût un
ministère quelconque composé d'éléments
pris dans les rangs du parti conservateur.
C'est fort honnête de leur part.
Une chose toutefois préoccupe beaucoup
les gazeliers des loges ils craignent qu'un
ministère conservateur ne soit un événe
ment fatal nolreindépendance nationale.
Comment cela? Ecoulons; on va nous l'ap
prendre Le cléricalisme est le parti le
moins en bonne position de défendre effica-
cernent l'indépendance du pays. Car déjà en
plusieurs circonstances, il a fait appel
tétranger pour peser sur l'opinion, afin de
n'être pas battu aux élections. On ajoute:
Si dans un intérêt de parti, il (le clérica-
lisme) n'a pas eu de répugnance invoquer
une influence étrangère, on peut douter
qu'il mette beaucoup de zèle et d'ardeur
défendre l'indépendance nationale.
lion! Voilà certes une accusation en rè
gle; pour qu'elle fût prouvée, il ne manque
qu'une chose: des preuves l'appui.
Et qu'est ce que le parti qui se permet
de pareilles insinuations l'adresse des
conservateurs?
Yoici: Ce parti-là n'a pas une goutte de
sang belge dans les veines. Ses principes,
ses goûts, ses allures, jusqu'à ses hommes
les plus influents, tout chez lui est d ori
gine exotique. C'est tellement vrai que ses
journaux les plus importants sont rédigés
par des intrigants ou des réfugiés français,
qui trouvent leur profit venir se venger
chez nous du mépris et des dédains qu'ils
rencontrent en France.
Nous devons avouer que tout cela nous
paraît assez peu national. Sans doute, les
feuilles libérales font grand bruit de leur
patriotisme: ils crient, protestent et jurent
par tous les Dieux de l'Empire. Mais cela
ne fait rien: il nous semble toujours que
le patriotisme donlse targue un parti com
posé de tels éléments ne peut être qu'un
patriotisme de mauvais aloi, et nous ne
pouvons nous empêcher de douter que ce
parti mette beaucoup de zèle et d'ardeur
défendre, le cas échéant, l'indépendance na
tionale.
El l'histoire nous en dit quelque chose:
elle nous apprend que jamais les hommes
de ce parti n'ont hésité sacrifier les plus
grands intérêts de la patrie, chaque fois
qu'un pareil sacrifice a pu servir au triom
phe de leurs passions politiques. Pournous
borner ce qui s'est fait en Belgique, ne
les a-t on pas vusconspirer, tantôt au profit
de la Fraucé, tantôt au profil de la Néer-
lande? A l'heure qu'il est ils ont encore
leurs clubs où ils maudissent le Roi et où
ils attendent toujours le moment favorable
pour livrer notre nationalit l'étranger.
Dieu nous préserve d'un tel malheur:
mais si jamais l'invasion du dehors vient
menacer notre patrie, il nous faudra
deux armées: l'une pour défendre aux
frontières notre indépendance mise en pé
ril l'autre, pour contenir les conspirateurs
des clubs-et des loges. A bas les masques!
Vos protestations hypocrites ne trompent
personne: on sait qui vous êtes et d'où
vous venez: Vous qui revendiquez pour
votre parti le monopole du patriotisme,
sachez que la Belgique ne vous doit rien...
rien que des trahisons, des complots et des
conspirations. Et ce que vous avez fait
dans le passé, vous êtes prêts le faire
encore maintenant: Nous adjurons tous
les Belges dignes de ce nom, d'en garder le
souvenir.
REVUE POLITIQUE.
LE PROPAGATEUR
VÉRITÉ ET JUSTICE.
Dans l'intérêt du commerce, nous prévenons le
public qu'il circule dans noire ville de fausses piè
ces de cinq francs qui sont d'une imitation parfaite
avec les bonnes pièces, mais le poids et le sou en
différent essentiellement. Celle que nous avons vue
portait l'effigie de Louis-Philippe, au millésime
de i832.
On a des nouvelles de Crimée jusqu'au 4. Rien
d'important De s'était passé cette date.
Disons encore quelques mots du combat livré
devant Sébastopol entre les alliés et les Russes,
dans la nuit du 23 au 24 février, suivant les
dépêches du prince Mentschikoff, dans la nuit
du 24 au 2Ô, suivant des renseignements parvenus
du camp des alliés. On sait qu'il s'agissait pour
les ail iés de s'emparer d'une redoute récemment
élevée par les Russes, et dont la possession sem
blait assez importante. Jusqu'ici, on n'est pas plus
d'accord sur les résultats que sur la date de cette
affaire. Les Russes et les alliés continuent h re
vendiquer le succès du combat livré au sujet de la
possession de celle redoute. L'araira! Bruat et lord
Raglan affirment que les Français ont pleinement
réussi dans leur entreprise et qu'ils ont enlevé la
redoute. Mais le prince Mentschikoff dit le con
traire, et son dire se trouve confirmé par la Ga
zette militaire de Vienne dans les termes suivants:
Dans la nuit du 21 au 22, les Russes out
élevé une redoute sur la hauteur de Japun, qui
forme le versant droit de la Kilia-Balka. Les tra
vaux ont été exécutés avec tant de rapidité que les
Frauçais n'ont pu s'opposer leur achèvement.
Celte position occupée par les Russes est impor
tante.
L'ouvrage si hardiment élevé par eux, domine
l'aile droite des travaux de siège des alliés. Les
Russes veuaieot, pour ainsi dire, de prendre sans
coup férir la position pour laquelle on avait com
battu avec tant d'acharnement la bataille d'in-
keriuanu. Les alliés semblent aussi avoir reconnu
l'importance de la nouvelle position des Russes.
Dans la nuit du 24 au 25, ils résolurent de
les en chasser. Ils firent donc plusieurs attaques
avec déploiement de grandes forces. Mais les Russes
les repoussèrent vigoureusement, et' forcèrent les
Frauçais renoncer leur entreprise après avoir
subi de grandes pertes. Par suite, tous les travaux
des assiégeaotsparaisseuts'êlrebeaucoup ralentis.
Ouest la vérité?'C'est ce qui est fort difficile h
dire. Toutefois dods croyons que les rapports faits
sur celle affaire par les commandants alliés sont
seuls exacts.
Les dernières nouvelles du théâtre de la guerre,
veoues par voie de Constantinople, s'accordent 'a
reconnaître que la position des alliés est .parfaite
ment satisfaisante.
Le Manifeste du nouvel Empereur de Russie
est connu maintenant. Ce document est très-court
et conforme ce que nous en avons dit daos notre
dernier numéro. Aussi les espérances de paix que
l'on avait conçues d'abord, vont-elles s'affaiblis-
sanl tous les jours davantage.
En fait de nouvelles diplomatiques, le JVan-
derer annonce que les puissances occidentales ont
fait savoir a leurs Mioislres h Vienne que la mort
de l'Empereur Nicolas ne modifiait en rien leur
politique dans la question orieolale.
On sait que l'Archiduc Guillaume se rend a
S' Pétersbourg pour y porter les compliments de
condoléance de l'Empereur d'Autriche. Partout,
sur son passage, il reçoit les plus grands honneurs;
et dans la capitale de la Russie, on se prépare lui
faire une réception brillaule. Il est très-possible
que l'avènement d'Alexandre II exerce une grande
influence sur les rapports ultérieurs de l'Autriche
et de la Russie.
Il plane toujours une grande incertitude sur le
point de savoir si la Prusse prendra part ou non
aux cooférences de Vienne. Une chose parait hors
de doute maintenant C'est que la Prusse ne veut
prendre avec les puissances occidentales aucun
arrangement qui lui impose des obligations sé
rieuses Nonobstant ce refus, la cour de Berlin
sera-t-elle admise au Congrès de Vienne? C'est
une question mais nous croyons que non.
Le remplacement du prince Mentschikoff, sui
vant les dernières nouvelles, n'est pas une disgrâce.
C'est sur sa demande et en considération de son
état de santé que le commandant des troupes rus
ses aurait obteou un successeur.
Le Moniteur de l'armée en France annonce
qu'uu corps de réserve, formé de plusieurs divi
sions, va être établi h Constantinople.
M. H. De Brouckere, ministre des affaires étran
gères, a été reçu hier par le Roi, et il a persisté
dans sa démission.
Une feuille de Bruxelles dit que d'autres hom
mes politiques vont être appelés par S. M.
On assure, dit l'Indépendance, que l'honorable
président de la Chambre des Représentants sera
reçu de nouveau par le Roi.
1
MANIFESTE
DE L'EMPEREUR ALEXANDRE II.
Saint-Pétersbourg, 3 mars.
Par la grâce de Dieu, nous, Alexandre II,
Empereur et autocrate de toutes les Russies, Roi
de Pologneetc., etc., etc., faisons connaître a
tous nos fidèles sujets
Que dans ses décrets impénétrables, il a plu a
Dieu de nous frapper d'un coup aussi douloureux
qu'inattendu. A la suite d'une courte, mais grave
maladie, qui s'est développée dans les derniers
jours avec une rapidité inouïe, notre très-cher
père, l'Empereur Nicolas Paulowitsch est mort
aujourd'hui 18 février (2 mars). Aucune parole