39™ année
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N» 3,942.
v TÉmitÉ ET JUSTICE.
7FE.BS, il Juillet.
Depuis la clôture des conférences de
Vienne, la question d'Orient est entrée
dans une phase nouvelle.
A la vue des empiétements successifs de
la Russie dans le domaine de ses voisins,
et surtout de son agression violente dans
les principautés, tous les gouvernements
avaient compris le danger imminent dont
l'ambition croissante des czars menaçait
l'équilibre européen. Et l'on peut dire que
partout on vit avec faveur les puissances
occidentales défendre main armée la
cause du faible et de l'ordre-général.
En ces derniers temps, la France, par
ses révolutions successives, l'Angleterre,
par sa conduite plus qu'équivoque lors des
grandes commotions de 1848 et 1849,
s'étaient justement attiré la défiance des
cabinets conservateurs. Par contre, la
Russie, en ces mêmes circonstances, loin
de se prévaloir pour s'agrandir des em*
barras de ses voisins, avait loyalement
soutenu, au pria même de son or et de son
sang, la cause de l'ordre et du bon droit.
Ainsi dans l'opinion les puissances
occidentales se trouvaient-elles, par rap-
port i'em pire Moscovite, dans u ne posi lion
d'infériorité, lorsqu'à la suite de l'ana-
bassade-Menlschikoff, l'autocrate démas
quant ses projets, les rôles se trouvèrent
intervertis. On sait le reste; on sait quelle
influence morale acquirent d'un seul coup
les gouvernements Britannique et Français:
l'Autriche, elle-même, signa avec eux un
traité d'alliance et s'avança jusqu'à s'en
gager joindre éventuellement ses armées
aux leurs.
Aujourd'buicependantlaguerred'Orient
semble entrer dans une phase nouvelle.
Les plénipotentiaires réunis aux conféren
ces de Vienne ne sont point parvenus
s'entendre; les alliés belligérants de la
Porte ont jugé insuffisantes les concessions
du cabinet de S'-Pélersbourg et n'ont pas
accueilli avec plus de faveur les propo
sitions de l'Autriche. Or c'est ici qu'une
SlPTIlIll!! (LITTfôl
DU R. P. DE DAMAS,
AUMONIER DE L'ARMÉE D'ORIENT,
Toute espèce d'occasion et les circonstances les
plus imprévues nous amènent b coosiater l'habitude
du sentiment religieux daus le cœur de nos soldats.
L'exaltation de la fièvre leur fait souvent proooucer
ce propos des paroles si sensées et si bien suivies
qu'il est difficile de ue pas y reconnaître le résultat
de réflexions mùiies précédemment. Je ne vous
citerai pas pour exemple ce pauvre fiévreux
chantant sur son lit de mort le cantique Vive
Jésusvive sa croix! et disant h ses camarades
Allons, amis, remerciez Dieu de ce que je vais
dissidence regrettable menace d'éclater.
L'Autriche, en effet, croyant avoir ren
contré une solution capable de sauvegarder
les intérêts et l'indépendance de l'empire
Ottoman sans froisser trop vivement
l'amour propre des Russes, n'a point vu
sans déplaisir le rejet formel de ses propo
sitions par les puissances alliées, et ne se
croit point tenueenconséquenceàsoutenir
par les armes des exigences qu'elle trouve
outrées ou intempestives. Le chef du gou
vernement Français, de son côté, non
content de désavouer son ministre des
affaires étrangères pour avoir donné son
approbation au projet élaboré par le cabi
net autrichien, s'est énoncé, devant le
corps législatif, sur le comptedel'Autriche,
avec une amertume peu déguisée, au point
de faire peser sur elle un reproche d'in
fidélité ses engagements.
Ce refroidissement de part et d'autre
constitue déjà par lui-même un fait bien
regrettable. Espérons encore que ces nua
ges se dissiperont, qu'ils ne sont point le
prélude de dissentiments plus profonds
entre les puissances occidentales et les
cabinetsconservateursdu continent. Certes
la politique intérieure de l'empereurNapo-
léon n'est guère de nature justifier ces
craintes; toutefois, depuis quelque temps
surtout, les tendances de sa politique
l'extérieur accusent des relations de plus
en plus étroites avec les gouvernements
où dominent les principes révolutionnaires.
Ainsi vit on certains rois de France
maintenir de gré ou de force la religion
catholique dans leurs états et se liguer
contre elle avec ses ennemis chez les peu
ples voisins. Quant aux antécédents du
chef du ministère anglais, ils sont connus.
Lord Palmerston, le coryphée de la franc-
maçonnerie, a joué en ces derniers temps,
en 1848 et depuis, un rôle déplorable: ses
antécédents n'offrent de gages qu'au parti
du désordre.
Sans doute, l'heure qu'il est, la cause
des puissances alliées est encore celle de
la civilisation catholique. Nous ne formu-
mourir. Quel booheur d'avoir été appelé sur cette
terre de Crimée donner ma vie pour mon pays!
Je vais au ciel, Dieu soit béni, a Je ne vous
parlerai pas non plus de cet Irlandais qui s'était
brisé une jambe et quipoussé par le délire,
courait daus la salle en se soutenant tant bien que
mal sur sa jambe cassée, s'armait d'un bâton,
cherchait h tuer tout le monde et se calmait immé
diatement en ma présence.
Je prolongerais indéfinitivement cette lettre s'il
fallait tout citer. Je me contenterai de vous raconter
le stratagème d'un vieux caporal b barbe grise,
peu dévot de son naturel. Eonuyé de se sentir
réveillé par des infirmiers qui ne pouvaient pas
venir b bout de quelques malades dont le délire
augmentait avec la nuit, il s'était imaginé de
m'envoyer chercher toutes les fois qu'un nouvel
accident se présentait. Alors on frappait b la porte
de ma tente, en me disant Un malade vous
demande.» Et quel n'était pas mon étounemeut
lotis qu'on seul vœu puisse-t-elle en toute
éventualité garder toujours ce caractère.
NOUYELLES DIVERSES.
Hier, pendant qu'un orage planait snr la ville
de Poperinghe, la foudre est tombée snr l'étalage
d'un cordonnier qui stationnait sur la Grand'Place.
Le fluide électrique a pénétré dans l'échoppe sans
toutefois y causer des dommages.
S. M. le Roi, par un arrêté en date do 3 de
ce mois, vient de décerner le titre de baron b
l'honorable sénateur, M. le chevalier Bethune.
On vient de découvrir b Eprave, b proximité
de la fameuse grotte de bao, connue de tous les
touristes, une grotte nouvelle dont on raconte des
merveilles et qui attire dès b présent l'admiration
des voyageurs.
On écrit des bords de la Lys les lignes
suivantes
Dans quelques communes de nôtre district, on
remarque une chose singulière sur les épis du
froment qui est maintenant en pleine floraison.
Elle consiste daos un glaïeul blanc d'environ 10
centimètres de longueur, et qui a poussé b côté de
l'épi. On appelle cela ici des drapeaux blancs. Les
vieillards des environs disent n'avoir jamais re
marqué celte singularité. Oo a cependant vu la
même chose en i84y daus les cantons de Dixmude
et de Thourout. Plusieurs sont d'avis que c'est Ib
un signe certain d'une récolte aboudaute. Puisse ce
pronostic se réaliser.
Un fait tragico comique a eu lieu la semaioe
dernière b la poste du chemin de fer de la ville de
Gand. Les têtes des suppliciés Rys et De Praetere
furent expédiées de Bruges dans uu panier au cabinet
d'auatomie de l'université de la même ville: uu
employé de l'octroi municipal, fourrant brusque
ment la main dans le panier afin de voir s'il ne
contenait pas des objets soumis b la taxe, en retira
la tête de Rys b cet aspect devenant pâle comme
un mort, il jeta un cri, laissa tomber la tête dn
supplicié et se répandit en reproches contre les
porteurs qui ne l'avaient pas prévenu et qui riaient
aux éclats.
eu me voyant conduit auprès d'un fréoéliqoe!
Mais il ne me demande pas, disais-je; il ne sait
pas ce qu'il fait. C'est vrai, M. l'abbé,
répondait le caporal. Mais j'ai remarqué combien
les malades respectaient l'aumônier; alors j'ai
songé b vous faire appeler pour que vous imposiez
b ce pauvre insensé. Et, eo effet, plusieurs
fois ma présence et la vue de ma croix calmèrent
ces pauvres gens.
Au milieu de 00s consolations, bous avons aussi
des dooleurs et en voyant la mort frapper taat de
têtes, il oous est difficile de nous défendre cootre
certains regrets inspirés par la perte de nos amis.
A l'heure actuelle, nous avoos encore le cœur
brisé par la perte de denx de nos aumôniers enlevés
en huit jours de temps b notre affection et aux
malheureux qu'ils soulageaient. Féuélon s dit
quelque part Le champ de bataille des pretres,
ce sout les hôpitaux, surtout dans le temps des
épidémies. En Crimée, nous avons deux champs
LE PROPAGATEUR
▲u directeur dbs Précis historiques. Bruxelles.
(suite et fin.)