Quand la discussion (dn chapitre de l'ensei-
gnemeot moyen) viendra, il me sera facile de
démontrer qne la positioa des régents et institu—
leurs des écoles moyennes est telle, qu'elle est
devenue intolérable, et qu'il est impossible qu'on
ne l'améliore pas. Je pourrais citer tels inslitu-
leurs de l'eoseignemeot moyen qui n'ont que
quatre !i cinq cents francs de traitement.
Ces fonctionnaires utiles et modestes sont
moins rétribués que tous les autres fonctionnaires
de l'État, leurs traitements sont inférieurs b ceux
des douaniers, des facteurs ruraux, des simples
ouvriers du chemin de fer et j'ai honte de le dire,
ces hommes instruits et capables coûtent moins b
a l'État q u'un cheval de grosse cavalerie qui a droit
a obtenir sur le budget de l'Etat la ration forte.
Et cependant, messieurs, la Chambre devra le
reconnaître, ces instituteurs souffrent en silence,
aucune réclamation ne nous a été adressée par
eux, ils ont confiance dans le gouvernement et
dans la législature et j'espère que cette confiance
ne sera pas déçue.
Pour obtenir une chaire dans uneécole moyenne,
il faut avoir fait des études longues et sérieuses,
il faut avoir fiéqoenté des cours spéciaux, avoir
fait des examens.
Les membres du corps enseignant doivent
avoir une tenue décente et tenir un certain rang
dans la société.
Eh! bien, Monsieur, je vous assure que ces
paroles ont été accueillies avec joie, avec enthou
siasme par les régents et instituteurs des écoles
moyennes; ils sont les intéressés et h jnste titre ils
en sont satisfaits; personne d'ailleurs ne songe h
troubler les légitimes espérances qu'ils ont conçues,
de voir augmenter leurs minimes rétributions. Vous
avez pris leurs intérêts h cœur et ils savent que
vous n'êtes pas homme ii reculer devant quelques
démarches h faire en leur faveur. Ils ont confiance
en vous. Aussi, soyez en sûr, si déjb vous n'avez pas
reçu des témoignages de leur reconnaissance, ils
n'oublieront point, h votre retour h Ypres, de vons
offrir les assurances de leur gratitude; ils viendront
en corps vous présenter leurs hommages et vons
verrez briller dans tout leur maintien les marques
éclatantes du respect qu'ils vous portent et du
dévouement dont ils sont animés h votre égard.
Mais, Moosieur, au risque de vous être moins
agréable, je dois vous rappeler qu'b tonte médaille
il y a un revers.
Vos paroles ont étooné la grande majorité, sinon
la totalité de vos concitoyens.
On se rappelle en effetl'acte iniqoe et odieux
posé par le Cooseil communal d'Ypres en date du
17 novembre i856.
L'on n'a pas oublié comment alors sans rime ni
raison publiquement avouée, le Conseil commu
nal supprima le modique supplément de 5oo et de
Cet homme a dit la vérité j'ai été dix ans
aux galères
Le ton ferme et grave avec lequel il prononça
ces mots imposa un moment; et chacun sembla
peser en lui-même la valeur et la signification de
ce mot J'ai été Victor laissa tomber, de surprise,
la barre de fer qu'il tenait b la maio, et Ambroise
regardait fixement son père, comme s'il ne le
comprenait pas.
Eh bien! poursuivit Martiosuis-je un
menteur? Je répète que je ne veux pas travailler
avec un voleur, un assassin, que sais-je? Et vous,
les camarades?
Non non nous ne travaillerons pas.... A
la porte! h la porte le galérien.' s'écrièrent tons
les ouvriers.
Ce tumulte amena bientôt le propriétaire de
l'établissement.
Qu'est-ce qu'il y a, Messieurs? d'où vient
ce bruit?
Il y a, Monsieur, répondit Martin, que vons
nous avez donné un galérien pour contre-maître,
et que nous sortirons tous plutôt que de travailler
avec lui.
Plaisantez-vous? M. Paul un.... galérien!
Qu'est-ce que vous me faites dire?
aoo fr., ii la pension des deux succursalistes et des
huit vicaires de la ville d'Ypres.
L'on sait que vous, Moosieur, vous êtes le
membre le plus influent du Conseil communal;
l'on est convaincu que si vous eussiez voulo, cet
acte, qui a soulevé l'indignation publique, n'eut
pas été posé.
L'on se demande, en lisant les paroles que vous
venez de prononcer b la Chambre des Représen
tants, comment vous n'avez pas usé de toute votre
influence, comment vous n'avez pas employé tonte
votre éloquence, pour faire rejeter par le Conseil
communal le projet de suppression?
L'on se demaude comment vous avez appuyé et
de votre influence et de votre vote, un acte si
contradictoire avec les sentiments que vous avez
exprimés h la Chambre?
L'on est tenté de croire, Moosieur, que vous
osez de deux poids et de deux mesures.
En effet, vous serait-il facile de démontrer que
la position des deux succursalistes et des huit
vicaires d'Ypres, est brillante, qu'il est impossible
de l'améliorer encore? Vous savez, sans doute que
le traitement des succursalistes est de 700 fr. et que
celui des vicaires ne montent qu'b 5oo fr.
Dites, Moosieur, ces prêtres utiles et modestes
(vous ne leur contesterez pas ces qualités, vons les
connaissez trop bien,), ces prêtres sont-ils plus
rétribués que tous les autres fonctionnaires de
l'État? Leurs traitements sont-ils supérieurs h ceux
des douaniers, des facteurs ruraux, des simples
ouvriers du chemin de fer?
N'avez-vou» pas honte de dire, que ces hommes
instruits et capables (vous ne doutez certes pas
qu'ils ne soient tels) que ces hommes coûtent
moins h l'État qu'un cheval de grosse cavalerie
qui a droit h obtenir sur le budget de l'Etat la
ration forte?
Et cependant, Monsieur, vous devez le recon
naître, ces prêtres, que l'on punit parce qu'ils
remplissent leur devoir, que l'ou frappe parce
que l'on ne peut atteindre leur chef, ces hommes
au caractère noble et patient, souffrent en silence;
ils n'adressent aucune réclamation ni vous ni au
Cooseil commuoal; ils ne se prévalent pas des
témoignages d'intérêt qu'ils reçoivent chaque jour
et se contentent de ne pas laisser refroidir leur zèle
et leur dévouement, même envers ceux qui leur en
tiennent si peu compte.
Et cependant, Moosieur vous ne l'ignorez pas,
pour devenir prêtre, pour obtenir un vicariat ou
une cure, il faut avoir fait des études longues et
sérieuses, il faut avoir achevé ses humanités, avoir
suivi les cours du séminaire, avoir passé une partie
de sa vie dans le ministère, il faut avoir fait des
examens!! a|,
Les prêtres, Monsieur, ne doivent-ils pas par
hasard avoir une tenue décente, un certain rang
dans la société?
Puis, apercevant Paul calme, recueilli, les bras
croisés, Ambroise et Victor auprès de lui, immo
biles comme des marbres
Qu'y a-t-il donc ici, M. Paul? d'où vient ce
tnmnlte?
On vons en a dit la canse, Monsieur.
La canse!.:. la cause...C'est-à-dire...
La véritable cause, Monsieur, ajouta Paul.
La véritable cause! Est-ce possible? Vous
l'avouez? En ce cas vous comprenez que... vous
sentez que...
Les ouvriers s'agitaient tumultueusement autour
des interlocuteurs, proférant des cris et des me
naces.
En ce cas, reprit le chef de l'établissement,
j'en suis bien fâché, mais, en effet, vous ne pouvez
plus rester ici.
Moosieur,dit Paul, avgz-vous vons plaindre
de moi?
En aucune façon... Mais enfin je ne puis
forcer personne b travailler avec vons, Messieurs,
dit-il b ses ouvriers, demain vous aurez nn nouveau
contre-maître. Je vous prie de vous retirer, mes
amis, il faut que je règle mes comptes avec... mon
sieur Paul.
Les ouvriers se retirèrent en tnmulte.
Et cependant on leur a retiré le modique sup
plément de 300 fr.!! et vous, Monsieur, vous
avez voté cette suppression
Voilà, Monsieur, ce qui étonne vos concitoyens
et b juste titre. L'on ne comprend pas comment
votre conduite b la Chambre des Représentants soit
en désaccord avec celle que vous avez tenue au
Conseil communal.
Dans les deux cas il s'agit d'hommes utiles la
société, d'hommes instruits et capables.
Dans les deux cas il s'agit de rétributions moin
dres que celles des douaniers, que la somme que
coûte au budget la ration d'un cheval de cuirassiers 1
Et cependant, pour les uns, vous demandez une
augmentation de traitement; tandis que aux autres,
vous refusez le modique supplément une pension
reconnue comme insuffisante.
Quelques méchantes langues disentque la
différence de votre conduite tient ce que dans
l'un cas, il s'est agi de prêtres et dans l'autre de
laïques; mais un homme au caractère élevé comme
vous, est au-dessus de ces mesquines considéra
tions; pour ma part je ne crois pas celte expli
cation malveillante!
Mais enfin je dois vous avouerque l'on ne s'y
comprend pas.
En effet, Monsieur, supposez, qne dans la séance
du Conseil communal d'Ypres, en date du 17
novembre dernier, un membre l'effet de faire
rejeter le projet de suppression du supplément
accordé aux succursalistes et aux vicaires d'Ypres,
se fut servi de paroles semblables celles que vous
venez de faire entendre la Chambre des Repré
sentants, en faveur des régents de l'instruction
moyenne, dites-le. donc, qu'auriez-vous eu
répondre?
En vérité, Monsieur, il y a là de quoi réfléchir
je vous le répète encore, vos concitoyens s'en
occupent et s'en étonnent; il faut certes convenir,
qu'ils n'ont pas tort.
Agréez, Monsieur, etc., etc.
Dn assez grand nombre d'articles du budget de
l'intérieur a été adopté mardi par la Chambre.
De nombreuses observations ont été présentées,
entre autres, sur la bibliothèque rurale et les écoles
d'agriculture, ces deux débris dn 13 août. M. le
ministre de l'intérieur a dit qu'il n'y avait pas
regretter le crédit jadis affecté b la Bibliothèque
rurale, la série d'ouvrages vraiment utiles étant
épuisée.
Quant aux écoles d'agricolture, MM. Julliot,
Van der Doockt, De Kerchove, Rodenbach, etc., en
ont démontré l'inutilité, peut-être d'une manière
quelque peu superflue, ces écoles elles-mêmes ayant
prouvé qu'elles étaient utiles comme une cinquième
roue l'est b un chariot. M. De Decker, loi, a appli
qué b ces institutions hybrides son système de
Monsieurvous n'êtes pas en sûreté ici
ajouta le propriétaire; sortez par cette porte de
derrière, vous comprenez que je ne puis plus vous
revoir. Quels que soient vos antécédents, je n'ai
pas b me plaindre de vous. Hum! ajouta-t-il en
lui-même, c'est une chose b bien examiner il a
pu cacher son jeu
Paul sortit, Ambroise et Victor le suivaient
silencieusement les deux enfants attendaient
dans une mortelle angoisse, une parole de leur
père; car ils ne pouvaient croire b la réalité de ce
dont ils venaient d'être témoins. Une parole de
leur père les eût convaincus de son innocence; car
leur père n'avait jamais menti. Leur père, depuis
plus d'un an, s'était toujours montré b eux comme
un modèle de sagesse et de vertu Mais Paul suivait
lentement le chemin, sans proférer nn mot, en
proie b mille réflexions, recueillant avec peiue ses
forces pour résister b cette épreuve. Quelques
mouvements convulsifs trahissaient seuls l'agitation
et les combats de son âme; et les deux enfants
suivaient lentement leur père, craignant d'arriver,
redoutant la vue de leur mère, de leur sœur! Ils
arrivèrent tremblants sur le seuil de la porte.
Pour être continué.)