augmententplus il faut tendre b les adoucir par
une prudente et fructueose administration.
Les édifices destinés contenir un per
sonnel chargé de soigner le moral des malheu
reux en même temps que leur misère physique
ont été fondés sous l'influence de la religionet
par là, nous devons reconnaître que la disposi
tion élever des édifices pour y recueillir des
malheureuxrentre tout-à-fait dans Vesprit
primitif des institutions de bienfaisanceSoit,
pourvu que, par religion, vous entendiez la religion
catholique. Serait-ce pour cela que, par le temps
de libéralisme qui court, les catholiques seraient
systématiquement exclus des administrations cha
ritables?
Sans doute, il est de l'essence des Hospices de
recueillir les vieillards et les infirmes; les Bureaux
de Bienfaisance ont la mission spéciale de distribuer
des secours h domicile. Ce que veut le Président des
Hospices, c'est que l'on tâche de faire entrer le
plus de malheureux possible dans les édifices exis
tants, et de donner le plus de secours possible h
ceux qui ne peuvent y être admis en attendant que
leur tour arrive. Ce que les autres veulent c'est de
créer, h grands frais de construction et d'adminis
tration, de nouvelles maisons de refuge, sans aug
menter considérablement le nombre des places, et
en réduisant rien ou'a très-peu dechoseles secours
de ceox qui vivent et meurent dans l'attente.
Ces hommes-lb ont le même système partout
en politique, en administration, en charité. Pour
les uns tout, trop... pour les autres, rien.
Ils ajoutent nous devons la sage conduite
de nos prédécesseurs et avoir trouvé les ressour
ces dont nous disposons aujourd'huiet il serait
difficile de s'en écarter sans tomber dans le
principe des socialistes
Il y a socialisme et socialisme. Celui qui con
siste secourir les pauvres, surtout les invalides,
est de très-bon aloi. Ne le craignez pas, pratiquez-
le hardiment, nul ne songera h vous en faire un
grief.
L'intérêt de la ville s'oppose une exten
sion exagérée de secours extérieurs tandis
quelle trouve tout avantage l'érection
d'établissements de bienfaisance
Il faut distinguer. On ne s'attend pas b des
secours exagérés; ce que l'on réclame, ce sont
des secours efficacesPuis, s'il faut encourager les
fondations charitables en les rendant libres, il ne
faut pas employer les revenus des Hospices pour
donner une extension réellement exagérée a ses
propriétés bâties.
Augmenter les revenus pour les distribuer
domicile c'est les verser dans un gouffre
c'est effacer chez le peuple la prévoyance qu'il
compris; puis ils s'assirent, avec un air de mutuel
défi, Louise devant son piano,Edouard sur un divan.
Si j'ai la faiblesse de céder aujourd'hui,
pensa-t-eile, me voila réduite céder demain,
après-demain, tous les jours. Il sera le maître, je
serai l'esclave. Non, je De céderai point.
El, se retournant vers Edouard
Fi delà campagne! s'écria-t-elle.
Edouard faisait de son côté la réflexion suivante:
Il est plus aisé d'éviter une première faute
qu'une seconde; ne lâchons point ce matin des
rênes qu'il me serait peut-être impossible de ressai
sir ce soir.
Et, en réponse a l'exclamation provocatrice de
Louise, il loi renvoya celle-ci
Fi des boulevards!
11 prit un livre et se mit a lire avec un calme
imperturbable.
Les doigts de Louise laissaient immobiles les
touches du piano; mais l'agitation de ses petits
pieds, battant sur le parquet une mesure précipitée,
attestait qu'elle avait des nerfs plus irritables que
ceux de sou mari.
possède déjà si peuet, par suite, d'autres
qualités tellement indispensables pourtant
son existence, que les besoins et les misères de
cette vie ne semblent destinés qu'à forcer les
hommes de les acquérir pour sortir de Vindi
gence naturelle,
Ce langage pourrait s'appliquer aux indigents
valides, mais il devient un cruel sarcasme lors
qu'on l'applique aux vieillards et aux infirmes.
On reconnaît en fia de compte
Qu'il est du devoir de l'administration de
soutenir complètement en dehors de nos éta
blissements les infirmes qui n'y peuvent
trouver place lorsqu'ils sont sans moyens
d'existence. Mais au delà de nos ressources
nous sommes obligés de compter sur la bien
faisance privéeque nous ne voulons pas
avoir la prétention de rendre inutile.
La finale est admirable! Franchement, si ces
Messieurs voulaient bien avoir la prétention de
rendre inutile la charité privée, eu égard aux
immenses ressources des Hospicesnous serions
disposés b leur passer une masse d'autres préten
tions plus ou moins ridicules.
Donc, ils n'en démordront pas augmenter
indéfiniment le nombre des maisons destinées b y
recueillir la vieillesse; consacrer b ces construc
tions et reconstructions tous les revenus extraor
dinaires, même ceux qui devraient être capitalisés,
comme le produit des ventes d'arbres; admettre
dans ces établissements d'abord ceux qui possèdent
quelque chose, ensuite seulement ceux qui ne
possèdent rien; secourir complètement en dehors
des établissements, les infirmes qui n'y peuvent
trouver place lorsqu'ils sont sans moyens d'exis
tence (et il y en a beaucoup), dans la mesure des
ressources qui restent (et elles sont épuisées par
les bâtisses)... réduire la mendicitépar consé
quent, les trois quarts des vieillards et des infir
mes... Tel est le parti pris, par nos administrateurs
de la charité légale. Et ce sont les mêmes hommes
qui prétendent que l'aumône dégrade. Quelle
intelligente contradiction!
L'arrêt de la cour de cassation qui condamne le
système de compression appliqué, depuis 1847, b
la charité chrétienne, a singulièrement modéré
l'impatience qae témoignaient les journaux de la
gauche de voir cette grave question traitée b la
tribune parlementaire. Loin de nous accuser encore
de vouloir retarder le débat, ils nous trouvent trop
empressés de l'ouvrir, et peu s'en faut qu'ils ne le
déclarent dangereox et intempestif. L'un d'eux
formule même timidement la pensée qu'il serait
peut-être convenable de renvoyer b la session
prochaine la discussion du projet de loi, en quoi il
Edouard fit uu léger mouvement d'impatieuce.
Cette lecture m'intéresse, madame, et je ne
serais pas fâché de la poursuivre tranquillement.
Eh bien
Mais ce bruit...
Vous incommode? il faut pourtant bien que
j'étudie, monsieur.
Sans agiter les touches? Singulière méthode!
Chacun a la sienne; je suis désolée que celle-
ci ne vous convjenne pas.
La mesure s'anima au point de prendre les
proportions d'un véritable roulement de caisse.
Au fait dit Edouard, je puis me retirer dans
mon qabinet.
Je n'ai pas la prétention d'y mettre obstacle.
Edouard se leva. Louise, voyant qu'il se disposait
b quitter le salon, reprit
Si pourtant vous vous décidiez.
A vous accompagner sur les boulevards?
C'est impossible, Madame.
Au moment de franchir le seuil de la porte, il se
retourna
exprime sans doute le désir secret de son parti.
Nous considérons un nouvel ajournement comme
impossible, et nous sommes convaincus que nos
adversaires eux-mêmestenant compte des justes
exigences de l'opinion publique, se résigneront b
subir l'inévitable solution du problême qu'ils ont
posé.
Ils font grand bruit, depuis six mois, d'un nou
veau livre que M. Frère vient de publier sous le
masque de Jean Van Damme. Longtemps avant
l'apparition, peut-être même avant la confection
de cet ouvrage, ils l'annonçaient avec des cris
d'enthousiasme, le qualifiant de chef-d'œuvre, de
production capitale et sans seconde, et affirmant
tout b la fois que ce travail herculéen ferait taire b
jamais les partisans de la charité libre. Jean Van
Damme s'est montré, il a parlé, plaidé, crié,
pleuré, il a épuisé toutes les ressources de la pas
sion et de la chicane, et pourtant il n'a convaincu
personne, il n'a pas détruit un seul des arguments
développés par M. Malou, au nom de la section
centrale de la Chambre. Noos avons attentivement
écouté Jean Van Damme et, nous pouvons le dire
en conscience, nous n'avons pas trouvé, dans son
long factum, une seule raison nouvelle b l'appui
de l'insoutenable thèse qu'il défend. La cause doit
être bien mauvaise pour ne pas donner des inspira
tions plus heureuses b l'habile avocat qui la patrone.
Nos adversaires prétendaient deux choses
d'abord que la liberté de la charité était inadmis
sible en principe, ensuite qu'elle était incompatible
avec les lois do pays. Sur le premier point, ils ont
été réfutés par l'histoire, par la raison, par la
conscience publique, par l'esprit de la Constitution
de i83i; aussi n'y ont-ils pas longtemps insisté.
Sur le second point, ils ont été battus par les arrêts
impartiaux du pouvoir judiciaire. Expulsés de ce
suprême refuge, ils en sont réduits aux déclama
tions dans le vide, aux accusations calomnieuses
renouvelées des plus mauvais jours de la fin du
xyme siècle.
Dans le cours de cette polémique stérile, qui
est notre principal grief contre l'administration
du 12 août, le raisonnement que voici nous a
toujours pleinement rassurés Il est impossible,
nous disions-nous, que la charité soit moins libre
en Belgique qu'en Franceen Hollandeen
Angleterre, en Allemagne et aux États-Unis.
Quoi! nous jouissons en paix de toutes les libertés
imaginables; l'association, les cultes, la presse,
l'enseignement sont dégagés de toute entrave,
et nos concitoyens seraient privés de l'usage du
plos précieux des droits, du premier des devoirs,
celui de faire le bien! Il De leur serait pas permis
Quant renseignement nous fesons nos réserres.
(Note du Propagateur.)
Mais si, de votre côté, vos réflexions vous
conseillaient...
De vous suivre b la campagne? Jamais, mon
sieur.
Edouard sortit b pas comptés, et referma la porte
avec toute la gravité d'un aspirant b la magistrature.
C'est une déclaration de guerre, fit Louise
indignée; je l'accepte.
Et les réflexions qu'elle se mit b faire n'étaient
certainement pas de nature b la conduire dans la
voie des concessions.
Était-ce donc Ib cet adorateur si dévoué, qu'il
eût été jusqu'au bout du monde loi chercher la
romance b la mode, si attentif b ses,désirs qu'il en
épiait les moindres indices? Que d'hypocrisie per
fide dans ce respect, dans cette attention, dans
ce dévoûraent Mais si elle s'est laissé prendre au
piège, elle ne souffrira point qu'on la traite en
vaincue. C'en est fait, b partir de ce jour, quels que
puissent être les goûts de son mari, il est bieo décidé
qu'elle aura les goûts diamétralement opposés.
[Pour être continué.