CHAMBRE DES REPRESENTANTS.
h domicile. De cette réduction, d'une part, et de la
retenue ope'rée pendant les six mois d'été, il suitb
l'évidence que les secours extraordinaires, accordés
arec tant d'éclat pendant l'hiver, étaient complè
tement illusoires; que, durant les dix années de
crise alimentaire, la commission n'a fait aucun
sacrifice en faveur des malheureux. Tel est le grief
culminant qui révolte tout cœur charitable et qui
justifie, il lui seul, l'opposition vigoureuse du
Président de l'administration.
Donc, en i853, le revenu des Hospices a.été de
fr. 171,837-16 et il est en voie de progrès.
Voyous !i quoi et comment cette énorme somme
est annuellement appliquée.
La population des établissements des Hospices se
partageait'de la manière suivante, au 1" janvier
i856.
Orphelins. 60 fr. 00-76 par tête, fait par jour fr. q5-6o
Orphelines 5o 00-62 3i-oo
Nazareth (vieil.) 32 00-S4 18-48
Béguinage (id.) 4° oo-65 26-00
Belle (femmes). 28 00-90 25-2o
S1-Jean (id.) 4° 00-62 24-80
S «-Jacques (id.). 28 oo-55 j5-4o
Passchendaele ?4 oo-54 13-96
292 fr. «99-44
Et par anfr. 72,795-60
Ainsi 292 individus coûtent, dans les établisse
ments, la somme de fr. 72,795*60 par an, non
compris les dépenses spéciales, médicaments et
frais d'administration.
En dehors des établissemeots, voici an 1"
janvier i856 l'état des vieillards et des infirmes
pensionnés ou secourus b domicile
Vieillards et infirmes qui ne peuvent plus travailler et
qui sont pensionnés, soit dans leur famillesoit chez des
étrangers345
Orphelins62
Vieillards et infirmes qui ne sont pas dans l'impos
sibilité absolue de travailler, et qui reçoivent un
secours permanent684
Autres vieillards et infirmes qui ne sont secourus
qu'une partie de l'année237
1,328
Les pensions et les secours en argent et en nature
accordés b ces treize cent vingt-huit individus, non
compris les dépenses spéciales, médicaments et frais
d'administration, se sont élevés a fr. 53,762-17.
C'est snr la somme globale de ces pensions et
secours extérieurs qu'en 1855 il n'a été employé
que fr. 17,o51-88 pour soulager ceux qui fléchis
sent mais ne succombent pas encore sous le faix de
l'âge ou des infirmités, comme nous l'avons avancé
dans nn précédent article. Ceux qui sont pensionnés
hors des établissements doivent être assimilés b la
population des établissements même ils sont
absolument incapables de se livrer au moiodre
travail; ceux qui n'obtiennent que des secours
temporaires éveillent moins la sollicitude que cette
catégorie intermédiaire en faveur de laquelle nous
avons spécialement élevé la voix.
Les frais d'administration des Hospices s'élèvent
VINGT MILLE FRANCS, plus de 10 p. des
revenus. Reste fr. 35,ooo-oo pour la maison des
aliénés, les hôpitaux et les médicaments, mais
surtout pour constructions et reconstructions.
La population des Hospices dans les établisse
ments s'élève donc b 292 et hors des établissements
b 1828, ensemble 1620 iodividus. Dans ce nombre
il y a, en tout, 172 orphelins; reste i448 vieillards
ou infirmes, dont 182 seulement se trouvent dans
I f
les établissements, et dont 1266 sont pensionnés
ou secourus hors des établissements. Il faut remar
quer en outre, et c'est trop frappant pour échapper
b qui que ce soit, que la population totale des
établissements, 292 iodividus coûtent fr. 72,795-
60, tandis que la population extérieure, y compris
les pensionnés, i328 individus, n'obtiennent que
fr. 53,762-17.
Maintenant nous le demandons, faut-il acheter
des maisons, quelque grandes qu'elles soient, pour
en faire de petits hospices, pour augmenter encore
le nombre déjb trop grand des refuges trop étroits;
ou bien faut-il songer sérieusements b des établis
sements modestes et spacieux qui puissent ren
fermer, l'on tous les hommes, l'autre toutes les
femmes? L'administration serait pins facileet moins
coûteuse. Il y aurait aussi plus de justice, plus
d'égalité dans les secours. Aujourd'hui les 182
vieillards qui se trouvent dans les établissements
sont les privilégiés de la charité légale; viennent
ensuite les 345 pensionnés qui constituent la classe
moyenne, et enfio les 684 secourus qui sont en
quelque sorte les rebalés de cette fière et dédai
gneuse charité officielle.
On assure qu'un mot d'ordre a été envoyé par
le Grand-Orient de Bruxelles b toutes les loges
belges, et aux membres des loges qui se trouvent
dans les différentes localités où il n'y a pas de loges
constituées, a l'effet d'obtenir des adhésions fac
tices aux excitations dont MM. Verhaegen, Lebeau,
Frère etc., se sont faits les éditeurs responsables
b la tribune nationale.
Il a été enjoint en même temps aux petits
journaux de province, de se ruer avec recrudescence
snr le clergé, les jésuites et les nounettes, de
fabriquer des nouvelles scandaleuses, afin de four
nir aux orateurs des cabarets ample matière aux
déclamations saugrenues dont se repaît si volon
tiers la tourbe des badauds.
Séance du 11 mai.
Le remarquable discours prononcé par M. de
Decker a répandu de vives lumières sur la question
de la charité. L'orateur a démontré, de la manière
la plus heureuse, que la charité officielle ou légale
est insuffisante, incomplète et dangereuse; qu'elle
doit s'appuyer sur la charité privée, et que l'un et
l'autre mode de bienfaisance penvent et doivent
marcher d'accord. Il a reconnu, avec tons les
hommes de boone foi, que la charité libre et la
charité ecclésiastique ont donné lien b des abus,
mais il a prouvé que la charité laïque et officielle
n'a pas fait naître moins d'abns. A ce sujet, il a
cité uu chiffre éloquent En France, il a suffi de
seize mois (l'administration civile et révolutionnaire
pour réduire de trois cinquièmes le patrimoine
des pauvres.
Quant aux couventsM. de Decker a fait
remarquer avec raison que la gauche combat en
eux la liberté d'association même avec ou sans
la loi actuelle, les couvents subsisteront aussi
longtemps qu'on n'emploiera pas contre eux la
force brutale.
Vingt fois interrompu par des voix intolérantes,
M. de Decker a achevé l'exposé des salutaires
doctrines qu'il professe. Il s'est montré plus libéral,
dans le sens honnête du mot, que ses adversaires
impatients, et il leur a donné de sages conseils
qu'ils ne suivront pas, si l'on en juge d'après
leur altitude.
Séance du 12 mai.
Le mot d'ordre était donné pour la séance de ce
jour. Les tribunes publiques étaient pleines; long
temps avant l'ouverture de la séance, toutes les
places étaient prises par un auditoire choisi. M.
Frère devait parler on s'attendait b du bruit, b de
petits scandales parlementaires. Certain public en
est assez friand par le temps qui court. Eu réalité,
ces espérances ont été déçues; M. Frère a été
relativement modéré; il s'est borné b soutenirb
développer les propositions suivantes la majorité
actuelle des Chambres ne représente pas la nation
la minorité la représente mieux l'évêque de Bruges
a dicté le projet de loi b M. Nothomb; ce prélat,
né malin, créa les administrateurs spéciaux, admis
en Belgique depuis 60 ans; les couvents mangent
le bien des pauvres; les moines et les nonnetles
s'approprient ce qui ne leur appartient pas; les
Belges ont tort de se faire moines, et leurs filles ou
sœurs d'entrer en religion; il est bien vrai que le
système do projet de loi fut pratiqué en Belgique
depuis i83o et même depuis 1809 jusqu'en 1847,
et que des ministres libéraux l'appliquèreDt eux-
mêmes, témoin MM. Lebeau, Ernst, Leclercq et
Rogier; mais b cette époque ils ne savaient pas ce
qu'ils faisaient (voir la lettre de M. Lebeau au
Moniteur)-, la lumière s'est faite le 12 août 1847,
et le parti libéral a compris alors qu'il avait suivi
une fausse voie. Aujourd'hui il est unanime pour
adopter les idées de MM. Frère, de Hanssy et
Tesch; on n'est libéral qu'b cette condition, et
quiconque n'y souscrit pas, est un traître qni doit
être affiché au pilori.
Séance du i3 mai.
Les violentes interruptions de la gauche n'ont
pas empêché M. Bumortier de faire boone justice
des erreurs accumulées dans les discours de MM.
Verhaegen et Frère. Tous les faits allégués par ces
derniers orateurs ont été discutés et refutés par M.
Dumortier avec une logique entraînante qui a fait
une véritable impression sor l'assemblée. M.
Dumortier a été surtout éloquent quand il a vengé
les religieuses des ateliers de charité, de l'outra
geante et fausse accusation que M. Frère avait
formulée contre ces anges de vertu d'empocher le
salaire des pauvres enfants qu'elles instruisent.
M. De Haerne de son côté a appuyé les obser-
valions de M. Dumortier.
Séance du i4 mai.
M. Vilain X1III a achevé la démonstration faite
par MM. Dumortier et De Haerne et a fourni des
preuves matérielles et irréfutables de la calomnie
tombée du haut de la tribune aux pieds des sœurs
de charité.
Avant lui M. Orts plus modéré dans la forme
que d'autres orateurs de la gauche s'est attaché a la
critique des principes du projet de loi; il est aussi
intolérant et ennemi de la liberté que ceux qni
crient bas les couvents; mais du moins il a
observé les convenances parlementaires.
M. De Steeuhalut a proposé quelques amende-
meuts au programme maçonnique; il n'est pas
l'ennemi des couvents; mais il demande une loi
spéciale pour chaque fondation, ce qui équivaut b
la suppression du projet de loi.
Le projet de loi sur la charité est très bien
apprécié dans le pays; on comprend partout la
nécessité d'en finir avec cette qnestion trop long
temps controversée; et s'il y avait quelque chose
capable d'agiter nos populations, ce serait le triom
phe des idées libérales qne M. Lebeau préconise en
1857, après avoir renié celles que jadis il mettait
en pratique. Lb serait le danger, et s'il était permis
de soumettre des intérêts aussi graves que ceux
de l'humanité souffrante b une expérience hasar
deuse, nous dirions b MM. Lebean, Rogier, Frère
et Tesch: Abolissez les couvents; détruisez la
charité privée; fermez les asiles qu'elle a ouverts b
toutes les souffrances; substituez-y la froide bien
faisance officielle, et avant six mois, le pays
vous chassera, comme il vous a chassés il y a cinq
ans; car vous ne pouvez l'avoir oublié, c'est votre
système spoliateur des pauvres qui a fait porter les
premiers coups b votre domination c'est au nom de
la liberté de la charité, que furent élus en i85o M.
le baron d'Anethan b Thielt; M. Malou père b
Ypres, et depnis, votre administration n'a plus
été qu'une longue série d'échecs. Poarquoi? M.
Verhaegen l'a dit Étant au pouvoir, le parti
libéral n'a fait que des sottises, et la plus
graode, la plus odiease, qui froissait le plus nos
populations, était celle qui allait emprunter b la
Convention nationale de 93 sa tyranniqne spolia
tion des pauvres. [Patrie.)