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grave, la confiance altérée; oo fera appel an
dévouemeot du Roi, pour faire cesser la cause de
l'irrilalioo; cette cause, c'est le projet de loi que
l'on condamne de toute sa hauteur comme impo
pulaire et comme ayant fait naître un profond
mécontentement dans le pays; enfin l'on espère en
prenant l'initiative d'entraîner, sur cette pente
révolutionnaire, les conseils communaux du pays.
Nous ne qualifierons pas celte conduite. Pour
ne point y voir la complicité avec l'émeute nous
avons besoin de dire que les cris séditieux sont
capables de donner des vertiges h bien de têtes.
Mais aussi nous devons protester hautement lors
qu'on veut rendre le pays solidaire et complice des
désordres de la capitale. Que le projet de loi sur
la charité scandaleusement travesti et calomnié
par les orateurs et les journaux de la loge, soit
impopulaire auprès des émeutiers stupides ou
pervers de la ville de Bruxelles; qu'il ait excité un
profond mécontentement dans les loges maçonni
ques de Bruxelles et dans lenrs affiliations; que la
faction du désordre ait recours aux plus mauvais
moyens pour troubler et déconsidérer le pays le
plus calme et le plus respecté du monde, et pour
porter on coup mortel k nos sages et libres insti
tutions, cela nous le savons. Mais uous savons
aussi que le seul sentiment qui anime le pays, c'est
l'indignation contre les désordres de la capitale,
d'autant plus coupables qu'ils n'ont pour prétexte
qu'une loi réclamée depuis longtemps par l'im
mense majorité de nos populations, ooe loi k
laquelle on ne pourrait reprocher peut-être que
son esprit de modérationde conciliationde
condescendance poussée jusqu'aux dernières limi
tes, au point que snr la terre classique de la liberté,
elle nous laisse, pour faire le bien aux pauvres
bien moins de liberté que dans aucun autre pays
du monde civilisé.
Qne la capitale revienne donc k l'ordre et au
bon sensbelge; qu'elle cesse de servir d'instrument
aux passions révolutionnaires de l'Europe; k ce
prix seul le patriotisme du pays pourra s'efforcer
de concert avec la ville de Bruxelles k guérir la
profonde blessure qui vient d'être portée k la
considération dont jouissait notre belle patrie,
notre chère Belgique.
Avant 1847, personne ne parlait d'une loi sur
la charité, on n'y songeait même pas.
Arrive le cabinet du 12 août et avec lui nn
système d'interpréter la volonté des testateurs,
jusqu'alors inconnu et contraire k la législation qui
était restée intacte pendant pins d'un demi-siècle
sons tous les régimes qui avaient gouverné notre
pays.
Le cabioet du 12 août prit pour principe de
substituer sa volonté k la volonté sacrée des testa
teurs; selon lui, distribuer les aumônes léguées aux
pauvres, administrer les fondations faites en leur
faveur, c'était un droit dévolu uniquement aux
établissements officiels; toute disposition testa-
malheureuse et sublime créature était une mère
Et maintenant, que dire des douleurs de la dignité
maternelle? Elles sont ineffables comme ses joies.
Quand cette couronne se brise 00 flétrit, quand
cette douceur se change en amertume, quand cette
joie, qui avait fait oublier de si étranges angoisses,
est refoulée, trahie, quand la pauvreté, l'abandon
ou la mort viennent fondre sur cette mère, et lui
ravir ce qu'elle a de plus cher au monde, oh alors,
il se fait un profond silence dans cette âme, un
silence de désolation sur ce front découronné
passent des nuages sombres qui semblent cacher
des foudres, et puis bientôt la tempête éclate.
u Une voix a été entendue dans Rama, c'étaient
des pleurs et des cris c'était Rachel pleurant ses
enfants, et elle n'a pas voulu se consoler, parce
qu'ils ne sont plus: Nolnit consolari, quia non
sunt. a (S. Matth.2, 18).
N'était-ce pas aussi aux pieds de son fils expirant
qu'une mère s'écriait autrefois 0 vous tons qui
passez sur ce chemin, arrêtez-vous un moment:
considérez et voyez s'il est une douleur pareille
k ma douleur 0 vos omnes, qui transitis per
mentaire, quelque expresse et légitime qu'elle fut
devait plier devant celte règle arbitraire.
Un cri d'indignation retentit partout le pays; les
tribunaux rendirent justice k la liberté; et depuis
lors fut reconnue la nécessité d'une loi sur la
charité, qui d'une part en consacrant le principe de
la liberté, présentât les garanties les plus fortes
contre toute sorte d'abus, mais d'autre part fit
cesser l'arbitraire odieux par lequel on avait mé
connu la volonté des destateurs, et put en empêcher
le retour.
Quand le ministère catholique parvint aux
affaires, le pays lui demanda cette loi; en déposant
son projet de loi, le ministre de la justice, répondit
k cette légitime attente. Mais depuis lors, ce projet
fut l'objet des attaques les plus injustes les plus
malveillantes de la part des pseudo-libéraux; ils
en ont travesti le sens et la portée, ils ont excité les
passions les plus violentes, ils ont trompé le pays,
ils l'ont conduit k l'émeute; la Belgique était
calme et tranquille, ils ont soufflé le feu de la
discorde et jeté la perturbation dans le pays.
D'où est partie la provocation? N'est-ce pas de
ce parti qui a foulé aux pieds la législation qui
gonvernait les legs et les dons charitables depuis
un demi-siècle, en substituant la volonté d'un
ministre k la volonté da testateur?
Les déplorables excès qui ont eu lieu k Bruxelles,
ont été k Paris, l'objet d'une réprobation unanime.
On ne comprend pas comment MM. les libéraux
entendent le régime de la liberté ils le gardent
pour eux seuls pour les autres ils le confisquent.
Au début de la séance de la Chambre des
Représentants samedi 3o, M. le ministre de l'inté
rieur a donné lecture d'un arrêté royal du 5o mai,
ajournant le Sénat et la Chambre des Représentants.
Les membres se sont aussitôt séparés aux cris de
Vive le Roi.
ÉMEUTE BRUXELLOISE.
Journée du vendredi. Quelques arrestations
ont été faites pendant les scènes tumultueuses d'hier
soir. Ou a commencé l'instruction judiciaire.
Un certaio nombre de personnes appartenant k
des congrégations religieuses ont quitté Bruxelles,
ce matin, et sont parties dans diverses directions,
par les chemins de fer.
Les rassemblements se sont prolongés jusqu'à 3
heures do matin. Le couvent des Capucins a été
plusieurs fois assailli, ainsi qne la demeure de M.
Malou, celle de M. Coomans, les bureaux du Jour
nal de Bruxelles, etc.
La gendarmerie, la police et la troupe ont fait
preuve d'une très-grande modération.
A six heures etdemiedu soir, des rassemblements
considérables circulaient dans les quartiers popu
leux. Le principal a débouché k cette heure-lk
place de l'Hôtel-de-Ville. M. le bourgmestre se
trouvait k la Permanence. Ce rassemblement s'était
rendu déjà au collège S'-Michel, au couvent des
viam, attendile, et videte si est dolor sicut
dolor meus.
Voilk bien le cri d'une mère dont on a enlevé le
fils, dont les entrailles sont déchirées.
Non rien n'est plus auguste et tout k la fois plus
tendre et plus terrible que ce cri de la douleur
maternelle. Je l'ai entendu quelque fois. Il est
vénérable, il est redoutable; il a une majesté qui
étonne, et un éclat qui déchire c'est un sanglot de
l'âme qui domine et qui saisit, qui pénètre et qui
brise. Il n'y a pas de créature si sauvage, ni
de férocité si extrême qui ne cède k ce cri. La plus
hnmble des femmes devient une lionne, quand on
lui arrache son enfant Mater tua leœna. (Ezech.
19-2).
Rend-moi mon fils, disait au lion de Florence,
dans le transport de sa douleur et k genoux, une
mère éperdue; et le lion, saisi, épouvanté, déposa
l'enfant aux pieds de sa mère!
Ce cri vient d'une douleur si étrange, d'une
si profonde et si irrémédiable douleur, que je n'en
saurais révéler ici tout le mystère.
Je n'en dirai qu'une chose, laquelle m'est ensei-
Capucins et devant le palais du Roi, en chantant la
Brabançonne.
Dans la foule énorme qui encombrait dès 7
heures tous les abords du Théâtre de la Monnaie,
on remarquait peu d'ouvriers et beaucoup de mes
sieurs étrangers k la capitale.
Lorsque la première voilure de la cour est arrivée
pour le spectacle par ordre (elle renfermait le
comte de Marnix, maréchal du palais, et un officier
d'ordonnance), vers 8 heures 5[4, la manifestation
est devenue extrêmement bruyante. On criait a
tue-tête Vive le Roi! bas la calotte!
Cette démonstration a pris des proportions beau
coup plus grandes encore lorsque le duc et la
duchesse de Brabant sont entrés au Théâtre quel
ques minutes après. Les cris de Vive le Roi! vive
le prince! bas la calotte! ci bas la droite!
dominaient toujours.
Le duc et la duchesse, malgré l'émotion qu'ils
devaient naturellement ressentir, gardaient le pins
grand calme.
An sortir de la représentation de Guillaume
Tell, les manifestations ont recommencé et une
alarme assez vive s'est répandue dans la ville.
Le duc et la duchesse ont passé la nuit au palais
du Roi.
Les estafettes allant k Laeken et aux ministères
se succédaient de minute en minute.
Devant le palais de la Nation, près de la statue
de la Constitution, des fusées ont été tirées. Le
poste du théâtre du Parc a dû intervenir. Uoe
femme a été blessée k la main par un coup de
baïonnette.
Toute la nuit a été fort agitée.
Ce matin, des jeunes gens de la province des
Flandres et de Liège ont continué k arriver.
On a fait retirer les Petites-Sœurs des Pauvres,
qui allaient ce matin au marché pour recueillir des
aumônes. D'autres religieuses, qui s'étaient hasar
dées dans la rue, ont été l'objet de manifestations
très-hostiles. Beaucoup de prêtres ont été brutale
ment hués.
On annonce pour ce soir de nouvelles attaques
contre le Journal de Bruxelles et Y Émancipa
tion belge. Nons aimons k croire, pour l'honneur
du pays, que les menaces qui nous parviennent ne
seront pas réalisées.
Les troupes restent consignées.
Des agents de police ont été attaqués et l'on a
brisé la lanterne du commissariat de la 4e division.
Il y a eu, depuis hier, trois conseils des ministres.
A deux heures l'agitation était générale.
La garde civique est convoquée pour ce soir k 6
heures. On a commencé par la 3° légion, k la
réquisition du bourgmestre.
Beaucoup de troupes des différentes armes sont
arrivées des garnisons environnantes et sont logées
dans les faubourgs. Les cuirassiers et l'artillerie
occupent les faubourgs supérieurs.
Autour du palais des Chambres et au Parc les
gnée par les Saintes-Écritures, par ces mêmes
livres qui m'ont appris la noblesse primitive de la
compagne de l'homme, et puis sa chute, les gran
deurs et les joies de la dignité maternelle.
Il est évident, et c'est là ce qui fait définiti
vement la dignité supérieure de la mère ici-bas,
il est évident que la mère est destinée k une
souffrance expiatrice et sacrée. Elle est grande,
parce qu'elle souffre. Et si, en la voyant, je suis
saisi d'une religieuse émotion c'est que toutes les
douleurs les plus cuisantes de la terre sont pour
elleI De tous les coups qui devaient fondre sur la
nature humaine et la mettre en poudre, le coup le
plus terrible est tombé snr la mère de l'homme
c'est elle que les angoisses de la vie et les menaces
de la mort atteignent la première. C'est k elle que
les peines les plus amères de l'humanité se font
d'abord sentir, et cela souvent dans la plus vive,
dans la plus heureuse jeunesse; c'est k elle qu'il a
été dit Tu les enfanteras dans la douleur In
dolore paries Jilios. (Gen. III, 16).
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