40me Année
Samedi 11 Juillet 1857.
No 4,151.
pour la ville 6 fr. par an, pour le dehors fr. 7-50 par
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
trois mois. pour 3 mois.
7PB.BS, il Juillet.
bulletin politique.
rouissage du lin.
LE PROPAGATEUR
Par toute l'Europe les passions révolutionnaires
se réveillent avec une énergie nouvelle. Chez nous
elles firent no premier essai de leurs forces au mois
de mai dernier. Aujourd'hui il s'en est fallu de peu
qu'une machination ténébreuse n'enveloppât dans
son lacet infernal la France, l'Espagne et l'Italie.
Nous avons, dans notre dernier numéro, rap
porté les événements dout la Péninsule Italique a
été le théâtre.
A la même époque un mouvement insurrection
nel éclatai: en Espagne, dans la province de Séville.
Une troupe de cavaliers s'est portée sur Utrera,
ville d'environ 2,000 âmes. La place est envahie
aux cris de 'vive la république. Les factieux
incendient l'hôtel-de-ville et les quartiers des
troupes qui leur résistent, enlèvent 4o,ooo fr. h la
caisse publique, finalement se retirent dans les
montagnes. Une agitation dans le même sens s'est
produite simultanément en diverses localités im
portantes du royaume, et le maréchal Narvaez,
chef du cabinet espagnol, n'eo a point dissimulé la
gravité. Il a ajouté que le devoir d'assister le
gouvernement' devait passer avant toute autre
considération pour les hommes loyaux que l'oppo
sition compte dans ses rangs.
On présume qu'à cette vaste conspiration se
rattache également le complot récemment décou
vert contre la vie de l'Empereur des Français.
Dans des circonstances aussi graves, au sein de
la solennelle épreuve que traverse l'Europe, alors
que le poignard des siccaires menace également la
poitrine de tous les rois, des Bonaparte aussi bien
que des Bourbons, de Victor-Emmanuel comme de
Ferdinand, c'est chose déplorable que de voir le
gouvernement français se mettre la suite de
mylord Palmerston, épouser ses rancunes contre le
roi des Deux-Siciles et prétendre, lui Napoléon III,
lui si jaloux de sa propre autorité, si absolu dans
l'exercice de son pouvoir, prétendre imposer, (sans
nul soucis de la dignité royale,} un prince de la
trempe du roi Ferdinand II, des réformes adminis
tratives dont loi-même ne voudrait pas.
Quoi qn'il en soit, le gouvernement impérial
vient de poser un nouvel acte de pouvoir fort.
L'Assemblée Nationale, feuille bourbonnienne et
fusionnisle, est suspendue pour deux mois. Elle
avait osé émettre, avec beaucoup de ménagements
toutefois, l'opinion que le gouvernement aurait
influencé trop puissamment les électeurs, pour que le
vote intervenu pût être regardé comme l'expression
franche et réelle de l'opinion publique
Alors que la presse impie et licencieuse conserve
ses coudées franches et redouble d'excèsil est
fâcheux que la religiou et les principes conserva
teurs perdent encore un de leurs plus vigoureux
champions.
Le libéralisme anti-clérical constitue au sein de
la nation un mauvais levain qui, si l'on n'y prend
garde, produira, de temps autre, quelque débor
dement révolutionnaire. C'est un ramassis de tous
les mécontents, de tous les écervelés, de tous les
utopistes, de tous les misérables qui grouillent dans
les bas-fonds de la société; et la tête de cette
armée monstrueuse vous voyez quelques ambitieux
qui ont la piramidale prétention d'exercer, pour
eux et les leurs, le monopole de l'iutelligeuce et
des lomières, le monopole eo matière de religion,
d'administration et de politique; le monopole de
toutes les libertés pratiques. Ces extravagants
n'entendent compter avec personne; peut-on
songer encore sérieusement compter avec eux?
Déjà plusieurs tentatives de transaction, de conci
liation, ont échoué, quoiqu'elles fussent faites par
des hommes choisis dans les rangs du pseudo-libé
ralisme. Lorsqu'ils sont au pouvoir, ils proscrivent
de toutes les positions les catholiques et leur
ferment l'accès aux fonctions les plus secondaires;
lorsqu'ils ne sont pas au pouvoir, ils entravent les
ministères de transition pour avoir b combattre nn
ministère catholique. Ainsi donc, il faut être aveu
gle pour ne point voir, que les pseudo-libéraux
sont les enoemis jurés de tout ce qui touche au
catholicisme. La rage d'attaquer les catholiques est
telle chez eux, qu'ils signalent des griefs imagi
naires lorsqu'ils n'en trouvent pas qui aient
l'ombre de la réalité. Une majorité non équivoque,
une majorité telle que les faux libéraux n'en eurent
jamais dans la Chambre, porte au ministère des
hommes aussi recommandables par l'élévation de
leur caractère que par la distinction de leur talent
ils représentent hautement, et sincèrement l'esprit
qui a présidé aux discussions de notre pacte con
stitutionnel. Us ne tendent pas, eux, b fixer la
suprématie d'une opinion sur une autre; ils veulent
que l'équilibre établi par la Constitution ne soit
point rompu. Ils travaillent au développement de
toutes les libertés dont l'immortel Congrès a
déposé les germes dans son œuvre. Ce ministère
présente avec loyauté et bonne foi un projet de
loi qui garantit la liberté de la charité, en même
temps qu'il en soumet l'exercice b un contrôle
sérieux et efficace. Que feront les pseudo-libéraux?
Il s'agit d'une loi qoi ne touche, ni b la politique,
ni b la religion; l'ÎBtérêi de» pauvres, de ceux qui
ne peuvent plus travailler ou qui, malgré la meil
leure volonté, ne trouvent pas b occuper leurs
bras, cet intérêt sacré pour tout homme de cœur est
seul en jeu; les pseudo-libéraux serout-ils heu
reux de concourir b une bonne action? Non, sans
doute, ils ne sentent pas ce qu'il y aurait eu
d'honorable dans une pareille conduite ils ont
dénaturé le projet de loi pour s'en faire une
arme déloyale et contre la majorité de la nation,
et contre le catholicisme et contre ses ministres. Ils
ont arrêté l'accroissement du patrimoine des pau
vres, pour assouvir leur haine aveugle et barbare
contre les catholiques eo masse; ils ont fait appel
b l'émeute, et l'émeute est allée jusqu'au massacre
de Jemmapes.
L'émotion que la question du rouissage do lin
dans la Lys a produite dans nos contrées est on ne
peut plus légitime. Il s'agit d'une question de vie
ou de mort pour l'industrie linière la plus impor
tante et la plus florissante de la Flandre-occidentale.
Nous ne pouvons donc qu'applaudir b l'empres
sement que met l'unanimité des Conseils communaux
desarrondisseiuentsd'Ypreset de Courtraib envoyer
des pétitioos au gouvernement pour neutraliser les
efforts eo sens contraire de la Flandre-orientale.
Ces démonstrations importantes, jointes b tant
d'autres, nous donneront infailliblement gain de
cause; car il est impossible que le gouvernement, si
bien instruit sur la gravité des intérêts menacés,
puisse consentir b sacrifier une industrie qui fait la
prospérité de nos contrées et qu'il s'est tant efforcé
de préserver de la décadence qui la menaçait
autrefois.
Comme l'ont bien fait comprendre MM. Danneel
et Van Ackere dans la réunion des bourgmestres de
l'arrondissement de Courtrai, les lins rouis dans la
Lys ont une plus value de 5o p. sur tous les
autres. Impossible de remplacer ce rouissage par
tout autre quelconque. Les eaux de la Lys seules
sont propres b rouir ces lins qui par leur couleur,
leur force et leur finesse ont acquis sous le nom de
lins de Courtrai une réputation européenne. M.
Van Ackere, bourgmestre de Wevelgbem, évalue b
la somme de I2,3g4,2gi fr. la valeur des lios rouis
en Belgique dans les eaux de la Lys. Combien donc
sont nombreux et graves les intérêts des proprié
taires, fermiers, marchands de lins, rouisseurs,
ouvriers, etc., etc. qui sont engagés dans la question.
Que I'od mette quelque entrave an rouissage, et
immédiatement cette industrie quittera notre sol,
pour aller se transplanter en France où l'on rouit
et rouira sur la rive de la Lys qui appartient b ce
pays et même snr les deux rives de la partie de la
rivière qui appartient exclusivement b nos voisins.
L'on objectera donc, autant que l'on voudra b
Gand, la corruption des eaux de la rivière et des
dangers plus ou moins probables ou exagérés
d'insalubrité provenant do rouissage, ces quelques
inconvénients disparaissent devant l'importance
des intérêts eogagés, devant la jouissance depuis si
longtemps acquise et incontestée, malgré ces incon
vénients que la chaleur et la sécheresse exception
nelle delà saison ont pu rendre un pen pins sensibles.
Ces inconvénients surtout ne peuvent amener
aucune entrave au rouissage; parce que la corruption
des eaux de la Lys provient en grande partie de la
corruption des eaux de la Deule qui se déversent
dans la Lys vers la Pentecôte avec les ordures des
égoûts de Lille et les résidus des nombreuses fabri
ques de teintureries et prodaits chimiques; parce
que l'on rouit dans la Lys en France comme en
Belgique; parce que en détroisaot l'industrie linière
du pays, celle-ci irait en France répandre ses
bienfaits tout en donnant aux eaux de la Lys
les mêmes éléments de corruption qu'elle leur
fournit actuellement.
L'on commence b comprendre la chose b Gand
et l'opposition au rouissage commence b s'affaiblir.
Dans la séance de samedi dn Conseil communal la
commission chargée de rechercher les mesures b
prendre contre le rouissage avait déposé un rapport
concluant 1* b faire demander l'autorisation de
poursuites contre certains rouisseurs; 2* b adresser
une plainte au procureur-général avec prière
d'instructions b donner par lui aux officiers des
parquets pour faire poursuivre les rouisseurs; 3° b
faire une enquête sur les dommages éprouvés par
la ville de Gand par suite du rouissage. Des objec
tions fondées sur le rouissage en France ont été
faites. M. De Hemptinne, soutenu par M. De Baets,
a proposé d'instituer une commission chargée de
terminer l'affaire b l'amiable, et un amendement de
M. De Baets-est adopté, stipulant que la com
mission d'enquête recherchera tous les moyens
pratiques pour détourner le mal.
On écrit d'Ostende
Parmi les étrangers de distinction que la belle
saison nous amène, qu'ils viennent de l'Angleterre
ou de la Russie, de la France ou de l'Allemagne,
nous n'en avons entendu aucun qui ne déplore
avec amertume, qui ne flétrisse avec plus de sévé
rité que oous-mêmes les excès dont la Belgique a
été un moment le théâtre excès dans les rues,
excès dans la presse, excès b la tribune parlemen
taire; excès ou tout au moins écarlsimpardonnables
de la part de quelques conseils communaux
sortant de leurs attributions, de la part de quelques
magistrats connivant, nous dirions presque pacti
sant avec l'émeute, de la part de quelques ministres
étalant une faiblesse ou une ignorance qoi a failli
tout compromettre. Tout le fait présager, ce cri
uoanime de réprobation, ce jugement impartial des
nations voisines acquerront une force devant
laquelle les mesquineries et les illusions du men-
I songe céderont.