les dernières élections assez d'énergie et de vie pour
neutraliser d'a»auce les meneurs des loges et les
rendre impuissantes. Ceux-ci ont obtenu momen
tanément par toutes sortes de moyens un inconles-
tablesuccès; ils oot arraché au pays comme sanction
des émeutes et des illégalités commises, une majo
rité libérale assez considérable; ils n'en ressentent
et n'en conservent pas moins le vice de leurorigine:
le manque d'uoe base solide d'autorité et d'action.
Issus de la calomnie et de la violence, nés du dés
ordre, ils ne sauraient jouir ni du prestige néces
saire pour gouverner, ni avoir confiance en eux-
mêmes et dans la bonté de leur cause; ils se voient
dépaysés dans la sphère du pouvoir, qui n'a sa
raison d'être que pour le maintien et la défense de
l'ordre, du bien être public, des lois et de la justice.
Le pouvoir leur btûle les mains et leur activité est
absorbée en grande partie par les préoccupatious,
les efforts et les luttes pour couvrir le vice de leur
origioe. Ils ne jouissent l'extérieur ni de la
considération ni de la confiance indispensables pour
sauvegarder les intérêts du pays; l'alTaire Charras
montre assez leur impuissance faire respecter
l'honneur et l'indépendance de la Belgique.
Mais leurs plus cruels embarras leur viennent
encore de leur propre parti. La révolution y a fait
son entrée, et c'est grâces son coocours que l'on
a remporté la victoire danslesélections; maintenant
radicaux, révolutionnaires, démagogues, le Natio
nal en tête, veulent régler leur compte avec le
ministère et le pousser en avant daos la voie du
progrès libéral et anti-social.
Le ministère a beau désavouer ses alliés; ceux-
ci n'en crient que plus haut; ils comprennent et
organisent leurs forces et se préparent se passer
du coocours du parti libéral; déjà Bruxelles, en
dépit de l'Association libérale et du mioistère,
ils ont imposé la candidature de M. de Perceval, et
se moquent amèrement du parti qui cherche dans
sa défaite des prétextes pour sauver les apparences.
Le parti radical culbutera bientôt ou absorbera et
ministère et libéralisme, et il ne restera de salut au
pays que dans l'énergie et le dévouement du parti
catholique et dans le retour sincère d'une grande
fraction libérale aux principes unionistes du Con
grès national de i83o.
Le mioistère vient de céder aux exigences de la
partie factieuse du libéralisme en ce qui concerne
l'intervention de l'autorité militaire dans la répres
sion de troubles, émeutes, attroupements, etc. On
sait que son prédécesseur avait repoussé ces exigen
ces, et l'arrêté royal du ?8 août dernier avait
consacré les règles suivre. En prenant le pouvoir,
combats passés et aux combats venir.
On rapporte que Radetzky, cheval, sombre
et pensif, se retourna brusquement. Il vit Milan
l'horizon, Milan avec ses feux de la place
publique et ses lumières aux fenêtres; un mur-
mure lointain arrivait jusqu'au vieux capitaine,
et son œil suivait sur le fond noir du ciel les
contours des édifices. Son regard s'illumina tout
coup, et il dit Nous reviendrons bientôt!
nous reviendrons bientôt? Tel est l'adieu du
lion, tel doit être l'adieu du soldat.
a Durant celte marche péoible et marquée par
des combats de toos les jours, de toutes les heures,
le noble vieillard ne se laissa pas abattre un seul
instaot. Partout les routes étaient coupées par des
barricades qu'il fallait enlever la baïonnette;
l'insurrection était partout. Les paysans armés
tuaient ses soldats isolés, arrêtaient ses convois,
interceptaient ses communicatious et avaient réduit
son armée aux dernières extrémités. Radetzky
poursuivit imperlurbablementsesopérations, sauva
la place de Maoloue et arriva Vérone. La situation
était des plus critiques.
L'insurrection était géuéraleen Italie; Venise
le cabinet actuel n'avait pas osé rapporter cet j
arrêté, et la circulaire du général Berten, ministre
de la guerre, en date du 6 décembre, reproduisait,
un seul point près, la décision royale du 28 août.
Mais les ardélions du conseil communal gantois
ne voulureot pas en avoir le démenti leurs amis
avaient dû fuir en mai 1857 devant les troupes du
général Capiaumont; une seconde fois, deux plan
tons du général les avaient mis en déroule au mois
d'octobre, et la ville de Gand avait été privée ainsi
de ces manifestations nationales, que le
vulgaire appelle des émeutes, et qui ont placé
MM. Rogier, Frère, Tesch et de Vrière dans les
fauteuils ministériels.
Cet état de choses ne pouvait durer et le 2 1 du
mois de décembre, les meneurs gantois firent écrire
par l'échevin Van Potlelsberghe, faisant fonctions
de bourgmestre Gand, une lettre qui, sous forme
de demande d'explications, iovitait M. Rogier
donner l'émeute des coudées plus franches et
détruire les règles établies par l'arrêté royal du 28
août dernier.
M. le ministre de l'intérieor ne pouvait ne pas
acquiescer cette demande, et renouvelant le sys
tème inconstitutionnel et illégal du ministère du 12
août, il a détruit, par une simple lettre au
bourgmestre de Gand, ce que le Roi, par arrêté du
28 août dernier, avait établi il a décidé qu'en cas
d'émeute, de désordres ou d'attroupements, l'auto
rité militaire ne peut pas se mettre en position
d'agir saos réquisition préalable. De sorte qu'il
suffira désormais de la malveillance ou de la négli
gence d'un bourgmestre, pour qu'une ville soit
impunément livrée au pillage. Cette concession faite
l'émeute, est grosse des conséquences les plus
graves.
Voici la lettre que M. Rogier a écrite au
bourgmestre de Gand
Bruxelles, a5 décembre 185^.
Monsieur le bourgmestre,
Il ne peut y avoir deux manières d'ioterprêter
la circulaire du 6 décembre dont la rédaction a été,
ainsi que j'ai eu l'honneur de vous l'écrire, concer
tée entre les départements de la guerre, de la justice
et de l'intérieur. Cette circulaire aurait manqué
complètement son bot, si elle devait laisser subsister
des doutes et des divergences d'opinion qu'elle avait
spécialement pour objet de faire cesser.
Il s'agissait de déterminer la part faire
l'autorité civile et l'autorité militaire, en cas de
troubles, émeutes, attroupements.
Quaod de telles circonstances se présentent et
que l'autorité civile reconnaît la nécessité de faire
venait d'être abandonnée par le comte de Zicby; le
roi de Piémont s'apprêtait au combat; la Toscane,
Naples et Rome, suivaient l'exemple du Piémont,
et l'armée autrichienne était réduite une poignée
de soldats. Mais Radetzky était là le noble vieillard,
loin de sa patrie, sans ordres, saos secours, resta
ferme et inébranlable, et donna toutes les armées
de l'univers le grand exemple de ce que peuvent la
fermeté et la puissance de caractère d'un seul
homme sur les destinées de l'humanité.
Son plan fut aussi savamment combiné qu'éoer-
giquement exécuté, et lorsque Charles-Albert vint
la tête de 60,000 hommes d'infanterie et de
4,8oo chevaux, sans compter 4o,ooo hommes du
contingent italien, lui présenter la bataille, il
trouva l'armée autrichienne habilement échelonnée
sur la rive gauche du Mincio, de Mantoue au lac
Guarda.
Radetzky n'avait que 3o 4o,ooo hommes
mettre en ligne, mais c'étaient des troupes éprou
vées. Le combat de Santa-Lucia, livré le 6 mai, fut
le prélude de la malheureuse journée de Novare,
qui décida des destinées de l'Italie. Ce combat ne
pouvait laisser de doute sur l'issue de la journée du
interveuir la force militaireil convient qu'un cou.
cert préalable s'établisse eotre les deux autorités.
Le doublement des postes, l'emplacement des
troupes, l'occupation de certaines rues ou parcs,
sont des mesures qui peuvent être concertées de
commun accord.
Si ce concert, par des circonstances quelcon
ques, n'a pu s'établir, l'autorité militaire doit
attendre pour agir ou se mettre en position
d'agir, la réquisition légale de l'autorité civile.
Une fois requise, l'autorité militaire est seule
juge des mesures prendre pour la répression.
Toutefois, et sauf le cas de flagrant délit, l'em
ploi de la force ne peut avoir lieu qu'après les
sommations exigées par la loi.
Telles sont, monsieur le bourgmestre, les ex
plications que je crois devoir vous donner en
réponse votre lettre du 21 de ce mois. Mes
collègues de la guerre et de la justice qui j'en ai
référé, pensent avec moi, que la circulaire du 6
décembre, sainement interprétée, ne pouvait avoir
d'autre signification, et j'espère que désormais elle
ne laissera aucun doute dans l'esprit de ceux qui
sont chargés de l'exécuter.
Recevez, Monsieur le Bourgmestre, l'assurance
de mes sentiments distingués. Ch. Rogier. tt
Nous espérons que prochainement on soulèvera
dans les Chambres la question de savoir simême
sous le cabinet de l'émeute, une circulaire ministé
rielle peut annihiler un arrêté royal. MM. De
Haussy et Tesch ont déjà, sous le 12 août, usé de
cette licence, et le ministère de mai-novembre
vient de la renouveler. Il faut donc que l'on sache
si l'autorité royale doit céder devant l'autocratie
ministérielle. (Patrie.)
p.
Les superbes pachas de l'Association libérale
bruxelloise ont donc baissé la tête devant la candi
dature de M. de Perceval, désormais autorisé
s'intituler le vainqueur des vainqueurs, l'exter
minateur des exterminateurs.
Cette victoire du libéralisme avancé, subie en
silence et lâchement acceptée par la presse minis
térielle, n'est point saus doute le premier pas dans
une voie fatale et bien périlleuse; mais elle y
marque une empreinte patticulièrement caracté-
listique. La démagogie ne s'y est pas trompée; il
n'y a qu'à lire les chants de triomphe du National
et des autres organes de la presse démocratique et
sociale.
Cet événement nous frappe; il nous effraie; mais
il ne nous étonne pas. Tout se tient et tout
s'enchaîne. Quand le gouvernement sort de ses
voies, quand le siège de l'autorité est déplacé,
lendemain. Charles-Albert combattit Novare avec
un héroïsme digne des plus grands éloges; mais
bien plutôt en chevalier du moyen âge qu'en géné
ral des armées modernes. Radetzky s'y montra
grand capitaine et intrépide soldat.
Nous n'avons pas apprécier ici la conduite
politique du maréchal Radetzky, représentant la
maison d'Autriche en Italie; mais on ne peut s'em
pêcher, quelque opinion politique qu'on appar
tienne^ admirer lesangfroid, le courage, la fermeté
et le génie de ce noble vieillard en qui reposaient
les destinées de sa patrie, et qui, séparé du monde
entier par une insurrection générale, la veille de
manquer de munitions, presque sans argent et saos
approvisionnements, sans autre communication
avec Vienne que par le Tyrol, déjà travaillé par
l'insurrection, trouve assez de force, 81 ans, pour
faire face tous les dangers, parer toutes les
éventualités et ramener la victoire sous son drapean.
On peot dire que, dans aucun temps, dans aucune
circonstance, un homme de guerre ne s'est trouvé
dans une situation plus critique et n'en fût sorti
plus glorieusement.