41me Année.
No 4,219.
POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN,
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
POUR LE DEnORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR G MOIS, 2-75
POUR 5 MOIS.
'F F. Z G 6 MARS.
REVUE POLITIQUE.
Le discours prononce', le i"niars, b la Chambre
des Lords, par le comle de Derby, peut êire con
sidéré comme le manifeste politique de la nouvelle
administration. Passant successivement en revue
les diverses questions l'ordre du jour, le chef du
cabinet exprime l'espoir de voir la paix rétablie
sous peu dans l'Inde et dans la Chine. Relativement
aux complications intervenues avec ce dernier
empire, il exprime cette opinion que jamais l'idée
d'une acquisition territoriale n'entrera dans la tète
d'aucun ministre.
Le noble lord s'est prononcé ensuite avec une
chaleureuse conviction eu faveur de l'alliance
française. Il a stigmatisé énergiquement l'attentat
du i4 janvier, tout en faisant entendre que l'An
gleterre ne refuserait pas son hospitalité aux
réfugiés qui n'en abusent pas. Quant aux autres les
lois du pays sont suffisantes pour punir, dès que le
délit est suffisamment prouvé. Le tort de son
prédécesseur ne fut point en ce qu'il voulut amen
der la loi, et le vote des Communes n'a point été
dirigé contre le bill. Le tort du dernier ministère,
et ce qui lui attira la condamnation de la Chambre,
ce fut d'avoir laissé sans réplique la dépêche du
comte Walewski, dont certaines expressions pa
raissaient offensantes pour l'Angleterre, contraire
ment toutefois aux intentions de son auteur.
Pour se conformer b la résolution de la Chambre,
le nouveau gouvernement a demandé, dans les
lermes les plus amicaux, l'Empereur des Français
une explication de nature soulager l'esprit du
peuple anglais. Lord Derby ajoute qu'il a la ferme
confiance que la réponse attendue ne pourra man
quer de satisfaite l'opinion publiqueen Angleterre.
La politique 'a suivre, dit-il, par le gouverne
ment de S. M. dépendra nécessairement beaucoup
de la réponse qu'il recevra. En attendant, son
intention est de mettre la loi h exécution, afin
d'empêcher le retour des conspirations.
Abordant le bill, voté déjà par les Communes, et
en vertu duquel il fut décidé qu'il y avait lieu de
changer le gouvernement des Indes, le chef du
cabinet déclare que le bill actuel ne serait pas
représenté, mais qu'une proposition serait intro
duite pour l'établissement du gouvernement indien.
Relativement enfin la question de la réforme le
cabinet ne s'engage pas introduire on bill, mais
seulement porter son attention sur cette question
épineuse, en vue de la régler au moins provisoire
ment.
Tel est en résumé le programme de politique
extérieure et intérieure du cabiuet tory. C'est a
quoi se réduit h peu près tout l'intérêt de sa
chronique politique du jour. Signalons toutefois les
mouvements révolutionnaires dont les manœuvres
des sicaires de Mazzirii oot menacé de rechef la
ville de Gènes, au moment où se poursuivait le
ptocès des auteurs du complot du 29 juin dernier.
Il n y a eu cependant que quelques agressions
isolées; des mesures de rigueur ont été prises
I égard desréfugiés politiques. On voit doncencore
une fois si les complaisances du gouvernement
piémontais, si même sa coupable connivence envers
le libéralisme anti-catholique, le mettent b l'abri
des commotions révolutionnaires et lui ménagent
une soupape de sûreté.
Les nouvelles de l'Inde nous représentent le
général en chef sur le point d'entrer dans le
royaume d'Oude la tête de 25,000 hommes,
taudis que d'autres troupes se tenaient prêts
opérer en même temps que lui sur d'autres points.
On évaluait les forces des insurgés autour de
Luckuow 100,000 hommes.
Une dépêche de Calcutta, du 24 janvier, fait
mention d'un échec essuyé par un corps de troupes
britanniques dans une rencontre avec les Coolies,
population de montagnards,nouvellement révoltée.
On nous écrit de Wervicq 4 mars:
Une mauvaise feuille, le Progrès d'Ypres,
vient de lancer des attaques aussi odieuses qu'in
dignes contre de respectables ecclésiastiques de
notre ville. L'indignation de notre conscience nous
force "a en faire justice, malgré la déloyauté bien
connue de ce journal pamphlétaire et de ceux qui
l'inspireut.
Le scribe couvert de son masque habituel de
modératiou hypocrite, débute en adressant a l'au
torité ecclésiastique une modeste leçon de con
ciliation qui exhale une odeur violente encore des
saturnales du mois de Mai. Passons outre. Le
voici qui arrive b faire pour les habitants de
Wervicq, de l'histoire moderne dans le sens libéral.
Quelques jeunes gens, dit il, fort paisibles
(accompagnés sans doute dans la rue Courte des
Flamands, de quelques autres uon paisibles] Jesant
partie d'une société de musique (la Société des
Moineaux, richement dotée sur le budget de la
ville) s'étaient avisés (ou avaient reçu l'avis) de
se déguiser pour aller jouer quelques airs dans
les principaux estaminets de la ville (mais
spécialement la Demi-Lune et autres cabarêts
bieu connus et bien recommandés.)
Que tout cela était innocent! n'est-ce pas?
Écoulez donc, le défenseur de ces innocents et
paisibles bipèdes, railler l'intolérance du clergé en
s'écrrant Se déguiser, c'était plus qu'un crime,
c'était un péché mortel'. Le narrateur véridi-
que, l'appréciateur sensé, auquel il ne manque
plus que le bonnet de docteur en droit civil et
canonique, oublie de dire qu'an moyen de ces
jeunes gens masqués, il s'agissait tout simplement
d'introduire a Wervicq, les mascarades supprimées
depuis cinquante ans, et les bals masqués h l'instar
des grandes villes, avec leurs conséquences démo
ralisatrices. En effet, ces jeunes gens masqués
n'ont pas, d'après l'avis qu'ils avaient reçu, n'ont
pas cru devoir atteodre pour exécuter leurs dignes
exploits nocturnes, la construction d'unesaileneuve
et assez spacieuse pour y pouvoir danser sans ren
verser les dames.
Disons eu passant, que les lois de police locales,
pas plus que le clergé ne tolèrent ces sortes de
choses. L'art. III de l'ordonnance de police, dit en
langue française Tout travestissement et tout
charivari est interdit pour quelque cause que ce
soit, n Aussi, continue le narrateur du Progrès,
le Dimanche suivant, Ml'abbé Maes habitué
(c'est-a-dire vicaire) de l'église paroissiale de
Wervicq, monta en chaire et flétrit la conduite
bien innocente (aux yeux des hommes du Progrès,
mais aux yeux de tout honnête homme bien incon
sidérée ou bien coupable) de ces pauvres jeunes
gens. Jusque là nous ne trouvons dans le pro
cédé de M. Maes, que celle exagération et celte
intolérance contre lesquelles nous ne cessons de
protester.
Nos lecteurs doivent savoir que les feuilles ma
çonniques appellent exagération et intolérance,
toute espèce de zèle charitable pour la pureté de la
foi et la conservation des bonnesmœurs; pour elles,
le peuple doit être au niveau du Progrès dans les
colonnes duquel s'étalent sans vergogne l'impiété
et la turpitude. Le clergé comprend autrement sa
divine mission, et nous connaissons assez nos prê
tres, pour oser espérer qu'on ne parviendrait cor
rompre les mœurs publiques de notre ville, qu'en
leur passant sur le corps aussi savons-nous lui gré,
du courage avec lequel il s'attaque ouvertement
aux abus; or c'est ce qu'ont fait MM. Maes et ses
respectables collègues.
Mais, dit l'inspirateur du Progrès, notre jeune
ecclésiastique alla plus loin, et il accusa publi
quement l'autorité de négligence de ne pas
avoir rempli ses devoirs. Eh! bien, nous le
demandons, de pareils reproches jetés du haut
de la chaire, la face de l'autorité, sont-ils
convenables? Peuvent ils être tolérés? Et la
dessus le scribe laisse tomber son masque de modé
ration; il s'attaque la personne de notre digne
vicaire, pour le traîner dans la boue. Nous
le méprisons trop pour répondre aux plates injures
qu'il lance la figure d'un homme entouré du
respect général d'ailleurs les attaques d'un journal
qui baffoue d'ordinaire tout ce qu'il y a de respec
table, sont devenues un titre de considération
nouvelle pour celui qui en est l'objet; mais nous
dirons aux scribes qui ont de la délicatesse dans
l'oreille, défaut de celle de la conscience, de ne
plus s'effaroucher en pareille occasion. Voici
textuellement les paroles prononcées par M. le
vicaire, que répètent comme moi tous ceux qui les
ont entendues
Voila les conséquences d'un abus qui depuis
cioquaote ans est banni des mœurs de notre ville,
et que quelques jeuues gens ont voulu réiutro-
duire. Aussi eussions-nous désiré que l'autorité
civile prit les mesures nécessaires pour y mettre
obstacle. Elle le peut puisque la loi civile tout
en lui accordant la faculté de permettre cet abus,
lui fournit aussi le moyen de l'empêcher. En
outre un saint et impérieux devoir l'y oblige,
puisque tout supérieur tant ecclésiastique que
laïque, est tenu, en vertu de la loi divine, de
prévenir et d'empêcher les péchés de ses infé-
rieurs, quand il le peut sans inconvénient.
A notre tour, nous le demandons h tout homme
sensé et chrétien de quel côté se trouve ici
l'inconvenance et l'intolérance? n'est-ce pas du
côtédecelui qui,dans un mauvais journal, vilipende
et menace ceux qu'il doit pour être chrétien
écouter et respecter? Serait-ce par hasard, du
côté du prédicateur cbiétieu qui du haut de la
chaire de vérité, rappelle avec dignité et prudence,
la loi de Dieu h tout le monde, et s'élève dans la
mesure de son droit, contre des abus que la loi de
police locale elle-même ne tolère pas?