cessent d'être entourés de ce respect, qui est Ici
dernière barrière contre la barbarie, on peut
désespérer du salut d un peuple, car la force
brutale ne tarde pas a se substituer a la justice
régulière C'est là. en effet, pour le dire en pas
sant, aux États-Unis, le symptôme le plus
tristement significatif de la décadence morale
de la république américaine.
Plaise Dieu que, dans notre pays, l'on
n'entre point dans les voies ouvertes, avec un
déplorable cynisme, par certains organes de la
presse ministérielle Tous les honnêtes gens,
sans distinction de parti, les ont vus avec dou
leur s'immiscer dans tes actes judiciaires, pré
tendre imposer leurs arrêts préconçus aux
magistrats, signaler tort ou travers ceux ci
Vanimadversion publique, en mettant en sus
picion leur indépendance et leur impartialité,
sans respect aucun pour le juge ni pour la chose
jugée.
Que faut-il penser d'un parti qui encourage
ou tolère de pareils écarts, en sacrifiant ainsi
un intérêt éphémère, très problématique d'ail
leurs. l'intérêt éternel de la société? Nous plai
gnons le parti qui recourt des armes si igno
minieuses, nous plaignons le ministère qui est
servi par de pareils organes, nous plaignons
surtout le pays, qui ne pourrait résister long
temps cette action démoralisatrice, si ce sys
tème venait se généraliser.
Il est vrai que nous sommes en plein progrès
libéral, et que le ministère, dont le verbe est si
arrogant la tribune, doit peut être se faire
bien humble dans les coulisses où on lui dicte
des lois. Mais, du moins, en ce qui dépend de
lui. devrait-il faire l'impossible pour assurer
la magistrature la considération dont elle a
toujours joui juste titre.
Le moyen le plus efficace c'est de faire des
nominations Cabri de tout reproche, dans
Cintérêt de la magistrature elle-même. Par
malheursi nous nous en rapportons aux bruits
du palais, il y aurait bien des choses dire
cet égard. Des nominations récentes dans le
ressort de la cour d'appel de Bruxelles accusent
de la part du ministère de la justice, une déplo
rable tendance négliger la véritable pépinière
de la magistrature pour payer certains services
obscurs ou purement administratifs.
D après le jeu de mots d'un spirituel avocat,
on recrute lesfonctionnaires de l'ordre judiciaire
non plus dans le barreau, mais dans les bureaux.
En effet, on a vu te choix ministériel se porter
sur de jeunes employés que leurs occupations
de buraliste ont forcément détournés de toute
étude juridique et rendus étrangers aux affaires.
F.l cependant leurs concurrents étaient nom
breux, dignes, capables.
Aussi une impression pénible s'est-elle
manifestée partout dans les chambres du con
seil. dans les salles d'audience, au parquet, sur
tous les sièges. On n'envisage pas l'avenir sans
inquiétude. En effet, malgré l'esprit de déni
grement de C école de l'anarchie, et dans le feu
de nos discussions politiques, la magistrature
a pu conserver la position élevée que la Consti
tution lui assigne. Elle apparaît encore avec
cette réputation d'indépendance et de capacité
dont elle doit jouir pour remplir dignement sa
mission. Mais si, après lui avoir dénié son
impartialité comme on fa fait dans ces derniers
temps, on pouvait encore lui contester ses
lumières, le justiciable perdrait toute confiance
dans ses juges, et nous approcherions d'une
époque qui est déjà arrivée pour les Étals-Unis.
De toutes parts on entend faire les réflexions
les plus tristes. A la cour de cassation on ne
s étonnera plus d'avoir réformer des juge
ments qui dénotent une ignorance totale des
principes élémentaires du droit. A In cour
cf appel on n est pas éloigne de chercher dans le
barreau les éléments de recrutement qui pour
raient manquer dans 1rs sièges inférieurs. Dans
les tribunaux deprrmière instance on craint de
voir les services compromis. Les avocats enfin
se demandent s'il est bien nécessaire d exiger
un stage de ceux qui se proposent d exercer leur
honorable profession. Si la vie et les intérêts des
clients peuvent être mis en danger par l inexpé
rience de ceux qui sont chargés de les defendre,
ils sont bien plus menacés encore par l insuffi
sance de ceux qui sont appelés les juger
La presse qui s'arroge le monopole de l indé
pendance et du libre examen, garde actuelle
ment le silence sur cette situation. Nous avons
cru devoir le rompre malgré nos répugnances
toucher même indirectement des questions
de personnes. Mais de nombreuses nominations
auront lieu prochainement dans l'ordre judi
ciaire. Nous avons cru utile d'avertir le minis
tère des dangers que présente la voie où il s'est
engagé. Il est temps qu'il s'arrête et que. lais -
sant un peu plus l'écart les convenances
personnelles et les influences politiques, il con
sulte avant tout l'honneur de la magistrature et
la bonne distribution de la justice, qui sont un
intérêt social du premier ordre.
M. Théodule Loncke, d'Ypres, vient de passer
son dernier examen eu pharmacie,avec distinction.
actes officiels.
Le Moniteur promulgue la loi contenant le
budget du m inisière des travaux publics pour l'exer
cice i853 et fixé h la somiuede fr. 24,6ôo,o85-24.
NÉCROLOGIE.
M. Debouck, greffier k la justice de Paix du
canton de Passcheudaele, vient de mourir dans
celte commune, h l'âge de 53 ans.
CHRONIQUE JUDICIAIRE.
- 1*
cour d'assises de la flandre-occidentale.
AasuMiInMt d'un mari par «ut femme*
Complicité du domestiqua
Jeudi dernier la cour d'assises s'est occupée
d une accusation grave, portée contre une jeune
fermière de Merckem, près de Dixmude, qui, au
mois de novembre dernier, aurait, de complicité
avec son amant, tué son mari. Le domestique nie
énergiquemeut le crime qui lui est imputé; quant
h la leiume, sou système de défense consiste faire
considérer la mort de sou mari comme le résultat
d'une querelle dans laquelle elle se serait défendue.
Quoi qu il eu soit, voici le résumé des charges qui
pèseut sur les deux accusés.
acte d'accusation.
Le procureur-général près la cour d'appel de
C>aud fait couuaitre que la mèiue cour, chambre
des mises eu accusations, par arrêt do 19 février
i858, a renvoyé devant la cour d'assises de la
Flandie-Occideutale les nommés
1* Cathériue-Sophie Vandamme, âgée de 28
ans, cultivatrice;
2* Léouard Joseph Pieters, (surnommé Louis),
âgé de 3o ans, domestique, tous deux nés et
domiciliés k Merckem.
Accusés d'avoir h Merckem, dans la nuit du 21
au 22 novembre 1857, assassiné volontairement et
avec préméditation, le nommé Pierre Bulcke, mari
de celle première; le susdit Pieters au moins de
complicité, crime prévu par les articles 69, 60,
295, 29®» 297 3o2 du Code pénal.
En conséquence le procureur-général soussigné
a dressé le présent acte d'accusationpar lequel il
démuutre que des pièces de procédure résulteut
les faits et circonstances suivants:
Catherine-Sophie Vandamme, alors épouse de
Pierre Bulcke, cultivatrice Merckem, s'éiait ren
due, le 22 novembre dernier a l'église paroissiale,
pour y entendre la messe de sept heures, confiant
la garde de ses enfants, comme d'habitude, la
nommée Eugénie Syoen, et après avoir déclaré
que son mari, étant fatigué, était intentionné d'aller
a la messe de huit heures. Lorsque Eugénie Syoen
entendit la cloche sonner la messe de huit heures,
elle pria la petite fille Emélie Bulcke, âgée de 7
ans, d'aller appeler son père, qui était encore
couché. La fille obéit, appela par deux fois son
père, mais ne reçut aucune réponse. Elle ouvrit
alors, non sans peine, la porte de la chambre
coucher de ses parents, et s'aperçut que son père
avait cessé de vivre» Aux cris pousses par cet
enfant, la susnommée Eugénie Syoen et un des
domestiquesentrèrent dans la chambre et virent
avec effroi que Pierre Bulcke avait le cou tout
ensanglauté, qu'il était couché sur le dos, ayant la
tête hors des couvertures.
A peinela mort de Pierre Bulcke fut-elle
connue, que l'on procéda a uue enquête judiciaire.
Uu médecin constata en premier lieu, que le cou
de Pierre Bulcke avait été coupé; l'eulèvemeot
du cadavre, on découvrit dans le lit un rasoir
détérioré et tâché de sang, ainsi qu'une ficelle
formant un noeud.
Cette trouvaille fit supposer que Bulcke s'était
suicidé. Mais au moment où l'on procédait k l'exa
men minutieux de la chambre, que l'on se rappela
la position du cadavre, que l'on découvrit dans le
lit un mouchoir blanc placé h côté du cadavre, que
l'on s'aperçut de la présence de sang jusque sous la
plante des pieds de Pierre Bulcke, et des tâches de
sang sur la muraille et la fenêtre de la chambre
coucher, et que l'on put se convaincre que le pavé
de la chambre avait été récemment nettoyé, ou
abandonna aussitôt l'idée du suicide, et l'on
s'assura qu'un assassinat cruel avait été perpétré.
Quel était l'autenr de ce crime? Les soupçons
tombèrent immédiatement d'une manière accablante
sur Cathérine Vandamme, épouse de Pierre Bulcke,
et sur le susnommé Léonard Pietersservant
comme domestique dans cette ferme, car suivant
le bruit général, les deux accusés entretenaient des
relations adultères. Ceci a été constaté par l'en
quête et par leurs propres déclarations.
Ou découvrit cachée au bas du lit une camisole
ensanglantée appartenant k la femme Bulcke, dans
uue armoire un rideau aussi taché de sang, qui
avait pendu k la feuetre de la chambre h coucher,
et dans la cour de la ferme, un morceau de linge,
également ensanglantéet dépendant du berceau
qui se trouvait dans la même chambre. En outre
lorsque Cathérine Vandamme parut, on s'aperçut
qu elle avait une blessure k la main, et que sa
chemise et sou tablier étaient tâchés de sang.
Malgré ces preuves palpables, elle nia d'abord
sa culpabilité. 1 rois jours après son interrogatoire,
elle se jeta genoux, fondit en larmes, et avoua
qu elle s'était dispotée avec son mari pendant la
nuit, qu'étant dans une giande colère k cause de
ses insultes, elle s'était emparée du rasoir, et lui
avait porté un coup dans la gorge, qui fut suivi
immédiatement d'uue seconde blessure parce
qu'il se défendait.
Plus tard, elle a fait la déclaration que voici
Je me suis rendue pendant la nuit k l'écurie, où
j at appelé Léonard Pieters. J'étais sortie de la
maison eo camisole et eo chemise. J'étais allée
justemeot la petite chambre attenante k la
cuisine, pour tranquilliser mes deux petites filles,
qui se querellaient. Mon mari et moi nous nous
disputions, et c'est, transportée de colère, que je
suis sortie de la maison pour appeler Louis
(Pieters). Immédiatement après, je suis entrée
dans la maison, sans attendre Pieters et dans une
6raQde colère (car "ûu nous nous disputions)-