42me Année.
No 4,318.
La discussion sur l'article 295 du Code
pénal, a élé ouverte par un remarquable
discours de M. Rodenbach.iCe digne vété
ran de nos luttes politiques contre l'arbi
traire du gouvernement hollandais, a fait
entendre des accents dignes du célèbre
Congrès National dont il fut un des mem
bres les plus intrépides.
Nous reproduisons son discours, parce
que notre époque il est nécessaire de
faire comprendre la génération qui date
depuis 1830, les principes fondamentaux
de nos libertés publiques.
LE PROPAGATEUR
pour la ville 6 fr. par an, pour le dehors fr. 7-50 par
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
trois mois. p0dr 3 mois.
7f re s, 16 Février.
revue politique.
Le doute continue planer sur l'issue du conflit
austro-sarde. Un fait acquis, c'est qu'aucune des
Puissances engagées n'oserait prendre en ce mo
ment sur soi d'engager les hostilités; ni l'Autriche,
qui ne demande que le maintien de ses possessions
ni la Sardaigrte, qui a trop bien la conscience dé sa
faiblesse pour s'aventurer dans une pareille entre
prise sans autre appui que la révolution; ni la
France, qui attache trop d'importance b l'alliance
de l'Angleterre et se défie trop de ses dispositions
pour brusquer les choses. .Peul-être attend elle
qu'une révolution de cabinet ramène au pouvoir
lord Palmerstou, soo grand ami; pourvu toutefois
que l'attitude prise par l'administration actuelle,
n'ait au contraire pour effet de raffermir les torys
b la tête des affaires. Aussi, ,ne nous semble-1-il
pas improbable, ainsi que le présume une corres
pondance parisienne, que les choses traîneront un
peu plus eu longueur qu'on ne l'avait d'abord
pensé.
N'est-il pas vraisemblable, dit-elle, qu'à
moins d'événements extraordinaires on laissera
cette année s'écouler en négociations diplomati
ques, en préparatifs belliqueuxen efforts, pour
agir sur l'Angleterre. Si l'horizon politique ne
s'éclaircissait pas, on rassemblerait des corps d'ob
servation en automne, et on aviserait au prin
temps.
Quoi qu'il en soitchacun fait ses préparatifs
pour ne pas être surpris par les événements.
L'Autriche fait un emprqnt Londres et se met
partout en mesure de réprimer l'insurrection en
Italie, si elle lève la tête. Les Chambres du Pié
mont vienneut de voter un emprunt de cinquante
millions, et l'on s'occupe de la loi qui permettra
de mobiliser la garde nationale. Le Parlement
anglais va accorder b la Reine les fonds nécessaiies
pour augmenter ses armements. La France se met
aussi en mesure, et Marseille, Toulon et les bureaux
du ministère de la guerre sont en pleine activité.
C'est encore le discours de l'Empereur Napoléon
qui fait texte b tous les commentaires. Une obser
vation fort juste, selon nous, a été faite dernière
ment au sujet de ce discours par un publiciste
français. Ce qui ressort, d'après lui, des paroles de
Napoléon III, c'est un sentiment d'impatience assez
vif contre les alarmes qui se sont manifestées dès
que la possibilité de la guerre est apparue b l'hori
zon. Non pas que l'Empereur ait annoncé qu'il y
aurait la guerre, encore moins qu'il voulait la faire.
Mais il aurait souhaité que l'opinion ne se pronon
çât ni dans un sens, ni dans l'autre, qu'elle attendit
les événements comme il les attend. Toutes les
expressions de son discours qui portent coup
s'adressent b cenx qui ont montré suivant lui trop
d'alarmes b cette pensée de la guerre, et trop
d'attache pour la paix. 11 espère qu'elle sera possi
ble, fl désire qu'elle le soit, mais il voudrait voir
les esprits mieux préparés b l'éventualité opposée.
Il indique, b propos des provinces danubiennes, sa
manière de comprendre la politique de la France
elle doit partout protéger l'intérêt de la justice éi
de la civilisation; Une cause morale peut donc
suffire pour l'engager b accepter la guerre.
El qui sera le juge de celle cause, qui appré
ciera si elle a son degré de gravité suffisant pour
motiver1 le sacrifice de la paix? L'Empereur,
l'Empereur qui n'a d'autres juges que Dieu, sa
conscience, et la postérité. Ce qu'il demande au
fond au.public, c'est dé suspendre son jugement
jusqd'b ce que l'Empereur ait prononcé l'arrêt, de
subordonner sa volonté b celle que l'Empereur
exprimera.
Les feuilles britanniques, b la presqu'unanimité,
appnyeut l'idée d'un congrès européen, pour ré
soudre les difficultés pendantes. Ce serait, b leur
sens, le plus sûr moyen de sauvegarder la paix et
d'écarter les causes de la guerre.
Mentionnons encore un bruit.qui a couru der
nièrement et semble se confirmer aujourd'hui; une
alliance plus étroite serait sur le point de rappro
cher encore la Sardaigne et la Russie, s'il est vrai
que Victor-Emmanuel doive épouser une fille de la
grande-ducbesse Marie, veuve du duc de Luch-
tenberg et sœur du Czar Alexandre II.
t
Je sais bien qoe nous ne sommes plus sons le
régime des ministres hollandais de 1829 et i83o;
mais nos lois doivent être des lois libérales,
des lois belges.
b Le prêtre comme l'évèque est citoyen, il a le
droit de faire usage de la liberté que le pacte
fondamental garantit.
Noos voulons la Constitution, toute la Consti
tution et rien que la Constitution. Le prêtre doit
être puni de même que le laïque, point de peines
spéciale^.
J'ai toujours défendu dans cette enceinte, la
liberté de la presse et j'aurai aussi le courage de
défendre la liberté de la chaire.
Égalité, voila ce que je veux pour le prêtre
comme pour les autres citoyens.
Pourquoi ce redoublement de sévérité contre
la presse et contre le piètre? La presse et la parole
libres sont l'essence et la vie du régime représen
tatif; c'est le thermomètre des libertés publiques.
Je regrette beaucoup, messieurs, dans notre
libre Belgique, ces classifications de libéral, de
clérical, de jeunes et de vieux libéraux, tout cela
agile et divise le pays ainsi que les familles.
Serrons-nous la main pour la défense de notre
nationalité et rappelons-nous notre devise: Y Union
Jait la force!
Depuis 29 ans qoe j'ai l'honneur de siéger
dans cette enceinte, j'ai vu quatorze ministères
différents. Lorsqu'on parti est en majorité, il ne
doit point gouverner avec passion, car les excès et
les violences sont le plus grand attentat contre la
liberté.
Vous savez, messieurs, que les flots et les
destins sont changeants. Qui vous répond que votre
loi sera toujours loyalement exécutée.
Quant b moi, je veux la liberté la plus large
possible pour tout le monde, aussi bien pour le
prêtre que pour les autres citoyens.
Nous sommes tous des Belges, pourquoi ces
divisions, ces classifications? Les membres du
mémorable Congrès national ne connaissaient pas
toutes ces distinctions, le pays ne demande pas cela
de dous, il veut de la prospérité matérielle et
morale, mais point d'empirisme politique.
En finissant, je proteste de toutes mes forces
contre les mesures inopporlunescontraires b l'esprit
de la Constitution.
l,'Union de Charleroy nous fait connaître une
affaire importante en matière administrateurs
spéciaux de fondations charitables, affaire qui
vient de recevoir une solution judiciaire conforme
aux principes. Nous lisons dans ce joornal
Ceux de nos lecteurs qui ont visité, depuis
quelques années, les ruines de l'Abbaye d Aulne,
ont pa remarquer, dans les petits bâtiments restés
intacts, un hospice où sont entretenus dix-huit b
vingt vieillards des deux sexes.
Cette fondation, dûe b un ancien religieux de
l'abbaye, a donné lieu devant le tribunal de Char
leroy et devant la cour de Bruxelles, b un procès
qui vient de se terminer par un arrêt qui condamne
de nouveau le système de M. de Haussy en matière
de bienfaisance. Voici les faits
Feu Michel Norbert Herset, abbé du ci devant
monastère d'Aulne, avait, pat son testament mys-
Pour ne point renier, a dit M. Rodenbach,
l'opinion que j'ai émise au congrès national en
i85i, je persiste b croire qu'il ne peut point y
avoir des pénalités spéciales exceptionnelles contre
le prêtre et que les ecclésiastiques doivent rester
dans le droit commun.
Il est certain que, dans les articles proposés, la
liberté des cultes proclamée par le Congrès est
méconnue et que l'on ne respecte point le principe
fondamental de la séparation de l'Eglise et de l'Etat.
Si le prêtre calomnie en chaire, il est punissa
ble d'après les lois ordinaires qui atteignent ce
genre de délit, il doit encourir la responsabilité
des autres citoyens.
Quant aux lettres pastorales, elles rentrent
dans le droit commun, elles n'entraînent que la
responsabilité ordinaire. Chacun doit répondre de
ses œuvres, soit par ses paroles, soit par ses écrits.
Le culte est placé sur la même ligne que la
presse.
Le Code pénal revisé est aussi illibéral quand
il s'attaque aux ministres des cultes que lorsqu'il
s'en prend aux publicistes.
Je me rappelle, messieurs, que de 1825
i83o, des ageuts de police assistaient comme
espions aux sermons et dénonçaient b Van Maanen
des prédicateurs, comme ayant blâmé les actes du
gouvernement;ces vexationsavaienl profondément
irrité le pays.