43me Année.
Samedi 12 Novembre 1859.
No 4,394.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
7PB.S3S, 12 N OVEMBRE.
REVUE POLITIQUE.
DE LA FRANC-M A.ÇONNERIE.
f.rc PROPAGATEUR
POUR LA YILLE 6 FR. PAR AN.
4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR
TROIS MOIS.
POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR
AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75
POUR 5 MOIS.
Les journaux de Turin résument, h peu près
tous, la réponse de Victor-Emmanuel la lettre de
Napoléon du ao octobre, en ce sens qu'il insisterait
sur trois points principaux L'obligation for
melle contractée par le Roi vis-k-vis des popula
tions italiennes, dont il a accepté les vœux; par ce
motif le Roi n'a voulu signer les préliminaires de
Villafranca que pour ce qui le concernait, c'est-k-
dire la cession de la Lombardie, réservant le reste;
2" le projet de confédération que le Roi déclare
incompatible avec l'intérêt de l'Italie, de l'État, et
impraticable autrement que par des changements
radicaux inacceptables pour l'Autriche, le Pape,
etc.; 3* la convenance, la nécessité même de ne pas
préjuger les délibérations du congrès, étant désor-
maishorsde doutequelecongrèsdoit êtreconvoqoé.
Le Roi invoque la solidarité immuable d'intérêts
entre la Frauce et,l'Italie, solidarité çcçllée éternel-,
lement par la confraternité d'armes des deux
peuples et des deux souverains.
Aiosi la révolution a le verbe haut et les coudées
francbes; elle ne transige sur rien, et l'Empereur
des Français n'a d'autres ressources pour arriver k
un résultat quelconque, que d'arracher des con
cessions nouvelles, des sacrifices plus pénibles anx
gouvernements conservateurs et catholiques. Les
assemblées révolutionnaires des provinces de l'Italie
centrale se sont donné le mot pour offrir la régence
au prince de Carignan, oncle de Victor-Emmanuel.
Eo attendant, la lettre impériale dont les fauteurs
de la révolution tiennent si peu de compte eo tant
qu'elle va k l'eocontre de leurs desseins, fournit en
d'autres points aux feuilles aoli-cath tiques des
inductions qu'k tort ou k raison elles se bâtent de
tirer pour y applaudir.
C'est ainsi que le Siècle a vu avec le plus grand
plaisir, dit-il, pour la Toscane devenue indépen
dante, l'éventualité de recevoir des accroissements
de territoire. Cette éventualité, ajoute-t-il, ne
peut s'entendre que des Romagnes, puisque,
d'après les propositions de la France, Parme et
Plaisance sont réunis au Piémont, et Modène
attribué alla duchesse de Parme. Le Siècle,
observe une feuille catholique, peut impunément
mettre ainsi l'Empereur en contradiction avec lui-
même. Mais si un évêque s'avisait de s'inquiéter de
ce fait, on l'accuserait de répandre d'inutiles
alarmes, son mandement serait soustrait k la
publicité, et la feuille qui s'en ferait l'écho recevrait
un avertissement. Le commentaire du Siècle est
conçu tout entiet dans le même esprit.
En résumé, conclut-il, nous aimons k le
répéter, ce qui nous frappe dans larlettre de l'Em
pereur, c'est que la souveraineté des peuples sera
avant tout respectée; qu'il n'y a aucune garantie
de territoire faite au Saint Siège que la réserve
faite par la magoanimité du chef de l'État eo
faveur de deux des princes détrônés est subor
donnée k la volonté des peuples; et qu'enfin les
sentiments personnels de l'Empereur s'abaisseront
toujours devant les intérêts de la France. Telle
est l'interprétation que donne le Siècle de la lettre
impériale, sans être contredit; tandis que la feuille
qui oserait se plaindre de ce qui fait la jubilation de
l'organe révolutionnaire, ne se plaindrait sans
doute pas impunément.
Les interprétations continuent k se contredire au
sujet du résultat et du but de l'entrevue de Breslao.
La Gazette prussienne déclare mensongère la
version publiée par la Gazette cC Augsbourg
d'après laquelle la réunion de Breslau aurait été
dirigée cootre l'Angleterre. Une dépêche de Lon
dres annonce d'ailleurs que le prince de Prusse a
été.reçu avec de grands honneurs k Windsor, et
une autre dépêche de la même ville prétend que le
czar et le prince-régent seraient convenus de ne
permettre ni la révision des traités de 1815 ni la
tenue d'un Congrès sans la participation de l'An
gleterre. Il serait difficile de démêler le vrai an
milieu de ce feu croisé de démentis et de contra
dictions.
La guerre du Maroc continue k exciter en Espa
gne un vif enthousiasme.iLe clergé manifeste un
admirable patriotisme; la Reine a reçu de nom
breuses adresses émanant de l'épiscopat. Le primat
de Tolède et son chapitre viennent d'envoyer une
commission auprès du gouvernement pour offrir
un prélèvement de 8 k 10 p. too sur leurs émo
luments ainsi que tous les services qu'ils pourront
être en état de rendre pendant la guerre. Les mis
sionnaires espagnols k Tanger ont adressé k la
Reine une respectueuse adresse, demandant k
accompagner l'expédition, soit en qualité d'inter
prètes, soit en qualité d'infirmiers au service des
hôpitaux.
Le gros temps et le mauvais état de la mer ont
empêché jusqu'à présent le départ des troupes pour
l'Afrique. D'autre part des lettres d'Algérie signa
lent une fermentation croissante dans le Maroc. La
guerre sainte est prêcbée contre les Espagnols, et
les agitations qui régnent sur la frontière française
commandent de la renforcer, tant que durera la
guerre avec l'Espagne.
Des nouvelles favorables sont arrivées de la
Cochinchine.Une lettre de Tourane,émanant d'une
source certaine, dit que les Français, attaqués par
des forces cochiochinoises considérables, ont rem
porté une victoire complète. L'ennemi a subi de
fortes pertes.
Les nouvelles du Mexique sont pareillement
bonnes. Les soldats du parti conservateur qui est
aussi celui du Président de la République, le géné
ral Mirainon ont remporté sur les troupes consti
tutionnelles de Juarez plusieurs avantages en rase
campagne et leur ont en même temps enlevé un
certain nombre de places importantes, notanuueut
San-Luis de Potosi. Les populations se prononcent
plos vivement en faveur de Miramon, et déjà de
nombreuses défections se déclarent dans les rangs
de l'armée constitutionnelle. Tout indique que
sons peu Juarez se verra expulsé de son dernier
boulevard et son dernier refuge la Vera Crnx.
Un évêque, Mgr. Labastida, que le gouverne
ment de Coraonlort avait exilé du Mexique, a été
nommé tout récemment par Miramon, ministre
plénipotentiaire k Rome.
IV. SES PRATIQUES.
La franc-maçonnerie avait autrefois certains
rites, certaines observances dont elle fait peu de cas
de nos jours. Alors elle faisait usage d'équerres, de
triangles, de fils d'aplomb, de loges bieo décorées
etc. Maintenant plus d'équerre ni de triangles,
plus de plomb pour niveler ni d'outils ponr
aplanir, plus de loges avec ornements de différentes
couleurs, plus de bibliothèques secrètes, plus de
cabarêts; on y va plos rondement, et les choses se
font avec moins de façon.
Les cabinets publics de lecture où gisent pêle-
mêle mille feuilles libérales et anti-religieuses,
remplacent les bibliothèques secrètes,lesestaminets,
cabarêts ou tavernes, les cuisines des pâtissiers, des
rôtisseurs valent bien les cabinets cachés. Une
maison de campagne, une fabrique quelconque, le
salon de l'un ou de l'autre hôtel peuvent s'ouvrir
k toute heure, peu importe où, pour remplacer les
juntes d'État. Avec tout cela les franc-maçons
observent certaioes cérémonies qui précèdent
l'initiation aux mystères maçonniques C'est une
puérile et ridicule comédie, si l'on n'envisage que
le prologue de la pièce; mais qui devient ensuite
une.sanglante et criminelle tragédie, eu égard aux
catastrophes qu'elle peut amener. Ils s'attachent
encore k certaines maximes générales empruntées
anx jongleries puisées dans les traditions du
Weisbaupt, jacobinisme si fidèlement dépeint par
Barruel. Publiquement, il est vrai, les franc-
maçons font passer ce Barruel aox yeux des peuples
pour un grand menteur, un imposteur, un vision
naire et un babillard; mais en famille, ils croient
que personne mieux que lui n'a dévoilé les doctri
nes, les finesses et les vues de Weisbaupt.
Les franc-maçons poursuivent k outrance et
jusqu'à extinction trois ennemis la papauté, la
monarchie et l'armée; c'est pourquoi, k la réception
du grade de chevalier Kadosch, l'initié est mis en
présence d'un serpent k trois têtes, portant une
couronne, une tiare et un glaive.
Pour détruire les monarchies et les armées, ils
mettent constamment denx moyens en œnvre; l'nn
consiste k préparer des soulèvements et k susciter
des conspirations tant particulières que géuérales;
l'autre k jeter les gouvernements dans de graves et
nombreux embarras, pour détourner les esprits des
machinations ourdies dans l'ombre; et pour y
réussir plus facilement, voici comment ils s'y
prennent; mais nous laisserons parler ici un franc-
maçon lui-même A l'aide de nos plus vaillants
coopéraleurs, nous sommes très-adroits et très-
heureux pour détourner les esprits de nos machi
nations; puisque nous parvenons en venu de nos
feintes et dissimulations k nous fourrer Jans les
charges et les emplois les plus enviés, les plus
délicats et de la plos granJe importance. Nous
savons prendre tous les sentiments, agencer tous les
actes, toutes les manières, feindre la piété et le zèle
sincère et passionné. Nous avons chez nous des
renards si fins que tandis qu'ils montent de grade
en grade dans les mystères de la secte, ils arrivent
aux plus hautes charges k la cour, au sénat, dans
l'armée, dans les administrations, dans les gouver
nements et jusque dans la police.