43me Année.
No 4,416.
S S 28 Janvier.
ET LE PÈRE SANS-PEUR.
LE PROPAGATEUR
pour la ville 6 fr. par an,
4 fr. pour 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 3 mois.
REVUE POLITIQUE.
Le discours de ia Reine d'Angleterre, a l'ou-
vertore du Parlement, a paru moins explicite qu'on
ne s'y attendait relativement "a la politique anglaise
en Italie et aux stipulations du traité de commerce
avec la France. L'Angleterre y est-il dit s'efforcera
de faire prévaloir dans la politique européenne
le principe de la non-intervention armée dans les
affaires intérieures de la péninsule. Il est vrai le
gouvernement britannique ne menace pas, comme
naguère le Morning - Postson organe toute
puissance, dans le cas où elle interviendrait dans la
péninsule par les armes, de l'hostilité morale et
militaire de la Grande-Bretagne. Il n'en est pas
moins vrai de dire, avec une des principales feuil
les du pays N'eut - il pas été plus digne et plus
loyal de proclamer ce principe de non-interven
tion avant la guerre d'Italie? Si l'Angleterre avait
opposé le veto toute intervention étrangère, et
déclaré, au nom des traités de i8t5, qu'elle y
verrait un casus belli, il est douteux que l'Empe
reur eût franchi le Rubicon c'est-à-dire les
Alpes, et provoqué des évéoements qui troubleront
peut-cire l'Europe pour des siècles. Il est vrai que
ces troubles ne tournent pas précisément au désa
vantage de l'Angleterre. Elle y échappe par sa
position insulaire; plus le continent est agité, plus
elle a les bras libres pour faire triompher ses inté
rêts politiques et commerciaux. En fait, c'est elle
qui profile des énormes sacrifices que la France
vieot de faire en homme et en argent daus les
plaines de la Lombardie. La politique révolution
naire que le discours royal sanctioriue, sous pré
texte d'affranchissement des populations italiennes,
sera nécessairement fatale la France, quoi qu'il
arrive.
On remarque que la Reine, fort sobre et réser-
LE URINCE S
M. le comte de Mennecy, habitant un château
dans les environs de la capitale, a été pendant
longtemps secrétaire d'ambassade en Russie. Il a
épousé dans ce pays la uièce du prince S
ancien officier supérieur de l'armée d'Alexandre I"
en 1814 et i8r5.
Il y a quelques jours, le prince Sen train de*-
vnyager arriva au château de soo neveu "par
alliance. A cette occasion, celui-ci réunit dans un
banquet les notables de la commune le maire, le
curé, le médecin, le notaire, etc., et un vieux
militaire, le sieur Libert, surnommé le père Sans-
Peur, décoré de la Légion d'Honneur et de la
médaillé de Sainte-Hélène.
Le nom du prince Sparut rappeler ce
vieux brave un Icint.io souvenir.
Auriez-vous fait, monsieur, la campagne de
I rance, demanda-t-il au noble Moscovite.
Oui, mon ami. t,
vée sur l'extension des relations commerciales entre
les deux pays, constate avec plaisir et orgueil les
offres nombreuses de service volontaire auxquelles a
donné lieu l'épouvantail de l'agression française
Il y a ici évidemment, dit le Journal de Bru
xelles, une réponse des menaces éventuelles.
C'est pour les amis et alliés d'Outre-Manche qu'il
est écrit cette manifestation d'esprit public a
ajouté un puissant élément notre système de
défense nationale.
Une feuille sémi-officielle française vient de
publier quelques chiffres sur les tarifs spécifiés dans
le nouveau traité de commerce. Le droit d'entrée
des vins en Angleterre serait abaissé de i5o p. c.
28 p. c. Pour les fers, le droit d'entrée en France
serait de y fr. pour 100 kil. Les laines et cotons
manufacturés seraieot protégés par un droit maxi
mum de 5o p. c., qui sera fixé après enquête. Les
soies entreront en franchise en Angleterre. On se
montre moins explicite en ce qui touche les articles
de Paris. Quant aux matières premières qui doivent
entrer eu franchise en France, en vertu des décla
rations formelles de la lettre de l'Empereur, elles
jouiront de ce privilège le 1" juillet 1861. Les
prohibitions ne seront levées que le j" octobre,
bien que le traité doive être obligatoire pour
l'Angleterre dans les premiers jours de février
prochain.
Cette révolution économique, accomplie d'un
trait de plume, a dû naturellement jeter une grande
perturbation dans les affaires. La Pairie, le Pays
et le Constitutionnel s'élèvent avec vivacité contre
les réclamations des manufacturiers délégués, que
les réformes annoncées touchent plus particulière
ment. C'est un triste spectacle, dit un journal,
que celui que nous offre cette unanimité de ia
presse officieuse les grands manufacturiers font
de l'agitation ils cherchent inquiéter les esprits,
alarmer les intérêts, s'écrient ces feuilles! Et
voilà leur grand argument, celui devant lequel
tout doit céder: faire de l'agitation!
Peut-être alors est-ce un de vos parents qui
figure dans une aventure toujours présente ma
mémoire et que je raconterai, si la société veut
bien me le permettre.
Tout le monde s'empressa de donner son assen
timent.
C'était la bataille de Craêne. Les grenadiers
cheval de la garde, dont je faisais partie, reçoi
vent l'ordre de charger. Au premier élan, je suis
démonté et blessé légèrement au genou. Mon
régiment continue sa charge et je reste là. Voyaut
venir de mon coté un gros d'ennemis, je parviens
gagoer un petit bois derrière lequel je savais que
se trouvait notre arrière-garde.
A peine avais-je fait quelques pas dans les taillis,
que je me trouvai en présence d'un jeune officier
russe, décoré de plusieurs ordres. Il était assis et
occupé placer son mouchoir en guise d'appareil
sur une large blessure qu'il avait la cuisse
Grenadier, me dit-il en français, dès qu'il m'aper
çut, vous ponvez me faire prisonnier; je suis
incapable en ce moment de vous opposer aucune
résistance mais je vous conjure en grâce de me
laisser libre. Je suis le comte S.,., et je vous doDne
Quoi! s'écrie un autre journal, ne sera-1-il
plus permis des intérêts blessés de se défendre,
des consciences offensées de réclamer, tout
citoyen enfin de s'adresser l'opinion, de faire
appel tous. Les feuilles officieuses ont crié
ragitation quand le clergé a voulu faire entendre
sa voix dans la question religieuse; elles oui crié
l'agitation quand les catholiques se soDt émus
des atteintes portées au poùvoir temporel de Fie
IX par la révolution; efles crient l'agitation
quand des hommes considérables par la position
commerciale qu'ils ont su' se créer, demandent
être entendus et cherchent les moyens de se faire
entendre.
C'est là, on doit eo convenir, un mauvais moyen
de porter la conviction dans les esprits. Parler sans
cesse et toujours d'agitation, se serait faire croire,
en effet, que l'agitation est partout.
La lumière commence se faire sur le complet
désintéressement de l'empire français dans la ques
tion italienne. Malgré tant de déclarations en sens
contraires, une feuille gouvernementale, la Patrie
vient de publier un article tout fait significatif.
Cette feuille s'attache démontrer que l'annexion
de la Savoie, ainsi que du comté de Nice, la
France est devenue une nécessité laquelle ou ne
saurait échapper. Repousser les vœux des popu
lations que veulent se donner nous précisément
en vertu du principe pour lequel nous venons
de combattre, dit ce journal, ce ne serait plus du
désintéressement, ce serait une rare inconséquence.
Les prétentions dont la Patrie se fait l'interprète,
sont fondées sur ce motif qu'il faut donner la
France ses frontières naturelles des Alpes. On
sait que c'est en vertu d'une raisoo identique
qu'au-delà Qoiévrain, les amateurs de bruit et de
populaiité réclament pour la France la frontière du
Rhin, c'est-à-dire l'absorption de la Belgique et
d'une partie des provinces rhénanes.
Quoiqu'il en soit l'annexion de la Savoie et de
Nice semble décidée. Et en retour de cet accrois -
ma parole de venir plus tard me constituer pri
sonnier. Ayant appris que mon frère, mortellement
blessé, avait été transporté dans une ferme quel
ques pas d'icije me disposais m'y rendre lors
que votre maudite charge est venue me renverser
avec une blessure qui, heureusement, ne m'empê
che pas de marcher. Si vous me le permettez, je
vais courir près de mon frère. Peut-être aurai-je
encore le temps de l'embrasser et de recevoir son
dernier soupir.
J'étais tout ému, continue le père Sans-Peur, et
je dis l'officier morbleu, monsieur, vous m'avez
remué lé cœur; je ne sais si je manque mon devoir,
mais je n'ai pas la force de vous retenir. Allez voir
votre frère
L'officier me serra la main et s'éloigna. J'appris
depuis que, fidèle sa parole, il était venu se con
stituer prisonnier, puis qu'il avait été échangé et
qu'il était retourné en Russie.
Pendant ce récit, 1c prince Savait donné des
marques d'une vive émotion. Il se précipita vers le
vieux soldat et l'embrassa cordialement. Le comte
S..., lui dit-il, est devenu le prince SGrâce
vous, j'ai pu embrasser mon frère, qui est mort dans
mes bras.