43mc Année.
No 4,422.
LE PROPAGATEUR.
pour la ville 6 fr. par an,
4 fr. pol'r 6 mois, 2-50 pour
trois mois.
FOI CATHOLIQUE. CONSTITUTION BELGE.
pour le dehors fr. 7-50 par
an, 5 fr. pour 6 mois, 2-75
pour 3 mois.
7??. 3S, 18 Février.
REVUE POLITIQUE.
Le gouvernement français se montre fort irrite
de la liberté de pensée et de langage qu'oppose la
presse catholique la politique impériale vis-a-vis
le Saint-Siège. La Gazette de France a reçu un
deuxième avertissement, et sou existence est fort
compromise. La Bretagne, de Saiut-Brieux, vient
d'être supprimée. Elle avait publié UDe adresse de
trois députés l'Empereur, laquelle est une sorte
de protestatioo contre la politique du gouverne
ment dans la question romaine, et déploie l'incer
titude où l'on est sur ses intentions, qui, en se
prolongeant, séparerait de l'Empereur tous les
catholiques sincères. La Bretagne avait ajouté que
la seule réponse celle adresse avait été la sup
pression de l'Univers.
M. Thouvenel, ministre des affaires étrangères
en France, adresse tous les membres du corps
diplomatique une circulaire qui répond l'Ency
clique du Saint-Père. La question des Roraagnes,
dit-il, est puiement politique; il ue s'agit point de
porter atteinte a la puissance spirituelle du Saint-
Père, ni l'indépeudaoce dont elle a besoin pour
s'exercer dans les limites de ses droits; l'esprit de
parti seul, ajoute le ministre, a pu réussir trans
porter cette question sur le terrain religieux. Pour
l'éclaircisseiueut de la thèse soutenue par M. le
ministre, nous renvoyons nos lecteurs l'article
que nous publions ci-dessous.
La polémique religieuse a repris sou cours dans
les journaux du gouvernement. La thèse est tou
jours la nièine tout en dépouillant le Pape, on le
respecte profondément. Le Pays contient la
fois un article de M. Granier de Cassagnac, qui
paraphrase et commente les arguments de M.
Thouvenel, et uo article de M. Charles Bousquet,
qui s'appuyaut sur lord Macaulay, défend contre le
Siècle l'église catholique?
Le Constitutionnel se montre, dans ses com
mentaires sur la lettre de M. Thouvenel, beaucoup
moins modéré que le Pays. Il envenime et aggrave
les accusations portées par le ministre des affaires
étrangères contre la politique du Saint-Père.
La tribune anglaise continue de fixeHes yeux de
l'Europe entière; mais l'éloquence abondante des
orateurs du Parlement et les explicatious données
par le ministère, ne nous en disent pas plus que les
révélations dont la presse gouvernementale fran
çaise vient de temps en temps rompre le profond
silence du régime impérial.
Lord Nortuauby, dans la séance du i4, avait
tracé uu tableau très-sombre de la situation où se
trouverait actuellement l'Italie centrale, tombée
daos un étal d'anarchie profonde, et il s'était fait
de cette situation un argument coolre la politique
du ministre, auquel il reprochait son intervention
arbitraire dans les affaires de l'Italie. A l'appui de
ces accusatious, il avait cité des instructions que le
cabinet aurait envoyées au représentant de l'Angle
terre a Florence pour l autoriser reconnaître les
pouvoirs de M. Buoncompagni, délégué du prioce
de Carignan dans l'Italie centrale.
On dit que dans la réuuiou des conservateurs
qui a été tenue chez lord Derby, ou a décidé qu'oo
combattrait le budget de M. Gladstone. Le
Morrting-Post,(\ni rend compte de cette délibéra
tion, affirme que, par suite, on proposerait lundi
une résolution blâmant d'une manière générale le
plan financier. On assure que les motifs de celte
opposition sont l'augmentation de l'impôt sur le
revenu, la révocation de l'impôt sur le papier,
l'extension des autorisations pour la vente du vin
et des liqueurs spiritueuses en détail, et les dispo
sitions du traité avec la France relatives l'expor
tation do charbon.
Cette dernière disposition (de l'art. 1t) fait aussi
l'objet d'une opposition très-vive de la part du
Times. Ce journal croit que cette disposition du
traité doit être nécessairement modifiée de manière
a laisser l'Angleterre libre d'interdire l'exportation
du charbon suivant les circonstances.
Une dépêche télégraphique de Madrid nous
apprend que dans la journée du il, des parle
mentaires marocains se sont rendus auprès du
maréchal O'Donnell pour lui faire des ouvertures
pacifiques. Le général en chef a répondu qu'à la
Reine seule appartenait de traiter de la paix et d'en
dicter des conditions. En conséquence, il a fait
partir immédiatement le général Isturitz, qui va se
rendre Madrid pour soumettre ces propositions
au gouvernement de la Reine.
Le Times annonce que lord Elgin vient d'être
chargé d'une seconde mission en Chine où il se
rendra, comme plénipotentiaire, dans le but d'ob
tenir la ratification du traité et la cessation des
hostilités.
M. THOUVENEL ET L'ENCYCLIQUE.
M. Thouvenel, le nouveau ministre des
affaires étrangères de France, vientd'adres-
ser tous les membres du corps diploma
tique une réponse l'Encyclique du Saint-
Père. Il reproche la cour de Home deux
choses la première, d'avoir transporté
dans le domaine des choses spirituelles
une question qui relevait exclusivement de
l'ordre temporel; la seconde, c'est d'avoir
rendu inévitable par sa politique, celle
séparation de la Romagne que le gouver
nement de l'Empereur a tout fait pour pré
venir, en donnant au Pape les plus sages
avis, que celui-ci a eu le mauvais esprit
de ne pas suivre. Vinaction du Pape est
qualifiée d'inexplicable. La responsabilité
de ce qui arrive lui est hautement renvoyée.
On n'accepte pas son ajournement devant
Dieu, mais on l'ajourne lui-même devant
l'histoire, juge moins redoutable, car on
peut appeler du tribunal de l'histoire au
tribunal de Dieu. Enfin, suivant M. Thou
venel, l'émotion qu'a produite cette ques
tion est l'effet de l'esprit de parti.
Un publieisle français distingué, dans
une lettre une feuille belge, réfute pé
remptoirement cet acte d'accusation porté
par le ministre de Napoléon III. M. Thou
venel, dit-il, parle de l'administration de
Pie IX comme un homme qui serait né
depuis les événements de 1831. Il y a deux
portions bien distinctes dans le pontificat
de Pie IX. Le Pape réformateur a précédé
le Pape conservateur des droits du Saint-
Siège et des droits des couronnes. 11 n'a
pas attendu les conseils plus ou moins
respectueux de ses fils pour travailler
l'émancipation de l'Italie. Il a pris l'initia
tive quand personne ne la prenait et avant
qu'il ne fût question du gouvernement
actuel. Que M. Thouvenel relise les remar
quables articles écrits en 1847 par Donozo
Cortès. Le grand but de Pie IX, dit
l'illustre écrivain c'est de rendre indé
pendantes et libres l'Église et l'Italie; c'est
d'émanciper pacifiquement et la fois la
société civile et la société religieuse; c'est
de réaliser l'indissoluble alliance de l'ordre
et de la liberté.
Voilà dans quelle voie marchait Pie IX
dès 1847; il n'avait reculé devant aucune
mesure pour arriver son but, et dans
celte époque où l'on parle tant de la néces
sité de rendre l'administration laïque, il
avait pris pour premier ministre un laïc
le comte Rossi. M. Thouvenel est bien
nouveau dans la politique, s'il a oublié ce
qui en est advenu. Le comte Rossi a été
poignardé par les révolutionnaires ro
mains. On s'est servi des réformes opérées
par Pie IX pour conspirer contre son pou
voir. Ceux qui demandaient d'abord seule
ment des réformesont demandé une
révolution, et Pie IX a été obligé de quitter
Rome, où Garibaldi l'homme d'épée des
révolutionnaires italiens, est venu le rem
placer.
Quant la prétention de M. Thouvenel
de renfermer dans le cercle des questions
politiques, la souveraineté temporelle du
Pape, elle ne supporte pas l'examen. Pour
quoi la souveraineté temporelle a-t-elle été
ajoutée la souveraineté spirituelle? Évi
demment parce que la première sert de
garantie et de moyen la seconde. Les
donateurs ont tous introduit ce considérant
dans l'acte de donation et c'est pour cela
que les Papes en s'asseyant dans la chaire
de S1 Pierre, prêtent le serment de ne rien
laisser distraire du domaine du prince des
apôtres. Où en sommes-nous pour que le
ministre des affaires étrangères de France
ignore ces principes élémentaires du droit
des gens? S'il est vrai que l'indépendance
temporelle sert et facilite l'indépendance
spirituelle, et cela est incontestable et avait
été jusqu'ici toujours incontesté, comment
peut on nier qu'en entreprenant contre le
domaine temporel, on porte par contre
coup atteinte au domaine spirituel? Coin-
ment dès lors empêcher que l'usurpation
du domaine temporel du Pape, ne devienne
une question religieuse? Et si c'est une