43me Année. Mercredi 13 Juin 1860. N° 4,455. L'EGOÏSTE. FOI CATIIOLIQUE. CONSTITUTION BELGE. Dimanche d', 10 de ce mois, la proces sion du Saint-Sacrement est sortie de l'église de Saint-Martin, 9 heures du matin, et a suivi son itinéraire accoutumé au milieu d'une aflluence de fidèles, accou rue tant de tous les points de la ville que des communes environnantes et dont le pieux recueillement sur le passage du cortège religieux témoignait l'évidence de la vivacité des sentiments catholiques qui animent nos populations flamandes. Par dérogation l'usage suivi jusqu'à ce jour un détachement du 11e régiment d'infanterie de ligne ouvrait la marche de la procession et remplaçait le détachement de gendarmes cheval, qui, cette fois-ci et pied, fermaient la marche du cortège religieux. La haie était formée par les jeunes filles de l'Ecole pauvre, les pension naires de l'orphelinat, les élèves du collège de la ville et ceux du collège épiscopal et par quelques personnes de la ville. Le clergé des quatre paroisses de la cité ac compagnait le Très-Saint-Sacrement qui était porté par M. Bossaert, premier vi caire de l'église de Saint-Martin. La troupe de ligne et le corps de Sapeurs-Pompiers de la ville escortaient la procession. Le groupe, représentant les attributs du Très- Saint-Sacrement et qui pour la première fois figurait dans la procession, était vrai ment magnifique et se faisait remarquer par la tenue modeste des divers membres LE PROPAGATEUR. POUR LA VILLE 6 FR. PAR AN, 4 FR. POUR 6 MOIS, 2-50 POUR TROIS MOIS. POUR LE DEHORS FR. 7-50 PAR AN, 5 FR. POUR 6 MOIS, 2-75 POUR 3 MOIS. 7PÎ.3S, 13 JUIN. REVUE POLITIQUE. Les nouvelles de Sicile portent que le général Letizia, revenu de Naples, a signé, le 6, avec Garibaldi une capitulation aux termes de laquelle les troupes devront s'embarquer avec armes et bagages. Il est probable qu'elles ont le droit de rejoindre le reste des forcés napolitaines dans l'île. Déjà Garibaldi s'occupe d'organiser l'adminis tration dans la partie de l'île dont il est maître, c'est-à-dire environ un tiers du territoire. Il est, heureusement, bien loin d'être certain que le roi de Naples soit vaincu. Une fois déjà, en 1848, l'insurrection victorieuse a soumis, non pas un tiers de la Sicile, mais l'île tout entière, l'exception de Messine; et pourtant elle a été vaincue. Un publiciste français ne croit pas cependant, juste litre selon nous, que la prolongation de l'armistice de Païenne soit bonne pour le roi de Naples. C'est un temps donné l'activité révolutionnaire par l'immobilité royale. L'armis tice recrute l'armée de Garibaldi et ébranle et doit démoraliser l'armée napolitaine. En négociant avec celui qui, il y a quelques jours, était qualïfié de flibustier, on en fait une puissance, on le grandit dans l'opinion. L'habileté de la révolution pour séduire les troupes est connue; ni les flatteries, ni l'argent, ni d'autres moyens de corruption ne manqueront aux garibaldiens. On sera peut-être fort étonné, quand on voudra reprendre les hosti lités, de trouver les troupes bien moins disposées qu'auparavant la lutte, pratiquées qu'elles auront été par les influences révolutionnaires, et décou ragées qu'elles seront par les progrès qu'aura faits la révolution dans l'intervalle, et par le peu d'espoir qu'elles auront sur le résultat final. Dans une maison située près de Saint- Germain- en-Laie, vivait il y a plusieurs années, une dame nommée madame Cardon. Elle habi'ait avec sa belle-fille, femme d'un fils unique qu'elle avait perdu depuis deux ans. Cette petite maison bourgeoisearrangée en forme de château, avait un jardin dont les allées ratissées, les ifs taillés en pyramide et en carré démentaient effrontément le nom de parc l anglaise que leur avait donné madame Cardon. Des fleurs inodores étaient plantées symétri quement dans un grand rond garni de buis, devant les fenêtres du salon. Aucnoe fleur odorante n'avait la liberté d y croître, parce que les nerfs de madame Cardon étaient trop délicats pour les supporter. Par exemple, en entrant dans la maison, une odeur de cuisine et d'ognons frits suffoquait tout le monde. Mais c'était exprès, attendu que, selon madame Cardou cette odeur était très salutaire, et que les bonnes seules étaient nuisibles. Madame Cardon était une femme de cinquante- cinq aus, grande, laide, sèche, maigre. Son teint Ici, dans les cercles officiels, on ne doute pas du triomphe de Garibaldi, et les organes semi- officiels sont bien loin de la réserve qu'ils gardaient au premier moment. Ils étaient hypocritement neutres au début, ils sont franchement garibaldiens maintenant qu'ils croient au succès de Garibaldi. La Patrie, en particulier, est curieuse lire. Elle répudiait toute connivence avec ce chef de parti sans qoaod il est parti de Gênes; aujourd'hui elle constate avec bonheur sa réussite. Après avoir rapporté le langage significatif d'un personnage haut placé en France, disant tout haut qu'avant quelques mois Victor-Emmanuel serait toi de l'Italie entière, et que le siège de son empire serait Rome, dont le Pape serait l'Évêque, le publiciste, que nous citons, ajoute Vous com prenez que s'il y a de si grands agrandissements pour le Piémout, la Savoie et Nice, qui suffisent aujourd'hui, ne suffiront plus au gouvernement français. Aussi l'on recommence parler d'une nouvelle carte d'Europe. Les initiés assurent qu'ils ont uo parti pour l'annexion en Belgique Répondant aux brochures et aux journaux parle mentaires, les écrivaius semi-officiels les somment de se souvenir des grandes choses qui ont été faites et d'attendre les grandes choses qui vont bientôt se faire, eu les avertissant qu'ils seront bientôt réduits confesser que l'acliou vaut encore mieux que la parole dans le gouvernement. Tout ceci constitue une situation qui n'a rien de rassurant pour les partisans de la paix et de la tranquillité européenne. L'Europe, dans l'état de tiraillement et de transition où elle se trouve, avec les divisions qu'ont suscitées la guerre de Crimée et celle de l'Italie, semble une proie qui n'attend plus que le couteau qui doit la dépecer. La proie encore saignante et vivante se redressera-t-elle pour se défendre quand elle sentira le poids du couteau? Telle est la question. Ces sinistres prévisions ne sont point d'ailleurs était jaune, ses lèvres minces; sa voix brusque et sonore. Elle jouait du piano, de la harpe, de la guitare et du tambour de basque. Elle avait sur sa table des livres anglais, italiens, espagnols; mais comme on l'avait surprise plusieurs fois les lisant rebours, on disait par le monde qu'elle n'en savait pas un mol. Elle se mettait son piano toujours la même heure, elle jouait de la harpe toujours la même heure; ainsi de suite de la guitare et du tambour de basque. J'aime les arts, disait-elle avec un triomphe admirable. Elle dessinait la mine de plomb et au crayon noir; elle écrivait des livres, chantait des romances dont les vers étaient de sa composition. Mais tous ses talents en herbes n'existaient que dans sou imagination, et excepté, lire et écrire correctement, madame Cardon ne possédait aucun des avantages que ce bruit instrumental et littéraire aurait fait supporter. Ce ridicule n'eût été lien encore, si par une bonté même ordiuaire elle eût racheté ces travers de I orgueil. Mais son affreux caractère faisait le malheur de tout ce qui l'entourait. Sa jeunesse étant passée, avec le plus ou moins d'agréments particulières l'écrivain que nous citons, mats gagnent crédit de jour en jour. Nous ue préten dons point les apprécier, et nous en laissons juge le lecteur. qu'elle porte toujours avec elle, madame Cardon était arrivée cet âge où il devient doublement nécessaire la femme détrôoée de remplacer par des qualités essentielles les qualités éphémères qu'elle n'a plus. Quand elle est méchante, il ne lui reste que la haine et l'oubli. Ces deux grandes punitions de la terre étaient tombées sur madame Cardon. Ceux qui ne la haïssaient pas la redoutaient c'était l'équivalent. Aigrie par la leçon qu'elle avait enfin comprise, punie de son égoïsme et de sa méchanceté, elle avait vu peu peu s'éloigner d'elle tous ses amis, et demeurait stupéfaite devant sa vie détruite, devenue insupportable elle-même et aux autres. Elle avait en un fils qui était mort vingt-neuf ans, dans toute la force de l'âge, avec tous les agréments pour le monde et pour lui-même. Ce malheur, que sa pauvre belle-fille semblait seule souffrir, avait été supporté par madame Cardon avec un stoïcisme admirable. Rien n'est résigné comme l'égoïste! Je n'ai pas d'eufaots, disait-elle quelquefois, et je ne m'en plaiudrais pas si je n'avais eu le malheur d'eu perdre uo, ajoutait-elle, voyant les visages se rembrunir en l'écoutant. Des enfants! ils ne nen-

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Le Propagateur (1818-1871) | 1860 | | pagina 1