Que tels sont la portée et l'esprit dudit
art. 261
Aussi l'orateur du gouvernement, répon
dant une observation du consul Cambacerès,
proclama t-il le principe que là où les pro-
cessions sont permises les lieux où elles
i> passent deviennent momentanément des lieux
où s'exerce le culte
Attendu que s'il en est ainsi sous l'empire
du Code pénal actuel qui protège les cultes
aurorisés, il en est de même sous celui de notre
Constitution qui les protège tous indistincte
ment. et dont l'art. i4 porte que la liberté
des cultes, celle de leur exercice publicsont
garanties, sauf la répression des délits commis
l'occasion de l'usage de ces libertés
Que cette garantie du libre exercice public
d'un culle, c'est dire exercice public extérieur,
ainsi que l'expliquait le rapporteur de. la sec
tion centrale lors de la discussion dudit article,
deviendrait une lettre morte, s'il était facultatif
au premier venu d'entraver et troubler ces exer
cices par lacirculation de voilures ou autrement;
Qu'il suit de là que c'est tort que le pré
venu a soutenu qu'à lui tout aussi bien qu'à la
procession, dont cause, appartient la libre cir
culation de ladite roule pràvinciale;
Que celle même procession se fait de tout
temps, chaque année, et qu elle suit le même
itinéraireau vu et au su de l'administration
communale, laquelle y était représentée par
son agent le garde-champêtreen telle sorte,
qu'à tout événement, il y avait autorisation
tacite au moins pour le cortège religieux, d'oc
cuper momentanément celle partie de la route
qu elle parcourait lors du délit;
Attendu, tant au défaut d'instruction cri
minelle etàla bonne foi donta excipé le prévenu
Que cette intention ressort manifestement
des faits mêmes qu'il a posés, ainsi que leurs
circonstances qu'aucune cause ni physique ni
morale ne l'obligeait les perpétrer; qu'il a
lui même déclaré que le but de son voyage était
une partie de plaisir Belœil. que le retard
qu'il aurait pu éprouver en ne forçant point le
passage, n'aurait été que de quelques minutes,
le cortège n'étant plus qu'à cinq minutes envi
ron du lieu de sa destination;
Que d'ailleurss'il est vrai eu droit qu'il
n'y a point de culpabilité sans intention cri
minelle, celle intention ne doit pas seulement
porter sur la nocuilé de l'action\commise
Que la volonté de nuire n'est pas la seule
que la loi punisse que l'homme qui se livre
un acte défendu par la loi en sachant qu'il
faisait malencourt la peine que la loi com-
mine; et que, dans l'espèce, c'est de propos dé
libéré et au mépris de la défense de passer que
lui faisait le garde champêtre qu'il a posé le
fait incriminé
Attendu cependant qu'il y a des circon
stances atténuantes;
Par ces motifs ouï M. le substitut Gauthier
en son réquisitoire, le prévenu en ses moyens de
défense présentés par M" Merlin et Descamps,
le déclare coupable des faits ci dessus spécifiés,
en lui Jaisant application des articles 261 du
Code pénal. 4 de la Constitution, ig4 du Code
d'instruction criminelle 6 de la loi du i5 mai
i8ig4 15i67 et 58 de la loi du 21 mars
i85g lus l'audience,
Le condamne par corps 100 fr. d'amende
et aux frais liquidés 23 fr. 4i cent.
Ordonne qu'à défaut du paiement de
l'amendeil est condamné un emprisonne
ment de 8 jours, et en ce qui concerne la con
damnation aux frais, fixe 8 jours la durée de
la contrainte par corps.
Le tribunal civil de Namur a décidépar
un jugement prononcé le 6 de ce mois, que
quand deux parties transigeaient pendant C ac
tion d'un procès sans mentionner des dépens,
chacune de ces parties incombaient les frais
engendrés par elle; et que, dès lors, tune
n'était pas fondée réclamer des dépens
charge de tautre.
NOUVELLES DIVERSES.
Dimanche 24 de ce mois, uu train de plaisir
partira d'Ypres pour Osieude ô,4o du matin.
On nous écrit de Poperinghe, le 14c1:
Le houblon de la récolte 1861 se vend actuel
lement raison de fr. 108 b fr. 110 les 5o
kilogrammes.
Depuis quelques jours il arrive b Courtrai des
masses d'étrangers qui vont visiter les ruines de
l'église Saint-Martio, qui a été coosomée par les
flammes. On a dû dimanche organiser, h la fron
tière française, des trains spéciaux poor Courtrai;
i'uo d'eux couteuailplus de 600 voyageurs.
Nous empruntons au Journal de Gand les
intéressants détails qu'oo va lire sur i'inceudie de
l'église Saiot- Martin Courtrai Les récits qu'on
a faits de cet incendie fourmillent d'exagérations
et d'inexactitudes. Il n'est pas vrai qu'il u'existe
plus que les quatre murs de l'édifice; le désastre es!
grand, mais non irréparable, et les 43o,ooO fr.de
l'assurance couvriront certainement une grande
partie des frais de la restauration.
L'église est graude et belle assurément, mais
l'ornementation en est fort simple. Les murs nos,
b pignons, sont percés de fenêtres ogivales, sans
détail de sculpture; on remarque dans la construc
tion deux époques le xivm' et le xvm" siècle,
caractérisées plutôt par les formes géoérales que
par les ornements. La tour seule offre quelques
détails intéressants do gothique du XVm° siècle.
Elle se divisait en deux parties, de hauteur égale,
l'une de pierre, d'un style sobre et élégant, l'autre
de bois et de ce style bâtard que Victor Hugo
appelle une superposition de plats, de saladiers,
de tasses et de verres b pied dont le clocher de
Dinant donne une idée aussi exacte que possible.
Cette flèche de bois avait toutefois une charpente
remarquable et était d'une grande hauteur; elle
avait été faite b Anvers, en 1601par des char
pentiers de oavires, sur la place de Meir, où on la
monta entièrement, pour juger de l'effet, avant de
la transporter b Courtrai.
a La tour gothique est d'une construction solide,
et le tout,d'une hauteur d'environ trois cents pieds,
était, malgré l'incohérence do style, d'un fort bel
aspect. L'église est divisée en trois nefs fort larges,
les arceaux sont d'un gothique tellement surbaissé
que les nervures forment presque des cintres.
Archéologiquement parlant, l'intérêt de l'édifice
est médiocre en raison des replâtrages, des badi-
geoonages et des autres restaurations familières aux
fabriques. On y remarquait de bonnes orgues,
une belle chaire, quelques sculptures intéressantes
et un merveilleux tabernacle du seizième siècle en
grès d'Avesnespeut-être le chef-d'œuvre de ce
genre d'édicules de pierre fouillés b jour. Cette
chaire et ce tabernacle oDt fort heureusement
échappés b l'incendie.
C'est la poire, surmontée d'une croix de fer,
de l'extrémité de la tour, qui a été atteinte de la
foudre. Depuis six ans c'est la cinquième fois que
pareil accident arrive. On avait été frappé de cette
fréquence redoutable, et il était décidé qu'on
placerait sur la toor un paratonnerre. Les formali
tés administratives ont seules retardé l'entreprise.
Pendant les dix minutes qui suivirent le coup, on
ne vit rien et l'on crut que ce serait comme les
autres fois, mais on fut bientôt détrompé- Le feu
brilla, pareil, b celte hauteur immense, inaccessible,
a la flamme d'une bougie dans une lanterne, et
déjb il était évident que la flèche était perdue.
La grande croix et la boule tombèrent avec un
eflroyable bruit le long du clocher sur les toits de
la nef de droite. Rougie par le feu, elle dut les en-
flammer instantanément. Cepeudans c'est de la
tour même que se propagea l'incendie, qui du
sommet gagna rapidement le beffroi, le carillon et
la chambre de l'borloge. Il y avait quarante quatre
cloches au carillon, l'un des plus célèbres du pays,
et sept au beffroi Martin pesant g,000 livres;
Notre Dame, 7,000; Victor, 4,000; Catherine,
3,ôoo; Barbara2,âoo; Jacobus, 2,000; R0-
salie, 5oo.
De toutes ces cloches, les uoes sont tombées
dans la rue voisine par le dehors, brisant les scolp.
tores et les balustrades de pierre du clocher, les
autres, b demi fondues, oot percé les voûtes et
gisent âans l'église ou le long des parties préser
vées de la tour. Le vent soufflait violemment da
sud-ouest; il a donc, étant donné l'orientation
habituelle des églises, chassé les flammes au-dessus
des toits. En on instant, toutes les nefs oot été en
feu et c'était on spectacle grandiose et terrible que
celui de ce vaste iocendie. Moios de trois heures
suffirent poor la destruction totale des combles. Il
n'est pas vrai que les maisons voisines qient été
biûlées, quelques maisonnettes seulement ont été
alleiutes et b une assez grande distance de l'église.
Voici quel est l'état actuel de la ruiue Toute
la partie gothique de la tour subsiste; mais, do côté
des nefs, les pierres en sont fortement calcinées.
Une des grosses cloches est 1b dans un coin, aplatie,
monstrueusedifforme, repliée comme de la pâte;
elle a, en tombant, profondément eotamé la paroi
intérieure do clocher, et c'est pour cela sans doute
qu'elle n'a pas effondré la voûte, qui est cooverte
d'un amas de débris au milieu desquels on voit
encore une partie do mécanisme, des fers et des
roues du carillon.
L'escalier par lequel on arrive b cet étage de
la tour, le seol qui ait résisté, ce qui explique que
tons les débris s'y soient accumulés, est plein de
briques et de décombres. A droite, b l'extrémité
d'un autre escalier, sur nne plate-forme, on voit
la graode croix de fer b l'endroit où elle est tombée.
Les trois nefs sont intactes, et la cbaire y demeure
aussi belle que si eile sortait des mains de l'ouvrier.
Pourtaot b cinq pas de lb, les boiseries sont brûlées,
et il ne reste rien du jubé ni des magnifiques or
gues de l'église. Uo tableau, placé près de ces
orguesest le seul qui n'ait pas été sauvé. Par
quelques lambeaux qui en restent on peut juger
que le mal n'est pas grand.
Dans le chœur, deux voûtes se sont effondrées,
et une troisième, celle de la nef de droite, s'écrou
lera très-certainement. L'écroulement aura en tout
une étendue d'une vingtaine de mètres dans le sens
de la largeur de l'église, et de quatre oa cinq mètres
dans le sens de la longuear. Les pilliers et les ar-
ceaox sont et demeureront solides. Sous la pre
mière arcade voisine du maitre-autel est ce ravis
sant tabernacle de grès d'Avesnes, d'eoviron trente
pieds de haut, dont nous avons parlé. C'est une
œuvre d'uu fini et d'une délicatesse inimaginables.
Une voûte est tombée b gauche, une voûte est
tombée b droite, et aucune des fines arrêtes de cette
œuvre charmante n'a été atteinte. Deux anges dn
maître-hôtel, de marbre, et d'un travail délicieux,
ont anssi été préservés. C'est lb que le sacristaio a
été tué. Il expliquait l'événement b vingt 00 vingt-
cinq persounes imprudemment groupées dans le
chœur. Il parlaitla voûte s'effondre et l'écrase.
Les autres personnes ont, par une rare fortune,
échappé au coup; l'une d'elles seulemeot a été
effleurée, et le chapeau d'un curé est resté sous les
décombres. Les confessionnaux, quisont ordinaires,
n'ont pas souffert du feo. Le dallage non plus; il
est près du jubé couvert de charbon, de cendres,
de métal fondu et de débris de cloches. Voilb pour
l'intérieur de l'église.