D'TPRES.
46me Année.
No 4,747.
POI CATH0L1QIE. - CflXSTITtTIfllS BELGE.
Nous ne comptions pas donner le
compte rendu des audiences que la Cour
d'assises de notre province consacre
l'affaire de la liandc llouge d'abord parce
que le cadre de notre Journal est trop
restreint, ensuite parce que notre feuille
ne paraît que deux fois par semaine.
Quelques uns de nos abonnés ayant mani
festé le désir d'avoirjdans le propagateur
toute la série des audiences, nous nous
sommes décidés y accéder.
AFFAIRE DE LA BANDE ROIGE.
Audience du 23 mars.
M. te président. Je déclare ouverte la 2'
session desassises de la Flandre occidentale.
Les accusés sont introduits dans l'ordre
suivant sur le premier banc, Kestelyn, II.
Vermeersch, La housse, Lucie Doize, Virgi
nie Eeckhout; sur le second banc, Evariste
Vanderzype, Pierre Desot, Jean-Baptiste
Lepoutre, Marie Degryze (femme Vander
zype), Vandevoorde.
Les hommes ont le costume des prisons.
Les femmes ont les vêtements qu'elles por
taient lors de leur arrestation. Lucie Doize,
la plus jeune, vêtue d'une camisole et
coiffée d'un bonnet d'indienne, ne semble
pas comprendre sa pénible position. Sa
personne est frêle, ses traits d'une grande
fraîcheur, ne sont nullement altérés par sa
longue détention. Elle promène ses regards
sur les bancs des témoins et sourit aux
personnes de connaissance.
Virginie Eeckboul porleune camisole en
coton et un bonnet de linge. Elle est fort
peu affectée. Comme Lucie Doize,son prin
cipal souci est de découvrir, parmi les
témoins, les visages connus.
La femme Vanderzype, entièrement en-
enveloppée dans un mantelet noir capu
chon, est complètement insensible.
Les six hommes et l'enfant accusés pré
sentent tous un caractère uniforme de
forceet de santé. Vandevoorde a une figure
honnête; Lahousse, dont les cheveux, bien
peignés, sont séparés sur la tempe gauche
par une raie soigneusement tracée, a le
visage encadré par une forte barbe rousse;
Lepoutre, dont les cheveux, plats et collés
sur le front, grisonnent, a l'apparence bé-
nigrae; Pierre Desot a une grosse figure
rubiconde, sans expression; Evariste Van
derzype est un petit blondin, aux cheveux
bouclés; Vermeersch est un fort beau
aysan, a favoris noirs bien peignés, et Ch.
eslelyn, le principal accusé, croit, en
raison de son importance, devoir prendre
une attention toute particulière ce qui
concerne les formalités préliminaires de
la procédure. Son visage exprime la ruse,
non la férocité.
Les accusés, sur l'interpellation de M. le
président, déclinent successivement leurs
noms, prénoms, profession, lieu de nais
sance, domicile et leurs condamnations
antérieures.
Charles Kestelyn, 43 ans, journalier, né
Elverdinghe, domicilié Vlamerlinghe,
a été condamné trois fois Bruges, 10
années de travaux forcés, pour vol;
Ypres, un an de détention, pour vol;
Furnes, quatre années de la même peine,
pour la même cause;
Henri Vermeersch, 37 ans. journalier,
né et domicilié Vlamerlinghe, n'a pas
subi de condamnations;
Henri Lahousse, 29 ans, journalier, né
Reninghelsl, domicilié Vlamerlinghe,
non condamné;
Lucie-Colette Doize, femme 11. Ver
meersch, 30 ans, journalière, née West-
outre, domiciliée Vlamerlinghe, a été
condamnée,Ypres,6 semaines, pourvoi;
Virginie Eeckhout, femme Kestelyn,
journalière, née et domiciliée Vlamer
linghe, non condamnée;
Evariste Vanderzype, 13 ans, sans pro
fession, né et domicilié IStaden, non
condamné;
Pierre Desot, 40 ans, tisserand, né et
domicilié Staden, a été condamné deux
années de détention, pour vol, par le tri
bunal de Courtrai, une époque dont il
n'a plus souvenir;
Jean-Baptiste Lepoutre, 45 ans, tisse
rand, né et domicilié Staden, a été con
damné quinze jours de prison, par le
tribunal d'Ypres, pour maraudage;
Marie Degryze, femme Vanderzype, 41
ans, journalière, n'a pas subi de condam
nations antérieures;
Louis Vandevoorde, 28 ans, journalier,
né et domicilié Vlamertinghe, a été con-
damnéàSmois de prison, Ypres, pourvoi.
La lecture de l'acte d'accusation, rédigé
en flamand occupe l'audience pendant
une heure et demie. Des plans des lieux
où les crimes ont été commis par les accu
sés sont distribués au jury.
M. le président résume, d'après l'acte
d'accusationles charges imputées aux
accusés.
M. l'avocat général. Je crois devoir ajou
ter quelques mots l'acte d'accusation,
afin de faciliter l'intelligence des plans
qui vous ont été soumis.
M. l'avocat général explique le n* 1, qui
se rapporte au meurtre commis chez
Salomé. Il indique la position des demeu
res des enfants Barroo, les premiers té
moins qui se sont rendus sur les lieux, de
II. Vermeersch, de Lahousse et de Keste
lyn; la houblonnière où ont été retrouvés
les vêtements dérobés, le puits où, d'après
Lucie Doize, elle aurait trouvé un pistolet,
également dérobé chez Salomé.
Passant au plan n° 2, M. l'avocat géuéral
indique la direction qu'a prise, selon lui,
l'accusé Lahousse pour se rendre, le jour
du crime, la ferme de Debaene.
Hl. le président. Avant de nous quitter,
aujourd'huije dois aussi vous rappeler,
MM. les jurés, le serment que vous avez
prêté et qui vous défend de communiquer
votre opinion sur l'affaire pendant la sus
pension des audiences. Un juré indiscret
a dernièrement fait remettre une cause et
a élécomlamnéà tous les frais de la remise.
Audience du 24 mars.
M. Cavocal général. M. le président, je
demande qu'en vertu du pouvoir discré
tionnaire de M. le président, J. Ivenen, de
l'asschendaele, soit cité.
M. le président. II en sera ainsi.
Faites retirer la femme de Kestelyn et
emmenez le premier accusé dans le prétoire.
M' Maerlens. Je demande aussi l'audition
du maréchal des logis Fleurboy, de la
gendarmerie, Rousbrugghe.
J/. le président, il sera fait droit votre
demande. Kestelyn, c'est donc le 9 décem
bre 1841 que vous avez été condamné
10 ans de travaux forcés? R. Oui, mon
sieur le président.
D. Vous aviez 20 ans? J'en avais 22.
D. C'était donc bien grave. Vous avez
commencé bien jeune? Vous avez été placé
aussi pendant 10 ans sous la surveillance
de la police. R. Ce n'était pas grave.
D. A peine la surveillance a-t-elle cessé
que l'assassinat a été commis. Depuis votre
sortie de prison vous n'avez plus vécu que
de vols? B. C'est ce qu'on dit.
D. Non, c'est ce que vous déclarez vous-
même. R. Je n'ai reconnu que 5 vols.
D. Bien davantage. Vous en avez révélé
dont personne n'avait connaissance. R.
Est-ce vrai? (On rit.)
D. Pour un homme de votre force, vivre
uniquement de rapines est bien scanda
leux. Cependant vous aviez du travail chez
un brave homme qui ne vous méprisait
pas malgré vos antécédents. Combien
gagniez vous cbez le fermier? R. Sept
sous par jour.
D. Vous couchiez chez Koenen? Le
mercredi et le jeudi je rentrais chez moi.
D. Chose étrange, les deux meurtres de
Reninghelsl et de Staden ont été perpétrés
pendant vos jours de liberté? R. Pour
quoi quand on m'a arrêté une première
fois, m'a-t-on relâché?
D. Nous nous occuperons de cela plus
tard. Donnez-moi l'emploi de votre temps
le dimanche du crime de Reninghelsl.
R. Je suis allé la messe et au prêche.
Après la messe j'ai été payer mon loyer
et prendre une goutte. Je suis allé me faire
raser. J'ai été ensuite emprunter des
outils de menuiserie. Je suis rentré chez
moi 9 heures 3/4.
D. Je croyais que vous étiez rentré 9
heures. R. Jamais. Rentré, j'ai fait du
café et man^é trois tartines. Mon petit m'a
demandé d'aller la messe. J'ai travaillé
jusqu'à raidi. A midi et demi, mon petit est
rentré. Je l'ai grondé. 11 m'a dit qu'il avait
joué je lui ai dit Retournez jouervous
n'aurez pas manger. Sur les instances de
ma femme, je l'ai laissé rentrer et dîner
avec nous. Après dîner, je me suis habillé
et je suis sorti.
En route, j'ai rencontré cinq personnes
qui m'ont raconté le meurtre de Salomé.
J'y suis entré. J'ai vu le cadavre du neveu.
LE PHOPAGATEUB
cotjf.
DE I>A FLANDRE-OCCIDENTALE.