D'YPRES.
47me Année.
Mercredi 9 Décembre 1893.
i\o 4.819
Dans noire n° du 5 décembre nous
exposions la théorie constitutionnelle du
gouveruement représentatif, et nous en
montrions dans l'histoire parlementaire
des premières années de notre indépen
dance la sincère et loyale application. Nous
déclarions le gouvernement représentatif
le meilleur des régimes, parce que dans
son essence, qui est la participation effec
tive de chacun la confection des lois, il
présente une garantie sérieuse et légale du
respect des droits de tous et de chacun. Et
en effet nous voyions dans nos premières
sessions législatives, la majorité tenir tou
jours compte des vœux de la minorité, et
des délibérations de nos Chambres sortir
des lois transactionnelles qui répondaient
la volonté et aux besoins réels de tout le
pays. Mais depuis l'avènement au pou
voir des libéraux exclusifs, au lieu de cela
que voyons-nous?
Les lois où des intérêts divergents sont
engagés sont votées coups de majorité,
au mépris de la minorité, sans égard ses
plaintes et ses protestations les plus
légitimes et les mieux jusliiiées.
La majorité est tout, la minorité n'est
plus rien. On ne l'écoute plus: on la laisse
parler dans le vide. Plus de transaction,
plus d'entente, plus de respect pour le
droit des faibles. La raison et la justice,
quand elles sont manifestement en faveur
de la minorité, ne comptent pas. Les forces
morales ne valent plusc'est la force
brutale du nombre qui décide de tout.
Le miuislère exclusif libéral avant de
présenter un projet de loi compte ses
députés assermentés; pourvu qu'il trouve
une majorité d'une voix, tout est dit, tout
est fait, rieu au monde n'est plus capable
de lui faire abandonner ou amender son
projet. Par le temps que nous vivons les
discussions parlementaires n'ont pas plus
de portée que la marche d'une comédie
dont le dénouement est arrêté et connu
d'avance.
Le despotisme ministériel et l'absolu
tisme de la majorité ont fait du régime
représentatif une mystification et la meil
leure garantie des droits de tous les Belges
est devenue aux mains des libéraux exclu
sifs un instrument d'oppression et de
tyrannie.
Mais la lumière se fait, et tous les
honnêtes gens s'indignent. Encore une
élection, et la majorité d'aujourd'hui est la
minorité de demain.
Alors leur tour les libéraux supporte
ront ils des coups de majorité catholique?
Ils D'auraient pas se plaindre si l'on
usait de représailles. Mais l'esprit de
justice et le respect de la Constitution
incarnés dans le parti conservateur garan
tissent les libéraux contre ces retours.
Malheureusement ils ne le savent que
trop, et ils en sontd'aulant plus audacieux.
Et pour les cas extrêmes les exclusifs
n'onl-ils pas d'ailleurs en réserve, contre
les majorités les plus normales, la res
source de l'émeute et des manifestations
anti-légales? L'émeute est devenue pour
eux une puissance qu'ils n'abdiquent plus.
Ils ne s'en cachent pas. Elle leur a réussi
en J857, et les défenseurs du ministère
Frère-Hogier nous ont prévenus en termes
formels qu'à l'occasion cela se répéterait
encore.
Mais il restera toujours, que les menaces
révolutionnaires proférées au nom d'un
parti déshonorent ce parti que ce sont de
mauvais citoyens ceux qui se servent de
celle arme et ceux qui ont voulu et veulent
encore bénéficier du crime de lèse-Consti
tution.
En présence du quasi-équilibre des
forces parlementaires des deux parti^
qu'est-ce que tous les honnêtes gens catho
liques ou libéraux doivent vouloir?
Un ministère pris en dehors îles partis.
Il est seul possible. Un ministère exclu
sif ne peut plus vivre; et sa politique
mènerait le pays aux abîmes.
Un ministère impartial rallierait tous
ceux qui aiment véritablement leur patrie.
Il écarterait toutes les questions irritantes;
il ferait les affaires du pays en respectant
tous les droits, toutes les libertés, en recon
naissant et traitant sincèrement et loyale
ment tous les Belges comme étant égaux
devant la loi.
La prospérité et peut-être l'existence de
la Belgique ne sont qu'à ce prix.
Assez et trop de coups de majorité
portés contre la minorité. Assez et trop de
divisions. 11 faut qu'un grand parti se
forme, où prennent rang tous .ceux qui
tiennent la liberté et l'égalité civileset
politiques; il faut que tout patriote sincère
se sépare de l'exclusivisme. Les hon
nêtes gens ne peuvent vouloir que le pays
reste divisé en vainqueurs et en vaincus,
et s'épuise dans des luttes funestes. Le
temps des dupes est passé, il faut tous
les Belges l'entière jouissance de leurs li-
bertés constitutionnelles; il leur faut l'in
tégrité des garanties constitutionnelles; il
faut des élections libres de la pression
administrative. Le pays ne veut plus de
j
LE PROPAGATEUR
ill |I05
REVUE POLITIQUE.
Les Joiiiiiax de Vienne apportent la déclara
tion textuelle de M. de Rechberg sur la question
ilano allemande. C'est l'exposé le pins clair et le
pins complet de celte qnestion qui ail encore été
officiellement fourni. Comme M. de Bismarck, M.
de Rechberg estime que l'Autriche et la Piusse
sont liées par te traité de Londres, niais qoe les
stipulations de i85i-i85s sont absolument con
nexes avec ce traité, de telle sorte que les deux
puissances ne sont pas plus obligées enters le
second que le Danem.uk ne l'est erners les pre
mières. Il soutient qne le point de droit dans la
question constitutionnelle des duchés ne peut pas
être contesté, tandis qu'il est contestable dans la
question de succession; qne tout est prêt pour
l'exécution fédérale, et qu'il n'y a point de raison
valable de l'ajourner; qu'an contraire les préten
tions des princes qui aspirent la couronne du
Holsteiu ont besoin d'être examinées longuement
et mûrement; qu'il serait donc tout fait hors de
propos de confondre les deux aspects très-distincts
des affaires dano-allemandes. Enfin, il est d'avis
que si le traité de Londres était écarté, l'hérédité
ne serait pas moins mise en qnestion dans le
Danemark que dans les duchés; car le roi Christian
IX n'a été appelé indubitablement au gouverne
ment delà monarchie danoise que par la conven
tion de i8ôs.
Au reste, le roi de Danemark vient de retirer
l'ordoouance du 3o tuais, qui réglait la situation
constitutionnelle du Holstein.
A Berlin, on parle de dissentiments qui existe
raient entre M. de Bisinaick et le ministre de la
guerre; ce dernier insisterait vivement pour qu'on
procédât l'occupation et non pas b l'exécution
pure et simple du Holstein. On assure que le Roi
lui-même peoclie vers l'opinion do général de
Rooo.
Au cas où l'on procéderait l'exécution pure et
simple, voici, d'après la Nation, de Paris quel
serait le rôle assigné aux contingents des divers
Etats. Uo corps de Bavaro-Saxous occupera ie
pays, appuyé sur UDe réserve de i5,000 hommes,
composée de troupes autrichiennes, prussieoues
et hauovriennes. Un autre corps de réserve de
36,ooo hommes, composé d'Autrichiens et de
Prussiens, sera concentré sur l'Elbe.
Quaat b la Diète de Francfort, elle ne «e bâte
pas de prendre uue décision, et il semble que sa
ptiucipale préoccupation est, en ce moment, d'em
pêcher les événements de se précipiter. Si tontes
les puissances étaient animées de cet esprit, la paix
du monde ue serait pas si souvent troublée.
Les journaux ministériels de Turin reviennent
sur le projet de Congrès européen et regrettent
que les propositions de la France n'aient pas
abouti. Ils on l'air de croire que Victor-Emmanuel
en aurait retiré le principal bénéfice, et que les
puissances réunies en Congtès, sous la présidence
du Pape, o'auraieol rien eu de plus pressé que
d'offrir au roi galant-homme la capitale qu'il coo-
aoite depuis si loogtemps, Ces illusions sont vrai
ment curieuses. Quant Venise, le Piémoot oe se
dissimule pas qu'il n'a qu'une chance de l'obieuir,
et cette chance c'est uae guerre générale. De ce
côté les espérances du cabinet sarde, quoique
moins bruyamment exprimées, sont peut être au
fond plus siocères. Il y a bien des gens, parmi
ceux qui croieut b la guerre pour le pjiotemps,
qui pensent que le premier coup de canou pourrait
bien se tirer Ib.
LA CONSTITUTION FAUSSÉE.
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FOI CATHOLIQUE. - CONSTITUTION BELGE.
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