D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
4Smr Année.
No 4,914.
POUR YPRES FR. 6,00 PAR AN.
HORS VILLE 7,50
On aura peine concevoir dans notre
Europe ce que peut être un ouragan comme
celui qui vient de tomber sur Calcutta et
que le télégraphe nous annonce. En quel
ques heures, tout une contrée est parcou
rue par une trombe qui détruit tout sur
son passage. Deux cent millions de valeurs
sont engloutis et douze mille personnes
périssent dans les eaux soulevées. Voilà
l'Orient! S'il possède des splendeurs qui
nous sont inconnues, il a aussi des retours
dont nous sommes affranchis. La Provi
dence met ainsi presque toujours le mal
côté du bien par une sorte de compen
sation. Lorsqu'elle ouvre sa main géné
reuse pour accorder un don elle vous
place plus près du danger qui peut nous
atteindre.
Quoi qu'il en soit, il y a là un désastre
qui, pour l'Angleterre, s'élève la hauteur
d'uu événement politique. Il lui fournit
l'occasion de faire un heureux emploi de
ses prodigieuses richessesque M. Glad
stone était si fier d'étaler naguère aux
yeux du monde. Nous sommes le peuple
le plus riche et le plus puissant de la terre,
disait ce ministre. Notre drapeau se dé
ploie dans quarante cinq contrées diffé
rentes du globe.
Cela est vraiet c'est ce qui va obliger
ce pays, que la nature a si largement
comblé de richesses diverses, secourir
ceux qui vivent sous son sceptre et qui
viennent d'être si douloureusement frap
pés. Cette nécessiléarrivedansun moment
où la situation prospère des finances de
l'Angleterre lui permettra sans doute
d'étonner le monde par l'étendue de sa
libérale générosité. Que sont deux cent
millions de francs pour la riche et pros
père Angleterre? Pour secourir les habi-
tants de Calcutta l'Angleterre n'aura pas
besoin de faire ou comme la Russie, ou
comme l'Espagne ou comme l'Italie.
Le conseil communal de Gand paraît
vouloir se signaler par un des actes les
plus odieux que les passions antireligieu
ses aient pu suggérer. Il s'agit de faire
enlever le cercueil de Mgr. Delebecque de
la crypte de S. Bavon pour le déposer dans
un cimetière de la ville. Il n'y a pas en
core jusqu'ici de décision prise cet égard,
mais la menace d'exhumation a été faite
en plein conseil par le bourgmestre
et pas une voix de ce collège ne s'est éle
vée pour protester contre un pareil scan
dale. Il n'en a pas été de même au-dehors;
la ville de Gand et la Belgique tout entière
se sont émues de cet incidentqui pour
rait devenir très grave si les déterreurs
persistaient dans leur coupable, projet.
Espérons qu'ils ne fermeront pas l'oreille
au cri de réprobation énergique dont tout
le pays retentit; espérons qu'ils ne pous
seront pas les choses l'extrême et que la
prudence, défaut de justice les empê
chera de consommer un aussi monstrueux
attentat.
Aucun prétexte, aucune excuse ne pour
raient le légitimer aux yeux des popula
tions. Tous les catholiques de Gand qui
avaient voué leur évêque une affection
toute filiale, se considéreraient comme
insultés en sa personne. Ge serait un au
dacieux défi une véritable provocation...
On invoque la légalité, on cite le décret
de prairial an XIIqui interdit les inhu
mations dans les églises. Mais ce décret
n'a jamais reçu ni en Belgique ni en
France l'interprétation rigoureuse que
veulent lui donner les légistes du con
seil communal de Gand. G'est une règle
établie dans l'intérêt de la salubrité publi
que mais qui comporte des exceptions
consacrées par un usage constant et géné
ral. On n'a jamais cru cette disposition
applicable au roi ni aux membres de la
famille royale; on ne l'a jamais invoquée
non plus contre les évêques. En Frauce,
la question a été examinée par le conseil
d'État et résolue dans le sens de cette
double exception. Tous les évêques fran
çais reposent dans leurs cathédrales. Il en
a toujours été de même en Belgiqite, et
notamment Gand, puisque les prédéces
seurs de Mgr. Delebecque ont été tous dé
posés dans la crypte de S. Bavon. Aussi
lorsque cette église a été restauréeet
il n'y a pas si longtemps, on a con
servé les caveaux destinés recevoir la
dépouille mortelle des futurs évêques.
Tant il est vrai qu'on ne songeait nulle-
ment alors s'écarter de la règle suivie
dans les autres diocèses!
Celte règle ne peut seulever, d'ailleurs,
aucune objection sérieuseni donner
matière aucun abus. Oserait-on soutenir,
par exemple, que l'hygiène publique pour
rait être compromise parce qu'un cadavre
serait inhumé tous les 15 ou 20 ans dans
une église? Ici encore la presse libérâtre,
défaut d'abus réelsest obligée de re
courir des suppositions absurdes, et
VEcho du fortement demande d'un air
très-eflrayé, ce que deviendra le décret de
prairial si l'on ouvre la porte toute large
aux exceptions, si chaque curé veut être
enterré dan6 son église et chaque religieux
dans son couvent? La feuille doctrinaire
voit déjà toutes les églises transformées
en nécropoles et toutes les chapelles pa
vées de pierres tumulaires. C'est dépenser
en pure perte beaucoup d'imagination. Il
ne s'agit pas d'établir de nouvelles excep
tions, mais de conserver celles qui ont
toujours été admises et contre lesquelles,
répétons-le on ne produit aucune objec
tion sérieuse.
Mais quoi bon discuter pour établir
un droit aussi clair, aussi incontestable?
La mauvaise foi de nos adversaires est ici
trop évidente. Le respect de la loi est bien
le moindre de leur soucis. Il ne la rappel
lent jamais que pour autant qu'ils puissent
y trouver des prétextes pour vexer les
catholiques. Est-ce que ce même décret de
prairial, qu'ils invoquent aujourd'hui avec
tant d'insistance, ne consacre pas la divi
sion des cimetières par cultes, telle que
nous la réclamons Ils rejettent cette dis
position, parce qu'elle nous est favorable;
ils déclarent bien haut qu'elle est abrogée,
qu'on ne droit plus en tenir compte, que
c'est un abus d'un autre âge, que les cime
tières doivent désormais être communs,
que la législation de l'an XII a fait son
temps. Mais voyez l'inconséquence: aujour
d'hui c'est précisément cette législation, ce
décret qu'on nous oppose. Et pourquoi
parce qu'en l'interprétant judaïquement,
au pied de la lettre, sans tenir compte de
son esprit ni de la manière dont il a tou
jours été appliqué, on y trouve une
apparence de raison pour exclure un
évêque de sa cathédrale. Ainsi quand la
Loi prescrit de respecter nos cimetières,
on la foule aux pieds, et quand elle défend
les inhumations dans les églises, on en
force le sens, afin de donner ses pres
cription un caractère absolu.Voilà bien la
logique doctrinaire Voilà saisie sur le fait
la bonne foi de nos pharisiens libérâtres!
Et puis, ils prendront un air austère pour
nous prêcher le respect de la loi et l'obéis
sance l'autorité incarnée en leurs saintes
personnes! Allons donc! comédie, hypo
crisie que tout cela! Nous ne sommes pas
dupes de ce beau zélé pour la légalité
c'est un masque sous lequel se cachent les
éternels ennemis de nos droits et de nos
libertés.
Tels nous les avons trouvés dans toutes
les questions où nos intérêts religieux
étaient engagés, tels nous les trouvons
encore aujourd'hui au conseil communal
de Gand. Ils veulent exercer contre la
mémoire d'un évêque un acte de basse et
lâche vengeance; ils veulent humilier les
catholiques et contrister les âmes religieu
ses; ils s'imaginent qu'ils gradiront dans
leur propre estime et dans celle de leurs
L1 PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. - CONSTITUTION BELGE.
PRIX DE i/A BOS HEM EUT.
REVEE POLITIQUE.