D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
50me Année.
Samedi 13 Octobre 1866.
No 5,116.
REVUE POLITIQUE.
Les espérances données pendant un
moment la population chrétienne de
l'Orient devront encore une fois passer par
les lenteurs d'un ajournement indéfini. La
diplomatie remporte ce nouveau triomphe;
annoncé hier comme droit reconnu devant
lequel tout doit s'incliner, le principe de
la nationalité des peuples se trouve au
jourd'hui méconnu; mais la paix sera con
servée et nous aurons une année (l'année
1867) vouée entièrement aux travaux de
l'industrie, c'est ainsi que se présente la
situation.
Le journal la France déqient aujour
d'hui les bruits qui ont couru sur la santé
chancelante de l'empereur Napoléon. Il
assure que le séjour de Biarritz a été jus
qu'à présent favorable ce souverain et
que la prolongation de son séjour dans
cette résidence n'a pas d'autre motif que
celui de compléter son rétablissement. En
opposant quelque doute l'assertion de la
France, nous ne sommes inspirés par aucun
sentiment malveillant, mais nous sommes
du nombre de ceux qui regardent l'empe
reur Napoléon, cause du rôle considéra
ble qu'il joue dans tous les événements
depuis quinze ans, comme l'une des assises
sur lesquelles repose en ce moment la po
litique du monae entier; il importe donc
que la lumière se fasse sur la condition
réelle ou de cette pierre d'assises ou, si
l'on aime mieux, de cette clef de voûte. La
santé de l'empereur Napoléon est ébranlée;
il souffre d'une de ces affections dans les
quelles la colonne vertébrale se trouve
engagée la médecine les combat, elle en
arrête ou en suspend les progrès, mais elle
ne les guérit pas radicalement.
Ce qui est vraisemblable dans la situa
tion actuelle, ce sont des alternatives de
SÉBASTIEN GOMEZ
ou
IV.
Longtemps il était resté ainsi sans mouvement,
mal et de bien, suivant la constitution
du malade et les soins dont on l'entoure et
qu'il accepte.
Le Times consacre la politique géné
rale un article qui permet de croire qu'il
lui est parvenu du Continent des nouvel
les qui troublent un peu la quiétude non
pas seulement du journal mais encore du
cabinet britannique tout entier. Suivant
le Times, on se tromperait fort si l'on croy
ait que l'Angleterre veuille pratiquerquand
même et en toute circonstance la politique
de non intervention. Prenant la question
d'Orient pour exemple, le Times déclare
que l'Angleterre entend qu'en aucune cir
constance cette question ne puisse se régler
sans son concours.
Les dernières nouvelles reçues de Rome
au sujet de l'état de santé de l'impératrice
Charlotte sont plus satisfaisantes.
Avant hier matin a été célébré l'église
de N.-D. de Laeken le service funèbre en
mémoire de la reine Louise-Marie des
Belges, morte Ostende il y a seize ans.
A l'occasion de ce douloureux événe
ment, une grand'messe de Requiem a été
chantée en l'église paroissiale de Laeken,
près de laquelle sont inhumés les restes de
la Reine et ceux de Léopold 1".
Léopold 11, accompagné de la Reine,
tous deux en grand deuil de même que
toute la cour, sont arrivés l'église de
Laeken onze heures précises. Leurs
Majestés ont été reçues et haranguées sous
le porche par M. le curé Torfs, accompagné
de ses vicaires, puis Elles ont été conduites
processionnellement, au milieu du chœur,
où étaient disposés des prie dieu pour les
augustes assistants.
Après l'office ftjnèbre, le Roi et fa Reine,
suivis des personnes de la cour, ont été
prier sur le tombeau de la reine Louise et
de Léopold 1".
A l'issue de la cérémoniele public a
été admis visiter le tombeau royal jusqu'à
quatre heures.
DÉPÈCHES TÉLÉGRAPHIQUES.
Vienne, 10 octobre. Le Débat annonce
que la Diète hongroise sera convoquée aus
sitôt après la publication do traité de paix
avec l'Italie et se réunira an milieu de
novembre. Les autres Diètes seront con
voquées simultanément.
La remise des places fortes de la Yénétie
commencée.
Darhstadt 9 octobre. Le Regierungs-
blatt publie un édit du grand-duc ordon
nant la dissolution des états.
Trieste, 10 octobre. D'après des nou
velles de Corfou, il y a lieu de croire 9 un
soulèvement imminent des chrétiens dans
l'Epire et dans la Tbessalie.
Florence, 40 octobre. Les pertes des
troupes dans les derniers événements
Palerme ont été 7 officiers morts27
blessés et 532 soldats morts ou blessés.
La Haye, 14 octobre. Le Staatt'Courant
publie une proclamation du roi déclarant
qu'il est impossible de réguer avec la se
conde Chambre actuelle, puisque la désu
nion entre le gouvernement et la repré
sentation nationale amène deschangements
continuels de ministres, ce qui est nuisible
la prospérité du pays. Le Roi invite les
électeurs paraître tous le 30 octobre au
scrutin, afin de parvenir un accord entre
le gouvernement et les représentants.
Cette proclamation est datée du Loo, le
10 octobre.
LE PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. -v CONSTITUTION BELGE.
LE MULATRE DE MURILLO. -- LA TÊTE DE LA VIERGE.
L'ESCLAVE DÉLIVRÉ.
Suite. Voir ootre numéro de samedi deruier.
Le latin le latin répéta Sébastien en fixant
le regard sur le dernier qui avait quitté la salle. Ils
sont chrétiens, cependant; ne me laisseront-ils
jamais de repos, b moi qui, quoique d'une couleur
différente, suis cepeudant no chrétien comme eux
Redisant ces dernières paroles sur le même ton
qu'il avait prononcé le mot esclaveSébastien se
mit^n devoir de mettre en ordre la salle de tra
vail. La nuit l'ayant surpris en cette occopation,
il alluma une lampe, jetant un regard timide et
scrutateur autour de lui, comme pour s'assurer qu'il
était bien seul. Il s'approcha du chevalet de Villa-
vicemio, et, comme il contemplait cette tête de la
Vierge, qui avait apparu si miraculeusement snr
le canevas, les yeux pesaots, la contenance noncha
lante, l'être entier du pauvre esclave noir devin
rent animés; il mormora en ses dents:
Le maître a dit J'aimerais avoir fait cette
tête, a II parât tomber en extase.
SERVICE FUNÈBRE POUR LA REINE LOUISE-MARIE.
quand une main se posa sur sou bras, et si loin ses
pensées l'avaient transportédu présent et du visible,
qu'il fat effrayé et poussa une exclamation de ter
reur an toucher.
Sébastien dit one voix timide et brisée.
Est-ce vous, père? dit Sébastien regardant
un grand vieux nègre qui se tenait debout près de
lai.
Que faites-vous Ib, mou fils
Rien, père. Je ne faisais que regarder ce
tableau.
Sébastien, dit le vieux nègre tournant snr
son fils un regard plein d'une inquiétude fiévreu
se, j'ai entendu ce que disaieurles élèveseu sortant.
Allez-vous veiller cette nuit
Oui, père, répliqua l'enfant.
Et le latin dit le vieillard, lançant nn re
gard plein de terreur autour de cette large salle,
que la lumière de la lampe semblait jeter dans one
sombrenr plus profonde.
Je o'ai pas bien peur de loi, dit Sébastien
avec un sourire involontaire d'incrédulité.
Oh moo cher enfant, ne plaisantez pas ainsi,
dit le vieux nègre, dont la peor évidente se trahis
sait par le tremblement de ses genoox qui pouvaient
b peine le supporter. Ne le bravez pas. Oh I s'il ve
nait b vous enlever, avec vous, mou fils. Je suis
dans one frayeur extiêine. Mais ce n'est rien. Qu'il
nous prenne tons les d|ux b la fois, s'il en doit être
aiosi.
Moo bon père, dit le jeane mulâtre, le latin
n'est pas un être réel; c'est seulement une vieille
superstition de notre pays, Révérend Père Ambroise,
qui vient souvent ici, vous l'a souvent dit, père, et
vous devez le croire, car c'est un saint homme, et
11 est incapable de dire une chose qui oe soit pas
vraie.
Mais ces petites têtes, et particulièrement
cette tête de la Vierge, qui les a tous jetés dans une
telle surprise que le maître lui-même en parlait b
diner avec senor Meudez Ozorio, avec le jeune maî
tre Gaspard, et avec tout le monde. Qai a pu faire
une telle tête,sinon le latin?
On le saora one fois ou l'autre, père; mais
vous feriez bien de me laisser seul maintenant.
C'est une folie de parler aiosi, enfaut. Je oe
vous quitterai pas; seulement, pensez cher enfant,
ce que vous êtes pour moi. Les blancs ont des mai
sons, derargeut,ils ont la liberté, la liberté, enfant I
Mais vous ne savez pas ce que c'est que la liberté!
Vous êtes né on esclave; tuais moi! moi! j'ai été
fait esclave. Moi, je sois né libre, Sébastien
Oh! ii n'est que trop vrai, père, c'est une
chose horrible que d'être esclave.
Et Sébastieu fondit et pleurs.
Horrible! répéta le vieux oègre, horrible!
Et aucun espoir de jamais eu briser la chaîae;