D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
5Ime Année.
Mercredi 6 Mai 1868.
No 5,279.
YPRES.
UN MARIAGE EN 1794
ou l'héroïsme de l'amour filial.
Depuis quelque temps le bruit s'était
répandu, dans certains journaux, que no
tre honorable représentant, M. le chanoine
De Haerne, se relirait de la vie politique.
Nous pouvons affirmer, de la manière la
plus positive, que celle nouvelle est dénuée
de tout fondement. (Journal de Courtrai.)
Par arrêté royal du 4" mai, M. F- Roels,
membre de la députalion permanente du
conseil provincial de la Flandre occiden
tale, est nommé greffier de celte province,
en remplacement de M. P. Descbyver, ap
pelé d'autres fonctions.
Par diverses dispositions ministérielles
du département de la guerre
Le sous lieutenant d'état-major A.Arendt*
actuellement attaché au 1" régiment de
chasseurs cheval, est désigné pour être
attaché au 10e régiment de ligne.
Le lieutenant J. Franck, du 1er régiment
de chasseurs cheval, est désigné pour
passer l'école de cavalerie.
Dans la matinée de dimanche d\ une
partie de la Garde civique était rangée en
bataille sur la Plaine d'Amourquand la
nouvelle se répandit qu'on allait se rendre
Brielen. A Brielen? Quel ennemi pouvait
attaquer cet humble village? La France, au
mépris des traités, venait elle de faire, de
ce côté, une subite invasion et menaçait-
elle de prendre la ville? Mais non, il s'agis
sait tout simplement de faire une prome
nade militaire.
On partit donc, par un beau soleilen
suivant la ligne des Boulevards, en atten
dant de donner en plein dans la luxuriante
végétation des ravissantes campagnes.
Arrivés au Quaiquelques Gardes avaient
déjà soif; mais, la consigne ne permettait
pas encore la débandade. Ce ne fut qu'au
cabarêt le Moulin d'eau quequelquesgouttes
rassasièrent le gosier des plus altérés.
Quelques Gardes même, dans leur empres
sement satisfaire leur soif, purent une
enseigne de menuisier pour celle d'un ca
barêt; il est vrai qu'on peut se tromper.
L'opinion générale était qu'on allait faire
balte 177oekje. Mais, déception! arrivés
proximité de cette auberge, les soldats-
citoyens dorent se former en ligne de
bataille et défiler, par pelotons, devant le
cabarêt pour aller se reposerl'arme au
pied, l'ombre des grands arbres qui bor
dent la chaussée devant la maison de cam
pagne de M. Terrier. Là, les défenseurs de
la Patrie purent respirera l'aise et, appuyés
sur le canon de leurs fusils, se livrer de
profondes méditations sur les beautés de
la Nature, pendant que les vaches des
prairies limitrophes, accourues en troupes,
examinaient d'un œil stupéfait cet étalage
d'uniformes, d epaulettes éclatantes etd'ar-
mes étincelantes. Pendant que les Gardes
PROPAGATEUR
FOI CATHOLIQUE. - CONSTITUTION BELGE.
REVUE POLITIQUE.
Nous recevons un compte rendu sommaire
des déclarations que M. Disraeli a faites lundi
la Chambre des communes et de l'accueil
qu elles ont reçu de la part des chefs de l'op
position. Le premier ministre a déclaré que la
Reine n'avait pas accepté sa démissivn et qu'il
avait oblenu-ep conséquence les pouvoirs néces
saires pour dissoudre la Chambre. Mais il a en
même temps écarté l'hypothèse d'une dissolu
tion immédiate et d'un appel au pays sous
l'empire du vieux régime électoral. Le renou
vellement du Parlement n'aura donc lieu
qu'après la session actuelle et il coïncidera
avec la première application du bill de réforme.
Afin d'enlever ses adversaires tout moyen de
s'opposer cet ajournementM. Disraeli a
annoncé que dès présent le cabinet cesserait
de combattre les résolutions de M. Gladstone.
Un débat assez vif a suivi cette communica
tion. MM- Gladstone. Lowe et Bright, c'est à-
dire les chefs des trois principales fractions
opposées au ministère, ont prolesté contre la
conduite du cabinet, auquel ils dénient le droit
de se maintenir au pouvoir après son double
échec et de dissoudre le Parlement.
Le procès du président Johnson approche du
dénoumenl. Les lenteurs de la procédure, l'ab
sence de témoignages nouveaux contre le Pré'
sident, ont beaucoup diminué aux États Unis
l'intérêt qui s'attachait d'abord cet épisode
plus politique que judiciaire. L'accusation a
évidemment échoué dans sa tentative de mettre
la charge de M. Johnson un projet de coup
d'Étal ou tout au moins d'emploi de la force
pour installer le général Thomas au ministère
de la guerre en remplacement du général S tan -
ton. Il est maintenant démontré que l'unique
intention du Presideni, en faisant cette nomi
nation était de provoquer une décision de la
cour suprême au sujet du caractère constitu
tionnel ou inconstitutionnel de l'acte du Con
grès désigné sous le nom de Tenore of office bill.
Quant l'issue du procès, elle dépend du vote
(Suite. Voir notre dernier numéro.)
II.
Quelques heures avaient passé; Hélène était as
sise, soucieuse, immobile, auprès du fauteuil vide
de sa mère; ses paupières appesanties, sa respira
tion lourde et oppressée disaieut assez quel flux de
pensées amères avaient fait monter des larmes! ses
yeux. Tout son être s'élaoçait vers sa mère absente,
sa mère prisonnière, qui, sans doute, au fond d'un
cachot, oubliait les angoisses du supplice pour ne
penser qu'à son enfant abandonnée. O mon
Dieu! disait la jeune fille dans un élan de douleur,
si je ne puis la sauver, si cet homme ne me la rend
pas, je n'implore de votre grâce qu'ooe seule faveur:
faites-nous mourir ensemble; ne me laissez pas
seule en ce monde, saos guide et saDS appui, réu
nissez-moi a ma mère, et je bénirai votre clémence
au pied de l'échafaod
Uo coup frappé la porte, et qui retentit dans
les profondeurs de la maison silencieuse, interrom
pit la sombre revêrie de la jeune fille. Des pas
lourds résonnèrent sur l'escalier; elle ouvrit la
porte do saloo. et vit s'avancer vers elle Brotus
Graoîer, suivi d'oo jeune homme, sur lequel elle
ne laissa tomber un regard distrait. Elle courut
des sénateurs du parti républicain, qui passent
pour n'être point absolument hostiles au Pré
sident. On sait du reste que M. Johnson ne
pourra être condamné que si la majorité des
deux tiers des membres de la haute cour se
prononce contre lui.
ACTES OFFICIELS.
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES.
Paris, 4 mai. Le Moniteur annonce
qu'à l'occasion du mariage du prince Hum-
hert, le roi d'Italie a conféré le grand
cordon de la Couronne d'Italie aux minis
tres de France, de Saxe, de Prusse et de
Portugal Florence.
vers le serrurier avec empressement, presque a»ec
confiance... Pour un cœur de seize ans, l'espérance
est si près du désespoir!
Citoyen, avez-vous de bonnes nouvelles? ma
mère la reverai-je?
Doucement, petite, dit-il d'une voix essouf
flée, nous a»ons le temps; laisse-moi m'asseoir.
Toi, Léonidas, assieds-toi près de la citoyenne. Et
le vin que j'ai demandé oùesi-il
Le voilà, citoyeo, dit Hélène an moment ou
Geneviève entrait chargée d'une bouteille et de
trois verres de cristal posés sur un plateau d'argent.
Brutus lorgna la fois le vin et le plateau, et fit
un signe d'iotelligeoce son compagnoo. Pois, se
tournant vers Hélène, et lui dit
Il faut faire connaissance, n'est-ce pas, ci
toyenne? Or doDc, je te présente mon fils Léooi-
das-Brutns-Aristide Granier; ce n'est pas on da
moiseau maisc'est on franc républicain, un patriote
pur, fameux dans les sectioos... Salue, Léooidas!
Hélène forcée de lever les yeux, vit eu Léonidas
un jeune homme beau d'une vulgaire beauté, mais
flétri par des vices précoces et par uoe insuppor
table expression de forfanterie et de hardiesse
brutale. Elle rougit péniblement sous son regard,
et détourna la vue. Pendant ce temps Granier fai
sait une inspection rapide du saloo et en embrassait
d'oo coup d'oeil le somptueux mobilier. Les ten
tures de damas rouge, les meobles contoumés, la
pendule d'écaillé et de cuivre, debout entre ses
caodérabres, où s'eoroulaieot de capricieuses Chi
mères, les glaces hautes et limpides, entourées de
feuillages dorés, les portraits de famille one Halte
de chasse par Wouwermanstoot fot apprécié,
chiffré calculé avec l'exactitode et la science d'oo
d'on comiuissaire-priseur. Puis reprenant la parole,
il dit:
Citoyenoe, to sais que je suis venu ici b ta
prière, et uo patriote moins éprouvé pourrait être
compromis par uoe pareille visite. Aussi j'espère te
trouver docile et recoonaissanie. Tu sauras qo'il
dépend de toi de sauver ta mère.
Oh! monsieur vous me rendez la vie! Parlez,
que faut-il faire? où faut-il aller?
Doucement, doucement; et nous verrons
nous entendre. J'ai uoe proposition le faire; si In
l'acceptes ta mère est sauvée; mais ne biaisons pas;
je veux un oui, ou un non si c'est un oui, dans
peu de joors ta mère sera ici; si s'est on non de-
maio ta mère sera-
Un geste affreux compléta la phrase, Hélène
avait pâli.
Parlez, dit-elle d'une voix troublée, parlez,
et quoi que ce soit, je m'engage le faire... Parlez,
citoyen.
Eb bien! ma belle enfant, il faut épouser
mon fils Léonidas que voila. A cette condition, je
saoverai la mère sinon, ce soir le jugement, et de
main la guillotine. Choisis!
Hélène était altérée; il lui semblait qu'elle se