L A V i: R 1 T E
EmiTTaîLILÏâS IDITM1S23.
DNE PRÉDICTION VÉRIDIQUE.
Imprimerie de LAMlilN-VERWAERDELibraire, rue de Lille, n° 23, Ypres.
L'appareil consiste ilans tine Ixûte de fer forgé on
fondu on en tout antre métal de forme sphériqtie,
cylindrique,' ovale, angulaire, on de tout antre forme
appropriée aux besoins; faisant remarquer toutefois
que la forme sphériqtie paraît la plus convenable.
Cette boîte est disposée de manière tourner sur un
ou plusieurs supports; elle est garnie d'une ouverture
en liant, d'une en bas et d'une autre plus large sur le
devant. Les deux ouvertures du haut et du bas sorti
pourvues d'une porte en métal jour. Celle du haut
est ouverte pour laisser passer plus librement la fumée
et établir le courant d'air.
Quand il s'agit de charger la boîte, on introduit le
charbon par l'ouverture supérieure restée ouverte et
on allume le feu par le haut.
Quand les charbons sont en partie consumés et
qu'on sent la nécessité d'en remettre d'autres on
charge de nouveau la boîte par le haut, puis on ferme
la porte a jour, l'on fait tourner la boîte de manière
que le haut se trouve en bas, et l'on ouvre la porte
qui se trouve alors en haut.
Connue le charbon nouvellement mis, se trouve
ainsi pardessotis et qu'il s'enflamme [au contact du
charbon rouge, qui est audessns, la fumée, qui s en
dégage passe travers le charbon déjà en ignition
qui la brûle en grande partie en augmentant le calo
rique, tout en présentant une véritable économie.
Dimanche dernier tout Poperinghe était en
fête. Il sagissait d aller la gare du chemin
de fer recevoir les deux prix d'adresse rem
portés lors du tir la cible Courtrai.
Le corps des Pompiers, eu grande tenue,
musique en tête, en quittant l'hôtel de Saint-
Sébastien, où un dîner succulent et bien servi
les avait réunis, se rendit la gare vers les
deux heures où les prix, consistant en une
pendule superbe et une belle montre cylindre
avec chaîne en or, furent remis aux deux vain
queurs, cpii furent ramenés en triomphe par le
corps auquel ils appartiennent.
M. van Merris, 1 un des chefs du corps
des Pompiers de Poperinghe a fait l'acquisition
«le la pendule moyennant sept cents francs;
somme qui servira faire le bonheur d'un
chef de famille, qui devra sou aisance un
coup d'adresse et la munificence d un de ses
supérieurs.
Une nouvelle fête se prépare pour les
amateurs du Tir la cible. La ville de Tour
nai convoque dans ses murs tous les gardes
civiques pour le 20 du courant. Des prix
magnifiques attendent les vainqueurs.
JNous apprenons avec plaisir que notre
magnifique corps de Pompiers, avant en tète
son excellente musique, se rendra cette
invitation. On nous assure également que nos
artilleurs et un détachement de nos autres
gardes civiques, commandés par le Major, les
accompagneront et que réunis en corps, ils
iront, comme ils l'ont du reste déjà fait, il v
quelques jours, Courtrai, donner des preuves
aux 1 ouruaisiens du destr qu ils éprouvent
d'ajouter au lustre de la brillante fête qu'ils
préparent.
Poperinghe ne restera pas en arrière et il
paraît arrêté que son beau Corps de Pompiers,
musique en tète, se rendra également Tour
nai, avec 1 espoir de donner des nouvelles
preuves de son adresse et de remporter de
nouvelles victoires.
La fabrication des dentelles, qui est d'une si
grande importance pour nos Flandres, accuse une
reprise marquante. Il serait assez difficile d'indiquer
les causes du mouvement de hausse et de baisse dans
cvtte branche d'industrie, qui suit naturellement les
variations de la mode et le développement, ou la
recrudescence du luxe dans les différents pays du
monde, où notre industrie dentellière se préseute,
sans avoir redouter aucune rivalité.
Jacques Carotte, après avoir passé titie partie de sa vie
la Martinique, en qualité de Contrôleur des îles sous le vent,
revint en i^8'2 en France, où il eut un procès fameux avec
la s«>ciété ties Jésuites, qui refusaient d'acquitter une lettre
de change que lui avait donnée le père Lavalette. auquel il
avait cédé ses possessions d'outre mer. Ayant obtenu gain
de cause, Cazotte alla habiter la commune de Pierry, près
Kpernay, et s'y livra la composition d'un poème eu 12 ebauts»
intitulé Olivier.
T,a sagacité de Ca7.otte était grande; comme écrivain il avait
de l'esprit et une grande facilité.
Vivant au sein d'une famfllc chérie, cet homme eut été
parfaitement heureux, si de fréquents voyages Paris, où il
était continuellement en rapport avec les illuminés de 1 epoque,
n'avaient assombri son caractère.
A chaque excursion, Carotte revenait plus ulcere. La mort
de sa femme augmenta sa tristesse et le jéta dans la pratique
d'une dévotion, qui tournait presque l'ascétisme. Il prétendait
avoir des visions et pénétrer dans les mystères de l'avenir.
Chaque voyage de Cazotte Paris, était une véritable fête
pour la littérature, c'était qui l'aurait sa table, c'était
qui lui donnerait des preuves de son affection. Un jour Champ-
fort l'invita un grand dîner, auquel devaient prendre part
tous les beaux esprits. Après beaucoup d'instances, 1 hermite
de Pierry accepta.
La salle du festin était magnifique. Le plafond, entouré de
guirlandes, étiucelait les feux de mille bougies. Les murs
étaient cachés sous des tapisseries charmantes.
De petits amours bouflis, tout nus, les uns avec des rabats,
les •autres avec des perruques ou des chapeaux de prêtres,
gambadaient sur les panneaux.
Une assemblée nombreuse et choisie avait pris place autour
de la table. Parmi les convives on remarquait Condorcet, Vicq-
d'Azyr, de Nïeolnï, Bailly, de Maleshcrbes, Roucher, la Harpe.
La duchesse deGramniont et plusieurs autres femmes également
célèbres de l'époque, étalaient tout le luxe de leurs plus élégantes
parures.
On avait fait excellente chère comme de coutume. Au dessert,
les vins de Malvoisie et de Constance, avaient échauffé toutes
les tètes. A la gaîté de bonne compagnie était venu s'allier
cette liberté grivoise que donnent habituellement les fréquentes
libations du Nectar d'Epernay. C'était un véritable petit souper
du dix-huitième siècle, avec ses bons mots audacieux, ses
saillies gaillardes, ses chansons légèrement graveleuses.
On causait de toutde politique, de religion, de philosophie,
et même un peu de Dieu. C'était, comme on pense bien, pour
douter de soi» existence.
Champfort, qui entretenait une correspondance suivie avec
Mirabeau, i-acontait, sans rien déguiser, la vie de cet homme,
qui n'était encore célèbre que par des excès. Il lut ensuite
plusieurs de ses contes impies et libertins, lecture scabreuse,
que les grandes dames avaient écoutée sans avoir recours
l'éventail.
fie branle une fois donné, rien n'arrêta plus les convives;
l'un citait une tirade de la Pneellel'autre rappelait un
chapitre de Diderot, tous apportaient cet édifice de sarcasmes
et de moqueries, leur anecdote, leur calembourg ou leur maxime.
Le grand non» de Voltaire fut prononcé. L'on se répandit aussitôt
en éloges furibonds au sujet du patriarche de Ferney. C'était
lui qui avait forcé la superstition et le fanatisme faire place
la raison une révolution devait s'en suivre, et l'on se mit
aussitôt calculer l'époque probable de son explosion. Tous
la désiraient, tous l'appelaient grands cris et il y avait là
des gens comme Bailly, qui craignaient que leur âge ne leur
permit pas d'en être les témoins.
Au milieu de la joie générale, un seul restait impassible, un
seul n'avait point pris part l'ovation décernée entre la poire et
le fromage au patriarche de Ferney. Ce convive, qui protestait
par sa tristesse contre l'élan commun, c'était Cazotte.
Mais peine tous ceux qui craiguaient de ne pas être assez
heureux pour voir éclore la révolution, eurent-ils exprimé leur
doute, que Cazotte, dans un moment d'exaltation fibrile, se
redresse et s'écrie:
Oui nous la verrons tous cette grande et sublime révolution.
Nul ne peut changer les arrêts de la Providence. L'esprit me
l'a dit, vous la verrez tous.
Après avoir prononcé ces paroles il retombe dans cette espèce
de rêverie sombre, qui ne l'avait pas quitté pendant le repas.
Nous espérons parbleu bien être les témoins, les acteurs
de cette grande délivrance, reprirent tous les convives. Voyez
le beau prophète
Prophète! Oui, je le suis, réplique Cazotte, que ce mot
venait de réveiller comme en sursaut. Le drame de la révolution
vient de s'accomplir en moi; je sais ce qui se fait et ce qui
se fera. Vous tous qui m'entourez, voulez-vous savoir ce que
vous deviendrez, acteurs cl témoins?
Voyous, dit Condorcet, avec le sourire sardonique, qui
lui était familier. Ilabacue a la parole.
Cazotte se lève, et considérant peudant quelques instants
son interlocuteur avec un regard mélancolique, il s'écrie en
étendant vers lui un bras méuaçaut
Vous, M. de Condorcet, abreuvé de calomnies, d'outrages,
vous expirerez sur le pavé d'un cachot, avec la rage d'avoir
li\ré la patrie la tyrannie des intelligences vulgaires; vous
mouriez du poison que vous aurez pris pour vous dérober
au bourreau.
L'assemblée restait muette. Cependant le vin fermentait encore
dans toutes les têtes, les domestiques venaient de renouveler
les Imugies, les convives remplirent leurs verres; l'on se souvint
que Cazotte était sujet des hallucinations de ce genre, et l'on
se mil lire de plus belle.
M. Cazotte, lui disait-on de tous côtés, le conte que von s
nous faites n'est pas aussi amusant que votre Diable amonrenr.
J'aime mieux le !,ord impromptu, poursuivit l'un; je préfère
les mille et une fadaisescontinuait Cliauipforl.
Vous/M. Champfort, reprend Cazotte, vous vous couperez
les veines de vingt-deux coups île rasoir, et pourtant vous
survivrez deux mois encore vus vingt-deux blessures.
On se regarde et l'on fait un effort pour rire. Vicq-d'Azir,
se met entonner un De profita dis.
Vous faites bien, M. Yicq-d'Azir, chantez vous-même
vos funérailles. Ce n'est pas vous qui vous ouvrirez les veines,
car vous aurez peur que votre main ne tremble; vous deman
derez ce service un ami, pour être plus sûr de votre fait,
et, baigné dans votre sang, au milieu d'un accès de goutte,
vous expirerez dans fa nuit. Tenez, regardez cette pendule
elle va sonner l'heure de votre mort.
L'aiguille marquait une heure moins un quart sur le cadran
doré.
Par un mouvement dont ils ne sont pas maîtres, tous les
convives se dressent Cazotte comme un berger qui compte s«»u
troupeau, fait le dénombrement de ses victimes.
Vous mourrez sur l'échafauti, dit-il M..^Nicolaï; vous
aussi M. Bailly; vous aussi M. Malesherbes, vous aussi M.
Roucher. L'échafaud ou le suicide, voilà ce qui vous attend.
L'effroi commençait gagner tous les invités. Cependant tous
voulaient faire bonne contenance. Ou se disait l'oreille Vous
voyez bien qu'il est fou il plaisante, et vous savez bien que,
daus toutes ses plaisanteriesil entre toujours un peu de
merveilleux; Cazotte n'est pas illuminé pour rien.
Malgré ces assurances les femmes ne pouvaient s'empêcher
de prendre ces prophéties au sérieux; ou tout au moins, de
trouver ce merveilleux un peu trop patibulaire.
La duchesse de Vitré, pour donner 1111 peu de courage
ses compagnes, s'avisa de demander Cazotte l'époque, où
tout cela devait arriver.
Six ans ne se passeront pas que tout ce que je vous dis,
11e soit accompli.
Voilà bien des miracles, s'écria La Harpe, et vous ne
m'y mettez pour rien
Vous y serez pour un miracle tout au moins aussi extra
ordinaire, s'écria Cazotte; je vous vois frappant de votre front
nu le marbre du sanctuaire; vous baisez la main d'un de
ces prêtres, dont vous vous moquez aujourd'hui vous demandez
la paix du cœur l'ombre des cloîtres et le repos de votre
conscience au pardon qui tombe du confessionnal.
Cette prophétie moins triste, et peut-être plus étonnante
que les autres, ramena un peu île gaîté dans celte réunion,
que la vision de Cazotte venait de décimer.
Je suis rassuré, reprit Chainpfort; si nous ne devons
périr que quand La Harpe sera converti, nous sommes
immortels
La duchesse de Vitré avait donné un exemple, qui fut
bientôt suivi par Madame de Grammont.
Nous sommes bien heureuses, dit-elle, nous autres femmes,
de n'être pour rien dans les révolutions. Quand je dis pour
rien, ce 11'est pas que nous ne nous en mêlions toujours un
peu mais il est reçu qu'on ne s'en prend pas nous, et notre
sexe, ajouta-l-elle en s'adressaut Cazotte, d'un ton caressant,
sera sans doute
Mais le prophète était impitoyable et sans laisser la duchesse
le temps d'acheveril ajouta Votre sexe ne vous défendra pas.
- Mais que nous dites-vous la, M. Cazotte? C'est la fin
du monde que vous prêchez.
C'est possible, mais ce qu'il y a de certain, c'est que
vous, madame la duchesse de Giammout, vous serez conduite
l'échafaud, vous et beaucoup d'autres dames avec vous, dans
uue charrette, les mains liées derrière le dos.
J'espère que daus ce cas la, j'aurai du moins un carrosse
drapé de noir
Non, madame, de plus grandes dames que vous iront
en charrette, les mains liées comme vous.
De plus grandes dames! Quoi, des princesses du sang?
De plus giaudes dames encore
Ici il se fit un grand mouvement dans l'assemblée.
Personne 11e voulut insister sur cette dernière réponse.
Les bougies ne répandaient plus qu'une ombre douteuse
daus l'appailement; la fatigue et la terreur se lisaient sur
la figure blafarde des convives/les débris du festin gisaieut
pêle-mêle sur la table, où passaient de temps en temps les
ombres fantastique du crépuscule, se glissant travers les
hautes fenêtres. La voix seule de Cazotte troublait le silence.
11 disait d'une tou lugubre:
J'ai fait sept fois le tour des remparts et j'ai crié: malheur
Jérusalem malheur Jérusalem malheur moi
La duchesse de Vitré n'osait plus interroger Cazotte. Madame
de Grammont, pour ne point paraître effrayée, fit un effort
sur elle-même.
Vous verrez, dit-elle sou voisin Champfort, qu'il ue
uie laissera pas seulement 1111 confesseur.
N011, madame, poursuivit l'implacable visionnaire, vous
11'eu aurez pas, ni vous, ni personne. Le dernier supplicié
qui eu auia un par grâce, sera
Il s'arrêta un moment.
Lb bien! dit la duchesse; quel est dont l'heureux
mortel qui jouira de celte prérogative?
C'est la seule qui restera au roi de France.
Apres celte prédiction devenue célèbre, car le hasard qui
l'avait dictée, sembla prendre plaisii a la vérifier daus toutes
ses pallies, Cazotte salua et sortit, laissant tout l'auditoire
plongé dans la stupeur. J'. D.
■ans? r-Tvra.h