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[.'Inauguration Olficielle
du Cimetière Francais a Ypres
't Klein Stadhuis, Savoyards en andere,
vraagt eens aan die menschen hoeveel ze
's Zondags 's morgens en 's avonds verkoopen
aan die zondagsche toeristen uit het Noorden
van Frankrijk die naar de zee trekken en
allen hier te Yper, zoowel bij de heenreis
als bij hunne terugkomst stilhouden. Van de
muziek en koorzangmaatschappijen, scholen
en andere vereenigingen, fabriekwerkers en
werksters die zoo vaag in groep een uitstapje
doen en nooit nalaten, bij hunnen doortocht
te Yper, hier voor enkele stonden uit te stap
pen, zouden er zeker en vast slechts weinigen
meer, om niet te zeggen geen, hier nog stil
houden moest men die menschen daarvoor
een taks doen betalen.
En de winkels eu winkeltjes want 't zijn
al geen groote van tabak, cigaren, cigaret-
ten, aandenkens, postkaarten, koeken, taar
ten. chocolade, enz. Gaat eens bij al die
kleine neringdoeners van aan de statie tot
aan de Bascule. De eenen meer, de anderen
min, inaar allen trekken voordeel uit het
vreemdelingenverkeer en zouden zich ver
zetten tegen die taks die het getal bezoekers
grootelijks zou doen verminderen.
Grootere steden dan Yper, zooals Oostende
en andere, hebben nooit tot dergelijke taks
hun toevlucht genomen, omdat zij wel weten
dat het groot nadeel dat zij aan de plaatse
lijke nering berokkent niet kan opwegen tegen
het geringe voordeel dat de stadskas eruit
zou trekken.
Neen, Heeren van het schepencollege, hier
ook te Yper moogt gtj geen zulk voorstel
doen, dat den ondergang van de nering en
bijzonderlijk van de kleine nering, die het nu
reeds niet te breed heeft, voor gevolg zou
hebben. Er is zeker wel middel op andere
wijze geld te slaan. Deze die hier wekelijks
geld komen halen van stad en omliggende,
zijn zij reeds belast zooals in andere steden
Een onderzoek in deze richiing zou voorzeker
goede vruchten dragen. Dat men eerst en
vooral de personen belast die hier komen geld
winnen en niet dezen die komen om er gtld
te laten.
Mochten deze enkele bemerkingen, die
alleen gedaan zijn ter verdediging der belan
gen van de kleine nering, de heeren van ons
nieuw schepencollege van al de nadeelen
eener taks op de auto's overtuigd hebben en
ertoe bijdragen om hen daarvan te doen
afzien, dau zouden alle nering doeners van
Yper er hen ongetwijfeld zeer aankbaar voor
zijn.
Le modeste cimetière frarjgais de S4 Charles
aux croix de bois s'est transformé en un cime
tière bien amémagé aux croix de pierre oü
dorment 3.COO morts de la grande guerre,
dont les noms y sont gravés, a cóté de plus
de 600 héros francais inconnus dont les restes
mortels furent léunis dans un ossuaire au fond
de ce champ de repos.
Les Yprois de la première heure ont con
servé le souvenir pieux de l'émouvant péléri-
nage qu'ils firent a ce cimetière le i'r N ovembre
1920, a l'occasion de l'inauguration du monu
ment funéraire, hommage de notre population
aux héros francais tombés pour ia déiense
d'Ypres.
Cette touchante manifestation de 1920 était
due a l'initiative de notre concitoyen dévoué,
Mr Charles Bekaert, etc'est ce même monu
ment qui fut abondamment fleuri; Dimanche
dernier, a l'occasion des cérémonies grandio-
ses de l'inauguration du Cimetière de S4 Char
les k la Fotyze sous Ypres.
Dès le matin l'animation des grands jours
règne dans la Cité Martyre, et nombre de
facades se pavoisent spontanément aux cou-
leurs nationales oelges et Frangaises.
A 14 1/2 h. Mr le bourgmestre Sobry, en
costume officiel, entouré de M M. Lemahieu
et Missiaen, échevins, et Versailles, secrétaire
communal, regoit les autorités frangaises et
beiges a l'Hötel de Ville, et prononce le dis
cours suivant
Monsieur le President,
Monsieur l'Ambassadeur
Monsieur le Gouverneur,
t
Monseigneur l'A umónier en chef,
Mesdames et Messieurs
Avant de procéder aux solennelles inaugu
ration et bénédiction du cimetière frangais
d'Ypres-Potyze, Vous voulez bien venir sa'.uer
la Ville d'Ypres, si violemment attaquée par
l'Envahisseur, et si vaillamment défendue par
ses Défenseurs, notamment par les 36oo sol
dats frangais, qui dorment au cimetière Saint-
Charles leur dernier sommeil.
Je suis confus de l'honneur qui m'échoit de
recevoir tant et de si distingués' personnages,
et m'empresse de Vous présenter l'hommage
de mon protond respect et de ma vive recon
naissance. Je Vous remercie de la sympathie
que Vous éprouvez pour une Ville, qui osa
résister a l'Allemagne et l'Autriche en appa-
rence irrésistibles, sut faire le sacrifice de
mille ans d'existence et de tout son avoir, et
qui, en considération de son courage et de
son martyre, se trouve aujourd'hui quasi
rebatie par la Belgique reconnaissante, déco
rée des croix de guerre de France et d'Angle
terre, et honorée de la venue des Peuples et
de leurs plus hautes Autorités.
La Ville d'Ypres est devenue une ville
historique d'une réputation mondiale a cause
des grandes choses qui s'y sont passées.
Quand lYnvahissrur avait pénétré en Bel
gique jusqu'a l'Yser, et en France jusqu'a la
Marne, il se St, au mois d'octobre 1914, que,
grace aux succes de Joffreetd'ALert, i! déses-
péra d'atteindre Paris par la Marne, et la
Som me par l'Yser; il rêva alors d'étendre son
empire maritime et entreprit sa course a la
mer il appela tous les guerriers allemands et
autrichiens disponibles a Ypres, et v ter.ta et
retenta, quatre ans durant, a coups d'assauts
retentissants et de carnages épouvantables,
le passage a travers Ypres il me faut Ypres,
s'écria Guillaume II a Menin au mois d'oc
tobre 1914, et il y fit comrrencer et- recom
meneer les plus énergiques attaques l'histoire
dira que, ne venant pas a bout de la résistance
de l'Empire britannique, appuyée par la
France et la Relgique, les envahisseurs bom-
halrdèrent et asphyxièrent, brisèrent et hrü
lèrent la Ville, qui osa leur tenir tête,
protégea le pays non encore envahi, empêcha
l'annexion de toute la Belgique et du Nord
de la France et amena la fuite de l'ennemi au
mois d'octobre 1918
Excusez moi, j'oublie que c'est uniquement
en l'honneur des défenseurs frangais d'Ypres
que Vous organisez votre pélérinage. Quels
ne doivent pas avoir été le patriotisme, l'es-
pritde sacrifice, le courage, l'énergie, l'endu-
rance, les fatigues et les souffrances des 36oo
soldats frangais, que Vous vemz particulière-
ment remémorer aujourd'hui ce sont les plus
hautes vertus civiques et militaires que Vous
venez honorer c'est l'amour de la Patrie, le
respect du Droit et le besoin de la Liberté
que Vous venez glorifier.
La Ville d'Ypres s'associe de tout coeur a
vos nobles sentiments, d'autant plus que c'est
directement pour Elle et a ses pieds que les
36oo soldats frangais, enterrés ici, ont fait le
sacrifice de leur vie. Puissent nos fleurs
honorer la mémoire des défenseurs d' Ypres,
et nos prières donner a leurs ames le bonheur
éternel.
Mr Albert Devize, ancien ministre beige,
répond dans les deux langues, et le Général
Gouraud remercie, au nom de la France, la
viile d'Ypres et son bourgmestre.
La plupart des personnalités présentes
signent ensuite le livre d'or.
A la sortie de l'hötel de ville la musique du
3e de ligne qui vient d'arriver d'Ostende, con,
duite par le lieutenant Moreau, joue la Mar
seillaise et la Brabangonne, tandis que la foule
acclame longue ment les représentants de la
France.
Les autorités se rendent ensuite en auto au
cimetière frangais, qui se trouve a quatre kilo
metres de la ville. Le long de la route une
foule immense progresse tandis que des auto
cars amènent des centaines et des centaines
de pélerins. De nombreuses délégations de
sociétés patriotiques, avee drapeau, sont déja
arrivées au champ de repos. Toutes portent
des gerbes. Voici les Trompettes patriotes de
BruxelleS lés Amitiés Frangaises d'Ypres
les Poilus de France en Belgique, section de
la Flandre Occidentale (Qstende, Courtrai et
Ypres) la Fédération Nationale des Anciens
Combattants et celle des Invalides, sections
d'Ypres la British Legion l'associaiion
des Aveugles de guerre, etc etc.
Des sonnefies de clairoris retentissent, on
entend une marche régimentaire. C'est la
musique du 3' de ligne qui arrive, suivie des
personnalités civiles et militaires qui prennént
place sur la tribune dressée prés de l'entrée
du cimetière et pavoisée aux couleurs frangai
ses, beiges et Yproisesi Voici d'abord le géné
ral Hanoteau, représentant S. M. le Roi
Albert le général Gouraud, gouverneur mili
taire de Paris, grand invalide de guerre. .Vien-
nent ensuite le général Deprez M. Georges
Leygues, ministre des pensions et ancien
président du Conseil frangais M. Albert De-
vèze, ministred'Etat M. Mundeleer, député
Mgr. Dugardyn, aumönier en chef de l'armée
beige le Comte Peretti de la Rocca, ambas
sadeur de France a Bruxelles le général
Chardigny, attaché militaire frangais M.
Wauwermans, député M. M. Jean Bernard,
Hye, Coeckelberg, Rooman et Mettewie,
bourgmestre de Molenbeek le colonel ftan
gais Vinper.sini M. Flattée, secrétaire de la
section beige de l'Idée frangaise èt l'étran-
ger le docteur Delannes M. le ministre
de Broqueville Mme la Comtesse John
d'Oultremont et Mme la baronne Lemonnier,
présiientes de l'CEuvre des Tombes le capi-
taine W. G. Perrott, représentant ['Imperial
War Graves Commission le major Peeters,
directeur du service des sépultures militaires
beiges M. Jules Destrée, ancien ministre
le général Desprez, commandant la province
M. Léon Théodor, ancien ministre M. H.
Sobry, bourgmestre d'Ypres, et divers officiers
supérieurs frangais.
Une nouvelle sonnerie retentit et le plus
grand silence est aussitót observé. M. Al>ert
Devèze, président de la section beige de
l'Idée Frangaise a l'Etranger ouvre la
série des discours et prononce la belle allocu
tion suivante, qui fut religieusement écoutée
par une foule immense
Discours de M. Devèze
Devant ces tombes glorieuses, recueillons-
nous. II n'est point de legon plus forte et plus
haute que celle ci. Elle nous enseigne a la fois
l'honneur de la guerre et des sacrifices
humains qu'elle exige l'amour de la paix et
de ses oeuvres fécondes la passion de la
liberté et de la justice, sans laquelle il n'est
point de paix véritable et durable la solida
rité de sentiment qui doit unir entre eux les
peuples sortis victorieux de l'épreuve a force
d'héroïsme et de foi robuste dans leurs
destinées.
Car ces soldats sublimes n'étaient pas au
service d'une entreprise de conquête, de
rapine et de domination. A l'appel de la patrie
en danger, ils avaient quitté douloureusement
tout ce qu'ils aimaient, tout ce qui avait été
jusqu'alors leur joie et leur raison de vivre,
pour prendre les armes et, dès eet instant,
ils avaient consenti, avec une simplicité ma-
gnifique, le sacrifice supiême de leur existence
a la défense, a la sauvegarde du patrimoine
commun de la nation. Us sentaient confu.-é-
ment que ce patrimoine, a Ia lois moral et
matériel, était lait de tout ce que leur avaient
légué les générations. Les idéés, lt-s granGes
idéés de solidarité humaine et ue progrès,
d'égalité des citoyens, de souveraineté du
peqple, leniement congues etformées a travers
lessiècles dans lesprofondeurs.de l'ame collec
tive, et dont l'éclosion superbe et ['expansion
irrésistible ont bouleversé le monde.
Ils sont morts pour la France la France
libre, grande et fiére, et pacifique, amie des
peuples liores, digne de leur confiance aussi
bien que de leur admiration, mère immortelle
pour laquelle leur jeunesse avait rêvé de vivre,
pour laquelle elle a voulu et elle a su mourir.
Mais, Beiges, nous savons que c'est pour
nous aussi que ceux-ci sont morts. Nous qui
d'un égal amour, avec une égale fierté, avec
une pareille fidélité aux grands souvenirs de
notre histoire et une même terveur d'espérance
dans ï'ayenir de la patrie l'avons servie et
défendue a l'heuré üu péril nous saluons
avec une émotion indicible. ces Irères d'armes
tombés sur notre sol, pour notre cause aussi
bien que pour la leur. Nous voulons qu'ils
dorment en paix al'ombre des deux drapeaux.
Et notre gratitude pieuse, en fleurissant leurs
tombeaux, ne fera point de diflérence entre
nos soldats de Flandre et de Wallonië et
ces soldats de France, leurs compagnons de
souffrance et de gloire.
Les uns et les autres se sont oflerts en holo-
causte. Ils ont voulu que les générations futu
res ne connaissent plus l'affreux fléau. Ils
noüs ordonnent car ils ont le droit d'or-
donner de veiller avec vigilance sur la
sécurité de nos frontières, afin qu'aucune
agression nouvelle ne puisse mettre en dan
ger l'Idéal pour lequel ils sont tombés. Mais
ils nous ordonnent de même de mettre tout
en oeuvre pour qu'a jamais, par la concorde
loyale des nations civilisées, la Paix règne sur
le monde, stabilisée par la Justice et dominéé
par le Droit.
Immortalisons leur mémoire et notre recon
naissance dans le marbre et la pierre cette
tache est digne de nous. Mais n'oublions ja
mais que pour ces grands morts, la patrie elle-
mème, heureuse, forte, unie, prospère, est le
seul monument digne d'eux.