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sinistrés qu’on
aux
au cin-
reux qui avaient tout perdu, se sont heurtés
dans bien des cas, malgré les excellentes dis
positions du ministre des affaires économi-
ques, a des difficultés interminables pour
obtenir les justes dommages auxquels ils
avaient droit.
Aussi, maints sinistrés, plutót que de reve-
nir dans le pays et devoir, pour commencer,
loger a la belle étoile ou dans des abris alle-
mands ou autres, ont préféré céder leurs
droits aux dommages et laisser aux cession-
naires toutes les difficultés de la reconstruc
tion.
Ces cessionnaires, gens généralement en-
treprenants, se substituent done aux sinistrés.
Sans ces cessionnaires, les regions dévastées
seraient loin d’etre ce qu’elles sont déja les
personnes compétentes, les presidents des
coopératives pour dommages de guerre, le
président de la Fédération des sinistrés, sont
unanimes pour le reconnaitre.
M. Rabau, conseiller provincial et prési
dent de la Fédération des coopératives pour
dommages de guerre de Furnes-Dixmude,
déclare qu’un trés grand nombre de sinistrés
ne sont pas revenus les uns sont décédés,
des families se sont disloquées, d’autres ont
créé un foyer en France, et beaucoup ont agi
ainsi, préférantun toit a l’étranger plutót qu’
un tas de ruines dans leur patrie et la certi
tude de nombreux déboires avant de pouvoir
reconstruire.
Dans une lettre a M. de Liedekerke, M.
Rabau dit, entre autres
On a laissé croire aux
-pouvait acheter des dommages de guerre de
maisons détruites et on voyait même les tribu-
naux et les coopératives donner des avances
de 70 p. c. sur ces biens au nouveau proprié-
taire cela, avec l’assentiment du ministère.
Or, récemment, une nouvelle interpreta
tion défend aux commissaires de l’Etat d’ac-
corder une indemnité de remploi aux acqué-
reurs qui sont déja en possession d’une autre
maison, et cela soi-disant pour empêcher la
spéculation et dans l’intérêt des sinistrés.
En voulant toucher quelques spéculateurs
(si Ton peut les appeler ainsi, car sans les
nouveaux acquéreurs, comment nos localités
seront-elles reconstruites, puisque plus de la
moitié de la population d’avant-guerre a dis-
paru d’une faqon ou d’une autre), en vou
lant done toucher ceux-la, on n’a pas remarqué
qu’on ruine en même temps des centaines de
personnes honorables, qui n’ont, cependant,
contrevenu a aucune loi, a aucun reglement,
pour la plupart des sinistrés dont le coeur bat
d’angoisse a l’idée de ce que le gouvernement
leur réserve
Nous voyons ainsi des personnes qui, en
toute confiance, ont acheté une maison en
1920. Une avance accordée de 70 p. c. leur a
permis de la reconstruire et maintenant qu’ils
viennent d’obtenir un jugement définitif, on
leur accorde en tout et pour tout la valeur de
1914. Ces personnes, dont les neuf dizièmes
ne possèdent pas cet argent, seront done obli-
gées de rembourser ce qu’elles ont touché et
dépensé de bonne foi, il y a deux ans.
Elies se verront done complètement
ruinées.
D’autres qui ont acheté dans les mêmes
conditions, un an après, done en 1921, mais
qui ont pu obtenir plus tót que les premiers
un jugement définitif, supposons en 1922,
ceux-la se sont vu accorder un coefficient 5 de
remploi. Ce qui n’est en somme, que juste.
Mais peut-on comprendre ces deux poids et
ces deux mesures Personne ne saurait 1’ad-
mettre.
Messieurs, de nombreux propriétaires de
ferme ont fait reconstruire leur propriété par
l’Etat qui, certainement, a dü appliquer le
coefficient 5.
D’autres propriétaires de fermes ont eu
recours aux Boerenbonden pour lesquels
la construction n’a pas coüté moins cher, et,
aujourd’hui, comme on ne paie plus qu’en
raison du coefficient 4, ces derniers malheu-
reux sinistrés, sont obliges de payer
Boerenbonden un supplément égal
quième de la somme dépensée.
Pour beaucoup, c’est la ruine.
Il faut reconnaitre, messieurs, que c est le
cas ou jamais de dire deux poids et deux
mesures.
Les sinistrés qui n’avaient plus aucun inté-
rèt a reconstruire, par exemple les héritieis
d’un commergant ou d’un industriel décédé,
ou les sinistrés qui n’en avaient pas le courage,
ont été trés heureux de trouver des cession
naires. Mais paree que quelques-uns, oh
trés peu ont fait une bonne affaire, 1’admi-
nistration pretend les frapper tous a partir de
ce jour, voire même rétroactivement.
Il est bien évident que personne n’achèterait
des droits aux dommages de guerre, s’il
n’espérait pas y trouver son profit de la a
qualifier tous les cessionnaires de spéculateurs,
de les traiter en parasites des sinistrés, il y a
de la marge.
Il convient aussi de ne pas perdre de vue
que le but qu’envisageait le pays était moins
d’indemniser que de reconstruire, de rendre
la vitalité aux zones détruites.
Mais, messieurs, il n’y a pas seulement
certains ceèsionnaires que l’on peut accuser
de spéculer. Il y a quelques jours a eu lieu a
Ypres 1’adjudication d’un terrain situé Grand’
Place, endroit extrêmement précieux au point
de vue commercial. Il a été vendu 400 francs
le mètre carré. Or, cette vente a eu lieu pour
compte de l’Etat qui avait acquis ce terrain
au prix de 203 francs le mètre carré.
M. Delattre. Et on dit que l’Etat est
mauvais commercant
M. Buyl.C’est ce qui a fait dire, a un jour
nal que l’Etat se montre ainsi, le plus odieux
de tous les spéculateurs
Le Fonds du Roi Albert, cette oeuvre admi
rable qui a déja rendu tant de services a
acheté, pour les revendre, un nombre consi-
dérable de droits aux dommages de guerre.
A ce propos, voici la teneur d’une affiche
placardée dans tous les bureaux des commis
sariats d’Etat des regions dévastées
Avis. Les sinistrés qui désirent vendre
leurs droits aux dommages de guerre, peuvent
s’adresser aux sociétés locales d’habitations a
bon marché ou au Fonds du Roi Albert, rue
Montoyer, 53, a Bruxelles, soit directement
ou a 1’intervention du commissaire principal.
Cette cession peut se faire avant ou après
jugement tant pour le mobilier que pour les
immeubles.
Et voici ce que je trouve dans le procés
verbal d’une séance du mois dernier du con-
seil d’administration du Fonds du Roi Albert
Le conseil approuve le rachat des dom
mages de guerre suivants
i° au prix de 5,5i3 fr. 16 c. pour trois
maisons ouvrières situées a Ploegsteert.
Indemnités totales dont disposera le
Fonds du Roi Albert, environ 19,000 francs
2° au prix de 6,775francs, pour un im-
meuble situé a Eppeghem, et dommage mobi
lier y afferent.
Indemnités totales dont disposera le
bonds du Roi Albert, environ 20,000 francs
3° au prix de 2,892 francs, pour un
immeuble situé a Cruybeke. Indemnités tota
les dont disposera le Fonds du Roi Albert,
environ 12,000 francs.
Il ne viendra cependant a l’idée de person
ne, de dire que le Fonds du Roi Albert fait de
ia spéculation
M. Poncelet. Mais, monsieur Buyl, vous
oubliez que lorsque le Fonds du Roi Albert
acquiert le droit de reconstruire, il fait socia-
lement une excellente chose, mais quand un
particulier fait la même acquisition, il s’enri-
chit souvent aux dépens de la collectivité.
M. Buyl - C’est ce qu’il faudrait démon-
trer.
Je connais, messieurs, une coopérative
sociahste que je me garderai bien d’accu
ser de faire de la spéculation, - qui a racheté
la propriété détruite d’un magistrat commu
nal des plus estimés...
M. Colaert. J’ai vendu mon immeul)]
une société soi-disant commerciale. Cela
été déclaré devant notai re et témoins. J’ai
trompé.
MDebunne. Pas de personnalité(ft,
M. Buyl. - Je suppose que cette coon
tive n’a pas fait une mauvaise affaire et
tant, le cedant, je vous 1’assure, est de ta
a ne pas se laisser fruster.
Une maison trés ancienne, La j-
Rose a Furnes, qui a été admirablem
restaurée grace, en partie, a la générosité
Américains, a été cédée aux Boerenbond
le puissant organisme agricole, pour y insta
une banque. Je crois que cédant et cessi
naire sont enchantés tous deux.
M’est-il permis de vous rappeler, messiet
i° que le droit strict a l’indemnité est pro
mé par l’arrêté-loi du 23 octobre 1918 et
1’article i'r de la loi organique du 10 mai 19
20 que 1’article 55 de la même loi dispose 1
les indemnités pour dommages de guerre s
cessibles 3° qu’un arrét de la Cour de
sation du 7 décembre 1922 dit, en ten
formels
La reconstitution économique s’opèn
l’intérêt public obtient satisfaction aussi b
par le fait du cessionnaire du sinistré,
par ce dernier lui-même.»
Enfin, messieurs, n’oublions pas qu’il
suite du titre VI, livre III, du Code civil, t
le cessionnaire entre dans tous les droits
cédant.
Mais, messieurs, ce qui heurte toutes 1
conceptions constitutionnelles, c’est larétro
tivité que Ton vent donner a la loi
Est-il nécessaire d’invoquer 1’article 2
Code civil qui dit que la loi ne disposeq
pour 1’avenir et n’a point d’effet rétroactif 1
La rétroactivité porterait une grave atteir
au prestige de la loi et a l’autorité de lacho
jugée.
C’est ce que fait ressortir avec infinimentt
raison l’organe des sinistrés de 1’arronfa
ment d’Ypres, l’orsqu’il écrit
La mesure n’atteindrait pas seulew
ceux qui, a 1’avenir, reprendront des dro
aux dommages,' mais aussi ceux qui aur(
contracté sous 1’empire de la loi actuelle,
plus fort, meme ceux d’entre euxquii
obtenu jugement et exécution du jugero
intervenu. C’est une facon comme unea»
de montrer que le crime des cessionnai
c’est d’avoir eu confiance dans les lois del
pays c’est d’avoir cru a l’autorité de
chose jugée c’est d’avoir placé leurconIB
en des principes qui ont toujours étécol
dérés comme étant a la base de toute soel
civilisée. I
Le gouvernement est parvenu a fair6®
par le Sénat que désormais, pour les
naires tout au moins, la loi etlesjuge'L]
pris et exécutés par application de la '0'
sans force et sans valeur. I
Il estclair aussi, que pareille l°',ne®
rait avoir que pour effet de frapper
bilité les biens des sinistrés. Et deque
je vous le demande N’y a-t-il pas 6
trés qui se voient obligés de vcn^ie't011]B
quement, le droit de vendre restera
concédé, mais, en fait, il n y al
d’acquéreurs M
De toutes ces graves conséqufB^^B
loi, telle qu’elle est projetée, on P®
convaincre, par la lecture des textes
au Sénat. Il ne s’agit done paS
d’un projet de loi qui vise uniquein
ques cessionnaires, mais qui menace
per tous les sinistrés dans leurs bien.
a partir de 1’adoption definitive e
biens seraient inaliénables, sans v
sable.
Le même journal dit plus loin
Quant a l’État, au gouvernentf^M
on cotte circonstance, un bien VI al
que tout autre, il a intcrct a ce Q
pas porto atteinte a des principeS^tf^B
tuent les fondements meme de 1*