11 I Au dictés par la plus élémentaire sagesse, c’est on aura beau nous dire le contraire attein- dre l’Etat, de Ia manière la plus directe et lx plus sure, dans son crédit, dans son prestige et dans son autorité. Les consequences Que M. Theunis le veuille ou ne le veuille pas. il est grave de dire J’ annule certains petits dommages, je ne paie plus les indemni- tés que jusqu’a concurrence d’une certaine quotité, je me réserve de réclamer a ceux qui ont déja requ, le remboursement de tout ce qu’ils auront requ au dela de cette même quo tité. C’est méconnaitre les engagements pris et faire bon marché des décisions de justice.. Cette attitude inconsidérée ne peut avoir as dehors qu’une trés facheuse répercussion. Sans envisager plus longtemps les suites^ lointaines d’une aussi magistrale leqon de bol- chevisme, arrêtons-nous un instant a des con- séquences plus immédiates. Et tout d’abord, comment déterminera t-ort les petits dommages qui seront a annuler et ceux qui ne le seront pas Dans un pays de régime égalitaire, il est toujours intéressant de savoir comment on s’y prendra pour résoudre ce difficile problème. Ensuite, si nous comprenons bien, le sinis- tré acceptant de faire le remploi ne disposera plus des sommes nécessaires Il ne recevra plus qu’une partie des indemnités lui accor- dées, 1’autre partie n’étant représentée que par un titre non convertible et sans valeur realisable. C’est arrêter net l’achèvement de la restanration des regions dévastées. Quant au sinistré qui a obtenu ses indem nités a charge de remploi et qui a effective- ment reconstruit, il se trouvera dans une situation beaucoup plus grave et beaucoup plus pénible sous prétexte d’égalitè, il devra rembourser toutes les indemnités recues aut dela de la quotité prévue, comme donnant lieu a indemnisation im nédiate. Si cette quotité est fixée a 5o °/0 il devra done rendre la moitié du total des indemnités allouées. S’il a touché ioo.ooo frs, il devra rembourser 5o.ooo frs., contre remise de titres non négociables. Dans la plupart des cas, il n’aura pas cette somme disponible, et, dés lors, il ne restera plus a l’Etat qu’a hypothéquer le bien jusqu’a con currence de 5o.ooo francs., soit une somme dépassant dans la plupart des cas la valeur realisable de 1’immeuble reconstruit. Avons-nous tort de dire que le sort des sinis trés se trouvant en pareil cas sera plus péni ble que celui qui n’a encore rien touché? Après 1’effort accompli en de malheureuses condi tions car la reconstruction ne s’est pas faite sans efforts et sans peines le voila ruiné et broyé par la machine a égaliser pré- conisée par M. Theunis. Enfin, faut-il dire qu’on ne voit pas trés bien l’Etat dans ce róle n mveau de créancier improvisé a l’égard des sinistrés quelle ironie I et dirigeant contre eux une armée. de budgétivores. Qui ne voit qu’un pareil programme aussi indéfendable ne pourrait se réaliser qu’au prix des plus grandes difficultésdifficultés d’ordre moral, difficultés d’application. Ce qui est aussi particulièrement grave, c’est que la politique annoncée auraitd’ailleurs une conséquence immédiate en France. Entre notie pays et la France a été conclu, au point de vue des dommages de guerre un traité de réciprocité les Beiges ayant subi des dommages en France bénéfi’cient des avantages de la loi francaise, comme les Fran cais ayantrsubi des dommages en Belgique,, bénéficient chez nous des avantages de la loi beige. Mais si demain les avantages accordés par les lois beiges de reparation deviennent illu— soires ou conduisent nous venons de voir le cas a la ruine de celui qui en réclame Ie bénéfice, il est certain que cé traité franco-bel- ge relatif aux dommages de guerre serait, en. réalité, pour les Francais, une veritable du— perie. tirer vanité de l’obstination qu’il a mise a pousser toujours plus avant la restauration des régions dévastées, voila que, brusquement, il hésite, rougit de son effort, s’étonne de son audace. Au lieu d’être fiërté, il n’est plus que confusion. II est bien prés de renier l’oeuvre a laquelle il a si puissamment collaboré. Il se plait a broyer du noir. Epuisé le crédit national Incertains les résultats de la pro chaine conférence interalliée II n’est plus question que de sacrifices, dont principalement les sinistrés feront les frais. C’est ainsi, en effet, que M. Theunis déve- loppe un programme nouveau en matière de dommages de guerre comportant trois propo sitions i'). Annulation des petits dommages, tout au moins pour ceux qui peuvent les supporter. 2’). Paiement des indemnités jusqu’a con currence d’ une certaine quotité et pour le sur plus remise de titres négociables lorsque l’Allemagne aura payé. 3e). Même traitemènt pour ceux qui ont déja repu leurs indemnités comme pour ceux qui en sont encore a les attendre. L’inadmissible solution Ce programme soulève des troublantes ques tions. Est-il admissible que l’Etat en arrive a renier ses engagements Nous ne le pensons pas. L’exemple donné par le gouvernement des Soviets n’est pas a imiter. L’exemple fourni par l’Allemagne n’est pas davantage a suivre. Souvenons-nous de l’attitude du Gouvernement francais, cha- que fois qu’il est question de ses dettes vis-a- vis de ses alliés il ne les conteste ni ne les renie il sait qu’en reniant ses dettes un état se discrédite et.se déshonore. C’est de la fidélité a exécuter les engagements pris que depend le crédit de l’Etat, aussi bien que celui de l’individu Crédit a l’intérieuret crédit a l’extéri.eur'. Renier les engagements pris, quand il s’agit de" l’Etat, c’est done porter atteinte a s'n crédit national, mais aussi a son prestige et a son autorité. Un gouvernement qui renie ses propres engagements n’est p^is qualifié pour exiger d’un autre gouvernement la fidéle exécution de ses engagements il s’est mis volontaire- ment en mauvaise posture. Est il admissible que l’Etat tout en reconnais- sant ses dettes, refuse de les payer Il ne nous parait pas. Le refus brutal de payer ses dettes, quand on est l’Etat et qu’on dispose de la force, équivaut en réalité a renier ses dettes II entrainera les mêmes consé quences. Est-il admissible que l’Etat suspends ses paye- ments Evidemment oui. II peut arriver a l’Etat d’être dans la situation du débiteur mal- heureux a l’impossible nul n’est tenu II appartient a l’Etat d’établir sa bonne foi. II lui appartient de justifier pourquoi il s’attaque a ceux-ci et pas a ceux la. Mais cette bonne foi que nous réclamons, jamais il ne pourra mieux l’établir, après avoir fourni les justifi cations nécessaires, qu’en proposant un délai et en offrant des garanties. C’est dans eet esprit tout de conciliation qu’il nous plait d’examiner le programme esquisse par M. Theunis. Il nous est impos sible de nous y rallier. En annulant certains dommages, et en exigeant remboursement de certaines indemnites percues, sous prétexte de faire l-’égalité parmi les sinistrés, on mécon- nait les engagements solennels qui ont été pris on renie, partiellement tout au moins, une dette qui a été considérée comme dette sacrée en remettant le paiement de la grande partie des indemnités a une époque indétermi- née a la veille de la conférence internatio- i nale, dont on prédit les heureux résultats sans explications, sans offre de garanties, on I fait naitre toutes les suspicions. Rien ne parait plus grave a 1’heure actuelle. Adopter sembla- ble politique en brouille avec les principes IL Max Glorie, ancien député, parle Ete en ces termes ■nes importantes déclarations faites récem- Itala Chambre par M. Theunis, a 1’occa- ]a discussion du traité franco-beige, jretenuque le chef du Gouvernement y Kjageait la revision radicale, non pas de fcques décisions intervenues en matière de tinages de guerre, mais de toute la ques- des dommages de guerre, y compris le ■oft a la reparation lui-même. Bgien accueilli dans le milieu parlementaire, programme -esquisse par M. Theunis |01!Va aussi dans la presse un écho favorable. lanS la panique du moment, chacun voulut y Kir, semble-t-il, le rcmède héroïque. |ll s’en faut de beaucoup que, dans les mi- de sinistrés, il trouva le même accueil. peine la portee de ce programme y fut-elle Innue, qu’elle y provoqua d’abord une véri- Ible consternation. Toutefois, après ce pre fer moment de découragement et d’abandon, s’yforma un état d’esprit nouveau, se tra- cisant par d’apres protestations et par onanime volonté de défendre avec la der ive énergie, contre un gouvernement par- ire, leurs foyers remis en péril. Le droit a la reparation Quand on examine cette question, on ne •ut en effet perdre de vue les engagements Jennels pris a l’égard des sinistrés. Avant la guerre mondiale, la guerre avait iijours été considérée, au point de vue de ses inséquences, comme un événement d’ordre itastrophique. Tant mieux si la chance vous a été favo- ble, tant pis par contre, si la foudre a ineen- ié votre toit ou si la guerre a détruit votre aison. Victime d’un événement catastro- bique, le sinistré n’avait aucun droit et pou- lits’estimer heureux du secours qui lui était fert par .compassion telle était 1’affreuse octrine. Néanmoins, la guerre mondiale perdure, iétine dans les tranchees, se localise et des gions entières sont vouées a 1’effroyable tetruction. Des milliers de citoyens devenus ms toit, s’éparpillent en tous sens. L’esprit esolidarité, véritable esprit moderne, mis en veil par l’immensité du désastre, réclame des olutions. La nécessitéderamenerles coiitrées wagées a la vie, avec l’aide de ses anciens ubitants, ne demande pas avec moins de vi- Jieur, les sacrifices nécessaires c’est l’inté- èt national bien compris. La partie ne peut «nquer d’être gagnée la résistance gouver- «mentale bientót vaincue, s’achève en un pand geste fraternel le droit a la réparation Stné. C’est par l’arrêté-loi du 23 octobre 1918 lu’aété proclamé le droit a la réparation ie droit d la réparation par la nation, des ^'innages resultant des faits de la guerre, en tyique, est reconuu aux Beiges. C’est sur ce droit la, solennellement pro- latné par l’arrêté-loi du 23 octobre igi8, "Dsacré depuis lors, partiellement tout au ®°ins, par les lois successives sur les répara- 10ns et appliquées par nos juridictions de ^images de guerre, que les sinistrés ont °ndé toutes leurs espérances. ^Cest par ce droit la, que l’Etat s’est acquis '"dispensable concours des sinistrés, grace '"Qiel les régions hier encore complètement evastées, sont pour ainsi dire rendues a une 'le normale, sujet d’étonnement et d’admira- Otl pour tous nos visiteurs étrangers I] e geste du législateur d’octobre iqiS, fait ^nneur au pays. L’ceuvre grandiose qui ^Cc°mplit et dont il n’est que le point de laissera sa glorieuse trace dans 1 His- ^re’ dans la grande Histoire, oil l’on ne se pas a faire le récit des guerres et des ^S ructions, mais oil Ton recommit aussi le J,r.lte de 1’effort qui crée, animé du plus e vouloir humain. Le Programme de M. Theunis Moment oü le Gouvernement pouvait -.-<1 bi

HISTORISCHE KRANTEN

Het Ypersche (1925-1929) | 1924 | | pagina 5