La Restauration Agricole
de la Flandre Occidentale
Conférence donnée par ML. BOEREBOOM,
Inspecteur Général au Ministère de l'Agriculture,
devant la délégation de la Société des Nations
d Ypres, le 6 Juillet 1928.
Messieurs,
Aujourd'hui vous avez traversé une partie
de ce que fut l'ancien champ de bataille du
saillant d'Ypres et, en voyant nos belles
fermes reconstruites et les magnifiques champs
ifjrometteurs de récoltes abondantes, vous
fouvez difficilement vous rendre compte des
ravages terribles que la guerre avait causés a
rïotre sol.
II faut, en effet, avoir visité le front au len
demain de l'armistice, ou avoir travaillé a la
reconstruction du pays pour pouvoir encore
garder un souvenir exact de l'état de dévasta
don dans lequel nous avons retrouvé notre
Belle Flandre Occidentale.
Un tiers de cette province, une des plus
prospères de notre pays, était transformé
un vaste désert chaotique oü toute trace
d'e vie avait disparu.
Dans la partie Nord, des nappes d'eau
rsaumatre recouvraient, a perte de vue, les
prairies réputées du Furnes Ambacht. Dans
ïfc Sud. des routes provisoires, construites
S.ors de l'avance de nos armées, traversaient
des champs ou plutot des terrains livrés aux
-Qseaux et aux orties.
Le sol bouleversé a des profondeurs invrai-
uemblables, entrecoupé de tranchées pro-
förides, était encombré de débris de toute
oature, décombres et fils de fer barbelés.
Sur l'horizon se profilaient seuls quelques
fr.or.90ns d'arbres déchiquetés, d'immenses
tbris bétonnés, ou des débris de tanks
epibourbés.
Au printemps de 1919, le président Wilson
vjnrt visiter nos champs de bataille. Dans
liltinéraire on avait prévu un arrêt a Poelca
pelle, avant la guerre un village florissant de
4poo ames.
Comme point de repère, les autorités
unglaises avaient planté, au cóté droit de l'é-
glise détruite.un poteau avec 1'inscription «lei
FoelcapelleLe cortège présidentiel tra
versa la forêt d'Houthulst et parvint a Ypres
■;ians arrêt. Le poteau avait été renversé et
personne n'avait soupqonné l'endroit oü
ïferrêt devait êtrefait, ni découvert la moindre
tEace d'une habitation quelconque et pourtant
plusieurs villages importants avaient été
traversés.
Si grande était la dévastation que, au cours
dé nos travaux, nos ouvriers nivelèrent
souvent les emplacements de fermes impor-
faotes sans pouvoir distinguer ces emplace
ments des terrains avoisinants.
iLes pessimistes annonqaient que le mal
était sans remède. Dans la zone, inondée par
I'eau de mer, les dépots dé sel auraient cm
pêché toute végétation. Dans le reste du
front, le bouleversement contir.uel avait
ramené a la surface une si notable proportion
de sous sol argileux que toute culture devait
être pratiquement impossible. Le coüt de la
restauration aurait dépassé de loin la valeur
des terrains qu'cn pouvait récupérer. Tout
ce qu'on pouvait tenter c'était créer une
iihmer.se forêt, qui aurait enlevé a l'agriculture
oiie région des plus prospères, environ 1/20
dé la Belgique, eflacé de la carte une centaine
de villages et condamné a Immigration une
partie importante de notre population.
Nous avons prouvé, Messieurs, une fois de
plus, combien les pessimistes ont eu tort et
je suis heureux de pouvoir, dans la maison
communale d'Ypres, la ville que certains
avaient déja voué k une mort certaine, de
pouvoir vous indiquer rapidement comment
les pouvoirs publics et, en particulier, le
•Ministère de 1'Agriculture, ont contribué a la
resurrection de notre Flandre dévastée.
Les Ministres des Chemins de Fer et des
Travaux Publics assumèrent la reconstruction
des voies ferrées ou des routes et voies navi-
gables. Le Ministre dés Affaires Economiques
organisa les tribunaux des dommages de
guerre pour l'indemnisation des sinistrés.
Par l'intermédiaire de l'Oflice des régions
dévastées et de hauts commissaires royaux,
jouissant de prérogatives les plus étendues,
il réorganisa les services administratifs des
communes et dirigea les travaux de recon-
stitution par l'Etat des communes et des
habitations.
Au debut de la res^ Les enthou
élaboré des projets grandios fajre
siastes et Turbanisation ruines de
abstraction compléte des p ieur empla-
nos cités détruites et d'étabhr, a ieur
cement, des villes et des g ï'idéal que se
être, auraient mieux repondu or„anisa-
forment certains modernisesd^ne organts^
tion municipale, mais ou tou d'aban-
aurait été eflacée. Ne Parla a cöté
donner les ruines d'Ypres et d edifier a
une cité nouvelle
Tous ces beau* projets ou plutM tous ces
projets grandioses s'evanouiren i'0DD0Si-
difficultés de réalisation ou devant 1 opposi
tion légitime des sinistiés.
Les grandes dépenses qu'ils auraient en rai
nées auraient d'ailleurs, vu la si ua ion
cière du pays et la reduction de n
nités, rendu l'exécution impossib e.
Nos villages furent donc i reconstruits en
respectant autant que possible les prop
existantes, les routes furent e argies,
places publiques créées, les reseaux eo
refaits et complétés, des distributions e
améliorées, et dans nos communes recon
struites les anciens habitants, ievenus a
pays, se sentent actuellement non pas dans
une ville étrangère mais de nouveau chez eux.
La reconstruction des habitations a gene
ralement été assumée par les propriétaires au
moyen d'avances administratives ou d indem
nités accordées par les tribunaux des dom
mages de guerre. Tou'efois, un grand nombre
d'habitations et de fermes furent aussi recon
struites par l'Etat, moyennant abandon des
droits aux dommages de guerre.
On a critiqué quelque peu certaines dispo
sitions des nouvelles termes. Conques souvent
par des techniciens étrangers au pays un
certain nombre de constructions présentent
des dispositions auxquelles nos populations
ne sont pas habituées et on reproche, avec
quelque raison, que certains architectes ont
trop sacrifié au cöté esthétique, et ce, au
détriment des facilités d'exploitation. Malgré
les imperfections on peut toutefois constater
une tiès grande amélioration iéalisée au point
de vue de l'hygiène des habitants et des
animaux.
La reconstitution agricole proprement dite
a été l'ceuvre du Ministère de 1'Agriculture
qui, k eet effet, institua, dés le mois d'Octobre
1918, un service spécial qui devait examiner
et résoudre sur place toutes les questions
rentrant dans les attributions du département
de 1'Agriculture et des Travaux Publics.
M. le Ministre Baron Ruzette, originaire
de la région d'Ypres, eut a coeur de suivre et
de guider toutes les études et tous les travaux.
Au début, les résultats obtenus furent peu
importants. On devait, en effet, travailler dans
un pays totalement détruit, sans voies de
communication, sans populations. Nous ne
disposions ni de locaux ni de personnel. Une
des plus grosses difflcultés était le recrute
ment d'agents techniques, pour une besogne
trés difficile, trés ingrate et forcément tem-
poraire.
D'autre part, l'incertitude au point de vue
des réparations et le manque de ciédits furent
cause que, pendant la première année, les
travaux de reconstitution ne purent être
poussés a fond. Nous dümes nous borner a
er.courager le retour au pays des habitants
exilés, en leur procurant les matériaux néces
saires pour leur installation provisoire, et en
facilitant l'acquisition de l'outillage et du
cheptel le plus indispensable.
Le travail principal exécuté en 1919 fut le
recreusement de tous les cours d'eau de la
région dévastée.
Dans l'impossibilité de dresser des projets
et de faire appel a la concurrence les travaux
furent au début exécutés au moyen du con-
trat, appelé en Belgique contrat américain
et qui consiste a rembourser aux entrepre
neurs toutes les dépenses majorées d'un
certain pourcentage pour frais généraux
bénéfices, etc...
Ce mode d exécution a été critiqué et a
juste titre, paree qu'il incitait a la dépense
le benefice de 1 entrepreneur croissant avec lé
cout des travaux. Le choix que nous avons
pu faire des entrepreneurs et la réserve en
vertu ue laquelle le Département de l'Aeri
culture pouvait résilier a tout moment les
contrats sans indemnité, ont permis de ter
miner dans de bonnes conditions un travail
qu il n etait pas possible d'exécuter autrement
Nous devions en effet entamer une besogne
dont il etait impossible d'évaluer importance
et les difflcultés et dans un pays inaccessible
et désert. Les conditions de traval
extrêmement pénibles. Les ouvriers j
ériger des baraquements prov}JN
moyen de matériaux récupérés surjjiS 1
pour leur nourriture, organiser des
ravitaillées seulement tous les
huit'
Pour édifier une de nos premières K
nous fumes obligés de percer Un barra,
retenait les eaux et inondait toute
Après Tévacuation des eaux nous
vames les corps de sept soldats et rT"
dépouilles de chevaux, qui répandaiem
odeur nauséabonde. Vous
comprendrez
lors que le recrutement des ouvrier,
personnel était extrêmement difficjie
malgré tous les obstacles, le recreuseiJ!
poussé avec grande énergie et en Jf
temps tous les cours d'eau furent ,ét
dans leur situation ancienne.
Ces travaux eurent pour conséquence
supprimer les inondations, qui couvraie„
front, ils assèchèrent le sol et permirent d
tamer les travaux de restauration et
ploitation.
Pendant la première période furent c
de nombreux champs d'expériences, oupl,
puisque nous n'avons jamais doutédusu
final, des champs de démonstrations, desl
a encourager et rassurer les cultivateurs
hésitaient d'entreprendre les travaux
défrichement.
Dans la région du Nord, qui était ri
sous eau pendant quatre ans, des échanti]
de terrain furent analysés et décélèrei
présence d'une forte proportion de chk
de Sodium allantj usque 20 pour mille,
qu'on considère généralement comme sté
les terrains contenant 1 pour mille de k
Mais nous n'étions pas convaircus. Nos
ders n'étaient-ils pas le produit des allm
déposés par la mer et, sur les pat ties les
élevées des terres inondées, ne pouvions-
pas voir apparaitre la flore caractéristiqu
nos prairies grasses
Pour la création d'un champ d'expérie
prés du front de Schoorbakke, j'avaiscon
un technicien de la vieille école qui, a
avoir vu le terrain que nous proposi
déclara la réussite impossible, ajoutant
le temps des miracles était passé.
Vous avez pu voir, Messieurs, en tra
sant nos belles régions restauréesqueleti
des miracles est heureusement revenue!
cette parcelle dont la restauration devait
impossible, on a récolté en 1922 2400 kg
froment a l'hectare.
Comme amendement des terres nous a
uniquement utilisé de grandes quantité
chaux qui ont donné des résultats
faisants.
Nous avons pu remarquer que la tenet
NaCl. diminue trés rapidement et
moment les effets nuisibles ont disparu
a de rares endroits oü il faudra de t
breuees années de culture spéciale
rendre a la terre sa fertilité primitive.
Toutrs ces études préparatoires per®
de compléter l'organisation du cadre
sonnel et d'arrérer les méthodes dén®
de travail pour arriver a la restauration
terres et fournir aux cultivateurs sinistre
cheptel et l'outillage nécessaires.
Encore pendant les hostilités, Sa 1
le Roi, qui vivait continuellement au r®
en connaissait mieux que personne la 8
détresse, avait promis un prix de 23
a l'auteur beige du meilleur projet p'
pour la remise en état d'exploi'atl°
terres ravagées. Ayant eu l'honneur
partie du jury d'examen, j'eus l°cca^:
connaitre les solutions aussi noiTibreu-^,
baroques suggérées surtout par d®
ciens en chambre.
La méthode n'était pourtant
compliquée.
Elle fut préconisée par un
d'un bon sens robuste et d'un 0Ptm taUre-'
branlable. II éciivit que, pour
front, il suffisait d'utiliser convena
bêche. C'était la solution vraie e
immense travail de terrassement 1
partement de 1'Agriculture prit sur
niser et de mener a bonne fin. 6
des ter
Une loi sur la restauration
votée le i5 Novembre ig 19*
Elk
aut"11-
(éf
dans une zone limitée, a acquer11L1jce
tionner les terres et a prendre mpteri
les mesures nécessaires a la pr0
ration. Les crédits
nécessaires ,1
et 1 on put enfin se mettre re»
besogne.
A r-vo ofórnnv rnnn r\A.
'11 nniilo *VI Ont 4-/xi. 1
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