IPURHAL D UNE StEUR D7PRES Dclobre 1914 a Mai 1915
„10-28 Het Ypersche - 2e Bijvoegsel - JLa JRégion d.' Ypres N° 28
Motos Saroléa - Modèles 1928
Suite
2 Janvier. Je suis de garde a la maison pendant la
iesse de 6 heures. Vers 6 h. 1/2 M. Lams arrivera avec le
orbjllard chercher les moits II sonne et je cours lui ouvrir
t porte de la salie, puis celle qui donne dans la rue Wenninck,
jj-sque, au tournant de la galerie, je heurte un brancard. Ma
Lgie s'éteint et je ne puis distinguer l'obstacle, mais il en sort
e odeur infecte. A tatons je retrouve la porte. Puis sitót M.
iarns sorti. Je rel°uinai voir ce qui m'avait obstrué le passage.
C'était le cadavre d une vieille femme, réfugiée de Zonnebeke,
:orte de misère dans un grenier de la rue des Trèfles. Apporté
i veille, dans un état déja voisin de la putréfaction, Sceur
jerchmans avait fait déposer le corps dans la galerie et, sur-
bargée de besogne, avait oublié de me prévenir. Je dus repasser
|ar cette galerie dans la journée et je vous assure que ce n'est
Is sans un léger sentiment d'horreur que je regardai du coin
je ['ceil ce que j'avais si gentiment ernbrassé le matin. Enfin,
jous l'enroulames dans une couverture. Journée calme deux
jIjus seulement et qui n'explosent pas. Je vais voir quelques
naiades avec le docteur Smerdon.
3 Janvier. Les canons cassent les vitres, oü il y en a
Icore et déchirent les chiffons qui servent a boucher les ouver-
ures. Les fusils aussi font du tapage malgré le mauvais temps,
leaucoup de monde dans la petite église. La femme Dehollan-
]er meurt au Sacré Coeur Au Salut, j'étais a ma place
iccoutumée, prés de l'entiée, lorsque M. l'abbé Allemon, de
f>operir.ghe, vint me frapper sur l'épaule. II était arrivé a Ypres
ivec deux officiers franqais qui demandèrent l'endroit oü était
■nterré le commandant de La Croix, du H4e de ligne. Comme
ils ne corinais-aient pas le chemin, je les y accompagnai. Arri-
fés la, un des officiers sembla fort ému, et des larmes s'échap-
hèrent de ses yeux. Je pris la liberté de lui demander s'il con-
naissait particulièrement le défunt et il me répondit que c'était
son frère. II me demanda de soigner le tombeau et voulut me
remettre soixante francs pour y faire placer une pierre. Je lui
dis de laisser ce soin a M. le Curé, ce qu'il fit. Celui ci chargea
done M. Emile Verhack d'y placer la pierre le plus tot possible,
ïour les quelques francs qui restaient, M. le Curé fit un Service
pour l'ame du commandant décédé.
Le soir, je rencontrai un pauvre soldat franqais qui venait
des tranchées, sale ct s'appuyant sur un baton. II avait les pieds
gelésJe lui demandai si je pouvais lui être utile. Oh me
lit-il, si vous pouviez m'indiquer un poste franqais II y en
tun en face de chez nous, lui répondis je, mais avant d'y aller,
venez prendre quelque nourriture chez nous II m'accompagra
et je pus lui donner quelques vêtements de rechange, ce qui lui
permit de faire laver ceux qu'il portait. En attendant qu'ils
fussent secs, il se trouvait a merveille dans sa vieille culotte
i'officier anglais, avec une veste de cuisinier pour complé'er le
:ostume.
4 Janvier. Nuit tranquille. Journée calme. Quelques
Kplosions dans le lointain. Les Allemands ont dü reculer. On
üt que les troupes frangaises vont remplacer les Anglais. Ainsi
tone nos bons ambulanciers nous quitteraient et que ferions
raus sans eux Aujourd'hui encore les Quakers nous ont envoye
tept caisses de Bovril et des pois secs pour nos pauvres et ros
nalales. M- le Curé fera son possible pour les ga-der ici. II y
quelques jours a peine que M. le commandant Young nous
"pporta deux grands sacs de chemises, et cela est bien venu
■os besoins sont si grands Maintenant du moins, nous pou
'°ns leur donner quelque rechange, bien que nous soyons obli
és parfois de donner aux hommes des chemises de femmes
tais a la guerre comme a la guerre 1 II y a bien des soldats
lui doivent s'en contenter...
5 Janvier. L'accalmie semble se prolonger. Deux ou
ro's shrapnels seulement dans les prairies de la Potte de Lille.
Un gendarme a l'imprudence d'ouvrir un obus et est mis en
>ièces. Un autre gendarme est grièvement blessé. M. le Curé et
e Docteur Fox accourus, le firent transporter au Sacré Cceur.
Tous les membres sont présents a la réunion aujourd hui.
ette association a déja fait beaucoup de bien et pris plusieurs
nesures utiles. M. le Curé lit une supplique dans laquelle il
nsi*te pour que l'ambulance du Friends Unit puisse continuer
10n oeuvre de dévouement dans notre ville et les environs. M.
e ^ourgmestre se chargera de la faire parvenir a M. le i mis
tre> au Havre. M. le Curé demande aussi d'organiser un secours
;our les malades pauvres et les vieillards afin de leur procurer
la soupe et du lait. Instantanément, les premiers fonds,
fr^te-douze francs, sont recueillis parmi les membres memes
Co*ité. Immédiatement aussi, a son retour, des mesures
Prises pour assurer la distribution réguliere qui commen-
;ra le lendemain. La grande marmite est exhibee Des le
**Un> avant de faire les pansements, la soupe sera au feu, pour
être portée a domicile vers midi. Soeur Marie soignera pour
faire bouillir le lait qui sera versé dans des bouteilles d'un litre.
M'lle Mathilde Maroy nous aidera a les emporter en même temps
que la soupe. Une liste est dressée d'après les indications don-
nées par M. le Curé, contenant nom et adresse des intéressés
Deux families, rue des Chiens trois, rue de la Crapaudière
huit, cour des Veuves sept, rue des Boudeurs cinq, rue
Grimminck cinq, rue du Canon trois, au Zaalhof deux, rue
des Trèfles cinq, rue Basse trois, rue de Lille.
Depuis que M. le Curé loge chez nous, deux veilleurs
passent la nuit dans sa cave. Ce sont Joseph Cottenier et Emile
Cilor. Ce soir, a 7 h. 1/2, nous étions au souper, quand un des
deux vint nous prévenir qu'il y avait des voleurs dans la cure.
M. le Curé s'y rendit je suivis, munie d'une petite lanterne.
Nous trouvames en efïet les traces des pillards qui devaient
avoir étsurpris dans leur besogne, car quelques bouteilles
étaient piacées debout et une était débouchée. Les pots de
confiture avaient tous passé l'examen le savon était répandu
par terre l'échelle et le bougeoir étaient encore la. La bou-
teille débouchée fut emportée et servit a inaugurer la veillée des
Trois Rois. Mme Roose, la reine de la fête, y fut pour un gateau
des plus appétissants, un vrai gateau des Rois.
6 Janvier. Journée calme. Quelques coups de canon
et quelques shrapnels hors de la ville, vers la route de Dicke-
busch, par oü, nous dit on, les Anglais se renlent a Ypres. Le
soir, vers 5 heures, trois soldats, sans doute les voleurs de la
v ille, se laissent surprendre, volant du vin dans la cave. lis
avaient avec eux une charrette des pompiers et s'enfuirent par
la Porte de Lille. Joseph Cottenier voulut les poursuivre, mais
il fut arrèté a la Porte, bien qu'il affirmat que c'étaient des
voleurs.
7 Janvier. Depuis quelques jours je visite les maladès
avec le Docteur Smerdon. Aujourd'hui il amène son rempla-
gant, le Docteur Thomson. M. le Curé accompagnait ordinaire-
ment le Docteur, mais il trouve plus nécessaire de se tenir a la
portée de ceux qui ont besoin de ses secours spirituels pendant:
ces jours de bombardement continu. Tous les malades qui
envoient leur adresse a notre couvent de la rue de Lille sont
visités gratuitement par les Docteurs de l'ambulance des Qua
kers. Les malades qui se présentent au couvent, rue de Lille,
entre 9 heures et 10 heures, regoivent aussi des soins gratuits
des Docteurs Manning, Fox et Malabar. Ma mission principale
est de servir de guide et d'interprète et aussi de décider les
malades a se laisser conduire a l'hópital, ce qui n'était pas
toujours facile Quand les malades y consentent, l'opposition
de la familie soulève de nouveaux obstacles et les protestations
injurieuses souvent ne manquent pas, ces pauvres gens ne com-
prenant pas qu'on ne veut que leur faire du bien. Une fois
même, une vieille femme de la rue du Lapin empoigna la pelle
a charbon et le tisonnier pour me frapper. Heureusement les
messieurs anglais, ignorant la langue flamande, ne comprennent
pas les termes délicats par lesquels on paye leur dévouement.
Quelques cas de fièvre typhoïde se sont déclarés, surtout
parmi les réfugiées. Dès 6 h. 1/2 au matin, ma soupe est pré-
parée. Elle va mijoter toute la matinée. Vers 7 h. 1/2, les blessés
viennent se faire panser. Vers 9 h'ures, j'accompagne le Docteur
Thomson et MtI1: Cloostermans assiste M. le Docteur Manning.
Dans l'après midi, M. le Curé, après avoir prié les
Absoutes dans l'église du Béguinage, accompagne au cime-
tière civil le corps du gendarme. C'est la première fois depuis
le bombardement de notre ville qu'un prêtre y retourne. Après
la cérémonie, M. le Curé se rend chez le Commandant de Place,
pour lui parler de l'organisation d'un hópital pour les typheï-
ques. Celui ci lui promet de mettre immédiatement la main a
l'cêuvre. En attendant, un service médical et pharmaceutique
sera provisoirement installé, si M. le Curé sait fournir une salie
et des Soeurs, avec les objets indispensables, ce qu'il va essayer
de faire sans retard. Vers 12 heures, je porte de la soupe a la
Cour des Veuves. Mathilde Maroy soigne pour le lait.
Franchement, me voici cordonnier titré Sceur Antoinette
devient ma cliente Je vais lui raccommoder ses souliers.
8 Janvier. M. le Curé, de concert avec M. J.-W.
Young, s'occupe de l'organisation de l'hópital pour les typhoï-
ques, qui sera ouvert a l'Institut du Sacré-Cceur. Trois Sceurs
de l'hópital civil d'Ypres reviennent avec lui de Poperinghe. Le
nombre des religieuses augmente done l'ambulance du Friends
Unit». A suivre.
La machine incomparable
Agents officiels Devos Dewanckel,
Porte de Menin, Ypres.