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LA CROIX D'OR.
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Mcrcredi 28 Octob. 1874
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9me année. Nos 921.
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Lc Journal parail le Mercredi el le Samcdi. Les insertions coülent 15 centimes la ligne.Les réclames, dans le corps du journal, se paient 30 centimes la ligne.lTn numéro du journal, pris au Bureau, 15 centimes.
Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, content 20 fr. les 100 exemplaires.
CHKMIXS DE FElt.
LETTRE DE MGR L'ÉVÊQUE D'ORLÉANS
sur la spoliation da l'Eglise a Rome el en
Italië.
(Suite. Voir le N° précédent.)
Mgr Dupanloup signale ensuile comme
quelque chose dc plus élrange encore et de
plus contraire aux engagements pris par le
gouvernement italien, vis-a-vis des nations
calholiqiies. sa prélention d appliquer cctte
législalion spoliatrice mème aux établisse-
ments que ces nations ont fondés a Rome.
Qui ne le sait, monsieur le ministre?
Rome est la patrie commune de tons les
calholiques. Celte Rome disail autrefois
Monlaigne, mérite qu'ori l'aime, confédérée
de si longlemps el par lant de litres a noire
couronne: c'est la viile commune et mélropo-
lilaine de loutes les nations chrétiennes; l'Es-
pagnol el le Francais, chacun y est chezsoi.
Pour élre des princes de cel Elal, il ne fant
qu'élrede chrétienté, oü qu'elle soil; il n'est
lieu, ici bas, que le ciel ait embrasséavec
telle influence de faveur el telle Constance.
Voila pourquoi loutes les nations calholi
ques de l'ancien et du nouveau monde, se
sont établies a Rome: Anglais, Beiges, Al Ie
mands, Espagnols, Arnéricains; la France, et
c'est notre orgueil, monsieur le minislre, y
figure au premier rang. Nous y avons ce
qu'on appel le nos Pieux établissements
Saint Louis des Francais, fondé par Catheri
ne de iMédicis; Sl-Claude des Botirguignons,
St-Nicolas des Lorrains, St-Yves des Bretons,
la Purification des qualre nations, St-Sauveur
in Thermisloutes maisons administrées par
notre ambassadeur, au moven d'une com
mission. Nous y avons aussi des Maisons
religicuses: le Séminaire francais, les Char-
treux a Sie- Marie des Anges; les Lazaristes,
établis a Rome par la duchesse d'Aiguillon;
nos vaillanls Trappistes, qui ont assaini, au
péril de leur vie plusieurs y sont morts
les terres insalubres de St-Paul aux
Trois-Fontaines; sans compter nos nombreu-
ses maisons de Fréres et Sceurs. Intlépen-
dammenl des autres dépenses, auxquelles
el le pourvoit, l'administration des Pieux
établissements dispose, chaque année, de
30 a 40,000 francs pour donuer des secours
aux pauvres Francais, qui sont en résidence
ou de passage a Rome.
Eb bien! ces Établissements francais, d'a-
bord, vous' les frappez d'impöls énormes. Ils
payaienl, sous Pie IX, 11,500 fr.; aujour-
d hui 28,000 fr. presque trois fois plus; et
ils sont menacés de payer 34,000 fr.
Mais il y a plus, toutes ces maisons élran-
gères, pieux établissements et comrnunaulés,
vous voulez les soumettre aussi a la venic
forcée, en deux ans, et, comme droit de
transfert, leur prendre 30 p. 100.
Mais n'est-ce pas de l'argenl des nations
calholiques que vous prendriez de cette fa-
con, monsieur le ministre?
Les biens acquis a litre onéreux ne vous
arrêlent méme pas. Les Trappistes de Saint-
Paul aux Trois-Fontaines, a qui Pie IX a con-
fié des terrains insalubres a assainir, si insa
lubres que plusieurs, je Ie disais tout a
I'beure, sont morls a la peine; et qu'ils
sont lous forcés, chaqueannée, d'abandonner
leur monaslére pendant trois mois, les
Trappistes, dis je, ont achelé de leurs de
niers, pour s'y retirer dans la saison meur-
trière, une maison prés de Saint-Jean de
Latran: eb bien! on veul qu'ils la vendent,
et leur prendre, bien enleridu, le tiers du
prix de vente, et opérer sur le resle les pré-
lèvemenls que nous avons vus!
Et vous parliez, dans voire Memorandum
du 29 Aout, d'un accord avec les puissan
ces ayanl a Rome des sujets catholiqucs!
Ou est-il eet accord?
Aujourd'hui vous prétendez que le gouver
nement et le Parlement italien ont sen Is
qualilé pour décider dc ces immenses inté
réts, qui regardent les calholiques du monde
entier.
Mais ce n'est pas tout, et vous prenez-la ce
qui, a d autres litres encore, n'est pas a vous.
Mgr Dupanloup établit ensuile l'origine
antique et le caraclére international des
principals richesses de TÉglise romaine,
puis il conclut ainsi:
Si done il en est ainsi, si les biens de
l'Eglise romaine ont, pour la plus grande
pariie, une origine étrangére, les largesses
de la calholicité, n'est-il pas évident, mon
sieur le minislre, que ces biens-la ne sont
pas a l'llalie? et que cette Rome catholique,
enrichie des dons du monde chrélien, et les
prodigieuses richesses artisliques et monu-
ineutales qu'elle renl'erme nesonl pas une
proie a votre convenance, dont vous puissiez
disposer a voire gré?
Voila pourquoi ce qui se fait la, silencieu-
semenl, dans l'ombre, les operations de
votre junte liquidatrice, les spoliations qui
se consoniment et celles qui se préparent
sonlehoses qui nous imporlentau plus haul
degré, et nous ne pouvons, sans protester
du fond de nos consciences, voir mettre
ainsi la main sur des trésors sacrés qui sont
a nous.
Du spectacle de cette spoliation immense
l'évèque d'Orléans passe a un autre, a celui
de la désorganisalion de l'Eglise, et aux
coups profonds porlés par le gouvernement
italien a l'administration spirituelle du Sl-
Pére, en méme temps qu'a Ia religion elle-
ntéme.
II monlrc l'étal du ciergé en Italië, les
vides fails deja dans sou sein. II monlrc le
dénument des évèques, la ruine des sétm-
naires, les cures sans prèlres.
Pour fuir la rigueur dc vos lois militai-
res, beaucoup de jeunes ecclésiastiques s'é-
laient réfugiés dans les provinces non encore
annexées: aprés les annexions, vous les avez
recherchés, arrélcs, et, nonobstanl le carac
lére sacerdotal dont ils élaienl revètus, vous
les avez iucorporés de force a vos regiments.
Cest un fait certain qu'au siége de Rome,
en 1870, Pannée d'tnvasion comptail un
grand nonibre de ces pauvres prétres qui,
une fois dans Rome, allaient furlivemenl
dans les sacrislies et dépouillaient un mo
ment l'habit militaire, afin de pouvoir cèJé-
brer la sainte messe!
Oui, cette indignilé, monsieur le minislre,
a été une triste réalité.
La disette de prélres est déja grande.
J'ignore le chiffre aeluel des paroisses qui
n'onl pas de prélres, mais je sais que déja il
est elïrayant.
On m'a cité tel diocése d'ltalie oü, sur 150
cures, it y en a 70 de vaeanles!
Que sera-ce dans quelques années? Alors,
le culleayant cessé, faule de prèlres, dans
un grand nombre d'églises, a Rome et dans
l'llalie, on s'épouvante a la pensée de cc qui
pourra advenir de ces sanctuaires el des
atnes.
Mais du reste, est-ce que la guerre, inces-
sante, acbarnée, faite au clergé, au Rape, a
la religion, malgré vos précautions pour la
dissimuler, n'est pas éclatante?
Ne faites-vous pas tons vos elforts pour
arracber les enfanls du peuple a l'enseigne-
rnenl religieux?
Le Pape libre, diles-vous, l'Eglise libre!
Libres, ouL desubir toutes les attaques, tou
tes lés menaces, lous les outrages.
l.e gouvernement italien permet tout a la
presse, a la librairie, au theatre, et quelque-
i'ois a la rue elle-mème! Rappelez-vous les
sacrileges publics, impunis, du dernier car
naval romain!
J'ai vu d'impies et d'odieuses caricalures
s'étaler sur les muts de la capitale du monde
catholique.
II n'y a pas une nation, méme séparée de
l'Eglise, chez qui on souffrirait de pareils
scandales. J'excepte a peine Genéve.
Parmi les alteinles radicales portécs a
l'administration spirituelle du Saint-Pereet
aux services publics de l'Eglise universelle,
l'éloquent prélat signale d'abord la dcslruc-
tion du Collége romain, qui n'était pas un
établissement italien, mais une institution
esseiilieliement catholique, une école de
théologie pour Ie monde entier, collége in
ternational dés sa fondation, international
par les décrets dc Grégoire XIII, par les
maitres qui y enseignent, et par lesorigines
diverses des éléves qui le fréquenlenl depuis
trois siécles.
II signale ensuile la destruction des mai
sons généralices.
Que seront désormais ces généraux ou
procureurs généraux des ordres, isolés ou
errants, réduits a une existence précaire,
exposés, s'ils sont de nalionalilé étrangére, a
tomber sous le coup des pouvoirs de police
eta n'èlre plus que toléréssur le territoire
italien; privés d'ailleurs de loutes les res
sources qu'ils trouvaient autrefois dans leurs
comrnunaulés?
Puis vient la désorganisation des congré-
galions romaines. C'est une immense admi
nistration, en effet, que celle de l'Eglise
universelle! Toute question, avant dètre
résolue par le Pape, a dü élre longueinent
étudiée, méditée, disculée, par cette légion
de consulteurs qui remplissent les Congrega
tions romaines présidées paries Cardinaux.
Désormais, comment enlretiendra-t-on
ce personnel si nombreux, et comment pré-
parera-t-on les hommes destinés a ces sa-
vantes fonclions, s'ils ne possédent plus ni
mais'ons, ni monastéres, ni licux de reunion,
pour s'abriter, eux, leurs archives, leurs
bibliolhèques; si l'Eglise n'a plus aucuns
biens assurés, aucuu établissement possédé
avec sécunlé, oü elle puisse faire leducation
de ses éléves el ofl'rir a ceux qui se préparent
au sacerdocc, aux missions, aux magistra-
lures ecclésiastiques, a Penseignement, des
asiles tranquilles et des ressources spéciales?»
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Poperinglie-Ypres, 5-10,7-23,9-30,10-08,2-15,0-00,9-20. Ypres-Poperinghe, 0-00,9-07,12-00,3-07,6 00,8-40,9-00
pennghe-IIazebrouck, 7 13, 12-20, 4-17, 7-13. Hazebrouck-Poperinghe-Ypres, 8-30, 10 00, 4-10, 8-20.
pres-Holders, 7-00, 12-20, 0-40. Uoulers- Ypres, 9-20, 1-00, 7-00.
Kouiers-Bruges, 8-40,11-34,1-13, (L. 0 00), 7-30, (9-00. Lichterv.) Lichter v.- Thouroul, 4-20 m. Bruges-Kow/ers, 8-20,
12-00, 0-13, 0-42. Lichtervelde-CWtmt, 0-20 m. 9 01, 1,30, 0,40 7,21 Zadalghem-Tliouroat, 8-40. 1,00, 0,20, 0,08.
Ypres-Courtrai, 0-34,9-49,11-18,2-30,0-20. Courtrai- Ypres-, 8-08,11-02,2-00,0-40,8-49.
Ypres-Ihourout, 7-13, 12 00, 0-20, (le Samedi a 0-00 du matin jusqu'a Langhemarck). Thourout-Ypres, 9-00, 1-18, 7-48,
(Ie samedi a 0-20 du matin de Langhemarck a Ypres).
Comines-NVnrnêton -Le Touquet-IIeuplines-^lmewheres, 0-00, 10,10,12-00, 0-40,— Armentières-Ilouplines-Le Touquet-War-
noion-Comines 7 -20, 10,00, 4-10, 8 -40. Comines- Wamêlon 8-40, m. 9-30 s. Warnêton-Comines 0-30, 9-00,
Courtrai-/{rages, 8-00, 11-00, 12-30, (L. 0-10), 0-00. (9-00 s. (Lichterv.)Bruges-Courtrai, 8-20, 12-00, 0-13, 0-42.
Bruges, Blankenberghe, Heyst, (Etat) 7-30,9 40,11 04,1,20,2 20,2-00,0 20(exp.) (S 0-00)7-30 (exp.)8-40. (bassin)7-00,7-36,
O-u1,11-10,2-31,2-50,0-20(exp.)(S.0-00)7-41 (oxp.)8 01.Heyst, Blankenberghe, Biuges, 0-40,(L. 7-20) 8,30,11-25,1-20,2-'
I -y wu i i u i ij v/j oV) lam iiiw ui;ui i^i i "M/j U]UU| i i ai; i jiu j
(exp.)4-10,0-30,(D. 0-10)7-20. Blankenberg, Bruges, 6-10,(L. 7-42)8-05,11-00,1-40,3-05(éxp.)4-30,6 00(0. 6-30) 7,007 48.
IngelinunsterDeynze-Grmd, 0-10, 9-41, 2-10. Ingelniunsler-iOeywze, 4-00 2" cl,, 7-10. Gand-Ueyme-lngelmunsler, 6-08,
11-20, 4-46. Deynlelngelmunsler, 7,31 9-10 2" cl, 11,04 0,19, 8-20 s.
Ingelmunsler-^Msep/jet», 6-00, 12-10, 6-10. Anseghein-Ingelmunster7-42, 2-20, 7-45.
Liehtervelde-Dixmude-Furnes et üunkerke, 6-30, 9-08, 1-30, 7-00. ZViAerAe-Furnes-Dixmude et Liclitervelde, 0-40, 11 10,
5-45, 5-05.
Dixmude-iV;e;«yro/L9-00,10,30,2-20,0,10 8-40. Nicnp-/)tVm,(ville)7-40,12-00,4-24,0,00,9,30,(bains)7,30,11,50,4,10,0,00.
I Uomaul-Oslende, 4-00, 9-10, 12,00, 1-00, 8-05. 10,15— (hiendi-Thouroul, 7-05, 10-10, 12 20, 4,40. 6-10. 9,10.
belzaete-Eec/oo, 9-00, 1-20, 8-20. - Eecloo-Se^aete, 0-30, 10 10, 4-22.
Gand-Terneuzen(station) 8-17, 12-10, 7,20. (porie d'Anvers) 8-30, 12-40. 7 40. Iorneuzon-Gand, 6-00, 10-30, 4 40.
Selzaeie-LoAera», 9 04, t-30, 8-30. (Ie Merer. 5-10 m.) Lokeren-Se/ctaele, 0 00, 10-20, 4 45. (Ie Martli, 9,30.)
CORRESPONIDAJVCES,
COURTRAI, BRUXELLES.
Courtrai dép. 6,37 10,03 12,33 3,47 0,30.
Bruxelles arr. 9,20 1,35 2,20 0,14 8,08.
C0URTBA1, TOURNA!LILLE.
Courtrai dop. 6,37 10,06 2,04 0,34 8,47.
Touniai arr. 7,28 11,47 3,48 6,29 9,41.
Lille 7,37 12,00 4,00 6,32 9,00.
COURTRAI, BAND.
Bruxelles dép.
Courtrai arr.
Lille dép.
Tournai arr.
Courtrai
BRUXELLES, COURTRAI.
0,22 8,28 12,21 5,30 6,47.
8,00 10,46 2,44 7,06 8,44.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
0,20 8,20 11,00 2,18 5,20.
0,42 8,06 11,34 2,40 0,39.
6,34 9.47 12,26 3,38 0,33.
Courtrai dép.
Gand arr.
0,42
8,01
12,31
1,51
3,44
5,04
6,40.
7,50.
Gand dép.
Courtrai arr.
GAND, COURTRAI.
0,10 9,38 1,28
6,34 10,01 2,49
4,24 7,21.
0,31 8,42.
Bruges dép.
Gand arr.
Bruxelles
BRUGES, CAND, BRUXELLES.
6,49 exp. 12,34 3,02 exp. 6,43 8,19 exp.
7,34 1,49 4,42 7,OS
8,00 4,00 0,00 9,31 10,26.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruxelles dép.
Gand arr
Bruges
- 8,14
6,00 9,41
7,20 10,34
11,03 3,12
1.23 4,26 exp.
2,38 0,11
6,37
7,22
0,55.
7,22.
8,38.
A M. 1I1NGHETTI,
SPOLIATION DES ÈTABL1SSEMENTS ÈTRANGERS.
Suite. Voir le N° précédent.
Lundi, 1" Juillet 1839.
Klant né li Paris, rue de n° 3, je n'ai réel-
lement pas de pays.
Les Parisiens ignorent eomplétement ce que
cesi que l'herbe, le lever et le coucher du soleil,
les liois aux feuillages odorants, les fleurs, la vasle
mer aux Hols altiers, et jusqu'a la terre, nolre
nourrice. La nature, oeuvre de Dieu, a élé rem-
placée li Paris par des maisons, des trot toil's, des
nies pavées. oeuvre des hommes. C'esl li-iste.
Malgré cela je ne puis quitter Paris sansémo-
tion.
Comme il n'y a pas encore de cliemin de fer de
Pm is au Havre, je ne risque guère, dans la roulc,
dètre broyé ou carbonisé.
Je m'embarque, avec mon léger bagage, dans la
diligence de la rue Nolre-Danie-des Vicloires, ap-
P-irienant au frcre de Jacques Lafliltc, le banquier
conint de la désastreuse et impie revolution de
Juillet.
Je passcrai som silence les adieux adressés a ma
familie, ceux non moins toucbants et beauconp
P us grotesques de mes voisins. II y a enlre
aulres un giUS monsieur, excessivement décoré,
qui parle fort, cl se donne de grands airs d'impor-
latice. 11 me parail sentir la chicane; il a du ligre
dans les lèvres et du serpent dans les yenx, ce
duit élre un descendant de Fouquier-Tainville.
Comme il parail très-bavard, je ne tarderai pas
a déeouvrir quel est ce vaste personnage. lont eet
huimne a pris place dans le nteilleur coin; le coin
n* 1, le coin suprème le coin particiilièrement
afTectionné par les commis-voyageurs et les dentis-
tes nomades, gens qui ont une grande expé-
rience du confortable dans une voilure publique.
Ilien de trop remarquable ne m'est arrivé de
Paris it Konen, cette superbe patrie de Cor-
neille. J'ai continué ïi élre placé a cölé du gros
homme court, foil et laid, qnoique décoré. Ce
monsieur paraissail très-préteniieux, très-satisfait
de lui-mème, et c'elait avec orgueil qu'il livrait
it notre admiration sa têle de Représentant du
Peuple, dans la supposition machiavélique
qu'ils soient représentants du peuple ceux qui sont
nommés par qui vous savez.
Ce monsieur nous apprit done qu'il était dépu-
té, et se noinma. II nous était parfaitemenl ni-
connit.
J'avais en face de moi une charmante jeune fille.
Elle se cachait dans l'ombre, et c'élait a peine si je
pouvais enlreroir le profil élégant que, du reste,
elle semblait prendre malicieuseinent a taclie de ne
ntonirer que d'un seul cölé. Lorsque nous des-
cenditnes dans une de ces cavernes de voleurs
DÉSORGAMSATION DU CLERGÉ.
patentés qu'on appelle auburges, il me fut doiiné
de voir les yeux de la belle voyageuse, avantage
que mes noinbreux efforts n'avaient pu me procu
rerMais, liélas1 désillusion!.. elle élail
borgneJe vous assure qu'une scmblablc
iiilirmité dépare le plus beau visage.
II me vient utie affreuse pensée. Si le gros mon
sieur décoré allait s'embarquer pour faire la tra -
versée avec inoiBrand Dieu! eet hippopolame
ferait sontbrer la navire
J'ai besoin d'espérer qu'il s'arrêlera au Havre.
Sans cela, que deviendrait la Justice? Que devien-
draient ses coiTittiellanls?... Ce monsieur se doit
tout it sa patrie, dont il est un des plus gracieux
ornements.
2 Juillet.
Je suis arrivé att Havre ce matin. Je suis
descendu a l'liólel de Normandie. Si jamais
vous allcz au Havre, Madame, déliez-vous de l'hö-
tel de Normandie! Vous pourriez y avoir, comine
moi, pour voisin, un ténor! Or, dans la vit' privée,
je ne sais rien de plus horrible qu'uu ténor,
si ce n'est pourtant deux ténors.
l'igiirez-vous, Madanm, que ce monsieur dont
la chambre est contigue a la mienne, et que je n'ai
pas aulrement l'avantage de connaitre, a passé unc
partic de la unit ii sol fier, sous le prétexle qu'il
doitdonner prochainement un concert au théalre.
Je ne sais ce qu'il demandera au public pour se
faire entendre, mais je sais bien, moi, ce que
DISORGANISATION DES SERVICES
INTERN ATION AUX.
j'aurais donné de bon coeur pour ne pas I'avoir
entendu. II faut que j'aiine la musique comme
vous savez que je I'aime, pour que je ne la donne
pas au diable après le traitement que cet artiste
m'a infligé. Jen suis encore tout malade et tout
étourdi. S'il avail chanté, passe encore; an lieu de
dornnr je me serais résigné a 1'écouler, et peut-
élre in'eiit-il charmé. Mais point. L'impiloyable
ténor solliait, je vous l'ai dit. II faisait plus! II
comiiK'iicaii un motif et ne l'achevait pas, passant
d'un air a un autre, sans suite et sans transition.
Uu ent dit une classe de chant dti Conservatoire.
C'élait horrible. Dieu vous préserve, Madame, de
I'liiilel de Noi'inandic; c'est Ie veen le plus clier de
inon coeur!.. Mon voisin tapait avec fureur sur
un piano de louage, il appelait cela s'accompa-
gner.
Un des garcons de 1'hotel m'a révélé que mon
voisin était un homme trés comme il faut, altendu
qu'il porte des diamants a sa chemise et gagne
cinquante mille francs par an. Je n'ai pu, malgré
mon amour pour les arts, m'empêcher de faire
celte Irisle réfiextion: quand un chanteur ou line
danseuse sont couverts d'or, les vaillanls el ohscurs
travail leurs, qui. après tout, nous nourrissent,
gagnent a peine de quoi manger. On dit pourtant
que ce pays est chrétien!
Que vous dirai-je du Havre? Cesl une ville mai-
chande, qui, a proprement parler, n'a qu'une
rue inütulée: Rue de Paris, qui conduit la jetée,
DÉSORGANISATiON DES CONGRÉGATIONS ROMAINES.
d'oü Ie coup d'uuil est splendide, comme lous ceux
de ce genre.
Je n'ai vrainicnl rien d'exlraordinaire a vous
raconter: je n'ai vu au Havre que des navires,
des ballots de marchandises, des Anglais el des
Anglaises, des chiens sales et des matelots ivres.
Quarid je vois un homme ivre, je lc plains,
d'abord paree que c'est la faute de ses passions qui
le poussent ii chercher dans la boisson l'oubli de sa
misère, puis, paree que c'est encore la faute du
marchand, qui lui vend d'liorribles breuvages
frelatés.
Je vous dirai encore que le mailre de l'hólel oii
je suis descendu m'a fait un mémoired'apothicaire;
ce pirate m'a traité en frégate conquise. Je me
demande comincnl j'ai pu payer cette note fanlas-
tique, moi, simple journaliste, qui n'ai jamais été
ténor. J en suis vraimcnl eonfus!
En vue du Havre, ce 3 Juillet.
Me voici en rade.l.e Havre étale devant nous
ses maisons blanches t't se chauffe au soleil. N'ous
ne sommes déja plus en Fiance; nous sommes sur
la mer, ce desert immense qui est il tout le
monde et u'apparlient ii personne.
Malgré cela, cliaciiu persiste ici a se croire en
core en France; nolre capitaine va jusqu'a dire
que nous ne sommes pas méme partis.
II se fonde sur ce qu'on ne doit lever l'ancre
que dans la nuit.
A CONTINEER.