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GROTTE D'AZUR.O
credi 18 Aoul 1878-
10" aiinée. N° 1,005.
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Le Journal parail Ie Mercredi et le Samedi. Les insertions c.oülenl lo centimes la ligne. Les réclames et annoncesjudiciaires se paient 30 centimes la ligne. On traite a forfait pour les insertions par annce.
Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémenlaircs commandos pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 10 fr. les 100 excmplaires.
V M M i «T S Bï E V JK It. 17 Juillet.
LE CENTENAIRE D'O'f.ONNELL.
OU LA FÉTE DU DROIT.
Nons emprnnlons a 1 Union un remarqua-
ble article dc M. Poujoulat sur la significa
tion du centennaire d'O Connell mis en
regard de la lutle civilisatrice-, aeluelle-
ment dirigee conlre I'Eglise par Ie libéralis
me et le césarisme conlisés:
La féle du cenlcnaire d'O'Connóll, sur
Jaqnelle sesonl attachés les regards des ca-
tholiques du monde enlier, n'a pas été une
féle purement irlandaise; elle a porlé plus
loin, elle n été marquee d'un intérê.t univer-
sel: c'élait Ia féle du droilO'Connell a élé
le libéralotir de l'ame même de son pays;
elle étouffail sous d'indignes lois, elle était
coupable de foi et de prière, traquée sous
1 ineii I pa t ion de catholicisme; tont s'armait
conlre elle, l'oppression l'enveloppait sur
tons les points; un homme entrepril de l'af-
frnnchir; il y réussit a force de persévérance
et de vigneur. Les longs efforts d'O'Connell
ontenfanté la liborté religieuse de l'lrlande.
Cet homme s'est fait un grand nom, paree
que toute vicloire du droit sur la lerre porte
avec elle une incomparable grandeur. A des
intervnlies rapprochés, deux mémorables
choses nonssont venues d'Angleterre, deux
choses significatives et opportunes!: ['inaugu
ration solen nel le a Cantorbéry d'une église
en l'honneur de la sainte viclime de Henri
11. et l'hommage de tout un peuple a son
liberaleur. II était bon quedc tels témoigna-
ges nous vinssent du pays si longtemps et
si cruellement labouré par la perséculion.
La Providence se ménage des a-propos par
1 accomplissement de ses desseins. Comme
elle est bien venue a son heure ceüe féle du
droit célébrée a Dublin! Les enfanls de I'E
glise, sur plus d un point du monde, sou-
tiennent aujourd hui de rudes combats; les
anciennes luttes sont pour eux d'utiles sou
venirs; ils y puisent une indomplable éner
gie et la certitude du Iriomphe. Le parti
libéral donne, a son insu. un grand
lustre a l'ultramontanisme en désignanl sous
ce nom la revendication des sainles libertés
de la conscience, el, quand il se place dans
le camp opposé, il fail de son nom a lui une
moquerie et un mensonge. Lorsque M. de
Bismark souleva si témérairemenl la question
religieuse, nous dimes qu'il allait créer une
Irlande au sein du nouvel empire germani-
que; dans une entreprise d'unité, c etail une
faute capilale que de pousser aux divisions
profondes. Dix-huit millions d'Allemands se
sont tronvés sous le coup des lois prussien-
nes hostiles a leurs croyatices; ils ont pu ne
pas sentir un grand goüt pour des plans
politiques donl leur foi avail a souffrir. Se-
rait-il surprenanl que Ton fit des vcoux pour
que du sol de la Germanic sortit un O'Con-
nell? Le cardinal Manning n'a pas crainl d'ex-
primer celte pensée.
On comprend done que le gouvernement
de Berlin n'ait pas vu de bon oeil la cèlébra-
lion du centenairect qu'il l'ait appréhendée;
il l'aurail empêchée s'il l'avait pu; mais lord
Derby n'est pas d'une humeur aussi commo
de queM. Decazes on M. Visconli-Venosta;
M. de Bismark obtient aisément que nous
reconnaissions au-dela des Pyrénées un roi
acclamé par une caserne et que nous rom-
pions a son profil la neulralilé; il obtient du
gouvernment du Quirinal des mesures hon-
teuses conlre les évêques d'Ialie; il trouve
dans Ie gouvernement helvétiqueun instru
ment complaisant pour ses haines et ses des
seins, mais le terrain brilannipue ne se préte
pas a ses désirs. La tentative derambassa
deur d'Allemagne auprés du gouvernement
de Ia reine, il y a quelque temps, ent si peu
de succes que l'on n'a pas apercu dans la
diplomatie prussienne la moindre envie de
recommencer. Mais si la perséculion de Ber
lin ne rencontre pas autanl de points d'ap-
pui qu'elle voudrail, elle ne perd rien de son
caraclére déteslable, el Ia partie jouée par le
puissant chancelier n'est pas prés de finir.
On connait le mol de Tertullien sur les
Césars.. Les Césars, dii ce grand homme,
seraient chrétiens, si les Cesars n'élaient
pas nécessaires au siècle, ou s'ils pouvaient
ét re Césars ei chrétiens tout ensemble.
Celte pensée, d'une vérilé profonde, carac-
lérise bien le césarisme persécuteur. Los ini-
iniliés dirigées conlre I'Eglise ont besom de
ceux qui portent le glaive, et, du moment
que ceux-ci enlendenl leurs droits a leur fu-
con, ils né peuvent pas comprendre les
droits essentiels de la dignité humaine. Ter
tullien décou vrail une con t rad iet ion enlre
César el cbrélien, paree que l'un n'est occu-
pé que de ce qu'il croit lui èlrc dü, et que
i'aulre s'occupe avant tout de ce qui est dü
a Dieu. II faulque le pouvoir cesse d etrc
César pour qu'il [misse devemr cbrélien. Les
empereurs des trois, preniiers siécles vou-
laient êlre chefs d'Elal ei chefs des ames;
cetle pretention plus ou moins rigoureuse,
salon les caractéres et les situations, est res-
tée partie inhérente de toute puissance non
catholique. Le chef du nouvel empire ger-
manique est a la fois empereur et pontife;
c'esl de Berlin que sont parlis le plus de
plainles et d'anaihémes conlre le dogme de
i'infaillibilité, et le César allemand se présen
te maintenanl au monde comme la plus hau
te incarnation de I'infaillibilité 'chez les peo
ples. II est en mème temps législateur et
légiste, roi et théöfogien; lout est de son
ressorl, tout appartienl a sa souveraineté,
qu'il s'agisse des profondeurs de l'esprit ou
des profondeurs de Ia conscience. C'esl le
syslème de l'asservissement universe! adap-
té aux convenances d'un homme ou d'un
Elat.
Voila ce que repousse Ie calholisme appelé
aujourd'hui I'ultramonlanisme dans la ian-
gue des cabinels et des iibéraux voila
ce que noire Eglise a loujours combatlu el
comballra loujours pour l'honneur et le
bien dn genre humain. O'Connell savail cela,
M. de Bismark ne le sail pas, el son erreur
pourra coüter cher a I'empire d'Allemagne.
Les évéques sur lesquels sont tombées ses
rigtieurs immérilées n'onl jamais manqué
de respect envers le souverain; leur sou-
mission n'a fini que la oil aurail commence
pour eux I'nposlasie; l'Etal n'a pas rencontré
des sujets plus fidèles; la resistance n'est ja
mais partie que des profondeurs in violabics
de la conscience chrétienne. Les persécutés
des premiers ages de I'Eglise n'agissaient
pas autrement; ils refusaient I'enccns aux
dieux, mais ils élaienl des modcles de verlus
civiques. I! n'y avail chez eux ni bravados
ni menaces; ils n'avaienl pas peur et ne son-
geaient pas a faire peur. La fidélilé ne me
nace personne, el ceux-la ne Iremblenl pas
qui savenl mourir. O'Connell, quoi qu'en
aient dil les contempteurs de son oeuvre, ne
ful jamais un faclieux; son opposition de-
meura loujours légale, et l'autonlé souve-
raine le Irouva toujoure respectueux.
Dans I hisloire des resistances caiholiques
fondées sur les lois divines apparaissenl sans
cesse les prélendus intéréts dc l'Etat en op
position avec les devoirs sacrès; on devient
suspect, on est rebelle, on conspire par cela
seul que l'on garde sa foi. Quand done les
chefs des empires apprendront-ils que ce
n'est pas la fidélité religieuse qui produit les
bouleversements, mais le mépris de la vérilé
parti de haul? Qu'ils méditenl ces paroles de
Bossuet sur Henri II, qui s'était declare l'en-
nemi de I'Eglise:
II l'attaque au spiritue! et au lemporel,
en ce qu'elle tient de Dieu, et en ce qu'elle
tient des hommes: il usurpe ouverlement sa
puissance. II met la main dans son trésor.
qui renferme la subsislanc'e des pauvres. II
llélrit l'honneur de ses ministres par l'abro-
gation de leurs privileges, et opprime leur
liberlé par des lois qui lui sont contraires.
Prinee lérnéraireet mal avisé, que ne peut-il
découvrir de lo:n les reuversements élran-
ges que fera un jour dans son Etat le mépris
de l'aulorilé ecclésiastique, et les exces inouis
oü les peoples seront emportés quand ils
auront secoué ce joug nécessaire! Mais rien
ne peut arrêter ses emportements.
Nous connaissons des Etats oü la persécu
lion de I'Eglise se mèle a l'action de plus en
plus grandissame des doctrines anlisociales.
Cette guerre aux institutions d'origine divi
ne est de nature a précipiter les ébranle-
ments; elle peut favoriser les reuverse
ments étranges donl parle l'évèque do
Meaux.
La fétc du droit! en est-il de plus hello
chez les nations? Ne doit-clle pas relenlir
partout oü le droit est violé? Un toast a élé
porté au Rape dans le banquet de Dublin; son
souvenir dominait cette grande reunion ca
tholique! Le droit a stibi dans son augusie
personne une double violation; le Boi et le
i'onlife ont été frappés. La Revolution n'a
pas pu d.éjiosséder Pie IX du pouvoir spiri-
tuel comme elle l'a dépossédé du pouvoir
royal, mais elle a tout fait pour lui rendre
difficile l'exercice de l'autonté pontificale.
Celle-ci est restée plus forte que la Revolu
tion, paree qu'elle a sa citadelle dans les
hauteurs divines et ses racmes dans fame
des peuples, mais l'ennemi a savamment
manoeuvre pour abattre ce qui ne périra
pas. Ce n'est pour nous qu'une épreuve,
mais c'est un malheur pour le monde social,
car le spectacle des droits de la Papauté en
souffrance devient une faihlesse pour tons
les pouvoirs de la lerre. Qu'y a-t-ii (J'mvio-
lable quand la violation alleint impunément
les plus grands sommets?
Le monde a done hesoin que le droit ne
soit pas foulé. II y a plus de repos el d'lioti-
neur quand la conscience humaine est res-
pectée, quand un peuple prie en liberie, et
que iTisurpation n'élale nulle pari ses triom-
phes. Le souvenir des saintes liberies cori-
quises n'importe sur quel point est une
espérance pour lout ce qui resle a conqué-
rir. L'lrlande a ressaisi le droit d'èlre catho
lique, les caiholiques de France out ressaisi
Ie droit d'enseigner, la Papauté ressaisira
tons ses droits perdus, et toute légitimité
sera victorieuse. L'ordre veritable n'est qu'a
ce pri.x. II y a des semhlauls etdessimula-
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peiinghe-iiazehrouck, 7 03, 12-25, 4-17, 7-13. Huzebroirck Poperinghe-Ypres, 8-35, 0 50', 4 10, 8-25.
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pres- Iwuroul, 7-IS, 12 06, 6 '20, (le Samedi a 5-50 du matin jusqu'u Langhemarck). Tliourout- Ypres, 8-40, 1-10, 7-00,
(le Samedi a 6-20.du matin 'de Langhemarck a Ypres).
Gomines-Wnrnêion-Le Touquei-llouplines-Amefttièifes, 0 00, 10,13, 12-00, 6-2.4,— Armentières-Honplines-Le Touquet-War-
neion-Cowmes 7 -26, 10,60, 4-10, 8-40. Comines- Warnêlon 8 46, m 9-30 s. Warnêton-Comines 6-30, 9-30,
Lourlrm-Bruges 8-06, 11-00, 12-36,4-06, 6-66. 9-00 s. (Liciiterv.)- Bruges-CWrlWii. 8-26. 12-60, 3-00, 6-42.
"JfhT W-?t> (Slallon) 0-60,7-23,9 20,(exp. le Dim. Seulem )9 30,11 08,2-26,2-60,3 3S,(exp.)S-30,(exp. le Sam.
(bassin) 7-00,7-31,9-26,(le Dim. seul) 9 36,11 -14.2 31,2-66,3 41 (exp )6 56, (exp. le Sam. seuIV 7 41,
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Jn.ge munsier-Ansegliem, 6-03, 12-83, 0-13. Anseghera-%efc»u»s<er, 7-42, 2-20, 7-43.
UCMorvejde-Uixmnde-Furrfes et Dunkerke, 6-30, 9-08, 1-36, 8-00. D/MAerAe-Fürnès-Dixmude el Lichtervelde, 6-38, 11- 10,
Dixmude-jVieKporl,9-30,2-20,8-43. Nieup-Dz>w.,(bains)7-20,11-80,4-10. (ville) 7-3
111onroiit Oslende4-30. 9-13. 1-80, 8.-08. - Oslende-Thouroul, 7-33, 10-10, 12 28,
Selzaele-.Eec/oo, 9-03, 1-28, 8-23. - Eecloo-.be/
-30,12-00,4-20.
6-13.
zaete, 3-33, 10 13, 4-22.
(land Tnrneuzen, (station) 8-17, 12-13, 7,23. (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-Gand, 6-00, 10-30, 440.-
Selzaete-Lokeren, 9-04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 in.) Lokeren-Soteae/e, 6-00, 10-25, 4 43. (le Mardi, 9,30.)
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IPOWDAWCES.
COURTRAIBRUXELLES.
BRUXELLES, COURTRAI.
Courlrai dep. 6,37 10,53 12,33 3,47 6,33.
Bruxelles arr. 9,"20 1,35 2,25 6,14 8,64.
COURTRAI, TOURNAI, LILLE.
Courlrai dep. 6,37 10,56 2,84 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 6,39 9,41.
Lille 7,38 12,08 4,00 6,35 10,00.
Bruxelles dép.
Courlrai arr.
8,22
8,02
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10,40
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6.47.
8,44.
Lille dép.
Tournai
Courlrai arr.
LILLE, TOIJRNAI. COURTRAI.
3,18 8,22 11,08 2,2-2 3,20
8,42 8,56 1 1,29 2,40 5,39
0,34 9.47 12,26 3,38 6,33
COURTRAI, BAND.
BAND, COURTRAI.
Courlrai dép.
Gand arr.
0,42
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Ginl dép.
Courlrai arr.
3,13
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1,28
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8,42.
BRUGES, GANDBRUXELLES.
Bruges d. 6,49exp.I'2.34, 2,52, 3 43,ex. 6,43.
Gand a. 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,38.
Bruxelles 8,50, 4 00, 6,02, 9-31.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruxelles dép.
Gand arr. 6,00
Bruges 7,13
8,1 4
9,41
10,34
11,53
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6 37
7,22
8,83.
7,23.
8,33.
DANS LA
PAR A I MÉ RICK.
Suite. Voir Ie N° précédent.
Saufles enfanls des pècheurs, il n'y avail aiiciin
êlre de mot) age dans l'ile. Aussi ne voyais-je per-
sonne, leur société m elaril striclement défendue.
Le soir. vena it quelquefois a la maison un vieux
capilaine au long cours. C'élaient mes jours de
féle. Mon père parlait alors de ses campagnes.
Tonic la période napoléonienne passail devant mes
yeux. Les guerres de l'Inde, la prise de l'ile Mau
rice, les combats conlre les corsaires francais, tonl
cela excilait au plus haul poinl ma curiosilé el
mon enthousiasme^
Je vivais avec lui de ses eombals el de ses dan
gers. II me semblait avoir vu lont cela. Et le
lendemaiu, quand du haut d'un rochet-, comme
celui oil nous nous iroiivons en ce moment, je
contemplais celte trier loujours agilée el que je
sutvais de l'aeïl les flottes el les navires de com-
Reproduction interdite. Exlraii du volume
un Amour\cnlre deux cercueils, elc, par Aimé
Bick,^ in-12, de 238 pages, édité par G Lebrocquy,
32, Chaussée de. Wavre, a Ixelles En vente chez
VAXDEIi'GHL\ÜT£ - FOSSÉ, a Ypres.
Prix 2 Iruncs.
metce qui se jouaieiit dans ses eanx, il me semblait
ëtre déj'a un grand amiral je m'enlendais com
mander a I équipage silencieux... le rocher, c'élait
mon banc de quart... les planles marines deve-
naient des matelots... Oh! I'imaginalion a douze
ans! Quelle belle cliose!... et comme on est
heureux saus le savoir alors que d'un coup de
celte baguelte magique que l'on nomme la fan-
taisie, on peul se créer des chimères enchanteresses
el les transformer en réalitésl...
Excitsez-moi. chcr docleur, contiruia l'Anglais
si je me suis élendu longuemenl sur celle pé
riode de ma vie j'étais si heureux alors! Et on
aime tanl a se rappeler ces jours iranquilfes donl
on est séparé, hélas! par une longue période de
trouble el de deception
En soïr,j'avais quatorze ansa peine, je rentrais
d une longue promenade sur mes rochers favoris,
quand je vis arriver au devant de mui le vieux Job
tout bouleversé.
Mon père venait d'avoir une terrible attaque de
goutle, mal donl il était depuis longlemps allligé,
et le médccin de I en droit désespérait de sa gitérison.
En effettrois jours apiès, j'ctais orphelin. Ce
fut le premier de lous mes malheurs. Celte bonne
vie si douce, si tranquille si charmante malgré sa
monolouie, était brisée |iour loujours.
Mon père me laissail une fortune considerable.
Le vieux capitaine au long coursqu'il avail tiomtné
mon lulcurme couseilla d'eulrer dans la marine.
Aprés les récils donl avail abreuvé ma jeunesse,
je ne pouvais concevoir que l'on pi-it un autre élat.
Aussi ce fut Ie cceur plein de joie que je me vis
diriger vers l'école de marine, oü je devais faire
mon apprenlissage, pour enlrer ensuile comme
aspirant sur un vaisseau de la marine militaire.
Néanmois je n'y étuis pas de qninze jours, que
en avals pardessus la léle; inférieur a tons mes
compagnons, graces i) l'inslruction pilovable
du bon vieux Job, le conlre-mailrej'élais le
plastron la risee de loute l'école.
Un nom illusire, une fortune considérablene
lii rul qu'aecroitre la jolousie de mes compagnons,
lis mullipliaienl, en mon houueur, les avanirs et
les farces que tout nouveau venu doil iuévita-
blement subir.
Je fus un vrai martyr. Et mon caraelèie, déjit
irisle, s'aigrit el se reinbrunil encore davanlage.
On ne me désignait que sous le nom de Misan
thrope... et franchement, l'on avail raison I... Ce
n'est pas impunëment que l'on esi repousse par
lous! Le caraclére en resle marqué," pour la vie,
d'un cachet inelTacable.
Mes trois ans de collége passéren! cependanl.
Ou ni'einbarqiia après un examen assez salisfui-
sant, sur un vaisseau de I Eial, el je commengai a
dix-sept ans la rude vie de marinsi souvent
décrite el si peu connue cependantcelte vie loute
de labeur, de privations et de sacrifices, mais tra-
versée cependantelle aussipar quelques éclairs
de joie et de vie, éclairs qui n'en brillent que
plus vivement dans le ciel dn pauvre marin,d'ordi-
naire si sombre et si monotone.
VII.
A BORD.
C'élait en 1821. La guerre de Grèce venait de
commence!-. Mon navire fut désignépour se rendre
dans la nier de ('Archipel. Nous parlimes d'abord
psur Malle, afin de ravitailler plusieurs frégates
qui y altendaient Ie moment d'agir... Certes, cher
docleur -— continua l'Anglais, après une courle
pose je ne vous décrirai pas mon voyage- et
ines avenlures... Une copie du livre de quart vous
iniéresserait peu et prolongerail indéfiniment mon
récil... Mais, comment vous earlier que la pre
mière fois que je vis la Médilrrranéela première
fois que j'apercus ces cötes loujours rianles, celle
nier loujours bleue, et ces bateaux a voiles lalines
qui se balangaient sur les (lots endormis, comment
vous cacher que je ressentis tout mon êlre se bou-
leverser, et se réveil Ier en moi je ne sais quels
sentiments indéfinissables, ensevelis jusqii'ii cejour
dans le plus profond de mon être?
Presque enfant encore, habilué aux longues
houles de la nier d'Irlande, n'ayant eu devant les
yeux que des scènes d horreur et de tempête, je ne
connaissais la mer que comme une vieille sorcière,
sinistre et furieuse, loujours en courroux, lou
jours en rage, qui bailait de ses coups presses les
flancs de nos rochers a pic...
Icije trouvais au contraire line reine niaje?-
lueuse et calmeune grande dame presque lou
jours souriante, el dont les colères même ne
duraient jamais bien longtemps... Je trouvais un
ciel pur, une temperature tiède, une brise douce
et embanmée, et alors, avec tont ('enthousiasme
d'un jeune coeur et d'une imagination ardenle
Oh oui, m'écriai-je, c'est ici qu'on doit savoir
vivre, c'est ici qu'on doit savoir aimer
Aimer!... Pour la première fois ce mot venait
a ma pensée, comme a mes lèvres... Aimer? el qui
en avait jamais parlé au pauvre délaissé, a l'or-
phelin bafoué de l'école?...
Tons mes compagnons avaient eu leurs amours
et leurs secrets d'adolescence. Ces secrets que
l'on garde jaloux comme des secrets d'Emt, dont
on meurt li seize ans, el dont on rit ii vingt.
Moi seulj'étais loujours resié isolé el délaissé.
IIaï par mes compagnonsje croyais que I'linivers
enlier me délestait... Elrange erreur, qui srui-
blait s'être évanouie sous les rayons de voll e beau
soleil meridional.
Sur ces entrefailes, nous arrivênïes a Malle. A
peine eüines-nous une minute, que nous descen.
dimes au plus vile a lerre.
Malle appa client a I'Angleterre, mais c'esl I'ltalie,
c'est presque I'Orieiit que cette ile-la. Aussi, avec
quel plaisir je parcourais cette lerre pitioresque 1
Avec quelle curiosilé j'examinais etile population
male et bronzée, antithése frappante avec la phy-
sionomie rougeaude et les types blondasscs du
Nord l... a coniiscer.